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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/631/2024

JTAPI/165/2024 du 26.02.2024 ( MC ) , CONFIRME

Descripteurs : MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;LÉGALITÉ;PROCÉDURE DUBLIN;DÉLAI
Normes : LEI.80.al3; LEI.76a.al1; LEI.76a.al2; LEI.76a.al3.leta; Cst.29; Règlement Dublin III.25.al1; Règlement Dublin III.28.par2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/631/2024 MC

JTAPI/165/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 26 février 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Julie MAI, avocate

 

contre

 

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Entre le 17 août et le 19 octobre 2023, le prétendument dénommé A______, né le ______ 2005 et originaire d'Algérie, mais démuni de tout document d'identité, a été condamné à quatre reprises pour entrée illégale, séjour illégal, dommages à la propriété (infraction d'importance mineure), vol (au sens de l'art. 139 ch. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (en raison de la violation de l'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève notifiée par le Commissaire de police le 17 août 2023 pour une durée de douze mois). La dernière condamnation prononcée à son encontre lui a en outre valu une mesure d'expulsion judiciaire de Suisse pour une durée de trois ans.

2.             Le 29 janvier 2024, durant sa détention à titre pénal, M. A______ a été auditionné par les services compétents – mandatés par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) – dans le cadre de la procédure Dublin cat. III. A cette occasion, il a notamment indiqué être d’accord de retourner en Allemagne, pays qui pourrait être responsable du traitement de son dossier.

3.             Par jugement du 1er février 2024, le tribunal d'application des peines et des mesures a ordonné la libération conditionnelle de l'intéressé pour le 20 février 2024.

4.             Le 7 février 2024, en réponse à la demande du Secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après : SEM), les autorités allemandes ont refusé le transfert de l'intéressé sur leur territoire.

5.             Le 8 février 2024, l'autorité fédérale compétente a dès lors adressé une demande aux autorités espagnoles, dont la réponse demeure attendue.

6.             A sa sortie de prison, le 20 février 2024, M. A______ a été remis entre les mains des services de police en vue de son refoulement.

7.             Entendu le même jour par l'OCPM, l'intéressé s'est vu notifier une décision de non-report de la mesure d'expulsion judiciaire prononcée à son encontre, après avoir pu exercer son droit d'être entendu à cet égard.

8.             Le 20 février 2024, à 14h55, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l’encontre de M. A______ pour une durée de sept semaines sur la base de l’art. 76a de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

Il ressortait du dossier ainsi que des déclarations du précité que celui-ci n'avait aucun lieu de résidence fixe en Suisse, ni aucun lien particulier avec ce pays, ni non plus de source légale de revenu.

Lors de son audition, l’intéressé a déclaré être d’accord de retourner dans le pays Dublin compétent.

9.             Par courrier daté du 21 février 2023, parvenu au greffe le 23 février suivant, M. A______ a demandé au tribunal qu'il examine la légalité et l'adéquation de sa détention administrative. Il sollicitait son audition et l'assistance d'un avocat.

10.         Par courrier électronique du 23 février 2024, le tribunal a invité le commissaire de police a lui transmettre son dossier et à déposer ses observations écrites le même jour, d’ici 15h00, conformément à la procédure prévue à l'art. 80a al. 3 LEI.

11.         Le même jour, par retour de courriel, le commissaire de police a transmis son dossier au tribunal, précisant que ni lui ni l’OCPM n’avaient d’observations et pièces complémentaires à verser à la procédure. Ils restaient dans l’attente d’une réponse des autorités espagnoles.

12.         Toujours le même jour, par courrier électronique, le tribunal a invité le conseil de l'intéressé à déposer ses observations écrites d’ici au lundi 26 février à 10h00.

13.         Dans le délai imparti, le conseil de M. A______ a transmis ses observations. Il a conclu à la libération immédiate de son client, soit, subsidiairement à la réduction de la durée de sa détention à six semaines maximum, en application de l’art. 76a al.3 let. c LEI.

En substance, l’Espagne était l’Etat Dublin responsable de M. A______ ce que l’OCPM savait déjà bien avant que le TAPEM ne prononce sa mise en liberté provisoire. Or, cet office avait tardé à contacter les autorités espagnoles afin d’anticiper son renvoi, ce qui aurait dû éviter sa mise en détention administrative. En tout état, les autorités espagnoles devaient se prononcer dans un délai de deux semaines sur la requêtes des autorités suisses, leur silence au-delà de ce délai valant acceptation de la requête. N’ayant pas répondu le 23 février 2024, leur silence devait ainsi être considéré comme une acceptation de l’accueil de M. A______. Parant, rien ne s’opposait à ce que son renvoi soit organisé rapidement à destination de l’Espagne. Son oncle, dont il transmettait les coordonnées au tribunal, vivait sur place.

