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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2701/2022

JTAPI/102/2023 du 25.01.2023 ( LCI ) , REJETE

REJETE par ATA/895/2023

Descripteurs : INSTALLATION DE TÉLÉCOMMUNICATION;ANTENNE;RADIOCOMMUNICATION;TÉLÉPHONE MOBILE;PERMIS DE CONSTRUIRE;ESTHÉTIQUE
Normes : LCI.89; LCI.15; LCI.93
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2701/2022 LCI

JTAPI/102/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 25 janvier 2023

 

dans la cause

 

A______ SA, représentée par Me Stephan KRONBICHLER, avocat, avec élection de domicile

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

B______ SA

 


EN FAIT

1.             La B______ SA est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune C______, sise en zone 2, à l'adresse D______.

Un immeuble d'habitation, construit entre 1910 et 1911, appartenant à un ensemble protégé du XIXe ou du début du XXe siècle, est érigé sur cette parcelle.

2.             Le 9 novembre 2021, A______ SA a déposé auprès département du territoire (ci-après: le département) une requête en autorisation de construire portant sur la mise en place d'une nouvelle installation de téléphonie mobile sur la toiture du bâtiment situé sur la parcelle n° 1______. Cette requête a été enregistrée sous la référence DD 2______.

3.             Lors de l'instruction de cette requête, plusieurs instances de préavis ont été sollicitées, notamment :

-          le 6 décembre 2021, la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après: CMNS) a émis un préavis défavorable.

Le projet visait l'installation d'une nouvelle station émettrice sur la toiture d'un bâtiment protégé, situé dans la séquence des immeubles implantés en ordre contigu le long de la rue D______ et à l'angle de la route E______, relevant les qualités architecturales du bâtiment concerné, construit en 1910 et appartenant à un ensemble protégé (______).

Le projet, composé de plusieurs antennes de téléphonie mobile émergentes au-dessus de la toiture, altérait la composition architecturale d'un bâtiment remarquable, digne de protection et qu'il convenait de sauvegarder, et compromettait l'unité urbanistique de l'ensemble protégé ;

-          le 6 décembre 2021, le service des monuments et des sites s'est déclaré défavorable au projet, se référant au préavis de la CMNS du même jour ;

-          le 9 décembre 2021, le service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisant (ci-après : SABRA) s'est prononcé favorablement au projet, sous conditions. Des mesurages de contrôle devaient être effectués aux locaux à utilisation sensible (ci-après: LUS) nos 3, 4, 6 et 8 – où les immissions étaient supérieures à 80% de la valeur limite d'installation (ci-après: VLInst) dans des directions proches du rayon principal –, les antennes de cette installation devaient être intégrées dans le système d'assurance qualité de l'opérateur et les parties accessibles pour l'entretien devaient être dûment protégées ;

-          le 20 décembre 2021, la Ville de Genève s'est prononcée défavorablement au projet, précisant qu'elle appliquait un moratoire à toute demande de modification d'installation existante ou de pose de nouvelle installation de téléphonie mobile.

4.             Par décision du 6 juillet 2022, le département a refusé de délivrer l'autorisation de construire sollicitée. Vu le préavis défavorable de la CMNS du 6 décembre 2021 et de la hauteur de l'installation prévue (flèche de l'antenne 4.27 m plus haute que le faîte de la toiture), le projet avait un impact négatif important sur le site et l'ensemble protégé concerné et n'était ainsi pas conforme aux art. 15, 89 et 92 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (L 5 05 – LCI).

5.             Par acte du 25 août 2022, A______ SA (ci-après: la recourante), sous la plume de son conseil, a formé recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: le tribunal), concluant à son annulation, subsidiairement, au renvoi du dossier au département pour nouvelle décision, sous suite de frais et dépens.

Si les qualités architecturales du bâtiment concerné par le projet litigieux étaient incontestables, la CMNS et le département se trompaient en considérant que la construction de l'antenne porterait atteinte au caractère architectural de l'édifice.

Il s'agissait d'un seul mât sur lequel étaient fixées trois antennes, contrairement à l'image de « forêt d'antennes » que peignait la décision querellée.

Le projet ne dépassait pas fortement de la toiture avec une flèche située à 4.27 m au-dessus du faîte. Les normes de mise à terre avaient changé et aucune pointe de 50 cm sur le mât ne serait installée. L'antenne projetée était aussi apposée sur une superstructure déjà existante, qu'elle ne dépasserait que de 3 m, à côté d'une cheminée et d'une antenne de télévision existante, lesquelles limitaient son impact visuel. La hauteur des installations était réduite à ce qui était techniquement nécessaire, de sorte que l'impact esthétique était minime.

