Aller au contenu principal

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/3282/2020

JTAPI/318/2021 du 26.03.2021 ( DOMPU ) , REJETE

Descripteurs : PUBLICITÉ(COMMERCE);ENSEIGNE;AFFICHE;SIGNAL LUMINEUX
Normes : LPR.3; LPR.7; LPR.8; RPR.1.al1.letb
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3282/2020 DOMPU

JTAPI/318/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 26 mars 2021

 

dans la cause

 

A______ SA, représentée par Me Philippe GIROD, avocat, avec élection de domicile

 

contre

VILLE DE GENÈVE

 


EN FAIT

1.             A______ SA est une société anonyme inscrite au registre du commerce de Genève dont le siège est à Genève, et a pour but l'installation, la reprise, l'exploitation et la gérance de tous cafés, glaciers, tea-rooms, brasseries, bars, restaurants et commerces similaires.

2.             Monsieur B______ est l'administrateur unique de cette société, il en a la signature individuelle.

3.             Cette société exploite l'établissement « C______ » à Genève.

4.             En 2002, l'établissement « C______ » a été inscrit à l'inventaire des immeubles dignes d'être protégés.

5.             Cet établissement, soit pour lui Monsieur D______, était titulaire depuis le 28 juin 2002 d'une autorisation pour divers procédés de réclame (ci-après : PDR).

Cette autorisation comprenait en substance :

-          Place ______ : deux procédés sous une marquise ou un balcon/enseigne/lumineux « C______ », une tente/enseigne « C______ Café », une tente/enseigne « Restaurant », une tente/enseigne « Brasserie », ainsi que deux tentes/publicité pour compte propre E______ ;

-          Rue ______ : deux tentes/enseigne « C______ Café », une tente/publicité pour compte propre E______ ;

-          Boulevard ______ : deux tentes/enseigne « C______ Café », une tente/publicité pour compte propre E______.

6.             Le 12 novembre 2018, un gestionnaire du service de l'espace public de la ville de Genève (ci-après : la ville) a constaté la présence de procédés de réclame (deux appliqués lumineux contre la marquise « C______ », une inscription sur le lambrequin « Brasserie Restaurant » et des inscriptions en lettres ajourées sur vitrines et portes vitrées) et d'empiètements (un lambrequin, une vitrine porte-menu, huit lanternes et neufs spots) non autorisés. Des photographies étaient jointes au constat.

7.             Par courrier du 16 novembre 2018, la ville a enjoint M. B______ de régulariser la situation en lui retournant les formulaires idoines dûment remplis au plus tard le 31 décembre 2018. Elle a également demandé des documents complémentaires.

8.             Le 31 octobre 2019, M. B______ a déposé deux formulaires de demande d'installation de procédés de réclame perceptibles du domaine public. Il a coché la case « appliqué (une face) » dans le premier formulaire et a coché la case « pose de tentes » en mentionnant à côté « lambrequin » dans le second formulaire. Il a indiqué sur les deux formulaires s'agissant de l'accord du propriétaire ou régisseur de l'immeuble « voir lettres régies ».

9.             Le 11 décembre 2019, la ville a demandé un préavis à l'office du patrimoine et des sites (ci-après : OPS) en particulier au service des monuments et sites (ci-après : SMS) s'agissant des procédés de réclames et empiètements demandés par M. B______ afin de régulariser sa situation suite au constat de la ville.

10.         Le 20 janvier 2020, le SMS a rendu un préavis.

Il n'a fait aucune observation s'agissant des appliqués lumineux « C______ », des procédés de réclames sur tente et des toiles de tente mobile.

S'agissant des adhésifs sur vitres, le SMS a indiqué « Afin d'éviter la profusion de réclame, 1 inscription « Brasserie C______ » par façade. Que les inscriptions « Open 7/7 ... » et « Ouvert 7/7 ... » soient de plus petite taille et installés uniquement sur les portées vitrées. Harmoniser la police des inscriptions ». Quant aux éclairages, il a demandé à la ville de préciser les emplacements des neufs spots et des huit lanternes.