14.         Par courriel du 26 février 2024, faisant suite à une demande de renseignements du tribunal par courriel du même jour, le commissaire de police a expliqué avoir pris contact avec la personne responsable du dossier au SEM qui lui avait indiqué que les autorités espagnoles avaient été contactées en date du 8 février 2024 et bénéficiaient d'un délai de réponse au 8 mars 2024. Le délai d'un mois qui prévalait dans ce cas, conformément à la réglementation DUBLIN, était dû au fait que l'Espagne ne figurait plus dans le relevé EURODAC. C'était l'Allemagne, dans sa réponse négative du 7 février 2024, qui avait désigné l'Espagne comme compétente.

15.         Cet échange de courriel a été transmis au conseil de M. A______, pour information.

EN DROIT

1.             Le tribunal est compétent pour examiner d’office la légalité et l’adéquation de la détention administrative (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d LaLEtr).

2.             Selon l'art. 80a al. 3 LEI, la légalité et l'adéquation de la détention ordonnée dans le cadre d'une procédure Dublin sont examinées, sur demande de la personne détenue, par une autorité judiciaire au terme d'une procédure écrite. Cet examen pouvant être demandé à tout moment.

3.             La LaLEtr, qui n'a pas été mise en jour suite à l'adoption et l'entrée en vigueur des art. 76a et 80a LEI, ne définit pas la compétence et ne détermine pas la procédure applicable dans les cas de figure envisagés par ces dispositions. Il ne fait néanmoins pas de doute que la compétence du tribunal est donnée s'agissant des demandes formées par les personnes détenues sur la base de l'art. 76a LEI (cf. not. JTAPI/817/2021 du 20 août 2021 confirmé par ATA/903/2021 du 3 septembre 2021; JTAPI/1004/2020 du 19 novembre 2020 confirmé par ATA/1252/2020 du 8  décembre 2020 ; JTAPI/803/2019 du 6 septembre 2019).

4.             En l'espèce, M. A______ a dûment requis du tribunal qu'il contrôle la légalité et l'adéquation de sa détention et a pu exposer ses motifs, par écrit, par l'intermédiaire d'un conseil désigné d'office conformément à la loi. Il sollicite son audition par le tribunal.

5.             Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit, pour l'intéressé, d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 139 II 489 consid. 3.3 ; 137 IV 33 consid. 9.2 ; 135 I 279 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_85/2016, 2C_86/2016 du 14 novembre 2016 consid. 3.1 ; 1C_516/2014 du 9 janvier 2015 consid. 2.1 ; 2C_421/2014 du 26 novembre 2014 consid. 2.1 ; 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3).

Il n'implique pas le droit de s'exprimer oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; 125 I 209 consid. 9b et l'arrêt cité ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_551/2015 du 22 mars 2016 consid. 2.2 ; 6B_594/2015 du 29 février 2016 consid. 2.1 ; 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 3 ; 5A_378/2014 du 30 juin 2014 consid. 3.1.1 ; cf. aussi art. 41 in fine de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

6.             En l'espèce, le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires à l'examen de la requête de M. A______, lesquels permettent de statuer immédiatement sur le litige, de sorte qu'il n'y a pas lieu de donner suite à sa demande tendant à ce que le tribunal procède à son audition, cet acte d'instruction, non obligatoire, ne s'avérant pas indispensable.

7.             Le tribunal peut confirmer, réformer ou annuler la décision du commissaire de police ; le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l'étranger (cf. art. 9 al. 3 LaLEtr).

8.             La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l'art. 31 Cst., ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.1 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.1).

9.             Selon l’art. 25 al. 1 du Règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride (règlement Dublin III), qui traite de la réponse à une requête aux fins de prise en charge, l’Etat membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n’excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines.