L'antenne projetée était prévue au centre de la toiture, de sorte qu'elle ne serait pratiquement pas visible depuis les rues adjacentes, notamment la rue D______ et la route E______, ce d'autant qu'elle était projetée sur un immeuble de près de 25 m. Le cas échéant, elle pouvait être démontée sans causer aucun dégât ni modification permanente de l'immeuble.

L'art. 92 LCI ne s'appliquait pas à la construction d'une antenne de téléphonie mobile sur le toit d'un bâtiment existant, qui n'altérait en rien la hauteur des corniches ou le nombre des niveaux de ce dernier. Les art. 87 et 92 LCI imposaient des protections différentes, dès lors que la zone de la Vieille-Ville était beaucoup plus homogène que le quartier dans lequel s'inscrivait l'ensemble protégé concerné, celui-ci étant entouré de bâtiments modernes de qualité architecturale très hétérogène.

Au surplus, les installations de téléphonie mobile devaient, pour des raisons techniques, nécessairement dépasser la hauteur des toits des bâtiments sur lesquelles elle se situaient afin d'accomplir leur but. Une application stricte d'une disposition cantonale prohibant tout dépassement de la hauteur des bâtiments n'était pas admissible, dès lors que cela reviendrait à interdire toute construction d'antennes dans l'ensemble du périmètre protégé et empêcherait les opérateurs de remplir leur obligation de couverture selon la loi fédérale sur les télécommunications du 30 avril 1997 (LTC – RS 784.10).

Il était notoire que les besoins de couverture et de capacité étaient en forte augmentation. Le projet litigieux se situait dans un quartier très densément peuplé des F______. Le site voisin (______) ne pouvait être exploité qu'avec une puissance très faible en raison des nombreux LUS à proximité. La couverture de ce secteur en bandes hautes fréquences était ainsi limitée et la couverture en réseau 5G pratiquement inexistante. L'installation d'un site supplémentaire était ainsi nécessaire.

6.             Le 1er novembre 2022, le département a transmis son dossier au tribunal, accompagné de ses observations. Il concluait au rejet du recours.

L'immeuble concerné faisait partie d'un ensemble protégé du XIXe siècle et du début du XXe siècle. Il était dès lors soumis aux art. 89 ss LCI, ce que la recourante ne contestait pas.

Les plans à l'appui de la requête en autorisation de construire permettaient de visualiser la hauteur et l'impact du projet litigieux. La CMNS avait constaté que cette installation compromettait l'unité urbanistique de l'ensemble protégé en question et portait atteinte au caractère architectural du bâtiment concerné, lequel était digne de protection et à sauvegarder. La CMNS avait donc retenu que le projet péjorait la situation existante au sens de l'art. 15 LCI et violait également l'art. 89 LCI.

Si la recourante estimait que l'installation de l'antenne projetée à l'endroit prévu était indispensable, plusieurs immeubles n'appartenant pas à un ensemble protégé se situaient à proximité immédiate du site retenu, par exemple ceux sis G______ ou H______ ou encore I______. La recourante ne démontrait pas que la couverture réseau de la zone ne pourrait pas être atteinte de manière analogue depuis l'un des bâtiments voisins. Ainsi, la pesée des intérêts effectuée était correcte, ce d'autant que la protection du patrimoine bâti était un intérêt public prépondérant pouvant justifier le refus de certains projets de construction.

En outre, malgré trois prolongations de délais, la recourante ne s'était jamais positionnée par rapport aux préavis défavorables de la CMNS ou de la commune.

Ainsi, la recourante ne démontrait pas que la décision querellée rendrait impossible ou compliquerait à l'excès la réalisation de son obligation de couverture. En définitive, elle se contentait de substituer son appréciation à celle d'une instance spécialisée, et reprise par le département.

7.             Le 18 novembre 2022, la recourante a répliqué.

Le département reconnaissait implicitement les besoins en couverture réseau qu'elle invoquait sur la base des cartes produites. Les trois bâtiments qu'il mentionnait avaient fait l'objet de prospections, mais dont le résultat s'était avéré négatif :

-          le bâtiment sis G______ était une PPE et il avait été impossible d'obtenir l'accord de tous les copropriétaires ;

-          le propriétaire du bâtiment sis H______ avait refusé d'entrer en matière sur la proposition d'installer une antenne de téléphonie mobile sur son immeuble ;

-          la Caisse de pension, propriétaire du bâtiment situé I______, avait refusé la proposition contractuelle.

L'emplacement retenu était donc le seul dans ce secteur permettant la réalisation du projet litigieux.

8.             Le 14 décembre 2022, le département a dupliqué.

Les empêchements invoqués par la recourante dans le cadre de ses prospections n'étaient pas démontrées. En tout état, ces éléments relevaient du droit privé. Par ailleurs, elle n'évoquait pas d'autres alternatives que celles qui lui avaient été suggérées par le département, si bien que qu'elle ne démontrait pas que son obligation de couverture serait rendue compliquée à l'excès.

9.             Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Le litige porte sur le refus d'autorisation d’implantation d'une installation de téléphonie mobile en zone 2 au niveau de la toiture d'un bâtiment s'inscrivant dans un ensemble protégé du XIXe siècle et du début du XXe siècle.

La recourante estime que le projet litigieux n'altérerait pas la substance urbanistique et architecturale du bâtiment protégé. Elle prétend également que l'augmentation de la couverture réseau constituerait un intérêt prépondérant à celui de la protection du patrimoine.

4.             Selon l'art. 22 al. 1 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700), aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente. L'autorisation est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone (art. 22 al. 2 let. a LAT) et si le terrain est équipé (art. 22 al. 2 let. b LAT). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d'autres conditions (art. 22 al. 3 LAT).

5.             Selon l'art. 1 al. 1 LCI, sur tout le territoire du canton, nul ne peut, sans y avoir été autorisé, notamment, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (let. a), ainsi que modifier, même partiellement, le volume, l’architecture, la couleur, l’implantation, la distribution ou la destination d’une construction ou d’une installation (let. b).

6.             L'art. 17 LAT prévoit que les zones à protéger comprennent notamment les localités typiques, les lieux historiques, les monuments naturels ou culturels (let. c).

7.             Les zones protégées constituent des périmètres délimités à l’intérieur d’une zone à bâtir ordinaire ou de développement et qui ont pour but la protection de l’aménagement et du caractère architectural des quartiers et localités considérés (art. 12 al. 5 LaLAT).

8.             Sont désignées comme zones à protéger au sens de l’art.17 LAT les ensembles du XIXe siècle et du début du XXe siècle, selon les dispositions des art. 89 et 93 de la LCI et font l’objet de dispositions particulières incluses dans la loi sur les constructions (art. 28 et 29 al. 1 let. d LaLAT).

9.             Les art. 89 ss LCI protègent les « ensembles du XIXe siècle et du début du XXe siècle », selon le titre de la section 2 chapitre IX.

L'art. 89 al. 1 LCI dispose que l’unité architecturale et urbanistique des ensembles du XIXe siècle et du début du XXe siècle situés en dehors des périmètres de protection de la Vieille-Ville et du secteur sud des anciennes fortifications, ainsi que du vieux Carouge, doit être préservée. Sont considérés comme ensemble les groupes de deux immeubles ou plus en ordre contigu, d’architecture identique ou analogue, ainsi que les immeubles séparés dont l’emplacement, le gabarit et le style ont été conçus dans le cadre d’une composition d’ensemble dans le quartier ou dans la rue (art. 89 al. 2 LCI).

10.         D'après l'art. 92 al. 1 LCI, afin de conserver l’homogénéité de l’architecture, la hauteur des corniches et le nombre de niveaux des immeubles reconstruits au sein des ensembles visés à l’article 89 doivent être maintenus. Une dérogation quant au nombre de niveaux peut être accordée par le DALE si l'esthétique de l'ensemble le justifie (art. 92 al. 2 LCI)

11.         Selon l'art. 93 LCI, les demandes d’autorisation, à l’exception de celles instruites en procédure accélérée, concernant des immeubles visés à l’article 89 sont soumises, pour préavis, à la commission des monuments, de la nature et des sites (al. 1). Les préavis sont motivés (al. 4).

12.         À teneur de l'art. 15 LCI, le département peut interdire ou n’autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l’intérêt d’un quartier, d’une rue ou d’un chemin, d’un site naturel ou de points de vue accessibles au public (al. 1). La décision du département se fonde notamment sur le préavis de la commission d’architecture ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la CMNS. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (al. 2).

La clause d'esthétique de l'art. 15 LCI fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce ; ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose alors une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 consid. 6 et la jurisprudence citée).

13.         L'art. 15 LCI reconnaît au département un large pouvoir d'appréciation. Ce dernier n'est limité que par l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation (ATA/1065/2018 du 9 octobre 2018 consid. 3e et la référence citée). Constitue un abus du pouvoir d'appréciation le cas où l'autorité reste dans le cadre fixé par la loi, mais se fonde toutefois sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 précité ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, p. 179).

14.         Le principe de la proportionnalité implique également que si l'autorité décisionnaire doit effectuer une soigneuse pesée des intérêts et faire primer cas échéant le développement du réseau téléphonique sur la protection du patrimoine, cela suppose que de son côté, le requérant de l'autorisation de construire doit de son côté faire tout son possible pour diminuer l'atteinte au patrimoine, dans la mesure que permettent l'état de la technique et les conditions d'exploitation et pour autant que cela soit économiquement supportable (JTAPI/1017/2022 du 29 septembre 2022 consid. 17)

15.         Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu’un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 6a et les références citées). Néanmoins, lorsque la consultation d’une instance de préavis est imposée par la loi, son préavis a un poids certain dans l’appréciation qu’est amenée à effectuer l’autorité de recours et il convient de ne pas le minimiser (ATA/1633/2019 du 5 novembre 2019 consid. 6b).

16.         Lorsque la consultation de la CMNS est imposée par la loi, le préavis de cette commission a un poids certain dans l'appréciation qu'est amenée à effectuer l'autorité de recours (ATA/126/2013 précité ; ATA/417/2009 précité). En outre, la CMNS se compose pour une large part de spécialistes, dont notamment des membres d'associations d'importance cantonale, poursuivant par pur idéal des buts de protection du patrimoine (art. 46 al. 2 LPMNS). A ce titre, son préavis est important (ATA/126/2013 précité ; ATA/417/2009 précité).

Elle se prononce en principe une seule fois sur chaque demande d’autorisation, les éventuels préavis complémentaires étant donnés par l’office du patrimoine et des sites, auquel est rattaché le SMS (cf. art. 6 al. 1 let. e ch. 3 ROAC), par délégation de la commission (art. 47 al. 1 LPMNS).

17.         Selon une jurisprudence bien établie, les autorités de recours observent une certaine retenue pour éviter de substituer leur propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Elles se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/532/2021 du 18 mai 2021 consid. 4 et la référence citée).

18.         En l'espèce, le projet litigieux est prévu sur un bâtiment sis en zone 2 appartenant à un ensemble protégé du XIXe siècle ou du début du XXe siècle, et porte sur la réalisation d'une nouvelle installation de téléphonie mobile, d'une hauteur de 3 m, avec systèmes techniques, support d'antennes et nouvelles antennes sur la toiture dudit bâtiment.

Dans son préavis du 6 décembre 2021, ayant relevé que le bâtiment sur lequel l'installation litigieuse était projetée appartenait à un ensemble protégé du XIXe siècle ou du début du XXe siècle, la CMNS s'est prononcée défavorablement au projet au motif qu'il compromettrait l'unité urbanistique de l'ensemble protégé et nuirait à son caractère architectural qu'il convenait de protéger.

Quand bien même l'installation litigieuse respecte les VLInst, celle-ci consiste, vu les plans versés au dossier, dans l'adjonction d'une structure de 3 m de haut sur la superstructure existante au niveau de la toiture du bâtiment existant, lequel est compris dans un ensemble protégé du XIXe et du début du XXe siècle, et dont la structure architecturale et urbanistique doit être conservé. Dès lors, il appert que l'impact du projet querellé sur le bâtiment protégé ne sera ni minime ni imperceptible depuis l'espace public, ce qu'admet par ailleurs la recourante concernant la prise de vue au niveau du bâtiment sis H______, de sorte que les objectifs de protection instaurés les dispositions sur la protection des ensembles protégés du XIXe siècle et du début du XXe siècle ne seraient pas assurés, ce d'autant que les allégations de la recourante quant à la nécessité d'augmenter la couverture réseau et de l'impossibilité de trouver un emplacement alternatif n'emportent pas à conviction. À cet égard, le caractère réversible de l'installation n'est pas propre à diminuer son impact sur l'aspect du bâtiment.

Vu les développements qui précèdent, la question de l'applicabilité de l'art. 92 LCI peut souffrir de rester indécise.

Dans ces circonstances, en refusant de délivrer l'autorisation de construire litigieuse sur la base des préavis défavorables de la CMNS et de la commune, il n'apparait pas que le département ait fait un usage abusif ou excessif de son pouvoir d'appréciation.

19.         Entièrement mal fondé, le recours est rejeté.

20.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 900.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 25 août 2022 par A______ SA contre la décision du département du territoire du 6 juillet 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Damien BLANC et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’à l’office fédéral de l’environnement.

Genève, le

 

La greffière