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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/320/2023

JTAPI/1363/2023 du 06.12.2023 ( DOMPU ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : DOMAINE PUBLIC;TERRASSE DE RESTAURANT;QUALITÉ POUR RECOURIR;TIERS
Normes : LPA.60.al1.letb; RTEP.20.al2; RTEP.27; LRoutes.77ss; LRoutes.85ss
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/320/2023 DOMPU

JTAPI/1363/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 6 décembre 2023

 

dans la cause

 

A______ SA, représentée par Me Murat Julian ALDER, avocat, avec élection de domicile

 

contre

VILLE DE GENÈVE

 


EN FAIT

1.             A______ SA (ci-après : la SA ou la recourante) est une société anonyme sise à Genève, rue du B______ 1______, dont le but est l'exploitation d'un café-petite restauration, le commerce, y compris en ligne, de tout produit alimentaire et de biens de consommation.

2.             Monsieur C______ en est l'unique administrateur, avec signature individuelle. Il est titulaire de l'autorisation d'exploiter le café-restaurant "D______" sise à la même adresse.

3.             Par permission n°2______ du 16 janvier 2017 du SEP, M. C______ a été autorisé à exploiter une terrasse à l'année pour son établissement "D______". La surface accordée ne devait pas correspondre à un enclos; elle devait restée ouverte et aérée; seuls quelques éléments esthétiques, amovibles, non fixés au sol et moyennant accord préalable, pouvaient la délimiter.

4.             Par décision du 3 juillet 2020, la Ville de Genève (ci-après : la ville), soit pour elle son service de l’espace public (ci-après : SEP), a notamment ordonné à M. C______ de s'abstenir d'utiliser une bâche suspendue à la tente solaire recouvrant la terrasse de l'établissement "D______", sise contre la balustrade du quai E______ reliant ainsi les parois vitrées, bancs et jardinières avec ladite tente. Il lui était rappelé que ce genre de dispositif qui clôt intégralement la terrasse était proscrit par l'art. 20 du règlement sur les terrasses d'établissements publics (RTEP - LC 21 314).

5.             Le 13 mai 2022, le SEP a adressé à M. C______ un courrier lui confirmant que son aménagement de terrasse tel que constaté depuis le 15 septembre 2021 était validé. Il lui était rappelé que les bâches transparentes fixées au store banne ne pouvaient pas être acceptées car elles constituaient un cloisonnement de terrasse proscrit par l'art. 20 RTEP.

6.             Le 11 novembre 2022, suite à la constatation le 3 novembre 2022 que des bâches étaient installées sur la surface de la terrasse de l'établissement "D______" cloisonnant cette dernière, le SEP a ordonné à M. C______ de les retirer immédiatement et lui a infligé une amende de CHF 1'500.-.

7.             Le 8 décembre 2022, à 18h38, la présence de bâches non conformes fixées au store de la terrasse de l'établissement précité a été constatée par la ville, photographies à l'appui.

8.             Par envoi du 9 décembre 2022, une ultime sommation a été adressée à M. C______ afin qu'il dépose les bâches en cause dès réception de celle-ci. Il était informé qu'une amende administrative fondée sur les art. 20 al. 2 et 27 RTEP et 77ss et 85ss de la loi sur les routes du 28 avril 1967 (LRoutes - L 1 10) allait lui être infligée par courrier séparé et qu'en cas de récidive, il s'exposait à une nouvelle amende ainsi qu'aux mesures administratives prévues par la loi.

9.             Par décision du 14 décembre 2022, n° 3______, la ville a amendé M. C______ à hauteur de CHF 3000-. au motif que les conditions de permission n'avaient pas été respectées suite au constat du 8 décembre 2022 à 18h38, à la rue du B______ angle quai E______.

10.         Tous les envois adressés à M. C______ par l'autorité intimée lui ont été adressés à son intention personnelle, c/o la SA, rue du B______ 1______, hormis la permission du 16 janvier 2017 qui lui a été transmise à F______.