11.         Suite à plusieurs échanges de courriels, afin de déterminer l'emplacement exact des éclairages, le SMS a rendu son préavis y relatif le 14 septembre 2020. Il était favorable au maintien des nombreux éclairages à la condition que le spot soit supprimé ou qu'il soit harmonisé avec les autres lampes.

12.         Par décision du 16 septembre 2020, compte tenu du préavis du SMS, la ville a refusé le maintien des procédés de réclame incriminés et du spot visé, et a ordonné leur dépose, impartissant un délai au 16 octobre 2020 à M. B______ pour s'exécuter.

La décision précisait que les éléments suivants pouvaient demeurer :

« Procédés de réclame :

-          L'inscription « Brasserie Restaurant » sur bandeau de tente ;

-          Une inscription « Open 7/7 » ou « Ouvert 7/7 » de plus petite taille et uniquement sur les portes vitrées à condition que la police d'écriture soit harmonisée ;

-          Une inscription « Brasserie C______ » en adhésif sur vitrine par façade ;

-          Les éléments lumineux « C______ » (Sous condition). Voir page 3.

Empiètements :

-          Lambrequin ;

-          Vitrine porte-menu ;

-          9 lanternes suspendues et 8 lanternes murales en appliques à condition que la lanterne suspendue manquante remplacée par un sport côté rue Necker soit remise en place afin d'harmoniser l'ensemble.

Tous les autres procédés de réclames et empiètements doivent être retirés ».

Concernant les deux appliqués lumineux « C______ », ils avaient été autorisés en 2002 comme des « PDR sous marquise » alors qu'il s'agissait en réalité de PDR contre marquise. Ces deux appliqués lumineux n'étaient plus règlementaires car ils dépassaient largement les dimensions de 0,5 m2 ainsi que l'élément de construction. Pour ces raisons, les deux procédés étaient acceptés « sous la condition qu'ils soient déposés lors du prochain changement de locataire ou de modification du procédé de réclame lui-même ».

13.         Par acte du 16 octobre 2020, A______ SA (ci-après : la recourante), sous la plume de son conseil, a interjeté recours contre la décision de la ville du 16 septembre 2020 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) concluant principalement à son annulation et au maintien en l'état des procédés de réclame, spots et empiètements dans l'établissement « C______ », sous suite de frais. Subsidiairement, elle a conclu à ce que la cause soit retournée à l'autorité intimée pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Elle a joint un chargé de pièces.

L'établissement « C______ » existait depuis 1952, et était une institution à Genève, facilement reconnaissable à sa devanture et sa terrasse. La particularité de l'établissement était l'étendue de ses horaires d'ouverture, 7 jours sur 7, à partir de 8h, avec un service continu de 11h30 à 23h30, heure de fermeture. Peu d'établissements à Genève proposaient un tel accueil.

Le lambrequin rouge avec l'inscription de l'enseigne existait probablement depuis la création du restaurant en 1952. Lorsque la famille de M. B______ avait acheté l'établissement en 1958, le lambrequin avec les inscriptions était déjà en place. Les lumières étaient plus récentes et dataient probablement des années 90.

Elle considérait qu'aucun excès de réclame ne pouvait lui être reproché, puisque les indications figurant sur la façade, s'agissant des horaires étendus, correspondaient aux particularités de son établissement.

De plus, la période sanitaire actuelle étant très difficile pour la restauration ; elle faisait tout son possible pour garder son personnel, sans recourir à une demande de réductions des horaires de travail (RHT), et offrir un bon service à sa clientèle. Par ailleurs, son chiffre d'affaires avait drastiquement baissé les derniers mois alors que les charges étaient restées identiques.

Enfin, elle estimait que l'approche des autorités qui exigeait des travaux couteux était difficilement compréhensible, voire excessive.

14.         Le 1er décembre 2020, la ville a constaté, photographies à l'appui, que les procédés de réclame - considérés comme non autorisés sur les vitrines de l'établissement « C______ » - n'avaient pas été retirés.