10.         Il ressort de l’art. 28 par. 2 du règlement Dublin III, qui traite du placement en rétention aux fins de transfert, que les États membres peuvent placer les personnes concernées en rétention en vue de garantir les procédures de transfert conformément audit règlement lorsqu’il existe un risque non négligeable de fuite de ces personnes, sur la base d’une évaluation individuelle et uniquement dans la mesure où le placement en rétention est proportionnel et si d’autres mesures moins coercitives ne peuvent être effectivement appliquées. À teneur du par. 3 du même article, le placement en rétention est d’une durée aussi brève que possible et ne se prolonge pas au-delà du délai raisonnablement nécessaire pour accomplir les procédures administratives requises avec toute la diligence voulue jusqu’à l’exécution du transfert au titre du présent règlement.

Lorsqu’une personne est placée en rétention en vertu du présent article, le délai de présentation d’une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge ne dépasse pas un mois à compter de l’introduction de la demande. L’État membre qui mène la procédure conformément au présent règlement demande dans ce cas une réponse urgente. Cette réponse est donnée dans un délai de deux semaines à partir de la réception de la requête. L’absence de réponse à l’expiration de ce délai de deux semaines équivaut à l’acceptation de la requête et entraîne l’obligation de prendre ou de reprendre en charge la personne, y compris l’obligation d’assurer la bonne organisation de son arrivée.

Lorsqu’une personne est placée en rétention en vertu du présent article, son transfert de l’État membre requérant vers l’État membre responsable est effectué dès qu’il est matériellement possible et au plus tard dans un délai de six semaines à compter de l’acceptation implicite ou explicite par un autre État membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou à compter du moment où le recours ou la révision n’a plus d’effet suspensif conformément à l’art. 27, paragraphe 3.

11.         À teneur de l'art. 76a al. 1 LEI, afin d'assurer son renvoi dans l'État Dublin responsable, l'autorité compétente peut mettre l'étranger en détention sur la base d'une évaluation individuelle lorsque les conditions suivantes sont remplies :

-          des éléments concrets font craindre que l'étranger concerné n'entende se soustraire au renvoi (let. a) ;

-          la détention est proportionnée (let. b) ;

-          d'autres mesures moins coercitives ne peuvent être appliquées de manière efficace (art. 28 par. 2 du règlement [UE] n° 604/2013 ; let. c).

12.         Selon l'art. 76a al. 2 LEI, les éléments concrets font craindre que l'étranger entende se soustraire à l'exécution du renvoi si :

-          son comportement en Suisse ou à l'étranger permet de conclure qu'il refuse d'obtempérer aux instructions des autorités (let. b) ;

-          il quitte la région qui lui est assignée ou pénètre dans une zone qui lui est interdite en vertu de l'art. 74 (let d) ;

-          a été condamné pour crime (let. h).

13.         Les motifs énumérés, de manière exhaustive, à l'art. 76a al. 2 LEI correspondent en principe à ceux déjà retenus aux art. 75 et 76 LEI (Gregor CHATTON/ Laurent MERZ in Code annoté de droit des migrations, volume II : loi sur les étrangers, n°  2.5 ad art. 76a, p. 808).

14.         Comme toute mesure étatique, la détention administrative en matière de droit des étrangers doit dans tous les cas respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst et art. 76a al. 1 let. b et c LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Il convient en particulier d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi constitue une mesure appropriée et nécessaire (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 134 I 92 consid. 2.3 et 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_624/2011 du 12 septembre 2011 consid. 2.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 et 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. ATF 130 II 425 consid. 5.2).

15.         Selon l'art. 76a al. 3 let. a LEI, à compter du moment où la détention a été ordonnée, l'étranger peut être placé ou maintenu en détention pour une durée maximale de sept semaines pendant la préparation de la décision relative à la responsabilité du traitement de la demande d'asile ; les démarches y afférentes comprennent l'établissement de la demande de reprise en charge adressée à un autre État Dublin, le délai d'attente de la réponse à la demande ou de son acceptation tacite, la rédaction de la décision et sa notification.

16.         Dès l’accord de réadmission donné par les autorités de l’Etat Dublin responsable, la détention prévue par l’art. 76a al. 3 let. a LEI passe directement dans la phase de procédure visée par l’art. 76a al. 3 let. c LEI, qui concerne le transfert proprement dit dans l’Etat Dublin responsable et prévoit une durée de détention maximale de six semaines. Il convient à cet égard de préciser que le fait de passer d'une phase à l'autre de la procédure de renvoi Dublin, au sens des let. a à c de l'art. 76a al. 3 LEI, ne semble pas donner lieu à des ordres de détention successifs ou à des demandes de prolongation de la détention, dès lors que l'examen d'une telle détention peut être requis à tout moment (art. 80a al. 3 LEI) et la libération sollicitée en tout temps (art. 80a al. 4 LEI). C'est donc l'autorité administrative qui doit d'office et constamment vérifier que les conditions de la détention administrative sont encore remplies, et, à défaut, lever la détention de son propre mouvement (Gregor CHATTON/Laurent MERZ, op. cit., n° 26 ad art. 80a LEI, p. 901).

17.         En l’espèce, M. A______ qui n'est pas au bénéfice d'une autorisation de courte durée, de séjour ou d'établissement, a notamment été condamné pour vol, au sens de l'art. 139 ch. 1 CP, soit une infraction qui constitue un crime selon l'art. 10 al. 2 CP. Par ailleurs, l'intéressé a violé à plusieurs reprises l'interdiction qui lui avait été faite par le commissaire de police de pénétrer dans le canton de Genève, raison pour laquelle il a également été condamné pour infraction à l'art. 119 al. 1 LEI. Au vu du comportement adopté jusqu'ici par l’intéressé - étant souligné qu'il a été condamné quatre fois en l'espace de deux mois -, il y a tout lieu de considérer qu'il n'a aucune intention de se plier aux décisions des autorités ni de collaborer avec ces dernières dans le cadre de son refoulement. Il existe ainsi des éléments concrets faisant craindre que, s'il était laissé en liberté, il se soustrairait à son renvoi de Suisse, laquelle mesure ne pourrait être mise en œuvre par les services concernés, faute de pouvoir localiser l'intéressé en temps utile. Il ressort en outre des éléments du dossier que M. A______ ne dispose d'aucun lieu de résidence fixe en Suisse, ni d'aucun lien particulier avec ce pays, ni non plus d'aucune source légale de revenu. Le risque qu'il disparaisse sans que l'on puisse vérifier son départ pour le pays responsable du traitement de sa demande d'asile apparaît ainsi suffisamment élevé, de sorte que toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence au moment où il devra être reconduit dans l'État Dublin responsable. Partant, il convient d'admettre que les conditions prévues par l'art. 76a al. 1 et 2 LEI sont réunies et que la détention est conforme au principe de proportionnalité.

Concernant les démarches entreprises, force est de constater que les autorités ont agi dans le cadre de leurs obligations légales et avec célérité. Elles ont dans un premier temps sollicité les autorités allemandes, pays mentionné par M. A______ comme étant l’Etat responsable de sa demande d’asile. Face au refus du 7 février 2024 desdites autorités de le réadmettre, elles ont interpellé les autorités espagnoles le 8 février 2024 et demeure actuellement dans l’attente de leur réponse implicite ou explicite, étant précisé que lorsqu’elles ont présenté leur requête M. A______ n’était pas en détention administrative et que dès lors, en application de l’art. 25 du règlement Dublin III, les autorités espagnoles disposaient d’un délai de réponse d’un mois, soit jusqu’au 8 mars 2024, puisque, comme expliqué par le commissaire de police, la requête des autorités suisses ne se fondait pas sur des données obtenues par le système Eurodac - l’Espagne n’y figurant plus - mais sur les indications fournies par l’Allemagne.

Cela étant, M. A______ étant en détention administrative depuis le 20 février 2024, l’art. 28 du règlement Dublin III, qui fixe des règles de procédure spécifiques à suivre lorsqu’une personne est placée en rétention/détention administrative, doit désormais s’appliquer à sa situation. Ainsi, en application de l’al. 3 de cette disposition, la réponse des autorités espagnoles, qui ont dû être informées du placement en rétention de l’intéressé aux fins de son transfert, doit être donnée dans un délai raccourci de deux semaines, soit au plus tard le 5 mars 2024 (cf dans ce sens : European Asylum Support Office, EASO, Guide sur la procédure de Dublin: normes opérationnelles et indicateurs ; Indicateur 52.4). Au-delà de cette date, l’absence de réponse des autorités espagnoles équivaudra à l’acceptation de la requête de prise en charge.

Dans cette mesure, la durée de la détention de sept semaines, décidée par le commissaire de police, respecte le cadre légal fixé par l'art. 76a al. 3 let. a LEI. Elle n’apparaît en outre pas disproportionnée au vu des circonstances concrètes.

18.         Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l’ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de sept semaines.

19.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M.  A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme l’ordre de mise en détention administrative émis par le commissaire de police le 20 février 2024 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de sept semaines, soit jusqu'au 8 avril 2024, inclus ;

2.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

 

Genève le

 

Le greffier