Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des prud'hommes

1 resultats
C/14570/2022

ACJC/127/2025 du 22.01.2025 sur JTPH/55/2024 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14570/2022 ACJC/127/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MERCREDI 22 JANVIER 2025

 

Entre

A______ SA, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 14 mars 2024 (JTPH/55/2024) et intimée sur appel joint, représentée par Me Yama SANGIN, avocat, Lexpro, rue Rodolphe-Toepffer 8, 1206 Genève,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé et appelant sur appel joint, représenté par Me Yann LAM, avocat, MBLD Associés, rue Joseph-Girard 20, case postale 1611, 1227 Carouge.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/55/20224 rendu le 14 mars 2024, notifié le lendemain à A______ SA, le Tribunal des prud'hommes (ci-après le Tribunal) a déclaré recevables la demande formée le 27 décembre 2022 par B______ contre A______ SA (ch. 1 du dispositif) ainsi que la demande reconventionnelle formée le 7 mars 2023 par A______ SA contre B______ (ch. 2), a condamné A______ SA à verser à B______ la somme brute de 19'004 fr. 65, avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 22 mars 2022 (ch. 3), a condamné A______ SA à verser à B______ la somme nette de 14'629 fr. 40, avec intérêts moratoires au taux de 5% l'an dès le 22 mars 2022 (ch. 4), a invité la partie qui en a la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 5) et a débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 6).

Le Tribunal a arrêté les frais de la procédure à 250 fr. (ch. 7), les a mis à la charge de A______ SA (ch. 8), les a compensés partiellement avec l’avance de frais de 200 fr. effectuée par B______, restant acquise à l’Etat de Genève (ch. 9), a condamné A______ SA à verser la somme de 50 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire de l’Etat de Genève (ch. 10), a condamné A______ SA à verser à B______ la somme de 200 fr. (ch. 11), a dit qu’il n’était pas alloué de dépens (ch. 12) et a débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 13).

B.            a. Par acte déposé le 25 avril 2024 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ SA a formé appel de ce jugement, dont elle a sollicité l'annulation des chiffres 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10 et 11 du dispositif.

Cela fait, elle a conclu à ce qu'il soit dit que le licenciement immédiat de B______ était justifié, qu'aucun salaire n'était dû à B______ pour la période du 22 mars au 31 mai 2022 et qu'aucune indemnité pour licenciement injustifié n'était due à B______, à ce que l'indemnité pour vacances non prises en nature allouée à B______ soit réduite en tenant compte uniquement d'un solde de 13 jours travaillés, à ce que B______ soit condamné à lui verser la somme totale de 25'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 21 mars 2022, et à ce que B______ soit débouté de toutes autres ou contraires conclusions.

A titre subsidiaire, A______ SA a conclu à l'annulation du chiffre 4 du dispositif, à la réduction de l'indemnité pour résiliation immédiate injustifiée allouée à B______ en tenant compte de manière appropriée des circonstances du cas d'espèce, à ce que B______ soit condamné à lui verser la somme totale de 25'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 21 mars 2022 et à ce qu'il soit débouté de toutes autres ou contraires conclusions.

Plus subsidiairement encore, A______ SA a conclu à ce que B______ soit condamné à lui verser la somme totale de 25'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 21 mars 2022 et débouté de toutes autres ou contraires conclusions.

b. Dans le délai imparti, soit le 28 mai 2024, B______ a répondu à l'appel et formé un appel joint.

Sur appel principal, il a conclu, préalablement, à l'irrecevabilité des allégués 1 à 17 du mémoire d'appel interjeté par A______ SA, principalement à son rejet, avec suite de frais judiciaires.

Sur appel joint, il a sollicité l'annulation des chiffres 3, 4 et 6 du dispositif du jugement attaqué et, cela fait, conclu à la condamnation de A______ SA à lui payer la somme brute de 34'343 fr. 11 avec intérêts à 5% dès le 22 mars 2022 ainsi que la somme nette de 34'402 fr. 84 avec intérêts à 5% dès le 22 mars 2022, avec suite de frais judiciaires.

c. Par réplique et réponse à l'appel joint du 8 juillet 2024, A______ SA a conclu au déboutement de B______ de toutes ses conclusions en appel joint, sous suite de frais judiciaires et dépens, et a persisté dans ses conclusions pour le surplus.

d. Par réplique et duplique des 23 septembre 2024 et 25 octobre 2024, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

e. Elles ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger par courriers du 19 novembre 2024.

C.           Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. A______ SA (G______ SA jusqu’en mai 2022) est une société de droit suisse dont le but est toutes activités dans le domaine du financement hypothécaire et de la planification financière, notamment dans le cadre de la prévoyance ainsi que toutes activités liées. Son siège est à Genève.

C______ (fondateur de A______ SA et conseiller en hypothèques en mars 2022) a été administrateur président de mai 2018 à juillet 2021 et a bénéficié d’une signature individuelle jusqu’en novembre 2021. Depuis lors, il bénéficie d’une signature collective à deux, tout comme D______ (directeur général), également dès novembre 2021, et E______, dès avril 2022. F______ (conseiller financier et supérieur hiérarchique de B______) a bénéficié d’une signature collective à deux de novembre 2021 à mars 2023.

b. B______, né le ______ 1996, a été engagé par A______ SA, en qualité de conseiller hypothécaire, à 100%, à partir du 1er février 2021, par contrat de travail à durée indéterminée signé le 1er octobre 2021.

Le salaire annuel convenu était de 84'000 fr. bruts, versé en douze mensualités. La part LPP employé et la part LPP employeur s’élevaient chacune à 314.70 fr.

L’employé avait droit à vingt-cinq jours de vacances par année.

Le contrat de travail contenait une clause de confidentialité, qui prévoyait que, tant pendant son emploi qu’après la fin de celui-ci, l’employé devait garder strictement confidentiels les secrets d’affaires et autres informations sensibles auxquels il avait accès et devait s’abstenir de les révéler à un tiers ou de les utiliser d’une quelconque façon dans son propre intérêt ou dans l’intérêt d’une personne autre que la société, sous peine de poursuites pénales (art. 17.1 et 17.2). Le contrat précisait qu’en cas de violation de cette clause, l’employé paierait à la société une pénalité d’un montant de 100'000 fr. pour chaque cas de violation (art. 17.3).

Le contrat contenait également, aux articles 18.1 à 18.3, une clause de non-concurrence et de non-débauchage.

Le contrat prévoyait enfin que la société pouvait octroyer à l’employé un bonus discrétionnaire (art. 10.1) dont son octroi et, le cas échéant, son montant, seraient décidés sur la base de critères déterminés et évalués par la société (art. 10.2). L’article 10.4 du contrat précisait que le bonus ne serait payable qu’à condition qu’aucun avis de résiliation n’ait été donné par l’une des parties à la date du paiement.

L’annexe 1 au contrat de travail précisait les modalités d’octroi de l’éventuelle prime et de l’éventuel salaire variable. Son contenu est le suivant :

« 1. Objectifs

·      L’Employeur fixe à l’Employé un objectif de chiffre d’affaires annuel minimum à atteindre pour un horaire à temps complet. Ce chiffre d'affaires doit être réalisé sur l’année civile et sera calculé pro rata temporis cas échéant.

Année 1 : CHF 250'000.- (hors temps d'essai)

Année 2 : CHF 300'000.-

Année 3 : CHF 350'000.-

·      Les objectifs de chiffres d’affaires seront ensuite fixés chaque début d’année civile avec le manager d’agence.

2.        Salaire variable

·      L’Employé peut, à certaines conditions, percevoir un salaire variable en sus de son salaire fixe. Le chiffre d'affaires déterminant pour calculer la partie variable du salaire de L’Employé comprend les éléments suivants :

Ø 100% des commissions des prêteurs nettes (soit notamment hors taxes et éventuelle commission d’apporteur d’affaire reversée à un tiers) encaissées par G______ SA si le mandat et les acheteurs ont été traités par l’Employé.

Ø 100% des commissions des polices d’assurance nettes (soit notamment hors taxes et éventuelle commission d’apporteur d’affaire reversée à un tiers) encaissées par G______ SA si le mandat et les acheteurs ont été traités par l'Employé.

Ø 100% des autres revenus nets facturés aux clients (soit notamment hors taxes et éventuelle commission d’apporteur d’affaire reversée à un tiers) encaissés par G______ SA si le mandat et les acheteurs ont été traités par l’Employé.

Pour pouvoir bénéficier d’une prime ainsi que d’un éventuel salaire variable, l’Employé doit atteindre minimum CHF 250'000.- de chiffre d’affaires durant l’année concernée.

Lorsque l’Employé réalise un chiffre d’affaires total de CHF 250'000.- ou plus, à la fin de l’année civile, l’Employeur lui verse une prime de CHF 10'000.- bruts avec son salaire du mois suivant.