15.         Dans sa réponse au recours du 21 décembre 2020, la ville a conclu principalement au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée, sous suite de frais. Subsidiairement, elle a conclu à la possibilité de prouver par toutes voies de droit utiles la réalité des faits allégués. Elle a produit un chargé de pièces.

La décision litigieuse reprenait et faisait siens les préavis du SMS. Elle estimait que les préavis revêtaient un poids suffisamment important pour être pris en compte dans la décision finale, notamment lorsque les préavis étaient requis par la loi, ce qui était le cas en l'espèce. Elle était en règle générale très circonspecte avant de s'écarter des préavis du SMS, notamment « en raison du fait qu'il s'agit par essence d'une appréciation esthétique émanant de spécialistes (architectes et urbanistes notamment), censés plus aptes à appréhender la situation à l'aune de leurs critères propres ».

16.         Par réplique du 15 janvier 2021, la recourante a persisté dans ses conclusions.

Les deux enseignes lumineuses et l'inscription « Brasserie Restaurant » avait été autorisées en 2002 alors qu'elles étaient qualifiées de non-autorisés en 2018 par la ville. Ces procédés avaient été jugés comme non réglementaires alors que le préavis du SMS ne mentionnait aucune observation concernant ces éléments. Dès lors, elle ne comprenait pas pour quelle raison l'autorité intimée demandait la dépose de ses deux enseignes lumineuses lors du prochain changement de locataire s'ils étaient effectivement non réglementaires.

Le préavis du 20 janvier 2020 demandait, pour les adhésifs sur les vitres, une seule inscription par façade, des inscriptions de plus petites tailles et uniquement sur la porte vitrée ainsi qu'une harmonisation de la police des inscriptions « afin d'éviter la profusion de réclame », en se référant à l'art. 2 du règlement d'application de la loi sur les procédés de réclame du 11 octobre 2000 - RPR - F 3 20.01) qui définit les « plaques professionnelles de petites dimensions ». Or, ni cet article, ni le but de la LPR (art. 1) ne se référaient à une profusion de réclame.

La particularité de l'établissement était ses horaires étendus : peu d'établissements offraient une telle possibilité d'accueil de la clientèle, ce qui constituait un motif objectivement admissible de surligner cette particularité par des adhésifs sur vitres et portes vitrées.

Enfin, le préavis du SMS du 14 septembre 2020 était favorable au maintien des lanternes à condition de supprimer un spot ou de l'harmoniser avec les autres lampes. La décision litigieuse allait plus loin que ce préavis, notamment sur la question des appliqués lumineux, alors que le préavis du SMS ne liait pas la ville, En effet, selon l'art. 7 LPR, le SMS devait être consulté préalablement mais l'autorité pouvait se détacher de son préavis. La ville aurait dû considérer cette possibilité afin de tenir compte de l'intérêt de l'établissement à mettre en avant sa particularité commerciale.

17.         Par duplique du 8 février 2021, la ville a persisté dans les conclusions de sa réponse.

L'autorisation du 28 juin 2002 avait été délivrée à M. D______. Partant, il appartenait à ce dernier ou à la recourante de l'informer des modifications apportées aux empiètements ou autre procédé de réclame du commerce, alors qu'aucune demande n'avait été effectuée depuis cette autorisation.

De plus, pour une raison qu'elle ignorait, la facturation de la redevance avait été interrompue depuis 2009, si bien que la recourante ne payait plus aucune taxe ou redevance à la ville depuis plus de 10 ans.

S'agissant des enseignes lumineuses « C______ », elle rappelait le fait qu'il s'agissait d'un « PDR contre marquise » et non « sous marquise » comme indiqué en 2002. Selon la législation en vigueur, ces enseignes ne devaient pas dépasser le bandeau de la marquise, alors que l'élément tout entier dépassait le bandeau de celle-ci. Toutefois, comme ces éléments avait été autorisés, elle n'exigeait pas leur dépose. Ainsi, elle ne comprenait pas la raison pour laquelle la recourante se plaignait du fait que la dépose serait demandée lors du prochain changement de locataire.