11.         Par acte du 30 janvier 2023, la SA, sous la plume de son conseil, a formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement, à l'annulation de la décision rendue le 14 décembre 2022 n° 3______ à son encontre et dire qu'aucune amende administrative ne serait prononcée à son égard, subsidiairement, à l'annulation de la décision rendue le 14 décembre 2022 n° 3______ à son encontre et à la réduction du montant de l'amende prononcée à son égard à CHF 500.-, dans tous les cas, condamner l'autorité intimée en tous les frais et dépens, lesquels comprendraient une indemnité de procédure de CHF 5'000.-.

Afin de protéger ses clients de la forte bise en hiver, elle avait installé des bâches transparentes fixées sur le store de la terrasse de son établissement. Ces bâches n'étaient pas permanentes et étaient démontées et stockées hors site de mai à septembre. L'exploitant les enroulait à la fermeture pour les dérouler le lendemain à partir de 17h00. Ces bâches étaient sorties uniquement en cas de forte bise et lorsque les températures extérieures étaient particulièrement basses afin de préserver le confort des clients et la santé des employés. Par décision de l'Office cantonal de l'énergie (ci-après : OCEN) qu'elle entendait produire, elle avait été autorisée à chauffer la terrasse de son établissement au moyen de procédés issus de l'énergie renouvelable. Cette décision disposait que la surface chauffée devait être munie de protection garantissant la conservation de l'énergie tels des parasols ou parois amovibles. Les bâches ne constituaient pas un cloisonnement et respectait le cadre légal. L'autorité intimée avait violé l'art. 20 RTEP et abusé de son pouvoir d'appréciation.

L'art. 85 LRoutes était également violé. L'autorité intimée s'était bornée à ordonner le retrait des bâches sans tenir compte de la situation particulière. Le montant de l'amende était disproportionné. Elle n'avait commis aucune faute étant relevé que la législation l'autorisait à aménager l'espace qui lui était dévolu de manière à ce qu'il soit abrité (notamment du vent) et confortable pour la clientèle. La seule faute qu'on pouvait lui reprocher était de ne pas s'être conformé à la sommation injustifiée de l'autorité. Sa faute était ainsi légère et excusable. Une réduction de l'amende à CHF 500.- devait dès lors être opérée.

12.         Dans ses observations du 6 avril 2023, la ville a conclu à ce que la recourante soit déboutée des fins de son recours dans la mesure de sa recevabilité et qu'en conséquence, le bien-fondé de l'amende du 14 décembre 2022 soit confirmé, sous suite de frais.

Une première amende administrative d'un montant de CHF 1'500.-, entrée en force, avait été infligée à M. C______ le 11 novembre 2022, pour usage de bâches non conformes fixées au store de la terrasse. Faute de recours, on pouvait donc en conclure que cette amende avait été considérée comme légitime et proportionnée par son destinataire. Le doublement de l'amende était justifié vu la récidive et proportionné économiquement lorsque l'on savait que les chiffres d'affaire journaliers pour des terrasses d'une telle envergure pouvaient facilement atteindre CHF 15'000.-.

13.         Dans le délai prolongé, la recourante a répliqué le 30 juin 2023 et persisté dans les termes et conclusions de son recours. L'allégation que les chiffres d'affaire journaliers pour des terrasses semblables à la sienne pouvaient facilement atteindre CHF 15'000.- était péremptoire et ne reposait sur aucune statistique. Elle a repris pour le surplus la motivation contenue dans son recours.

14.         Par duplique du 27 juillet 2023, la ville a relevé que le recours était irrecevable car la recourante n'était pas destinataire de la décision querellée, n'était pas au bénéfice de la permission délivrée par le SEP en vue de l'installation et l'exploitation de la terrasse du café "D______" ni son interlocutrice. L'amende querellée avait été infligée à M. C______, en sa qualité de titulaire de ladite permission, elle-même liée à sa qualité d'exploitante de l'établissement, ce qui ressortait clairement de la décision entreprise et des pièces du dossier. Le recours avait été exclusivement déposé par la SA, laquelle avait une position de tiers. Si le tribunal ne devait pas parvenir à cette conclusion, il lui fallait tenir compte que le comportement de M. C______ était constitutif de l'infraction réprimée à l'art. 85 al. 1 LRoutes. Sa faute n'était pas légère. Il avait agi en pleine conscience et volonté et malgré des rappels réguliers quant à l'illicéité de la situation. Il fallait en déduire une obstination caractérisée à refuser de se soumettre aux décisions de l'autorité. Vu la récidive, le montant de l'amende était mesuré. Au surplus, il ne ressortait pas du dossier qu'une telle sanction exposerait concrètement l'intéressé à une situation financière difficile. Elle concluait à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, sous suite de frais.

15.         Par écriture spontanée du 4 septembre 2023, la recourante a conclu à l'irrecevabilité de la nouvelle conclusion prise par la recourante au stade de la réplique. Cette nouvelle conclusion violait le principe de la bonne foi car l'autorité intimée s'était rapportée à justice s'agissant de la recevabilité du recours dans son mémoire du 6 avril 2023. Elle avait qualité pour recourir car son but était l'exploitation d'un café-petite restauration, le commerce, y compris en ligne, de tous produits et de biens de consommation. C'était conformément à son but social qu'elle possédait et exploitait l'établissement "D______". M. C______ en était à la fois actionnaire et administrateur unique. Tant l'amende querellée que les précédents courriers du SEP avaient été adressés à M. C______ c/o la SA, hormis la permission du 16 janvier 2017 adressée à F______. Le SEP s'était toujours adressé à M. C______ en sa qualité d'administrateur unique de la SA et non pas en tant que particulier. Si cela avait été le cas, il aurait dû adresser sa correspondance à son domicile et non pas à son adresse professionnelle. Dans la mesure où le SEP n'avait invoqué l'irrecevabilité du recours qu'au stade de la duplique, force était de constater qu'elle avait toujours considéré que c'était la SA qui était détentrice de la permission n° 3______ et non pas M. C______. En tout état, elle était indiscutablement touchée plus que quiconque par la décision attaquée et avait manifestement un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification. Au surplus, elle a repris l'argumentaire de son recours et ses conclusions.

16.         La décision de l'OCEN n'a pas été produite par la recourante.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés contre les décisions prises en application de la LRoutes ou de ses dispositions d'application, comme en l'espèce.

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La recevabilité d’un recours suppose encore que son auteur dispose de la qualité pour recourir, ce qui doit être examiné d'office par l'autorité de recours (ATF 135 II 369 consid. 3.3).

4.             Aux termes de l'art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure ayant abouti à la décision attaquée (let. a), ainsi que toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (let. b). Les let. a et b de cette disposition doivent se lire en parallèle. Ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s'il était partie à la procédure de première instance (ATA/868/2022 du 30 août 2022 consid. 2a ; ATA/1392/2021 du 21 décembre 2021 consid. 2a).

5.             La qualité pour recourir fondée sur l'art. 60 al. 1 let. b LPA correspond à celle de l'art. 89 al. 1 let. b et c LTF (ATF 144 I 43 consid. 2.1). Selon cette dernière disposition, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque est particulièrement atteint par la décision et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, soit un intérêt personnel et actuel, à voir le juge statuer sur ses conclusions.