Par ailleurs, lorsque que l’Employé réalise un chiffre d’affaires dépassant le seuil des CHF 250'000.- durant l’année, il pourra prétendre à un salaire variable correspondant à un pourcentage afférent au chiffre d’affaires dépassant ce seuil. Chaque seuil de chiffre d’affaires réalisé est cumulé avec le seuil précédent conformément au tableau ci-dessous :

 

No

Seuil de chiffre d’affaires annuel réalisé

Pourcentage

Total

1

De 250000

à 300000

50'000 (300'000 - 250'000) x 15%

CHF 7'500

2

De 300000

à 350000

50'000 (350'000 - 300'000) x 20%

CHF 10'000

3

De 350000

à 400000

50'000 (400'000 - 350'000) x 25%

CHF 12'500

 

 

 

 

 

(…)

A noter que lorsque l’Employé n’atteint pas le seuil minimum de chiffre d’affaires de CHF 250'000.- à la fin de l’année civile, ce dernier ne pourra prétendre à un quelconque paiement de salaire variable de la part de l’Employeur. En outre, l’Employé qui quitte son travail en cours d’emploi, ne saurait prétendre au paiement d’un quelconque salaire variable pro rata temporis (…) ».

c. Le 1er juillet 2021, G______ SA et B______ ont conclu un nouveau contrat de travail, identique au premier, à l’exception de la peine conventionnelle qui était réduite à 25'000 fr. pour chaque cas de violation (art. 17.3).

d. Pour l’année 2021, A______ SA a versé à B______, à bien plaire, une prime de 6'666 fr. 67, calculée pro rata temporis sur huit mois.

e. A une date indéterminée, H______/N______ [entreprise individuelle active dans le domaine de l'immobilier] a publié sur www.J______.ch une annonce pour un appartement sis à K______ [GE], pour un prix de vente de 1'880'000 fr.

f. Le vendredi 4 mars 2022, B______ a reçu de son père les deux messages WhatsApp suivants, auxquels il a répondu : « Ok » :

« 6 pièces Appartement in [code postal] K______ trouvé sur J______.ch (…) » ;

« Salut (…) tu pourrais stp demander le dossier avec les plans les charges etc? Merci ».

g. Le mercredi 9 mars 2022, L______ et M______, parents de B______, ont signé un contrat de mandat avec A______ SA, par lequel ceux-là mandataient celle-ci pour notamment la réalisation d’une analyse des possibilités de financement en relation avec un bien immobilier dont ils souhaitaient faire l’acquisition, en vue d’obtenir un financement hypothécaire.

h. Le mercredi 9 mars 2022 en fin de matinée, N______, courtier immobilier au sein de H______/N______, a adressé par email à O______ et P______ un règlement RAU et un cahier PPE concernant l'appartement de K______, précisant qu’en cas de questions ils pouvaient appeler le notaire dont il leur transmettait les coordonnées.

Par email du même jour à 22h34, O______ et P______ ont indiqué à N______ qu’après leur entretien de ce jour avec un spécialiste en hypothèques, soit Q______ de chez A______ SA, ils souhaitaient lui confirmer leur intérêt pour le duplex et lui soumettaient la proposition suivante pour son client : 1'750'000 fr. ainsi que la jouissance de l’appartement tant que nécessaire pour le vendeur contre un loyer de 3'700 fr. jusqu’à dix-huit mois maximum.

Par email du jeudi 10 mars 2022 adressé à 14h34 à O______ et P______, N______ a fait suite à leur entretien téléphonique du matin même, les a remerciés pour leur offre qu’il avait transmise aux propriétaires et a ajouté qu’il attendait les confirmations écrites de leurs organismes financiers.

Par email du vendredi 11 mars 2022 à 12h18, Q______, faisant suite à leur entretien téléphonique de la veille, a adressé à N______ une attestation de financement du couple O______/P______.

i. Vendredi 11 mars 2022, en fin de matinée, B______ a fait visiter à ses parents, domiciliés à Singapour, l’appartement sis à K______ en compagnie de N______, par visioconférence.

Entendu par le Tribunal en qualité de témoin, N______ a indiqué qu'à la fin de la visite, L______ et B______ avaient fait une offre, qu’ils avaient confirmée par email le lendemain. Préalablement à la visite, il avait indiqué à B______, sur sa demande, qu’il avait déjà transmis deux offres de particuliers aux vendeurs mais qu’elles étaient trop basses. Il n’avait mentionné aucun montant. Le témoin a précisé que tous les acheteurs demandaient à leur courtier s’il y avait d’autres personnes intéressées par le bien immobilier et si des offres étaient en cours. Il a ajouté qu’à la fin de la visite, B______ lui avait remis sa carte de visite à l’en-tête de A______ SA, s’étant jusqu’alors présenté comme quelqu’un d’intéressé pour le compte de son père. Lui-même lui avait ainsi demandé s’il connaissait Q______, qui représentait un client intéressé par le même appartement et dont l’offre avait été refusée.

Egalement entendu par le Tribunal, L______ a indiqué qu’à la fin de la visite, N______ l’avait informé du fait que deux offres avaient déjà été formulées et qu’elles étaient inférieures au prix demandé de l’ordre d’une centaine de milliers de francs. Il avait alors proposé 1'800'000 fr. plus un an d’occupation gratuite ou 1'850'000 fr. avec la perception d’un loyer le temps que le vendeur libère l’appartement. Au vu de l’enthousiasme du courtier, il avait cru comprendre qu’il avait fait la meilleure offre.

N______ a encore indiqué qu’avant la visite du 11 mars 2022 de L______, il avait transmis deux offres de particuliers aux vendeurs. Ces derniers les avaient refusées verbalement car elles étaient trop basses, mais souhaitaient quand même quelques jours de réflexion. Le 11 mars 2022, lui-même n’avait pas encore transmis ce refus aux clients potentiels.

j. Vendredi 11 mars 2022 en début d’après-midi, une discussion entre B______ et Q______ a eu lieu dans les locaux de A______ SA au sujet de l’appartement sis à K______.

Entendu comme témoin par le Tribunal, Q______ a indiqué qu’en début d’après-midi voire fin de matinée, B______ était venu dans son bureau, lui avait dit qu’il savait qu’une de ses clientes était intéressée par un appartement et lui avait demandé le montant de l’offre. Au bout d’un moment, il avait satisfait sa curiosité.

B______ a indiqué qu’il n’avait appris le montant de l’offre de la cliente de Q______ que lors de sa discussion avec celui-ci dans l’après-midi. Ils avaient discuté des montants proposés par l’un et l’autre. Puisque l’offre de son père avait déjà été faite oralement à l’issue de la visite, il n’avait pas vu de conflit potentiel.

Q______ a ajouté que, plus tard, alors que B______ passait devant son bureau en direction de la cuisine, il l’avait entendu dire au téléphone : « C’est bon papa, à tel prix ça passe. ». Cela l’avait surpris car il pensait qu’il avait un client intéressé par l’appartement, pas son père, et il s’était alors dit qu’il avait utilisé l’information qu’il lui avait donnée pour battre sa cliente.

L______ a quant à lui expliqué que c’était par téléphone vers 16h que son fils lui avait fait part du fait qu’une autre offre avait été faite par une cliente de A______ SA ainsi que de son montant, ce que B______ a confirmé lors de son audition. Le témoin pensait que son fils le lui avait dit par enthousiasme puisqu’il semblait qu’il allait pouvoir remporter la vente. Il ne l’avait certainement pas fait par malveillance puisqu’il l’avait fait au vu et au su de ses collègues.

Q______ a indiqué qu’après avoir entendu B______ parler au téléphone, il avait appelé sa cliente, qui lui avait dit que le courtier venait de l’informer du fait qu’un autre employé de A______ SA avait visité l’appartement. Il n’avait pas eu besoin de lui dire le nom de B______ car son mari avait également créé un profil sur la plateforme de A______ SA, qui avait été attribué à celui-là, et O______ avait fait le rapprochement. Il lui avait toutefois confirmé son nom. Elle se sentait trahie et évoquait le fait d’attaquer A______ SA, pensant que celle-ci avait utilisé ses données personnelles contre elle.

k. Le lendemain, soit samedi 12 mars 2022, par email de 8h24, B______, par le biais de son adresse de messagerie « B______@yahoo.fr », a confirmé à N______ l’intérêt de ses parents pour l’appartement ainsi que leur offre, à savoir 1'800'000 fr., 0 fr. de loyer les douze premiers mois puis 5'000 fr. par mois et signature directe entre avril et mai.

l. Dimanche 13 mars 2022, par email de 13h16, N______ a transmis à
B______ l’acceptation de l’offre de ses parents par les propriétaires, Mme et M. N______/R______.

m. Q______ a indiqué que, le lundi 14 mars 2022, B______ lui avait écrit via leur messagerie interne que leur offre avait été acceptée. Lui-même lui avait demandé s’il lui en voulait pour quelque chose et B______ avait répondu : « non même pas ».

n. Mercredi 16 mars 2022, en fin de journée, il a été relaté à la direction de A______ SA que B______ avait potentiellement utilisé des informations confidentielles concernant une cliente de la société afin de permettre à son père d’acquérir un appartement.

o. Jeudi 17 mars 2022, B______ a été convoqué par la direction et a été entendu par F______ et E______.

Par email du même jour à 17h43, B______ a écrit à F______ que pour atténuer le « risque réputationnel » de A______ SA, il proposerait le lendemain à ses parents de se retirer de la transaction. Une fois leur accord obtenu, il contacterait le courtier, lui exposerait la situation et lui demanderait de faire en sorte que l’offre de la cliente de Q______ soit acceptée par les vendeurs. Il a ajouté qu’il ferait son possible pour que l’offre de ses parents soit retirée et « que les négociations reprennent ou [sic !] elles en étaient avant que la famille L______/M______ s’intéresse au bien », précisant qu’il n’avait pas du tout voulu causer du tort à la cliente.

Le même jour en fin d’après-midi, une séance extraordinaire s’est tenue avec l’ensemble des membres de la direction de A______ SA.

D______ a expliqué que le comité exécutif avait réuni tous les directeurs par canton, dont F______ et E______, ainsi que C______ en sa qualité de fondateur de la société. Le but de cette cellule de crise était de demander à tous ces responsables leur opinion sur les faits et sur ce qu’il y avait à faire. Ceux-ci avaient été choqués par sa narration et avaient tous demandé le licenciement immédiat de B______, à l’exception de C______. Ce dernier l’avait rendu attentif à trois points, à savoir : différencier les « on dit » des éléments concrets, déterminer s’il s’agissait d’une erreur ou d’un fait intentionnel de B______ et examiner l’impact réputationnel pour la société.