Pour le surplus, elle renvoyait à son mémoire réponse, s'agissant notamment de la teneur des deux préavis de SMS.

18.         Par courrier du 22 février 2021, la recourante a transmis des observations suite à la duplique de l'intimée, afin d'exercer son droit d'être entendu, maintenant ses conclusions.

Le fait qu'il y ait eu deux bailleurs pour l'établissement et que l'autorisation de 2002 avait été adressée à l'ancien exploitant M. D______ n'était pas pertinent en l'espèce, tout comme le fait qu'elle ne payait pas de redevance depuis 2009.

Elle estimait que les procédés de réclame de l'établissement n'avaient pas changés depuis l'autorisation y relative du 28 juin 2002. Le constat, selon lequel ces éléments n'étaient pas conformes à l'autorisation, apparaissait seize années après la délivrance de ladite autorisation. Elle faisait valoir dès lors le principe des droits acquis.

Enfin, elle ne pouvait accepter le fait que la situation actuelle n'était pas remise en cause concernant les deux enseignes lumineuses, mais qu'elle le serait lors d'un changement de locataire car ces enseignes constituaient sa visibilité et sa marque de fabrique.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l'espèce, contre des décisions de la Ville de Genève prises en application de la loi sur les procédés de réclame du 9 juin 2000 (LPR - F 3 20) (art. 115, 116 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 38 LPR).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l'art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a) ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b).

En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce. Il n'en résulte toutefois pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, puisqu'elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/366/2013 du 11 juin 2013 consid. 3a et la référence citée).

4.             Saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des partis, mais n'est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2).

5.             La recourante fait valoir comme grief que la décision de la ville est excessive. Elle invoque le fait que les procédés de réclame soulignent la particularité de l'établissement et sont par conséquent justifiés. Elle allègue également le fait que la ville n'était pas obligée de suivre le préavis du SMS.

6.             L'utilisation de procédés de réclame est spécifiquement régie par la LPR, afin d'assurer la sécurité routière, la protection des sites et l'esthétique des lieux, ainsi que l'ordre public (art.1 LPR).

7.             Les procédés de réclame sont tous les moyens graphiques, plastiques, éclairés, lumineux, sonores, olfactifs et autres, perceptibles depuis le domaine public, dans un but direct ou indirect de publicité, de promotion d'activités culturelles ou sportives, de prévention ou d'éducation (art. 2 LPR), soit notamment les enseignes (art. 1 al. 1 let. b RPR).

8.             Les enseignes sont des procédés de réclame pour compte propre, destinés à signaler le commerce ou l'entreprise et qui contiennent son nom ou sa raison sociale, une ou plusieurs indications de sa branche d'activité, ainsi que, le cas échéant, son emblème (art. 18 al. 2 LPR). Les enseignes ne peuvent être posées que sur une ou des façades ou aux abords immédiats du bâtiment abritant le commerce ou l'entreprise (art. 20 al. 2 LPR).

9.             Sont soumis aux dispositions de la LPR et à ses dispositions d'application tous les procédés de réclame, perceptibles depuis le domaine public, qu'ils soient situés sur le domaine public ou privé (art. 3 al. 1 LPR).

10.         L'apposition, l'installation ou la modification d'un procédé de réclame est soumise à l'octroi préalable d'une autorisation, délivrée par la commune du lieu de situation du procédé de réclame (art. 4 et 5 LPR). L'autorité compétente peut assortir l'autorisation de conditions et de charges (art. 11 LPR).

11.         Selon l'art. 7 al. 1 let. b LPR, l'office du patrimoine et des sites doit, dans les limites de ses compétences, être consultée préalablement par l'autorité de décision pour les procédés de réclame apposés sur ou à proximité des immeubles situés dans les zones protégées et à protéger mentionnées aux art. 28 et 29 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30).