6.             L'intérêt digne de protection consiste dans l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au recourant, en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait. Il implique que le recourant soit touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grande que la généralité des administrés et se trouve, avec l'objet de la contestation, dans un rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2 ; 137 II 40 consid. 2.3 ; 133 II 468 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_837/2013 du 11 avril 2014 consid. 1.1). Le recourant doit démontrer que sa situation factuelle et/ou juridique peut être avantageusement influencée par l'issue du recours (ATA/14/2022 du 11 février 2022 consid. 5c). Tel n'est pas le cas de celui qui n'est atteint que de manière indirecte, médiate, ou encore « par ricochet » (ATA/1821/2019 du 17 décembre 2019 ; ATA/552/2006 du 17 octobre 2006). Un intérêt seulement indirect à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée n'est pas suffisant
(ATF 138 V 292 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 1C_665/2013 du 24 mars 2014 consid. 3.1).

7.             Selon la jurisprudence, la qualité pour recourir d'un tiers qui n'est pas destinataire de la décision dont il est fait recours n'est admise que restrictivement. Les tiers ne sont en effet pas touchés par une décision de la même manière que son destinataire formel et matériel, dans la mesure où elle ne leur octroie pas directement des droits ou leur impose des obligations (arrêts du Tribunal fédéral 9C_852/2017 du 25 juin 2018 consid. 2.2.2 ; 9C_616/2011 du 5 avril 2012 consid. 3.4). Pour avoir qualité pour recourir, le tiers doit ainsi être touché directement et plus fortement que tout autre tiers et se trouver, avec l'objet de la contestation, dans une relation particulière, étroite et digne d'être prise en considération (cf. ATF 146 I 172 consid. 7.1.2; 139 II 279 consid. 2.2 ; 137 III 67 consid. 3.5; 135 II 172 consid. 2.1). Une atteinte indirecte ou médiate ne suffit pas (ATF 138 V 292 consid. 4 ; 130 V 514 consid. 3.1; 130 V 202 consid. 3, 127 V 3 consid. 1b, 127 V 82 consid. 3a/aa). Un simple intérêt de fait ne permet en particulier pas de fonder une relation suffisamment étroite avec l'objet du litige (cf. ATF 138 V 161 consid. 2.5.2 et 2.7; 138 V 292 consid. 4 ; 137 III 67 consid. 3.5 ; 135 V 382 consid. 3.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_579/2019 du 11 mars 2020 consid. 6.3.1 ; 2C_1158/2012 du 27 août 2013 consid. 2.3.2; FLORENCE AUBRY GIRARDIN, Commentaire de la LTF, 2e éd., 2014, n° 35 ad art. 89 LTF). Le tiers doit en outre avoir un intérêt pratique à l'annulation ou à la modification de la décision qu'il attaque, en ce sens que l'issue de la procédure doit pouvoir influencer sa situation de manière significative (ATF 146 I 172 consid. 7.1.2 ; 139 II 279 consid. 2.2 et les arrêts cités). 

8.             Lorsque le recours intervient en faveur du destinataire de la décision dont il est fait recours ("pro Adressat"; cf. ATF 142 V 583 consid. 4.3 ; 141 V 650 consid. 3.1 ; 135 V 382 consid. 3.3.1), la qualité pour recourir suppose que le tiers tire lui-même un désavantage immédiat de la décision contestée; à cet égard, le fait qu'il soit créancier du destinataire de la décision ne suffit pas (ATF 137 III 67 consid. 3.5 ; 130 V 560 consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1007/2018 du 16 octobre 2019 consid. 5.2). De manière générale, il convient de retenir qu'une simple relation contractuelle entre le destinataire de la décision et le tiers recourant ne crée pas en soi la qualité pour recourir de ce dernier: les répercussions contractuelles ou les conséquences d'une obligation imposée au destinataire ne constituent ainsi qu'une atteinte indirecte (cf. ATF 130 V 560 consid. 3.5; RENÉ WIEDERKEHR/STEFAN EGGENSCHWILER, Die allgemeine Beschwerdebefugnis Dritter, 2018, n° 291 p. 88). La jurisprudence a reconnu une qualité pour recourir du tiers, en raison de sa relation étroite avec la contestation, en cas de responsabilité solidaire avec le destinataire de la décision (cf. arrêt 9C_752/2012 du 27 décembre 2012 consid. 4.1 et 4.2 ; ATA/147/2021 du 09 février 2021 consid. 3).

9.             En l'espèce, la recourante n'est pas destinataire de la décision contestée. Seul M. C______, exclusivement au bénéfice de la permission du 16 janvier 2017 qui lui a été adressée à F______, en sa qualité de titulaire de l'autorisation d'exploiter, en est le destinataire. Le fait que les envois subséquents de l'autorité intimée destinés à M. C______ ainsi que la décision querellée aient été adressés à son intention chez la recourante, ne permet pas de retenir qu'elle souhaitait en réalité s'adresser à cette dernière ou qu'elle était titulaire de l'autorisation d'exploiter. Au contraire, si cela avait été le cas et si l'autorité intimée avait considéré que la SA était bénéficiaire de la permission du 16 janvier 2017 et titulaire de l'autorisation d'exploiter, elle lui aurait adressé directement ses envois, par l'entremise de son administrateur par exemple, ce qu'elle n'a jamais fait. Elle l'aurait également inscrite comme titulaire de l'autorisation d'exploiter sur la permission du 16 janvier 2017, ce qui n'est pas le cas, seul M. C______ étant nommé à ce titre. Par ailleurs, il ne ressort pas du dossier que l'autorité intimée se serait adressée, ne serait-ce qu'à une reprise, à la recourante dans le cadre de la permission du 16 janvier 2017 et du respect de celle-ci. Il s'ensuit que la recourante doit être considérée comme un tiers dans la procédure. Reste donc à examiner si l'on se trouverait dans une situation permettant d'admettre exceptionnellement la qualité pour recourir au tiers non destinataire de la décision contestée (cf. supra consid. 7 et 8).

Rien n'indique, et la recourante ne l'allègue d'ailleurs pas, qu'elle serait la réelle créancière de l'amende infligée à M. C______ ou que celle-ci aurait des répercussions sur elle, issues d'une obligation contractuelle dans le cadre d'une refacturation par exemple. En tout état, cela ne constituerait que des atteintes indirectes insuffisantes pour lui conférer la qualité pour recourir au sens de la jurisprudence précitée. Par ailleurs, la recourante n'est pas, tant sous l'angle du droit public que du droit privé, débiteur solidaire de l'amende litigieuse auprès de l'autorité intimée. En effet, la LRoutes ne connaît pas de mécanisme de solidarité du paiement de l'amende entre la personne morale et celle qui a agi en son nom, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, à l'instar de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) à son art. 137 al. 4 ou de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) à son art. 44 al. 3 (cf. ATA/147/2021 du 09 février 2021 consid. 3). Seuls sont solidaires les copropriétaires d'immeuble (art. 89 LRoutes). On ne saurait à l'évidence pas non plus retenir que la recourante serait, à l'instar du locataire subissant une coupure de courant consécutive à des impayés de son bailleur, atteint avec une intensité telle qu'il faudrait considérer que c'est lui-même, et non pas le destinataire de la décision contestée, qui est touché au premier plan par celle-ci.

Il découle de ce qui précède que la recourante, faute d'être touchée directement par la décision litigieuse, ne peut se prévaloir d'un rapport suffisamment étroit et direct avec l'objet de la contestation qui serait digne de protection au regard des strictes exigences de recevabilité posées en matière de recours de tiers "pro Adressat".  

10.         Partant, le recours sera déclaré irrecevable.

11.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare irrecevable le recours interjeté le 30 janvier 2023 par A______ SA contre la décision de la Ville de Genève du 14 décembre 2022 ;

2.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

3.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

4.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Gwénaëlle GATTONI, présidente, Oleg CALAME et Aurèle MULLER, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

 

Genève, le

 

La greffière