F______ a déclaré que, lors de cette réunion, ils avaient expliqué les faits, à savoir qu’ils étaient pour la première fois confrontés à une divulgation d’informations confidentielles et qu’il en résultait un risque certain pour la réputation de la société. Le licenciement de B______ avait été évoqué mais il n’y avait en aucune façon eu de vote unanime à ce sujet. Il s’agissait plutôt d’une discussion ouverte sur le problème de divulgation de données. Aucune décision n’avait été prise à l’issue de cette réunion, hormis celle d’entendre la version de L______, ce qui avait été organisé dès le lendemain.

p. Par email du vendredi 18 mars 2022, à 8h49, B______ a écrit à F______, avec E______ et D______ en copie, qu’il s’excusait pour son manquement aux règles de base de confidentialité et aux valeurs de A______ SA. Il a ajouté que son intention n’était absolument pas de « voler » un dossier à Q______ et encore moins de blesser sa cliente. Il n’avait en outre, à aucun moment, voulu mettre en péril la réputation de A______ SA.

Le même jour à la même heure, B______ a adressé un email à Q______ dans lequel il a indiqué que, comme ce dernier le savait, la tournure que les événements avaient pris n’était pas conforme aux valeurs de A______ SA ni aux règles de base de confidentialité vis-à-vis de leurs clients. Il ne voulait en aucun cas lui porter préjudice, lui manquer de respect ou lui « voler » une affaire. Si tel avait été le cas, il lui présentait ses sincères excuses. Il a ajouté que, pour compenser le manque à gagner, il lui transmettrait le prochain dossier qu’il recevrait.

q. Le même jour, B______ et F______ se sont échangés les messages WhatsApp suivants entre 18h30 et 19h30 :

-F______ : « Retrait de l’offre nécessaire….. » ;

-B______ : « Et dans le cas ou pour une raison ils ne seraient pas d’accord ? Que se passerait il pour moi ? La cliente ? A______ ? Q______ ? As tu regarde avec Q______ si en effet il a bien donné mon nom et celui de mes parents à la cliente ? » ;

-F______ : « C’est important que cela se fasse pour notre réputation, la cliente et bien évidemment toi…. Ça pourrait changer donne » ;

-B______ : « Mais à quel niveau ? Je sais que mon père va demander »

-F______ : « Ben B______… tu sais que y avait 3 conditions pour ne pas être licencié …. Retrait de l’offre , message à la direction et au collègue…. » ;

-B______ : « Noté. Donc si ils refusent c’est au revoir. Et Q______, il t’a confirmé que c’est lui qui avait donné le nom des clients à sa cliente ? » ;

-F______ : « Q______ j’ai pas pu l’avoir, lundi je regarde aussi avec E______ (…). La version actuelle, c’est le courtier…. » ;

-B______ : « Tiens moi au jus. Parce que si il confirme (comme il m’a expliqué aujourd’hui) ça change la donne » ,

-F______ : « Bien évidemment. Non ça change pas par rapport à toi…. Mais ça peut aussi changer quelque chose pour lui…. » ;

-B______ : « Oui pour lui. On serait deux dans le même bateau ».

Leur échange s’est poursuivi le lendemain après-midi, samedi 19 mars 2022 :

-F______ à 14h33 : « Salut, Merci de régler la problématique du retrait de l’offre et contacter le courtier (samedi il bosse [sic !] tous) …. J’ai besoin de ta confirmation avant lundi matin 9:00, sinon je pourrais plus rien faire, et ça sera dans les mains de D______ et du board. » ;

-B______ à 14h34 : « Je vais faire au mieux » ;

-B______ à 15h43 : « Je viens de parler avec mon père. Avant de positionner et confirmer son choix il souhaite faire une visio avec toi, D______ (+ ceux qui veulent) pour expliquer les choses. Lundi matin première heure si ok pour vous » ;

-F______ à 16h06 : « Ciao, je communique dès que je vois D______ . pas de problème. Merci ».

r. Samedi 19 mars 2022, entre 15h05 et 15h47, un échange de messages WhatsApp a eu lieu entre B______ et C______. Celui-là a adressé à celui-ci une photographie du message de F______ de 14h33 puis a écrit :

-B______ : « En toute franchise j’ai pas envie de régler ça avec mes parents tant que je suis pas certains [sic !] à 100% que Q______ n’aura pas le même traitement que moi. J’ai cru comprendre que la cliente avait déposé une plainte… mes parents pour [sic !] faire de même en théorie et la situation ne ferait que d’empirer. J’ai évidemment envie de trouver une solution qui convienne à tous mais la j’ai l’impression d’être la « cible » » ;

-C______ : « En fait c est simple : tu as fait un délit d’initié. Le board a décidé de ne pas te licencié [sic !] si tu prends des mesures pour que ce qui se passe autour de cette histoire n’impacte pas la réputation de l’entreprise. Si la cliente ou tes parents déposent plaintes [sic !] et que ça entaches l’image de l’entreprise tu n’auras pas fais [sic !] le nécessaire et on pourra pas te sauver. Prendre les mesures nécessaires n’impliques pas seulement le fait de se retirer de la transaction mais justement de t’assurer qu’aucune plainte ou mauvaise image ne reste intraité [sic !]. Demander que Q______ soit traité de la même manière n’apporte aucune valeur ajoutée. Toi et Q______ devez travailler main dans la mains [sic !] pour résoudre ce problème. Si ça se sait qu’il y a une plainte en cours je pense que tu sautes et Q______ sera blâmé d’avoir pas remonter [sic !] au management et disclosé [sic !] un nom. Je me tiens volontiers à ta dispo pour t aider mais ton attitude qui consiste à essayer de trouver des noises à Q______ au lieu de traiter et sauver l’image de la boîte (et la tienne aussi du fait que tu partirais sur faute grave et de plus inscrit noir sur blanc s’il y a une procédure juridique) va droit dans le mur » ;

-B______ : « La dessus je suis d’accord et biensur je veux trouver une solution. Je veux pas lui causer de soucis ni à lui ni à personne, loin de la » ;

-C______ : « Je comprends mais il faut que tu comprennes que vous n êtes pas dans le même panier ».

s. Lundi 21 mars 2022, à 8h45, une visioconférence a eu lieu entre L______ et des représentants de A______ SA.

F______ a déclaré que, lors de la visioconférence, L______ avait évoqué la possibilité de rétractation de son offre. A l’issue de la séance, E______ et lui-même avaient indiqué à D______ que B______ ne contestait pas avoir obtenu l’information et l’avoir transmise à son père et également que L______ était intéressé par l’acquisition de ce bien préalablement à la communication de cette information. F______ a encore indiqué qu’au sein de la direction, le sentiment était qu’éventuellement, si L______ retirait son offre, ils pouvaient avoir une autre vision des conséquences pour B______ mais, en tout état, la simple divulgation de l’information était en soi problématique, indépendamment de l’acquisition du bien immobilier ou pas.

L______ a indiqué que, durant la visioconférence, il avait compris que A______ SA reprochait à son fils d’avoir brisé une règle de confidentialité en lui communiquant le montant de l’autre offre, mais à aucun moment il n’avait senti qu’on lui reprochait de l’avoir fait avant sa visite de l’appartement. A la fin de la séance, il avait un très bon sentiment ; les intervenants semblaient vouloir trouver une solution pacifique, notamment pour pallier au risque de nuire à l’image de l’entreprise. Il a encore précisé qu’avant la visioconférence, il avait évoqué avec son fils la possibilité de renoncer à l’achat pour calmer les esprits parce que « ça commençait à tourner au vinaigre ». Durant la séance, il avait toutefois dit à F______ et à E______ que, n’ayant rien à se reprocher et n’ayant en aucune manière profité d’une information confidentielle de la part de son fils, il considérait que c’était une mauvaise idée et qu’à ce stade il n’était pas prêt à renoncer à l’achat.

D______ a quant à lui expliqué que L______ avait confirmé avoir été au courant qu’une offre préalable avait été faite sur l’appartement et l’avoir appris par son fils ; il était également au courant du prix de cette offre préalable. D______ a indiqué qu’il ne se souvenait pas s’ils avaient demandé à L______ à quel moment il avait eu connaissance du montant de cette offre préalable.

t. Par courrier remis en mains propres le lundi 21 mars 2022, A______ SA a licencié B______ avec effet immédiat au motif que ses agissements avaient causé des torts tant à elle-même qu’à ses clients. Le courrier de licenciement contient notamment les indications suivantes: "Nous nous réservons le droit de prendre toutes autres mesures à votre égard conformément à l'art. 18.3 de votre contrat de travail. A toutes fins utiles, nous vous rappelons que vous restez soumis à la clause de confidentialité et non-concurrence qui perdurent au-delà de la fin des rapports de travail. Tous droits réservés pour le surplus".

Le même jour, A______ SA a remis à B______ un certificat de travail, dans lequel elle a notamment indiqué que ce dernier la quittait "libre de ses obligations mis à part celles de la confidentialité et du secret professionnel."

D______ a expliqué qu’à l’issue de la visioconférence, il n’avait plus aucun doute sur le fait que L______ avait reçu des informations confidentielles de la part de son fils B______. Le dernier doute qui persistait avait alors volé en éclat et, à partir de ce moment-là, il était impossible pour lui que B______ continue à travailler avec leurs clients. Ainsi, après avoir pris conseil auprès de membres du conseil d’administration et de l’avocat de la société, il avait licencié B______.

u. D______ a déclaré que, suite au licenciement de B______, plusieurs éléments étaient venus corroborer sa décision. Premièrement, la cliente lésée avait demandé un fort dédommagement pour avoir perdu l’affaire, soit plusieurs pourcentages du prix d’achat. Deuxièmement, il était devenu beaucoup plus difficile de recruter les meilleurs talents car le bruit s’était répandu que la confidentialité n’était pas assurée chez A______ SA et que des courtiers se volaient les affaires entre eux. Troisièmement, certains des trente-quatre collaborateurs qu’ils venaient d’engager, qui venaient pour la plupart de leur plus grand concurrent, parlaient sérieusement de quitter l’entreprise. Aucun n’était finalement parti mais certains n’étaient pas venus. Quatrièmement, des banques ayant eu vent du manque de confidentialité, le licenciement de B______ avait permis à la société de leur prouver qu’elle avait fait le ménage et que cela ne les empêchait pas de continuer les affaires avec elle. Enfin, en cette période, A______ SA était en pleine levée de fonds et cet événement avait failli impacter celle-ci.

D______ a ajouté, s’agissant des dommages subis par A______ SA, que plusieurs affaires de B______ avaient été annulées et que, selon la rumeur, elles avaient été refaites chez son nouvel employeur. En outre, la société avait été contrainte de mentionner sur sa due diligence qu’elle était en litige avec un employé, ce qui avait eu un très mauvais effet sur ses fonds d’investissement. Enfin, des banques leur avait indiqué avoir été contactées par B______ qui leur avait dit que A______ SA était un employeur malhonnête.

v. Q______ a déclaré être resté en contact avec O______ et l’avoir accompagnée pour un autre bien immobilier qui était en cours de construction. Cette cliente avait été d’autant plus déçue pour l’appartement de K______ qu’il correspondait exactement à ses besoins et que son mari et elle s’y projetaient déjà.

Le témoin a précisé qu’il avait lui-même reçu un avertissement ou un blâme car il avait confirmé l’identité de B______ à sa cliente, ce qui constituait une violation des règles de confidentialité.

w. Le 30 mars 2022, A______ SA a versé à B______ 4'741 fr. 95 bruts à titre de salaire pour la période du 1er au 21 mars 2022 ainsi que 2'992 fr. bruts à titre de vacances.

x. Par courrier du 4 mai 2022, B______ a indiqué à A______ SA qu’il estimait que son licenciement avec effet immédiat était injustifié et a réclamé le paiement de son salaire durant le délai de congé, d’un bonus complémentaire pour 2021, d’une indemnité pour licenciement avec effet immédiat injustifié et de son solde de 17.36 jours de vacances incluant le délai de congé, soit au total 45'465 fr. 20 bruts et 37'432 fr. nets.

A______ SA a, par courrier du 25 mai 2022, contesté les prétentions de B______. Elle a précisé qu’il disposait d’un solde de treize jours de vacances et qu’un montant de 2'992 fr. lui serait versé à ce titre à la fin du mois.

y. B______ a indiqué avoir retrouvé un emploi comme conseiller en assurances et prévoyance auprès de [la compagnie d'assurances] S______. Il avait signé le contrat en juin 2022 et avait débuté son emploi le 1er septembre 2022.

D. a. Après avoir déposé une requête de conciliation le 27 juillet 2022 et obtenu une autorisation de procéder le 4 octobre 2022, B______ a assigné A______ SA en paiement de la somme totale de 72'572 fr. 17, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 22 mars 2022, se composant comme suit :

·         18'340 fr. bruts à titre de salaire durant le délai de congé hypothétique de deux mois;

·         36'682 fr. 80 nets à titre d’indemnité pour licenciement avec effet immédiat injustifié;

·         629 fr. 40 bruts à titre de part employeur des cotisations LPP;

·         10'701 fr. 68 bruts à titre de salaire variable 2021;

·         3'581 fr. bruts à titre de salaire variable 2022;

·         2'230 fr. bruts à titre de prime 2022;

·         3'855 fr. 33 bruts à titre d'indemnité pour vacances non prises en nature.

b. Par mémoire de réponse et demande reconventionnelle déposé à l’office postal le 7 mars 2023, A______ SA a conclu, sur demande principale, au déboutement de B______ et, sur demande reconventionnelle, à sa condamnation au paiement de 25'000 fr. avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 21 mars 2022 à titre de peine conventionnelle, sous suite de frais et dépens.

c. Par mémoire de réplique sur demande principale et réponse à la demande reconventionnelle déposé au greffe du Tribunal des prud’hommes le 8 mai 2023, B______ a, sur demande principale, persisté dans ses conclusions et, sur demande reconventionnelle, conclu au déboutement de A______ SA.

d. Dans leurs écritures subséquentes, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

e. A l’audience de débats d’instruction du 3 octobre 2023, les parties ont confirmé leurs conclusions.

f. Aux audiences de débats principaux des 11 et 18 décembre 2023, le Tribunal a procédé à l’interrogatoire des parties soit, pour A______ SA, de D______ et de C______, puis à l’audition de plusieurs témoins, dont les déclarations ont été reprises ci-dessus dans la mesure utile.

g. A l’issue de l’administration des preuves, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions, puis le Tribunal a gardé la cause à juger.

h. Aux termes du jugement entrepris, les premiers juges ont notamment retenu que B______ n’avait pas droit au paiement d’un quelconque salaire variable. En effet, après avoir commencé son activité pour A______ SA le 1er février 2021 et hors temps d'essai de trois mois, il avait réalisé, sur une période de huit mois, un chiffre d'affaires de 228'509 fr. 07 et n'avait ainsi pas atteint les seuils de chiffres d'affaires requis par le contrat pour pouvoir prétendre au paiement d'un salaire variable pour l'année 2021, soit 250'000 fr. De même, selon le décompte du chiffre d’affaires 2022 de B______, il avait réalisé cette année-là, soit durant la période de janvier à mars, un revenu net de 6'037 fr., manifestement inférieur au seuil requis pour pouvoir prétendre au paiement d’un salaire variable pour l'année 2022. En suivant le même raisonnement, le Tribunal a également rejeté la prétention de B______ en paiement de la prime de 10'000 fr. au pro rata pour la période du 1er janvier au 21 mars 2022, soit un montant de 2'230 fr.

Le Tribunal a par ailleurs considéré que la résiliation immédiate des rapports de travail de B______ était injustifiée. Il a retenu, en substance, que A______ SA n'avait pas démontré avoir subi un préjudice résultant du comportement de son ancien employé. En particulier, il avait été établi par la procédure que l’offre de la cliente O______ avait été oralement refusée par les vendeurs avant que le père de B______ ne visite l’appartement et ne fasse une offre bien supérieure et qu'ainsi, L______ n’avait aucunement utilisé l’information relative au montant de l’autre offre pour formuler la sienne. Si, en révélant le montant de l’offre de l’autre cliente à son père, B______ avait effectivement violé ses devoirs de confidentialité, de diligence et de loyauté envers son employeur, de telles violations ne revêtaient pas un degré de gravité tel qu’elles justifiaient un licenciement avec effet immédiat. Le Tribunal a encore relevé qu'avant de procéder au licenciement de B______, A______ SA avait posé trois conditions à ce dernier – à savoir excuses à la direction et à son collègue ainsi que retrait de l’offre de son père – et avait indiqué que, s’il les remplissait, elle renoncerait à le licencier. Or, la condition du retrait de l’offre du père de l'intéressé apparaissait plus que disproportionnée et était inadéquate en ce qu'elle faisait dépendre le sort d’un employé d’une décision d’un tiers. En tout état, en posant ces conditions, A______ SA estimait que la faute commise par son employé n’était pas suffisamment grave pour justifier un licenciement avec effet immédiat, de sorte que les liens de confiance qui liaient l'employeuse à ce dernier n’étaient pas irrémédiablement rompus.

En conséquence, B______ avait droit au paiement de son salaire pour la période du 22 mars au 31 mai 2022. S’agissant du salaire déterminant pour calculer le montant dû, la prime de 6'666 fr. 67 que B______ avait perçue pour la fin de l’année 2021 n’étant pas du salaire, elle ne saurait être prise en compte dans ce calcul. En conséquence, B______ avait droit au paiement de son délai de congé sur la base de son salaire de 84'000 fr. par an, soit 7'000 fr. par mois. Sous déduction d'un montant de 4'741 fr. 95 bruts perçu à titre de salaire pour la période du 1er au 31 mars 2022, il avait donc droit au paiement d'un montant total de 16'258 fr. 05 bruts, plus intérêts moratoires à 5% l’an dès le 22 mars 2022.

En ce qui concerne l'indemnité pour licenciement avec effet immédiat injustifié, le Tribunal a considéré qu’il se justifiait de condamner l'employeuse à verser à B______ une indemnité correspondant à deux mois de salaire, soit 14'000 fr. nets.

Le Tribunal a par ailleurs condamné A______ SA au paiement de 629 fr. 40 nets, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 22 mars 2022, à titre de part employeur des cotisations LPP et de 2'746 fr. 60 bruts, plus intérêts moratoires à 5% l’an dès le 22 mars 2022, à titre d’indemnité pour un solde de vacances non prises en nature de 17.83 jours.

Enfin, il a rejeté les prétentions reconventionnelles de l'employeuse en paiement d'une peine conventionnelle, considérant tout d'abord que l'employeuse y avait renoncé dès lors qu'elle n’avait pas formulé de réserve dans le certificat de travail ni lors du paiement du solde de salaire à l'intéressé et qu'en tout état, le montant de la peine conventionnelle était clairement disproportionné puisqu’il correspondait à trois fois et demi le salaire mensuel de B______.

EN DROIT

1.             1.1 Par souci de simplification et pour respecter le rôle initial des parties en appel, A______ SA sera ci-après désignée en qualité d'appelante et B______ en qualité d'intimé.

1.2 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

En l'espèce, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.3 Interjeté dans le délai utile de trente jours (art. 145 al. 1 let. a et 311 al. 1 CPC) et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.4 Formé dans la réponse à l'appel (art. 313 al. 1 CPC), dans le respect des formes énoncées ci-dessus, l'appel joint est également recevable.

2.             La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs motivés qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l’art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

La valeur litigieuse étant supérieure à 30'000 fr., la procédure ordinaire s'applique et le procès est régi par la maxime des débats, qui prévoit que les parties allèguent les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et produisent les preuves qui s'y rapportent (art. 55 al. 1 CPC, art. 243 et art. 247 al. 2 CPC a contrario).

3.             3.1 Tant l'appelante que l'intimé reprochent au Tribunal d'avoir procédé à une constatation inexacte et incomplète des faits sur divers aspects.

En réponse au grief formulé par l'appelante, l'intimé soutient que les allégués en fait présentés dans le mémoire d'appel sont tardifs, partant irrecevables.

3.2 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

3.3 L'appelante soutient tout d'abord que le Tribunal avait retenu à tort, d'une part, que F______ et C______ avaient agi au nom et pour le compte de l'employeuse lorsqu'ils avaient donné des conseils et des indications à l'intimé afin d'éviter son licenciement et, d'autre part, que l'employeuse avait posé, comme condition permettant de renoncer au licenciement, le retrait de l'offre par les parents de l'intimé. Ces griefs ne relèvent toutefois pas de la constatation inexacte des faits mais de l'appréciation des preuves, qui sera traitée ci-après.

En ce qui concerne les autres faits "erronés" ou "manquants" allégués par l'appelante, celle-ci présente, sur divers points, sa propre version des faits, en s'appuyant sur les pièces produites ainsi que sur les déclarations des parties et des témoins auditionnés par les premiers juges. Elle omet toutefois, sous réserve de son allégué n° 15 relatif au contenu du courrier de licenciement, d'indiquer quels allégués topiques auraient par hypothèse été introduits en temps utile selon la procédure civile applicable et auraient été négligés par les premiers juges. Un simple renvoi à des pièces ou à des témoignages sont insuffisants de ce point de vue. La question de la recevabilité de ces allégués peut cependant demeurer ouverte dès lors que le grief de l'appelante doit en tout état être rejeté, les points soulevés n'étant pas pertinents pour l'issue du litige au vu de la motivation qui va suivre.

Pour le surplus, s'agissant de l'allégué n° 15 susmentionné, l'état de fait ci-dessus a été complété dans la mesure utile.

3.4 Pour sa part, l'intimé fait grief au Tribunal d'avoir retenu que la prime de 6'666 fr. 67 calculée pro rata temporis avait été versée à bien plaire.

Or, dans sa réplique et réponse sur demande reconventionnelle du 8 mai 2023, l'intimé a admis sans réserve l'allégué que l'appelante avait formulé en ce sens dans son mémoire de réponse et demande reconventionnnelle du 7 mars 2023 (all. n° 56), de sorte que le grief tiré d'une constatation inexacte des faits est infondé.

4.             L'intimé fait grief au Tribunal d'avoir écarté sa prétention en paiement d'un montant à hauteur de 10'701 fr. 68 à titre de salaire variable pour l'année 2021. Il allègue qu'il ressortait du contrat de travail et de son annexe 1 que l'objectif de chiffre d'affaires de l'employé devait être calculé pro rata temporis. Or, selon les constatations du jugement de première instance, après déduction du temps d'essai de trois mois, l'intimé avait réalisé, pour l'année 2021, un chiffre d'affaires net de 228'508 fr. 65 sur une période de huit mois. Partant, il avait droit à un montant brut de 5'701 fr. 73 (28'508 fr. 68 [correspondant au montant dépassant le seuil de 200'000 fr.] x 20%), ainsi qu'à un montant brut de 4'999 fr. 95 (33'333 fr. [montant issu du seuil précédent] x 15%), soit au total 10'701 fr. 68.

L'intimé déclarait par ailleurs renoncer à appeler du salaire variable et de la prime pour l'année 2022, compte tenu de la brève période en jeu.

4.1 En présence d'un litige sur l'interprétation d'un contrat, le juge applique les règles de l'art. 18 al. 1 CO (ATF 132 III 268 consid. 2.3.2; 129 III 664 consid. 3.1).

Le juge doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant, empiriquement sur la base d'indices, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales –, mais aussi le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat, des projets de contrat, de la correspondance échangée ou encore de l'attitude des parties après la conclusion du contrat, établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2; 140 III 86 consid. 4.1;
125 III 263 consid. 4c; arrêt du Tribunal fédéral 4A_417/2022 du 25 avril 2023 consid. 5.2). Déterminer ce qu'un cocontractant savait et voulait au moment de conclure relève des constatations de fait (ATF 132 III 268 consid. 2.3.2;
131 III 606 consid. 4.1; 128 III 419 consid. 2.2). S'il ne parvient pas à déterminer cette volonté, il doit recourir à l'interprétation selon la théorie de la confiance (normative ou objective) en recherchant quel sens les parties pouvaient ou devaient donner, de bonne foi, à leurs manifestations de volonté réciproques (ATF 142 III 671 consid. 3.3; 140 III 134 consid. 3.2; 136 III 186 consid. 3.2.1). S'il subsiste un doute, l'interprétation d'une clause doit être effectuée en défaveur de son auteur (interprétation contra stipulatorem; ATF 146 III 339 consid. 5.2.3; 124 III 155 consid. 1b; 122 III 118 consid. 2a).

4.2.1 Le Tribunal a estimé qu'au regard de la convention qui liait les parties, le seuil à atteindre pour le paiement du salaire variable n'était pas de 200'000 fr. comme l'invoquait l'intimé, mais de 250'000 fr., et que ce seuil ne devait pas être proratisé sur l'année 2021. Certes, le chiffre 1 de l'annexe 1, intitulé "Objectifs", précisait que "Ce chiffre d'affaires doit être réalisé sur l'année civile et sera calculé pro rata temporis cas échéant". Cependant, selon une interprétation objective de l'annexe 1 du contrat de travail, la participation d'un travailleur au chiffre d'affaires de l'entreprise servait à rémunérer le travail que l'employé avait accompli et par lequel il avait permis à son employeur de réaliser un bénéfice; rémunérer un travailleur sur le chiffre d'affaires d'une année entière alors qu'il n'avait travaillé qu'une partie de l'année reviendrait à le rémunérer sur un bénéfice potentiellement inexistant et serait ainsi de l'enrichissement illégitime. L'intimé n'avait donc pas atteint le seuil requis pour l'année en cause, ce qui excluait tout droit au paiement d'un salaire variable.

L'argumentation du Tribunal est difficile à suivre, sauf à supposer qu'il aurait tenu compte d'un calcul de profitabilité de l'employé dont il résulterait qu'une marge suffisante, permettant de verser une participation au chiffre d'affaires sous la forme d'un salaire variable (calculé au pro rata), ne pourrait pas être dégagée par un employé n'ayant travaillé qu'une partie de l'année. L'appelante n'a cependant rien allégué en ce sens, se contentant d'affirmer que le seuil de chiffre d'affaires fixé pour une année civile ne doit pas être proratisé.

4.2.2 Dans le cadre de l'interprétation des clauses qui déterminent le droit au paiement d'un salaire variable, il s'agit tout d'abord, conformément aux principes rappelés ci-dessus, de rechercher la commune et réelle intention des parties puis, si celle-ci ne ressort pas des preuves apportées, d'interpréter la clause litigieuse selon le principe de la confiance.

Or en l'espèce, les termes du contrat sont clairs, si bien que rien ne permet de penser qu'ils ne refléteraient pas la réelle et commune volonté des parties. En effet, il convient tout d'abord de distinguer la première clause de l'annexe 1 au contrat de travail, intitulée "1. Objectifs", qui fixent les objectifs de chiffre d'affaires annuel minimum devant être atteints par l'employé en fonction de son ancienneté (250'000 fr. la première année hors temps d'essai, 300'000 fr. la deuxième année, 350'000 fr. la troisième année, puis les objectifs sont fixés avec le manager d'agence chaque début d'année civile), de la seconde, intitulée "2. Salaire variable", qui détermine à quelles conditions l'employé peut prétendre à une prime ou à un salaire variable en sus de son salaire fixe.

La phrase sur laquelle l'intimé s'appuie pour en déduire que le seuil déclenchant le droit à un salaire variable doit être calculé au pro rata du nombre de mois travaillés au cours de l'année, hors temps d'essai ("[c]e chiffre d'affaires doit être réalisé sur l'année civile et sera calculé pro rata temporis cas échéant."), figure à l'article 1 de l'annexe et concerne ainsi uniquement le calcul de l'objectif.

S'agissant du droit à un salaire variable (et à une prime), l'article 2 de l'annexe 1 prévoit que "[p]our pouvoir bénéficier d’une prime ainsi que d’un éventuel salaire variable, l'Employé doit atteindre minimum 250'000 fr. de chiffre d'affaires durant l'année concernée". Plus loin, il est indiqué ce qui suit: " A noter que lorsque l’Employé n’atteint pas le seuil minimum de chiffre d’affaires de CHF 250'000.- à la fin de l’année civile, ce dernier ne pourra prétendre à un quelconque paiement de salaire variable de la part de l’Employeur. En outre, l’Employé qui quitte son travail en cours d’emploi, ne saurait prétendre au paiement d’un quelconque salaire variable pro rata temporis (…)".

Il en découle que si l'objectif annuel auquel l'employé doit satisfaire peut être proratisé, tel n'est en revanche pas le cas des conditions dont dépendent le droit au paiement d'un salaire variable; en effet le contrat indique expressément que lorsque le montant minimum de 250'000 fr. n'est pas atteint, l'employé ne peut prétendre au paiement d'un tel salaire et que, même en cas de départ de l'entreprise, soit lorsque l'année n'est pas complète, un calcul pro rata temporis est exclu. L'interprétation défendue par l'intimé, à savoir que le calcul pro rata temporis permis par l'article 1 relatif à la fixation de l'objectif s'appliquerait également au droit à un salaire variable prévu par l'article 2 reviendrait à retenir une contradiction manifeste dans les termes du contrat, que rien ne justifie.

Pour le surplus, le fait que l'employeur ait versé à l'intimé la prime de 10'000 fr. au pro rata pour l'année 2021, soit un montant de 6'666 fr., n'y change rien, l'employeur ayant expliqué que cette prime avait été versée à bien plaire et non en vertu d'une obligation contractuelle, ce qui est conforme aux dispositions de l'annexe 1 au contrat susmentionnées.

Il s'ensuit que l'intimé, dont il n'est pas contesté qu'il a réalisé un chiffre d'affaires de 228'508 fr. 68 en 2021, inférieur au seuil minimum de 250'000 fr., n'a, en vertu du contrat de travail conclu avec l'appelante, pas droit à un salaire variable pour l'année concernée. Son grief est, dès lors, mal fondé et l'intimé sera débouté de ce chef de conclusion.

5.             L'appelante fait grief au Tribunal de ne pas avoir considéré que le licenciement immédiat de l'intimé était justifié.

5.1.1 L'employeur et le travailleur peuvent résilier immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs (art. 337 al. 1 CO). Sont notamment considérés comme de justes motifs, toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d'exiger de celui qui a donné le congé la continuation des rapports de travail (art. 337 al. 2 CO).

Mesure exceptionnelle, la résiliation immédiate pour justes motifs doit être admise de manière restrictive (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; 130 III 28 consid. 4.1). Les faits invoqués à l'appui d'un renvoi immédiat doivent avoir entraîné la perte du rapport de confiance qui constitue le fondement du contrat de travail (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_395/2018 du 10 décembre 2019 consid. 5.1). Seul un manquement particulièrement grave du travailleur justifie son licenciement immédiat (ATF 142 III 579 consid. 4.2). Si le manquement est moins grave, il ne peut entraîner une résiliation immédiate que s'il a été répété en dépit d'un ou de plusieurs avertissements (ATF 142 III 579 consid. 4.2; 130 III 213 consid. 3.1; 130 III 28 consid. 4.1). L'employeur peut toutefois s'en abstenir lorsqu'il ressort de l'attitude de l'employé qu'une telle démarche serait inutile (ATF 127 III 153 consid. 1b).

Le juge apprécie librement s'il existe de justes motifs (art. 337 al. 3 CO); il applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC) et il dispose d'un large pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 4A_105/2018 du 10 octobre 2018 consid. 3.2.2). Savoir si le comportement incriminé atteint la gravité nécessaire dépend des circonstances du cas concret (ATF 142 III 579 consid. 4.2). Dans son appréciation, le juge doit notamment tenir compte de la position du travailleur au sein de l'entreprise, du type et de la durée des rapports contractuels, de la nature et de l'importance des manquements (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; 130 III 28 consid. 4.1; 127 III 351 consid. 4a).

Il appartient à la partie qui se prévaut de justes motifs de résiliation immédiate d'en établir l'existence (art. 8 CC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2010 du 13 avril 2010 consid. 4.1).

5.1.2 La partie qui entend se prévaloir de justes motifs doit le faire en principe sans délai, par quoi il faut entendre une manifestation de volonté intervenant après un bref temps de réflexion; une trop longue attente comporterait la renonciation à se prévaloir de ce moyen. La durée dépend des circonstances, mais un délai d'un à trois jours ouvrables est présumé approprié (ATF 138 I 113 consid. 6.3.1;
127 III 310 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_559/2016 du 18 janvier 2017 consid. 4.1).

Un délai supplémentaire n'est accordé à celui qui entend résilier le contrat que lorsque les circonstances particulières du cas concret exigent d'admettre une exception à cette règle (par exemple attendre le retour de l'employé fautif de ses vacances (arrêt du Tribunal fédéral 4A_236/2012 du 2 août 2012) ou lorsque au sein d'une personne morale la décision de licenciement relève de la compétence d'un organe constitué de plusieurs membres (ATF 130 III 28 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 4C.364/2001 du 19 juillet 2002 consid. 1.2.1).

5.1.3 Conformément à l'article 337c al. 1 CO, lorsque la résiliation immédiate du contrat est injustifiée, le travailleur a droit à ce qu’il aurait gagné si les rapports de travail avaient pris fin à l’expiration du délai de congé ou à la cessation du contrat conclu pour une durée déterminée.

La prétention du travailleur fondée sur cet article est une créance en dommages-intérêts qui inclut non seulement le salaire, y compris en nature, mais également la compensation des autres avantages résultant du contrat de travail, tels que les gratifications ou les indemnités de départ (arrêt du Tribunal fédéral 4C_321/2005 du 27 février 2006 consid. 8.3). Elle comprend également le paiement des vacances lorsque le contrat aurait pu prendre fin normalement dans un délai relativement bref (Wyler/Heinzer, Droit du travail, 2019, p. 760).

Le juge doit ainsi déterminer la rémunération qui aurait hypothétiquement été perçue jusqu’à la fin ordinaire du contrat. Si celle-ci varie d’un mois à l’autre, il peut se justifier d’opérer une moyenne sur une période de référence appropriée, notamment au courant de l’année précédente, en tenant compte le cas échéant des variations saisonnières ainsi que de l’évolution durant les derniers mois (ATF 125 III 14 consid. 2b; Donatiello, in CR CO I, 3ème éd. 2021, n. 9 ad art. 337c CO).

Le contrat peut être résilié pour la fin d'un mois moyennant un délai de congé d'un mois pendant la première année de service, de deux mois de la deuxième à la neuvième année de service, et de trois mois ultérieurement (art. 335c al. 1 CO). Ces délais peuvent être modifiés par accord écrit; des délais inférieurs à un mois ne peuvent toutefois être fixés que par convention collective et pour la première année de service (art. 335c al. 2 CO).

5.1.4 Lorsque l'employeur résilie immédiatement le contrat de travail sans justes motifs, le juge peut condamner celui-ci à verser au travailleur une indemnité dont il fixera librement le montant, compte tenu de toutes les circonstances; cette indemnité ne peut toutefois dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur (art. 337c al. 3 CO).

En principe, cette indemnité couvre le tort moral subi par le travailleur (ATF 135 III 405 consid. 3.1). Sauf cas exceptionnel, elle doit être versée pour tout licenciement immédiat dénué de justes motifs (ATF 133 III 657 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_173/2018 du 29 janvier 2019 consid. 5.1).

Cette indemnité, qui s'ajoute aux droits découlant de l'art. 337c al. 1 CO, revêt une double finalité, à la fois réparatrice et punitive, quand bien même elle ne consiste pas en des dommages-intérêts au sens classique, car elle est due même si la victime ne subit ou ne prouve aucun dommage; revêtant un caractère sui generis, elle s'apparente à la peine conventionnelle (ATF 135 III 405 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_173/2018 précité consid. 5.1).

L'indemnité est fixée d'après la gravité de la faute de l'employeur, la mesure de l'atteinte portée aux droits de la personnalité du travailleur et la manière dont la résiliation a été annoncée. D'autres critères tels que la durée des rapports de travail, l'âge du lésé, sa situation sociale et les effets économiques du licenciement entrent aussi en considération (arrêt du Tribunal fédéral 4A_161/2016 du 13 décembre 2016 consid. 3.1).

L'indemnité consécutive à une faute grave de l'employeur se situe le plus souvent entre quatre et six mois de salaire. Une éventuelle faute concomitante du travailleur est prise en considération et peut donner lieu à une réduction, voire à une suppression de l'indemnité lorsque la faute du travailleur est grave, mais insuffisante pour justifier le licenciement avec effet immédiat, ou encore lorsque tout manquement de l'employeur ou tout reproche d'un autre ordre est exclu (Wyler/Heinzer, op. cit., p. 765).

5.2.1 L'appelante affirme que, conformément à ce qui était indiqué dans la lettre de licenciement du 21 mars 2022, les agissements de l'intimé avaient causé des torts tant à elle-même qu'à ses divers clients. Tout d'abord, en permettant à ses parents d'obtenir l'appartement à la place de O______, cliente de Q______, l'intimé avait causé un préjudice correspondant à une perte de commission et donc de chiffre d'affaires, de même qu'un manque à gagner pour son collègue ainsi que, par extension, pour la société. Deuxièmement, O______ avait exigé un fort dédommagement de la part de l'appelante pour avoir perdu l'affaire et l'avait menacée de l'attaquer en justice. Troisièmement, la réputation de l'appelante sur le marché avait été ternie par cette affaire, qui avait indubitablement fait grand bruit. Il existait également un risque que l'atteinte réputationnelle s'étende à d'autres employés de l'entreprise, qui avaient pu apprendre l'existence de ce problème de confidentialité au sein de la société, ne serait-ce qu'en raison du fait que l'intimé avait eu une conversation téléphonique avec son père dans les bureaux mêmes de la société. Enfin, la société avait dû mentionner dans sa due diligence l'existence d'un litige avec son ancien employé, cela même alors qu'elle était en pleine levée de fonds.

5.2.1.1 En premier lieu, il convient de souligner que selon les constatations du Tribunal, que l'appelante ne conteste pas, l'offre de la cliente O______ avait été oralement refusée par les vendeurs avant que le père de l'intimé ne visite l'appartement et ne fasse une offre bien supérieure; en conséquence, comme le Tribunal l'a retenu sans être contredit, l'offre de O______ n'a pas été refusée en raison du fait que L______ aurait fait une offre supérieure parce qu'il connaissait son montant. En d'autres termes, le père de l'intimé n'a pas utilisé l'information fournie par son fils, relative au montant de l'autre offre, pour formuler la sienne et emporter la vente.

Partant, la violation du devoir de confidentialité par l'intimé, qui n'est pas contestée en soi, n'a eu aucune influence sur la perte de l'affaire par la cliente de Q______, et n'a donc pas pu générer un dommage équivalent à la perte d'une commission. Au demeurant, comme le relève l'intimé, dès lors que L______, père de l'intimé, était également client de l'appelante, la conclusion de l'affaire par celui-ci plutôt que par O______ n'aurait de toute façon pas pu causer une perte de chiffre d'affaires pour l'appelante.

En second lieu, les divers risques et préjudices dont se prévaut l'appelante, pour autant qu'ils reposent sur des allégués de fait recevables (cf. consid. 3 supra), ne sont pas démontrés. En particulier, l'appelante n'a pas allégué, encore moins prouvé avoir dédommagé O______. Au contraire, il a été établi que celle-ci avait continué de mandater l'appelante, Q______ ayant indiqué l'avoir accompagnée sur une autre affaire par la suite. De manière plus générale, la prétendue atteinte réputationnelle dont se prévaut l'appelante repose sur de pures conjectures et ne trouve aucune assise dans le dossier. Enfin, l'appelante ne saurait se prévaloir du fait qu'elle a dû mentionner, dans sa due diligence, un litige avec un ancien employé portant sur la question de savoir si un licenciement immédiat pour justes motifs était justifié pour en déduire, précisément, l'existence de tels justes motifs; l'argument est circulaire et, en cela, dénué d'effet.

5.2.1.2 L'appelante persiste à soutenir qu'en tout état, la violation du devoir de confidentialité par l'intimé était grave. Elle expose que la confidentialité est un principe crucial au sein d'une société active dans le domaine financier et que l'intimé en était pleinement conscient, ce qui ressortait des courriels qu'il avait adressés à Q______ et à F______ le 18 mars 2022 ainsi que du fait qu'il ne s'était pas offusqué de son éventuel licenciement avant de recevoir le courrier de résiliation du 21 mars 2022. L'appelante déduit également la gravité de la violation commise des répercussions économiques que dite violation a entraîné pour la société.

Comme cela a été dit ci-dessus, il n'a pas été établi que la société ait subi un quelconque dommage du fait de la violation de ses devoirs par l'intimé. Par ailleurs, c'est le lieu de rappeler qu'à teneur des faits établis et non contestés, l'intimé s'est, en définitive, limité à informer son père qu'il avait fait l'offre la plus élevée pour l'acquisition de l'appartement, tout en précisant le montant d'une offre concurrente (laquelle avait déjà été refusée par les vendeurs à ce moment-là, sans que ce fait ne soit aucunement imputable à l'intimé).

De surcroît, le Tribunal a retenu que l'appelante avait posé des conditions inadéquates à l'intimé pour éviter son licenciement et en particulier, fait dépendre le sort de son employé d'une décision d'un tiers, soit le retrait de l'offre par le père de l'intimé. L'appelante prétend toutefois que les messages envoyés via Whatsapp par F______ et C______ devaient être considérés comme de simples conseils donnés à titre privé à l'intimé, qui n'engageaient nullement l'employeuse, et que la question de savoir si les parents de l'intimé étaient disposés à retirer leur offre pour l'appartement de K______ n'avait joué aucun rôle dans la décision de le licencier, comme son représentant, D______, l'avait déclaré lors des débats.

Or, il ressort du contenu des messages concordants de F______ et C______, disposant tous deux d'une signature collective à deux pour l'employeuse, que ceux-ci ont rapporté à l'intimé la volonté de l'appelante. En effet, le message de F______ du 18 mars 2022 répète les conditions à la poursuite de relations de travail, dans une tournure indiquant qu'elles n'émanent pas de lui à titre personnel: "Ben B______, tu sais qu'il y a trois conditions pour ne pas être licencié…Retrait de l'offre, message à la direction et au collègue…". Quant au message de C______ du 19 mars 2022, il est on ne peut plus clair dans la mesure où il se réfère directement à la décision de l'employeuse: "Le board a décidé de ne pas te licencier si tu prends des mesures pour que ce qui se passe autour de cette histoire n'impacte pas la réputation de l'entreprise". De toute évidence, C______ et F______ ont, peu après la réunion du comité exécutif du 17 mars 2022, rappelé à l'intimé la décision et les conditions de l'appelante, de sorte que le contenu de leurs messages doit être compris comme reflétant la volonté de celle-ci.

Il s'ensuit également que le retrait de l'offre des parents de l'intimé était l'une des conditions que l'appelante avait posées à l'intimé en lui indiquant que s'il les remplissait, elle pourrait renoncer à le licencier. Au surplus, comme le relève l'intimé, on ne voit pas pour quelle raison une visioconférence a été organisée entre les membres de la direction de l'appelante et le père de l'intimé, lors de laquelle celui-ci a indiqué qu'il n'était pas prêt à renoncer à l'achat, si le retrait de l'offre n'était pas déterminant dans la suite que l'appelante entendait donner à l'affaire.

La Cour partage l'appréciation du Tribunal selon laquelle les conditions posées à la poursuite des rapports de travail, qui dépendaient notamment de la décision d'un tiers, étaient inadéquates et disproportionnées, étant rappelé, encore une fois, que L______ n'avait nullement profité d'une information confidentielle de son fils pour formuler son offre d'achat.

De même, il sied d'en conclure, à l'instar du Tribunal, que l'appelante envisageait sérieusement la poursuite des rapports de travail si l'employé remplissait les exigences posées, ce qui n'est pas compatible avec une rupture irrémédiable des liens de confiance propre à un licenciement immédiat.

5.2.1.3 Au regard de ce qui précède, de justes motifs de résiliation immédiate des rapports de travail au sens de l'art. 337 al. 1 et 2 CO ne sont pas réalisés.

C'est ainsi à bon droit que les premiers juges ont considéré que le licenciement immédiat notifié à l'intimé le 21 mars 2022 n'était pas justifié.

5.2.2 L'intimé prétend au paiement d'un montant brut de 20'600 fr. 13 à titre de salaire durant le délai de congé hypothétique de deux mois.

Le Tribunal a constaté que le délai de congé de l'intimé, alors dans sa deuxième année de service, étant de deux mois, il avait droit au paiement de son salaire pour la période du 22 mars au 31 mai 2022, dont il convenait de déduire le montant du salaire brut déjà perçu pour la période du 1er au 31 mars 2022, soit 4'741 fr. 95. Sous la réserve du principe même d'une résiliation immédiate injustifiée du contrat de travail (cf. consid. 4 supra), ces constatations ne sont pas remises en cause par les parties.

L'intimé discute en revanche le montant du salaire déterminant pour calculer la somme due. Il estime que le Tribunal aurait dû ajouter, au salaire de base de 84'000 fr. par an, le montant de la prime de 6'666 fr. versée en 2021 ainsi que le salaire variable d'un montant de 10'701 fr. 68, afin de retenir un salaire déterminant de 101'368 fr. 35 par an, respectivement 8'447 fr. 36 par mois.

Conformément à l'interprétation qui doit être faite de l'annexe 1 au contrat de travail, l'intimé ne peut prétendre au paiement d'un salaire variable ou d'une gratification faute d'avoir réalisé, pour les années civiles 2021 et 2022, un chiffre d'affaires atteignant le seuil fixé. De plus, la rémunération de l'intimé ne variait pas d'un mois à l'autre, ce qui exclut d’opérer une moyenne sur une période de référence qui comprendrait le montant de 6'666 fr., versé de manière discrétionnaire par l'appelante (cf. consid. 4.2.2 supra).

Il n'y a dès lors pas lieu de prendre en considération les montants allégués par l'intimé dans la fixation du salaire déterminant au sens de l'art. 337c al. 1 CO, qui a été correctement arrêté à 7'000 fr. (84'000 fr. : 12) par le Tribunal. Il s'ensuit que l'intimé peut prétendre au paiement d'un montant de 16'258 fr. 05 bruts ([7'000 x 3] - 4'741 fr. 95), plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 22 mars 2022.

L'appel joint sera donc rejeté sur ce point.

5.2.3 Le Tribunal a retenu que l'intimé disposait, au 31 mai 2022, d'un solde de vacances de 17.83 jours qui lui donnait droit au paiement de 5'738 fr. 60 bruts (17.83 jours x [7'000 fr. / 21.75 jours]), sous déduction de la somme de 2'992 fr. bruts déjà versée à ce titre par l'appelante, soit à la somme de 2'746 fr. 60 bruts au titre d'indemnité pour vacances non prises en nature.

Pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, il convient de rejeter le grief de l'intimé tendant à ce que l'indemnité pour vacances non prises soit calculée sur la base d'un salaire mensuel déterminant de 8'447 fr. 36, incluant la prime et le salaire variable allégués (cf. consid. 5.2.2 supra).

Par ailleurs, l'appelante a conclu à ce que l'indemnité pour vacances non prises en nature allouée à B______ soit réduite en tenant compte uniquement d'un solde de 13 jours travaillés, selon un décompte s'arrêtant au 21 mars 2022. Compte tenu du fait qu'une résiliation immédiate sans justes motifs a été retenue, l'intimé a droit au paiement des vacances à l'échéance du délai de congé, soit au 31 mai 2022, ce qui entraîne le rejet de son grief.

Le jugement entrepris peut dès lors être confirmé sur ce point.

5.2.4 Les premiers juges ont, à bon droit, accordé à l'intimé une indemnité au sens de l'art. 337c al. 3 CO, son licenciement immédiat étant injustifié. L'intimé soutient toutefois que le montant de celle-ci, correspondant à deux mois de salaire, serait trop bas. Il réclame une indemnité équivalant à quatre mois de salaire (calculée sur un salaire mensuel déterminant de 8'447 fr. 36), au regard du comportement de l'appelante qui lui avait imposé trois conditions "humiliantes" pour ne pas être licencié. De son côté, l'appelante a conclu à la réduction de l'indemnité pour résiliation immédiate injustifiée "en tenant compte de manière appropriée des circonstances du cas d'espèce", sans toutefois présenter de grief motivé sous cet angle.

Il est vrai, comme l'a relevé le Tribunal, que l'appelante n'a pas agi avec bienveillance envers l'intimé et a fait pression sur lui pour qu'il obtienne de son père le retrait de son offre. A n'en pas douter, l'intimé a été placé dans une situation difficile, autant d'un point de vue professionnel que personnel. Cela étant, on ne saurait non plus considérer que l'appelante a cherché à humilier l'intimé, qui avait commis une faute, en lui demandant de présenter des excuses à la direction et à son collègue.

Pour le surplus, le Tribunal a tenu compte, à juste titre, des éléments suivants:

L'intimé a commis une faute concomitante, puisqu'il a violé son devoir de confidentialité en indiquant à son père le montant de l’autre offre et s’est vanté que son père ait remporté la vente.

L'intimé n’a ni allégué ni prouvé avoir subi une atteinte à sa personnalité en raison de son licenciement.

Par ailleurs, l'intimé, né en 1996, est jeune. La durée des rapports de travail est courte, puisqu’elle a duré à peine plus d’une année.

Les effets économiques du licenciement ont été peu importants, l'intimé ayant retrouvé un emploi relativement similaire le 1er septembre 2022.

A cela peut-on encore ajouter qu'il n'est pas allégué que la résiliation des rapports de travail aurait été annoncée à l'intimé de manière inadéquate.

Dans ces circonstances, il n'est pas critiquable d'avoir alloué à l'intimé une indemnité pour un licenciement immédiat injustifié correspondant à deux mois de salaire, soit un montant de 14'000 fr. nets (cf. consid. 5.2.3 supra, dont il ressort que le salaire déterminant n'inclut pas les montants allégués par l'intimé à titre de salaire variable et de prime), la faute de l'appelante étant pour partie contrebalancée par les autres éléments pertinents au dossier.

Les parties seront par conséquent déboutées de leurs conclusions sur ce point.

6.             L'appelante réclame à l'intimé le paiement de 25'000 fr., avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 21 mars 2022, à titre de peine conventionnelle.

6.1 Selon l'art. 321e al. 1 CO, le travailleur répond du dommage qu'il cause à l'employeur intentionnellement ou par négligence.

Comme toute responsabilité contractuelle, la responsabilité du travailleur suppose la réalisation de quatre conditions: un dommage, la violation d'une obligation contractuelle, un rapport de causalité adéquate entre ladite violation et le dommage ainsi qu'une faute, laquelle est présumée (ATF 144 III 327, in SJ 2019 I p. 121; arrêts du Tribunal fédéral 4A_210/2015 du 4 octobre 2015 consid. 4.1; 4A_310/2007 du 4 décembre 2007 consid. 6.2).

En vertu de l'art. 160 al. 1 CO, lorsqu'une peine a été stipulée en vue de l'inexécution ou de l'exécution imparfaite du contrat, le créancier ne peut, sauf convention contraire, demander que l'exécution de la peine convenue. Selon l'art. 163 al. 1 CO, les parties fixent librement la peine conventionnelle. En application de l'art. 163 al. 3 CO, le juge doit réduire le montant de la peine conventionnelle dont la quotité est excessive (ATF 133 III 43 consid. 3.3).

Dans un arrêt de principe, le Tribunal fédéral a distingué les peines conventionnelles ayant une fonction compensatoire ou indemnitaire de celles poursuivant un but exclusivement disciplinaire ou répressif. Il a précisé qu’en vertu du caractère impératif de l’article 312e CO, il n’était pas possible de prévoir dans le contrat de travail une peine conventionnelle ayant une fonction purement compensatoire. S’agissant de la clause pénale ayant une fonction disciplinaire, elle devait, pour être valable en droit du travail, décrire avec précision quel comportement du travailleur emportait quelle sanction. Le montant de la peine, en particulier, devait être déterminé et proportionné. Ce n’était que de cette manière qu’il était possible de s’assurer que l’employeur n’abusait pas du pouvoir disciplinaire que lui conférait le contrat (ATF 144 III 327 consid. 5.2 à 5.5, trad. in SJ 2019 I 121 ; Dunand, in Commentaire du contrat de travail, 2e éd. 2022, n. 53 ad art. 321e CO, pp. 164-165).

Par ailleurs, l'employeur qui entend faire valoir sa créance en réparation du dommage causé par le travailleur doit formuler des réserves explicites au moment de l'accomplissement des actes accompagnant la fin des relations de travail, tels que le paiement du dernier salaire ou d'autres règlements de compte, les formalités éventuelles relatives aux prestations de prévoyance, l'établissement d'un certificat de travail ou encore une cérémonie d'adieux. A défaut, il pourra se voir opposer une renonciation par actes concluants à l'exercice d'une action en réparation (Dunand, in Commentaire du contrat de travail, 2e éd. 2022, n. 57 ad art. 321e CO, pp. 166; Wyler/Heinzer, pp. 167 s.; cf. arrêt 4A_351/2011 du 5 septembre 2011 consid. 2.4.1, dans lequel le Tribunal fédéral a considéré que des réserves antérieures, exprimées par exemple au moment de la notification de la résiliation du contrat de travail, pouvaient perdre leur effet si elles n'étaient pas renouvelées à l'occasion du versement du dernier salaire). Ainsi, la mention de « libre engagement » dans le certificat de travail a pour effet de consacrer une renonciation de l’employeur à toutes les créances dont il a connaissance à ce moment-là (Aubert, in Commentaire du contrat de travail, 2e éd. 2022, n. 37 ad art. 330a CO, p. 626 et les réf. citées) et donc également une renonciation à actionner le travailleur sur la base de l’article 321e CO (Dunand, in Commentaire du contrat de travail, 2e éd. 2022, n. 58 ad art. 321e CO, pp. 166-167).

6.2 En première instance, l'appelante a allégué qu'en transmettant des informations confidentielles à son père, l'intimé avait violé la clause de confidentialité prévue à l'article 17 de son contrat de travail, de sorte qu'il lui devait paiement d'une pénalité à hauteur de 25'000 fr., conformément à l'art. 17.3 dudit contrat.

Le Tribunal a constaté que l'appelante n'avait pas formulé de réserve dans le certificat de travail ni lors du paiement du solde de salaire à l'intimé. Dans la lettre de licenciement, l'appelante avait formulé une réserve concernant l'article 18.3 du contrat de travail, soit la clause de non-concurrence et de non-débauchage, et non en relation avec la peine conventionnelle. En conséquence, pour cette raison déjà, l'appelante ne pouvait prétendre au paiement d'une peine conventionnelle.

L'appelante conteste cette appréciation et fait valoir que la mention "tous droits réservés pour le surplus" dans la lettre de licenciement signifie que le paiement de la peine conventionnelle prévue à l'article 17 du contrat de travail a été dûment réservé.

Comme le relève l'intimé, si l'employeuse a jugé utile, dans le courrier de licenciement, de formuler une réserve explicite s'agissant de la clause de non-concurrence, elle n'en a pas fait de même concernant le paiement de la peine conventionnelle. Certes, le courrier se termine par la mention usuelle " Tous droits réservés pour le surplus". Cela étant dit, il s'avère que l'appelante a ensuite remis un certificat de travail dont il ressort que l'employé partait "libre de ses obligations". De plus, une fiche de salaire pour le mois de février a été remise à l'intimé et ce montant a été payé sans qu'aucune réserve n'ait été faite par l'employeuse.

Au regard de la jurisprudence susmentionnée, il y a lieu d'en conclure que l'appelante a implicitement renoncé à actionner l'intimé sur le fondement de la peine conventionnelle prévue dans le contrat.

Compte tenu de ce qui précède, peut demeurer ouverte la question de savoir si la clause du contrat prévoyant le paiement, par l'employé, d'une peine conventionnelle à hauteur de 25'000 fr. "pour chaque cas de violation" de la clause de confidentialité est suffisamment précise et proportionnée au regard des exigences de la jurisprudence.

Il s'ensuit que l'appelante ne peut prétendre au paiement d'un montant à titre de peine conventionnelle et sera dès lors déboutée de ce chef de conclusion.

7.             Sous réserve du principe de la résiliation immédiate injustifiée des rapports de travail, l'appelante ne soulève pas de grief à l'encontre de sa condamnation en paiement de la somme de 629 fr. 40 nets, avec intérêts moratoires à 5% l’an dès le 22 mars 2022, à titre de part employeur des cotisations LPP. Ce point du jugement sera dès lors confirmé, comme l'intimé y conclut.

8.             Compte tenu de ce qui précède, le jugement entrepris sera entièrement confirmé.

9.             9.1 L'appel et l'appel joint étant infondés, il n'y a pas lieu de revoir les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC a contrario). Les chiffres du dispositif du jugement attaqué y afférents seront donc également confirmés.

9.2 Au regard de la valeur litigieuse supérieure à 50'000 fr., il y a lieu de percevoir des frais judiciaires pour la procédure d'appel (art. 114 let. c cum 116 al. 1 CPC; art. 19 al. 3 let. c LaCC; art. 71 RTFMC). Les frais de l'appel et de l'appel joint seront arrêtés à 1'000 fr. au total (art. 19 al. 3 let. c LaCC; art. 71 RTFMC) et partiellement compensés avec l'avance de frais fournie par l'intimé à hauteur de 450 fr., qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). Compte tenu de l'issue du litige, qui voit chacune des parties être entièrement déboutée de ses conclusions d'appel, respectivement appel joint, ils seront mis à raison de 500 fr. à la charge de chacune d'entre elles.

L'appelante sera en conséquence condamnée à verser 500 fr. et l'intimé 50 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à titre de solde de frais.

La procédure d'appel ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 22 al. 2 LaCC), aucune des parties n'ayant procédé de manière téméraire ou de mauvaise foi.

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :


À la forme
:

Déclare recevables l'appel interjeté par A______ SA et l'appel joint interjeté par B______ contre le jugement JTPH/55/2024 rendu le 14 mars 2024 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/14570/2022.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel et d'appel joint à 1'000 fr., dit qu'ils sont partiellement compensés par l'avance de frais versée par B______, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève, et les met à raison de 500 fr. à la charge de A______ SA et à raison de 500 fr. à la charge de B______.

Condamne en conséquence A______ SA à verser 500 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Condamne en conséquence B______ à verser 50 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à titre de solde des frais judiciaires d'appel et d'appel joint.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens pour la procédure d'appel.

Siégeant :

Madame Stéphanie MUSY, présidente; Madame Nadia FAVRE, Monsieur
Valery BRAGAR, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.


 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.