12.         Au terme de l'art. 8 LPR, sont interdits tous les procédés de réclame qui, par leur emplacement, leur dimension, leur forme, leur couleur, leur éclairage, leur luminosité ou leur diffusion, nuisent à l'esthétique ou à la tranquillité d'un site, d'un point de vue, d'un bâtiment, d'un quartier, d'une voie publique, d'une localité, d'un lac, d'un élément de végétation ou d'un cours d'eau, ou qui peuvent porter atteinte à la sécurité routière ou à l'ordre public (al. 1). Les procédés de réclame sur les façades borgnes des bâtiments sont en principe interdits (al. 2).

L'autorité compétente tient compte dans sa décision des différents intérêts en présence (art. 8 al. 3 LPR).

13.         Le 26 novembre 2018, la commission des monuments et des sites en collaboration avec l'OPS a édicté un guide intitulé « Procédés de réclame - Fiches de bonnes pratiques sur les bâtiments protégés ou situés dans des zones protégées » (ci-après : le guide).

14.         Si les directives, circulaires ou instructions émises par l'administration ne peuvent contenir des règles de droit, elles sont susceptibles cependant d'apporter des précisions quant à certaines notions contenues dans la loi ou quant à la mise en pratique de celle-ci. Sans être lié par elles, le juge peut néanmoins les prendre en considération en vue d'assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré. Il ne doit cependant en tenir compte que si elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATF 121 II 473 consid. 2b). Ces directives ne dispensent pas de se prononcer à la lumière des circonstances du cas d'espèce. Par ailleurs, elles ne peuvent sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu'elles sont censées concrétiser. En d'autres termes, à défaut de lacune, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 138 II 536 consid. 5.4.3 ; 133 II 305 consid. 8.1). Ces principes sont applicables mutatis mutandis en droit cantonal (ATA/51/2006 du 31 janvier 2006 consid. 9b).

À teneur du guide, l'appréciation portée par l'OPS sur les procédés de réclame peut varier selon l'emplacement des commerces et des entreprises dans la ville, voire selon leur emplacement à l'intérieur d'une zone protégée, et selon le style d'architecture sur lequel le procédé est appliqué.

Ce guide retient en page 5 que « Lorsque les bâtiments concernés composent un ensemble, des exigences spécifiques de régularité et d'harmonie sont nécessaires pour éviter, précisément, de ruiner l'effet d'ensemble. D'une manière générale, il faut éviter la surcharge, la profusion et les répétitions, en limitant en principe la signalisation sur un bâtiment, pour un même commerce ou une même entreprise, à un seul procédé par façade. L'OPS s'efforce de conduire les requérants vers des solutions propres à ramener un certain ordre là où des désordres par trop flagrants sont apparus, tels, par exemple :

-          le cumul de types de signalisations

-          la disparition des lignes architecturales des façades (composition, modénature, etc.) sous des éléments trop invasifs (panneaux, toiles de tentes, enseignes trop volumineuses ou trop voyantes),

-          l'opacification partielle des vitrines par des éléments autocollants disposés sur les verres, des dispositifs d'obscurcissement et des panneaux pleins placés à l'intérieur des vitrines,

-          l'obstruction des impostes vitrées des vitrines,

-          l'accrochage mal venu d'une enseigne dans un élément du décor sculpté d'un montant de porte ou d'un pilastre,

-          l'association, pas des habillages publicitaires, des encadrements de vitrines en pierre ou en bois à la vitrine elle-même en serrurerie et verre ».

S'agissant des vitrines, le guide prévoit ce qui suit :

« Le vitrage doit conserver sa fonction architecturale de prise de jour. L'obstruction des impostes vitrées des vitrines par des panneaux de bois, de métal ou des dispositifs autocollants totalement opacifiants est proscrite. Dans le cas où une imposte aurait été obturée lors d'une intervention précédente, on s'efforcera de la dégager, dans la mesure où la serrurerie et le cadre d'origine sont en place et peuvent être réhabilités. Les procédés appliqués sur les vitrines, lettres découpées, films translucides, collages, à l'extérieur comme à l'intérieur, sont admis pour autant que leur nombre et la surface qu'ils occupent ne débordent pas sur le cadre de la vitrine, n'obturent pas la fonction de la vitrine et permettent une lisibilité calme. Pour maintenir la qualité esthétique des vitrines, tout autant que leur fonction d'animation, leur opacification partielle ou totale n'est pas admise ».

S'agissant de l'aspect financier, le guide prévoit à la page 5 que « La question financière peut s'avérer délicate. La rectification d'un procédé de réclame mal posé ne peut pas toujours être imposée à cause des coûts qu'une transformation immédiate peut engendrer. On attendra donc le moment opportun : une rénovation, une nouvelle reprise de l'enseigne ou un changement d'affectation ».

15.         Selon la jurisprudence constante, le tribunal de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l'autorité inférieure suive l'avis de celles-ci. Les autorités de recours se limitent à examiner si l'autorité ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/352/2012 du 5 juin 2012 ; ATA/113/2012 du 28 février 2012 consid. 8 ; ATA/360/2010 du 1er juin 2010 et les références citées.

16.         En l'espèce, la ville demande le retrait des adhésifs « Ouvert 7/7 ... » et « Open 7/7 ... » sur les vitres de l'établissement, mais autorise le maintien de ces inscriptions sur les portes vitrées à condition que les écritures soient de plus petite taille et la police harmonisée, ainsi qu'une inscription « Brasserie C______ » par façade. Elle base sa décision sur le préavis du SMS, lequel trouve son fondement dans les recommandations, qui ont été édictées en vue de l'application de la législation régissant les procédés de réclame, notamment celle tendant à éviter la surcharge, la profusion et les répétitions, en limitant la signalisation à un seul procédé par façade.

S'agissant du retrait du spot et de son remplacement par une lanterne, il apparaît comme une mesure permettant d'harmoniser l'éclairage de l'établissement.

Le tribunal relève que les modifications exigées et les coûts financiers engendrés n'apparaissent pas excessifs, contrairement à ce qu'invoque la recourante, puisqu'il s'agit à ce jour de simplement supprimer des adhésifs et remplacer un spot. Concernant les autres procédés de réclames, qui n'apparaissent plus conformes à la législation, leur suppression n'est à ce jour pas requise.

Au vu de ce qui précède, il apparaît que l'autorité intimée n'a fait que se conformer aux recommandations des instances spécialisées en la matière pour rendre sa décision, ce qui n'est pas critiquable, d'autant plus que la recourante ne peut se prévaloir d'aucun élément particulier relatif à sa situation qui, éventuellement, permettrait de remettre en question la stricte application de ces recommandations.

Rien ne permet enfin de retenir que l'autorité intimée aurait fait un usage excessif ou abusif de son pouvoir d'appréciation en fondant sa décision sur la base du préavis du SMS. La décision de la ville se fonde sur le guide de l'OPS, et sur ce préavis ; elle ne repose par conséquent sur aucun motif arbitraire, au sens où la jurisprudence l'entend, étant rappelé qu'il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution que celle qui a été retenue serait concevable, voire préférable.

Dans ces conditions, le tribunal, qui doit faire preuve de retenue et respecter la latitude de jugement conférée à la ville en matière de procédés de réclame, ne saurait corriger le résultat de sa décision en fonction d'une autre conception. Il ne peut substituer sa propre appréciation, car il statuerait ainsi en opportunité, ce qui lui est interdit par la loi (art. 61 al. 2 LPA).

17.         Le recours, entièrement mal fondé, sera rejeté.

18.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d'un émolument s'élevant à CHF 900.- ; il est couvert par l'avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 16 octobre 2020 par A______ SA contre la décision de la Ville de Genève du 16 septembre 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante, un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Patrick BLASER et Michel GROSFILLIER, juges assesseurs.


Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière