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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/9833/2019

CAPH/36/2022 du 02.03.2022 sur JTPH/214/2021 ( OO ) , ARRET/CONTRA

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9833/2019-3 CAPH/36/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU 2 mars 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______[GE], appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 11 juin 2021 (JTPH/214/2021), comparant par Me Stefano FABBRO et Me Carlo CECCARELLI, avocats, avenue du Théâtre 14, 1002 Lausanne, en l'Étude desquels il fait élection de domicile,

et

B______ SA, sise ______[GE], intimée, comparant par Me Bénédict FONTANET, avocat, Grand-Rue 25, case postale 3200, 1211 Genève 3, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/214/2021 du 11 juin 2021, reçu le 14 juin 2021 par les parties, le Tribunal des prud'hommes, statuant par voie de procédure ordinaire, a déclaré recevable la demande formée le 3 octobre 2019 par A______ contre B______ SA (ch. 1 du dispositif), débouté celui-ci de ses conclusions (ch. 2), débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 3), arrêté les frais de la procédure à 3'070 fr. 50 (ch. 4), mis ceux-ci intégralement à charge de A______ (ch. 5), les compensant partiellement avec l'avance de frais de 2'510 fr. effectuée par ce dernier qui restait acquise à l'Etat de Genève (ch. 6), condamné A______ à verser la somme de 560 fr. 50 aux Services financiers du pouvoir judiciaire de l'Etat de Genève (ch. 7) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 8).

B.            a. Par acte expédié le 14 juillet 2021 au greffe de la Cour de justice, A______ appelle de ce jugement, dont il sollicite l'annulation, avec suite de frais judiciaires et dépens. Principalement, il conclut à ce que la Cour condamne B______ SA à lui verser les sommes de 151'002 fr. à titre d'arriérés de commissions pour les années 2018 et 2019, 90'000 fr. nets à titre d'indemnité pour licenciement abusif et 10'000 fr. nets à titre d'indemnité pour tort moral, les trois montants portant intérêts à 5% l'an dès le 16 avril 2019. Il conclut également à ce que la Cour condamne B______ SA à lui délivrer immédiatement les fiches de salaire mensuelles et annuelles actualisées et un certificat de travail final. Subsidiairement, il reprend les mêmes conclusions à l'exception du premier montant qu'il remplace par USD 151'002.-. Plus subsidiairement, il conclut à ce que la cause soit retournée aux premiers juges.

b. Dans sa réponse, B______ SA conclut à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et dépens.

c. Les parties ont répliqué, respectivement dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées le 19 octobre 2021 de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les éléments pertinents suivants résultent de la procédure :

a.a B______ SA (ci-après également : l'employeuse) est une société de droit suisse, ayant son siège à Genève, dont le but est de fournir des prestations de services, courtage, représentation et gestion pour le compte de tiers dans le domaine maritime, ainsi que le courtage dans d'autres domaines.

a.b C______, société anonyme monégasque, a notamment pour but l'intermédiation sous toutes ses formes dans le commerce de tous navires et bateaux, la prestation de tous services relatifs à ceux-ci et l'activité de séquestre.

a.c Bien que faisant partie du même groupe, il n'existe aucun lien opérationnel, vu la nature fondamentalement différente des activités, entre B______ SA et C______ La première s'affaire à conclure des contrats de location de bateaux sur une période à court terme, visant le transport de marchandise d'un point à un autre. La seconde s'occupe de développer une activité sur le long terme en louant des bateaux sur une période de plusieurs mois.

b. A______ (ci-après également : le travailleur) a été engagé par B______ SA, en qualité de directeur, à partir du 1er août 2015, par contrat de travail à durée indéterminée signé le 26 mai 2015.

Le salaire annuel brut convenu était de 180'000 fr., soit 15'000 fr. par mois, versé douze fois l'an.

c. Le contrat prévoyait également une clause relative au bonus à la teneur suivante : "B______ SA peut également verser à l'employé à bien plaire un bonus en fonction des résultats de la société et de ses prestations personnelles".

d. Selon un document signé par les parties le même jour que le contrat de travail, les parties ont précisé que "l'accord sur le bonus est le suivant : trente-cinq pourcent de l'encaissé va en faveur du salarié i.e. coût du salaire et bonus. Cela revient à dire : 1'000'000 encaissé, 350'000 la somme qui va au courtier, i.e. le coût du salaire (coût pour la société) et le bonus i.e. si le coût est coût 110'000 bonus est 250'000, payable à l'encaissement. Acompte versé en avril, août et solde en décembre. S'il existe des raisons exceptionnelles de faire autrement, le courtier et notre responsable des rémunérations en parlent sereinement et trouvent une solution".

A______ a déclaré au Tribunal à cet égard qu'il s'agissait d'une commission et non d'un bonus, le bonus étant discrétionnaire alors que la commission calculée.

B______ SA a, quant à elle, allégué que le contrat de travail était clair et qu'il faisait mention expressément d'un bonus, et non pas d'une commission, dont le versement dépendait exclusivement de sa libre appréciation. Elle a déclaré en outre au Tribunal que c'était à la demande expresse du travailleur qu'elle avait précisé le mode de calcul du bonus sur papier, après le lui avoir expliqué oralement. En 50 ans d'activités et avec plus de 250 employés dans le monde, elle n'avait jamais écrit cette formule et celle-ci n'avait jamais été demandée. Ce document ne remplaçait pas la clause figurant dans le contrat de travail. Il avait pour seul et unique finalité de décomposer et d'expliquer le mode de calcul du bonus contractuel et discrétionnaire, si celui-ci était accordé à un employé. En aucun cas ce document avait eu pour vocation de remplacer la clause contractuelle prévoyant un bonus discrétionnaire.

e. Au début de l'année 2017, A______ a exprimé à son employeuse sa volonté de ne plus travailler pour elle mais pour C______.

B______ SA a expliqué que la volonté de A______ était de travailler en collaboration étroite avec un courtier monégasque, D______, dit "E______", E______ et ce, afin de développer un nouveau modèle d'affaires.

F______, administrateur délégué de C______, entendu en qualité de témoin, a déclaré qu'un contrat de mise à disposition du travailleur avait été conclu entre B______ SA et C______ afin que le travailleur reste employé par la première mais dédié complètement à la seconde.

f. A la demande de A______, B______ SA a loué à partir du 1er avril 2017 un local indépendant à Genève afin qu'il puisse y exercer son activité pour C______.

Selon le témoin F______, A______ ne voulait pas que ses collègues entendent ce qu'il disait, raison pour laquelle il voulait travailler dans un bureau séparé dans lequel il serait seul.

g. Au mois de mai 2017, A______ a été retiré des forums de discussions Skype et WhatsApp de B______ SA. Il s'en est plaint par SMS auprès d'un collègue.

B______ SA a exposé que ces forums avaient été créés par certains courtiers travaillant pour les diverses représentations de B______ à travers le monde afin d'échanger des informations pour développer leurs activités et leur propre clientèle. Si le travailleur avait été retiré de ces forums, c'était parce qu'il travaillait pour le compte de C______, structure totalement indépendante et séparée des autres représentations du groupe B______ à travers le monde.

Le témoin F______ a confirmé que C______ ne faisait pas partie du groupe de discussion entre courtiers. A______, du fait qu'il travaillait pour C______, ne pouvait dès lors pas faire partie de ce groupe. Il avait été informé que quand il rejoindrait C______ pour y travailler, il n'aurait plus accès à certains groupes WhatsApp ou Skype qui étaient plutôt des échanges d'informations que des forums de discussions.

G______, assistante de E______, entendue en qualité de témoin, a déclaré que depuis que A______ travaillait pour C______, il ne faisait plus partie de groupes de discussions entre courtiers, du fait que le travail qu'il faisait pour C______ ne nécessitait pas de faire partie de ces groupes. E______ n'avait pas non plus accès aux différents groupes de discussions WhatsApp et Skype puisqu'il travaillait exclusivement au moyen d'une adresse email privée. Compte tenu du fait que A______ allait travailler avec E______, elle estimait qu'il avait conscience qu'il n'allait plus avoir accès auxdits groupes de discussions.

h. Au mois de janvier 2018, A______ s'est vu retirer ses accès à ses emails au sein de B______ SA. Il s'en est plaint par SMS auprès d'un collègue.

A______ a déclaré au Tribunal que, sans ces accès, il lui était quasiment impossible de travailler correctement, car il ne lui restait que le téléphone et il ne pouvait pas formuler d'offre.

B______ SA a expliqué que A______, qui bénéficiait d'une adresse email C______.com et non B______.ch, était parfaitement conscient de cette réalité lorsqu'il avait exigé de son employeuse de travailler exclusivement pour C______.

i. A______ a été en incapacité de travail du 26 au 31 mars 2018 et du 11 au 30 juin 2018.

j. Dans une attestation médicale datée du 9 mai 2018, le Dr H______, médecin traitant de A______, a indiqué que ce dernier présentait des "troubles médicaux suite à des conflits importants à son travail". Le médecin préconisait, en conséquence, qu'il puisse s'abstenir de se rendre sur son lieu de travail.

k. Dans un courriel du 2 juillet 2018 adressé à F______, A______ lui a indiqué que, les choses ne se déroulant pas comme espéré, il proposait la mise en place d'une structure indépendante. Concernant les projets futurs entre B______ SA et I______ (ci-après : I______), société dont il était l'un des gérant avec signature individuelle, il proposait que 10% à 20% des commissions seraient acquises à I______ et 80% à 90% seraient à partager par moitié entre lui et B______ SA. S'il quittait B______ SA ou était licencié, I______ cesserait de payer B______ SA. En cas de désaccord de B______ SA avec cette proposition, il demandait à parler de l'accord et quitterait immédiatement la société.

l. Le 10 juillet 2018, B______ SA a résilié le contrat de travail de A______ par courrier recommandé avec effet au 31 octobre 2018 et l'a libéré de son obligation de travailler pendant son délai de congé.

m. Par courrier du 4 septembre 2018, l'employé a requis les motifs de son licenciement, ce à quoi l'employeur a répondu, le 21 septembre 2018, que son travail ne répondait plus aux attentes de la société.

n. Le 28 septembre 2018, A______ a formé opposition à son licenciement.

o. Le 31 octobre 2018, la société a établi un certificat de travail mentionnant uniquement le poste occupé par A______ ainsi que ses dates de début et de fin d'engagement.

p. A teneur de ses certificats de salaire, A______ n'a, durant son engagement, perçu aucun montant, en sus de son salaire fixe, à titre de bonus ou de commission.

q. Par courrier du 15 mars 2019, A______ a mis en demeure B______ SA de lui verser le montant de 251'002 fr. dans un délai de 30 jours dès réception dudit courrier. Il a expliqué que, sur la base du document signé le même jour que le contrat de travail et compte tenu de deux contrats conclus par B______ SA avec I______ par son intermédiaire qui ont rapporté à celle-ci un montant de USD 431'437.-, il avait droit à une commission de 35%, soit un montant brut de 151'002 fr. Par ailleurs, il estimait avoir été licencié en raison du fait qu'il réclamait le paiement de ladite commission, ce qui constituait un licenciement abusif, de sorte qu'il réclamait une indemnité à ce titre correspondant à six mois de salaire, soit 90'000 fr. nets. En outre, il avait été systématiquement mis à l'écart depuis 2017 pour le pousser à la démission, avait été exclu de toute communication ne lui permettant ainsi plus d'effectuer son travail et s'était vu, sans motif, retirer l'accès à ses emails le 21 mai 2018 alors qu'il était encore sous contrat. Ces agissements avaient dégradé son état de santé, de sorte qu'il réclamait une indemnité pour tort moral de 10'000 fr. nets. Enfin, il réclamait la délivrance d'un certificat de travail "en bonne et due forme" sous 5 jours ouvrables.

r. Par demande du 26 avril 2019, déclarée non conciliée le 5 juin 2019, et introduite devant le Tribunal des prud'hommes le 3 octobre 2019, A______ a assigné B______ SA en paiement de la somme totale de 251'004 fr., avec suite de frais et dépens. Ladite somme se décompose de la manière suivante:

-        151'002 fr. bruts, plus intérêts à 5% l'an dès le 16 avril 2019, à titre d'arriérés de commissions;

-        90'000 fr. nets, plus intérêts à 5% l'an dès le 16 avril 2019, à titre d'indemnité pour licenciement abusif;

-        10'000 fr. nets, plus intérêts à 5% l'an dès le 16 avril 2019, à titre d'indemnité pour tort moral.

Il a également conclu à la délivrance d'un certificat de travail final, dont il a chiffré la valeur à 1 fr., et de ses fiches de salaire mensuelles et annuelles actualisées, également chiffrées à 1 fr.

s. Dans sa réponse, B______ SA a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions.

t. Le Tribunal a procédé à l'audition des parties et de plusieurs témoins, dont les déclarations ont été intégrées dans la mesure utile à l'état de faits retenu ci-dessus.

Il ressort pour le surplus des enquêtes ce qui suit :

t.a Au sujet des pressions subies, A______ a indiqué qu'elles avaient été répétées et qu'elles avaient débuté environ six mois après le début de son activité au sein de B______ SA. Un membre du conseil d'administration de son employeuse avait souhaité modifier son contrat de travail en lui faisant perdre son statut de directeur, ce qu'il avait refusé. A______ avait interpellé un membre du conseil d'administration de C______ afin, d'une part, de réclamer le versement des commissions qui lui étaient dues et, d'autre part, de proposer un changement de structure qui lui permettrait de travailler sereinement tout en percevant des commissions sur les affaires qu'il aurait conclues. On lui avait demandé d'écrire un courriel relatant cette proposition. Une réunion lui avait alors été proposée. Alors qu'il pensait qu'ils allaient discuter de cette proposition, il avait été licencié. Lors de l'entretien, il lui avait été indiqué que sa proposition avait fâché un membre du conseil d'administration. Après l'entretien de licenciement, son employeuse lui avait dit qu'il n'avait pas réalisé les performances attendues, mais elle ne lui avait jamais donné d'objectifs à atteindre et il n'avait jamais reçu de mise en garde ou d'avertissement. Selon lui, son employeuse l'avait licencié afin de ne pas lui payer le salaire et les commissions dues.

t.b B______ SA a contesté l'existence des pressions psychologiques alléguées par le travailleur et indiqué que ce dernier ne s'était jamais plaint de subir pareilles pressions ni n'en avait même jamais fait mention à sa hiérarchie. Les débuts de la relation contractuelle avaient été bons, puis la situation s'était dégradée progressivement. A______ devenait de plus en plus suspicieux à l'endroit de ses collègues de travail et sortait systématiquement de l'espace de travail ouvert pour s'isoler lorsqu'il devait téléphoner. Cette façon de procéder suscitait l'incompréhension et un certain malaise de la part de ses collègues. Les coûts liés à la nouvelle activité de A______ et notamment, la location du bureau indépendant, avaient été refacturés à C______.

B______ SA a également déclaré que la décision de procéder au licenciement de A______ avait été prise en raison de la situation générale qui n'avait cessé de se détériorer au fil du temps et ce malgré les nombreuses démarches constructives effectuées pour tenter de trouver des solutions consensuelles aux multiples sollicitations du travailleur. Les performances de ce dernier étaient également problématiques et insatisfaisantes. Finalement, le fait qu'il avait menacé B______ SA de faire interrompre toutes relations contractuelles entre elle et un de ses clients, I______, avait définitivement rendu la suite de la collaboration impossible.

u. A l'issue de l'administration des preuves, les parties ont plaidé et le Tribunal a gardé la cause à juger.

D.           Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu que les parties avaient convenu d'un potentiel versement d'un bonus et non d'une commission. Ce bonus prévu contractuellement ne constituait pas une gratification obligatoire puisque le principe du versement du bonus n'était pas acquis de manière systématique. Le document signé le même jour que le contrat de travail ne remettait pas en question l'existence du bonus ou son caractère discrétionnaire. A______ n'avait ainsi pas droit au versement de 151'002 fr. Le Tribunal a ensuite relevé que l'appelant s'était mis lui-même à l'écart et avait finalement menacé l'intimée de faire interrompre toutes relations contractuelles entre celle-ci et I______ si ses exigences n'étaient pas satisfaites, ce qui avait définitivement rompu le lien de confiance entre les parties. L'employeuse n'avait ainsi pas invoqué de motif illicite à l'appui de son licenciement. Faute de licenciement abusif, de comportement ou de faits indépendants démontrant une atteinte à la personnalité de A______, une indemnité pour tort moral n'était pas justifiée. Il n'y avait dès lors pas lieu de condamner B______ SA à délivrer des fiches de salaires mensuelles et annuelles actualisées. S'agissant du certificat de travail, A______, assisté d'un conseil, n'avait pas expliqué les modifications qu'il souhaitait apporter au certificat de travail que son employeuse lui avait délivré, de sorte qu'il devait également être débouté de sa conclusion à ce titre.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et incidentes lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

En l'espèce, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Déposé dans le délai utile de trente jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs qui sont formulés (arrêts du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5; 5A_89/2014 du 15 avril 2014 consid. 5.3.2). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (art. 157 CPC en lien avec l'art. 310 let. b CPC; ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4D_72/2017 du 19 mars 2018 consid. 2).

En l'espèce, l'appelant n'a pas motivé son grief s'agissant du refus du Tribunal de modifier le certificat de travail. La Cour n'entrera dès lors pas en matière sur ce point.

1.4 Dans la mesure où la valeur litigieuse est supérieure à 30'000 fr., les maximes de débats (art. 55 al. 1 et 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC) sont applicables. La présente cause est en outre régie par la procédure ordinaire (art. 243 al. 1 et 2 a contrario CPC).

2.             L'appelant reproche au Tribunal d'avoir retenu que l'avenant au contrat du 26 mai 2015 concernait le calcul du bonus prévu dans le contrat auquel l'appelant n'avait pas droit. Ce dernier soutient qu'il s'agit d'une commission à laquelle il a droit puisque deux contrats ont été conclus par l'intimée grâce à lui.

2.1 A teneur de l'article 322 al. 1 CO, l'employeur paie au travailleur le salaire convenu, usuel ou fixé par un contrat-type de travail ou par une convention collective.

En droit suisse, la rémunération du travailleur obéit au principe de la liberté contractuelle: le salaire convenu fait foi (Wyler/Heinzer, Droit du travail, 4e éd., 2019, p. 183).

2.1.1 S'il est convenu que le travailleur a droit à une provision sur certaines affaires, elle lui est acquise dès que l'affaire a été valablement conclue avec le tiers (art. 322b al. 1 CO).

2.1.2 Selon l'article 322d al. 1 CO, si l'employeur accorde en sus du salaire une rétribution spéciale à certaines occasions, telles que Noël ou la fin de l'exercice annuel, le travailleur y a droit lorsqu'il en a été convenu ainsi.

D'après l'article 322d al. 2 CO, en cas d'extinction des rapports de travail avant l'occasion qui donne lieu à la rétribution spéciale, le travailleur n'a droit à une part proportionnelle de cette rétribution que s'il en a été convenu ainsi.

Le droit suisse ne contient aucune disposition qui traite spécifiquement du bonus, lequel peut consister dans le versement d'une somme d'argent ou encore dans la remise d'actions ou d'options (ATF 145 V 188 consid. 5.2.2 ; 141 III 407 consid. 4.1).

2.1.3 Dans plusieurs arrêts récents, le Tribunal fédéral a eu l'occasion de résumer l'ensemble de sa jurisprudence relative aux bonus (arrêts du Tribunal fédéral 4A_327/2019 du 1er mai 2020 consid. 3.1; 4A_230/2019 du 20 septembre 2019 consid. 3).

Il en résulte qu'il faut distinguer les trois cas suivants: (1) le salaire variable, (2) la gratification à laquelle l'employé a droit et (3) la gratification à laquelle il n'a pas droit.

On se trouve dans le cas n° 1 lorsqu'un montant (même désigné comme bonus ou gratification) est déterminé ou objectivement déterminable, c'est-à-dire qu'il a été promis par contrat dans son principe et que son montant est déterminé ou doit l'être sur la base de critères objectifs prédéterminés comme le bénéfice, le chiffre d'affaires ou une participation au résultat de l'exploitation, et qu'il ne dépend pas de l'appréciation de l'employeur; il doit alors être considéré comme un élément du salaire (variable), que l'employeur est tenu de verser à l'employé (art. 322 s. CO; ATF 141 III 407 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_327/2019 précité consid. 3.1.1).

En revanche, on se trouve en présence d'une gratification – dans les cas n° 2 et 3 – lorsque le bonus est indéterminé ou objectivement indéterminable, c'est-à-dire que son versement dépend du bon vouloir de l'employeur et que sa quotité dépend pour l'essentiel de la marge de manœuvre de celui-ci (ATF 141 III 407 consid. 4.1 et 4.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_327/2019 précité consid. 3.1.2). La jurisprudence reconnaît à l'employeur un tel pouvoir d'appréciation lorsque le montant du bonus ne dépend pas seulement de l'atteinte d'un certain résultat d'exploitation, mais aussi de l'appréciation subjective de la prestation du travailleur; le bonus doit alors être qualifié de gratification (ATF 142 III 381 consid. 2.1; 139 III 155 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_327/2019 précité ibidem).

Il y a un droit à la gratification – cas n° 2 – lorsque, par contrat, les parties sont tombées d'accord sur le principe du versement d'un bonus et n'en ont réservé que le montant; il s'agit d'une gratification que l'employeur est tenu de verser, mais il jouit d'une certaine liberté dans la fixation du montant à allouer (ATF 136 III 313 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_327/2019 précité consid. 3.1.3.1).

Il n'y a pas de droit à la gratification – cas n° 3 – lorsque, par contrat, les parties ont réservé tant le principe que le montant du bonus; il s'agit alors d'une gratification facultative; le bonus n'est pas convenu et l'employé n'y a pas droit, sous réserve de l'exception découlant de la nature de la gratification (principe de l'accessoriété) lorsque les salaires sont modestes ou moyens et supérieurs, ce principe étant en revanche inapplicable pour les très hauts revenus (arrêt du Tribunal fédéral 4A_327/2019 précité consid. 3.1.3.2).

Pour qualifier un bonus, il faut interpréter les manifestations de volonté des parties lors de la conclusion du contrat ou de leur comportement ultérieur au cours des rapports de travail (accord par actes concluants, c'est-à-dire tacite), selon les règles générales d'interprétation. Le juge doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune volonté des parties, en se fondant non seulement sur la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales –, mais encore sur le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes. Ce n'est que lorsque la volonté subjective des parties ne peut être établie qu'il y a lieu de recourir au principe de la confiance, à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre (ATF 141 III 407 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_463/2017 du 4 mai 2018 consid. 4; 4A_714/2016 du 29 août 2017 consid. 3, 5.1 et 5.2).

Subsidiairement, si l'interprétation selon le principe de la confiance ne permet pas de dégager le sens de clauses ambiguës, celles-ci sont à interpréter en défaveur de celui qui les a rédigées, en vertu de la règle "in dubio contra stipulatorem" (ATF 133 III 61 consid. 2.2.2.3; 122 III 118 consid. 2a).

2.2 En l'espèce, les parties s'opposent sur la question de savoir si l'avenant au contrat de travail concerne le droit du travailleur à percevoir une commission sur les affaires apportées par celui-ci, soit un élément du salaire, ou un bonus au sens prévu dans le contrat de travail dont le versement à l'appelant est discrétionnaire.

2.2.1 Il y a lieu de relever tout d'abord que le contrat de travail ne prévoit, outre le salaire fixe, que le paiement d'un éventuel bonus, discrétionnaire et en fonction des prestations personnelles du travailleur. Il n'est en aucun cas question de paiement d'une commission sur les affaires apportées par celui-ci. Par ailleurs, l'avenant au contrat de travail mentionne également uniquement "l'accord sur le bonus" et n'emploie pas non plus le terme "commission" ou "provision". Bien que les expressions ou la dénomination utilisées ne soient pas déterminantes, rien au dossier ne permet de constater que celles-ci ne correspondaient pas à la réelle et commune intention des parties. L'utilisation du terme "bonus" apparaît au contraire adéquate compte tenu du complément "à bien plaire" et de l'usage de la forme potestative dans la clause contractuelle, ce qu'une personne sans formation juridique tel que l'appelant pouvait comprendre lors de la signature. En outre, le fait que le versement du "bonus" dépend non seulement des résultats de la société mais également des prestations personnelles du travailleur indique clairement le caractère de gratification dudit versement.

A cela s'ajoute que l'avenant au contrat ne mentionne pas qu'il modifie les clauses de la rémunération de l'appelant ou du bonus discrétionnaire prévues dans le contrat de travail. Le fait que l'intimée ait accepté de rédiger un tel avenant, pour la première fois en 50 ans d'activité, à la demande de l'appelant, ne permet pas à lui seul de démontrer que les parties ont voulu déroger au contrat de travail. Du côté de l'appelant, le fait qu'il ait sollicité la rédaction de cet avenant n'est pas non plus apte à prouver que celui-ci servait à déroger au contrat de travail sur la question de la rémunération. Il apparaît au contraire, comme le soutient l'intimée, que les parties avaient voulu de la sorte expliciter la méthode de calcul d'un éventuel bonus et qu'elles se sont entendues sur ce point. Ceci est d'autant plus vrai que l'avenant et le contrat ont été signés le même jour.

De plus, comme relevé par le Tribunal, l'appelant n'a réclamé auprès de l'intimée le paiement d'un "bonus" ou d'une "commission" qu'après trois ans d'activités au sein de celle-ci. Si, dans son esprit, les documents contractuels prévoyaient, en sus du salaire fixe, le paiement d'un salaire variable tel une "commission" ou une "provision", il aurait fait valoir ses prétentions bien plus tôt, ce qu'il n'a pas fait. Ceci démontre encore une fois qu'il avait compris que les documents contractuels prévoyaient le versement d'un "bonus" discrétionnaire et non d'une "commission" ou "provision" à laquelle il aurait droit.

Au vu de ce qui précède, à l'instar de ce qu'ont retenu les premiers juges, les parties avaient une réelle et commune intention de prévoir une éventuelle gratification dans les documents contractuels. Il n'y a dès lors pas lieu de procéder à une interprétation objective ni à une interprétation "in dubio contra stipulatorem" des documents contractuels.

Reste à déterminer si l'appelant avait droit au versement de la gratification.

2.2.2 Comme précédemment exposé, le versement de la gratification dépend non seulement des résultats de l'intimée mais également des prestations personnelles de l'appelant. La formulation (potestative) de la clause prévue dans le contrat de travail ainsi que la précision "à bien plaire" donne en outre un large pouvoir d'appréciation à l'intimée. Par ailleurs, l'avenant au contrat est formulé de manière très sommaire et imprécise et comporte des erreurs de calcul, ce qui démontre une fois de plus le caractère indéterminable de l'éventuelle gratification. Il y a également lieu de relever qu'aucune gratification n'a été versée durant les rapports de travail. Ainsi, tant le principe que le montant étant réservés, force est de constater, à l'instar de ce qu'a fait le Tribunal, que la gratification prévue dans les documents contractuels était facultative et que l'appelant n'y a par conséquent pas droit, l'exception découlant de la nature de la gratification (principe de l'accessoriété) n'étant pas applicable.

A la lumière des éléments qui précèdent, c'est à juste titre que le Tribunal a débouté l'appelant de sa conclusion en paiement du montant de 151'002 fr. au titre "d'arriéré de commissions" ou de gratification.

3.             L'appelant reproche au Tribunal de l'avoir débouté de ses conclusions en paiement d'une indemnité pour licenciement abusif et pour tort moral. Il soutient en effet d'une part avoir été licencié en raison de sa demande de versement de l'arriéré des commissions – qu'il conteste avoir formulé en menace – et, d'autre part, d'avoir subi un harcèlement puisqu'il avait été délibérément mis à l'écart pour justifier ensuite une dégradation de la qualité de son travail puis son licenciement.

3.1 Chaque partie peut décider unilatéralement de mettre fin à un contrat de durée indéterminée (art. 335 al. 1 CO). En droit suisse du travail prévaut la liberté de la résiliation, de sorte que, pour être valable, un congé n'a en principe pas besoin de reposer sur un motif particulier (ATF 131 III 535 consid. 4.1). Ce droit est toutefois limité par les dispositions sur le congé abusif (art. 336 ss CO). L'abus est en principe retenu lorsque le motif invoqué n'est qu'un simple prétexte tandis que le véritable motif n'est pas constatable (ATF 130 III 699 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_224/2018 du 28 novembre 2018 consid. 3.1). Pour dire si un congé est abusif, il faut se fonder sur son motif réel (ATF 136 III 513 consid. 2.3 in fine; arrêt du Tribunal fédéral 4A_428/2019 du 16 juin 2020 consid. 4.1). L'art. 336 CO énonce une liste non exhaustive de cas de résiliation abusive, concrétisant l'interdiction générale de l'abus de droit (ATF 136 III 513 consid. 2.3; 131 III 535 consid. 4.2).

3.1.1 Est notamment abusif le congé dit de représailles (ou de vengeance) donné par une partie parce que l'autre partie fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail (art. 336 al. 1 let. d CO).

Les prétentions résultant du contrat de travail portent notamment sur des salaires, des primes ou des vacances ou encore sur un droit à la protection de sa personnalité au sens de l'art. 328 CO. L'employé doit être de bonne foi, laquelle est présumée (art. 3 al. 1 CC). Il importe peu qu'en réalité, sa prétention n'existe pas (ATF 136 III 513 consid. 2.4). Il suffit qu'il soit légitimé, de bonne foi, à penser que sa prétention est fondée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_401/2016 du 13 janvier 2017 consid. 5.1.1).

Les prétentions émises par l'employé doivent encore avoir joué un rôle causal dans la décision de l'employeur de le licencier (ATF 136 III 513 consid. 2.6). Le fait que l'employé émette de bonne foi une prétention résultant de son contrat de travail n'a pas nécessairement pour conséquence de rendre abusif le congé donné ultérieurement par l'employeur. Encore faut-il que la formulation de la prétention en soit à l'origine et qu'elle soit à tout le moins le motif déterminant du licenciement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_310/2019 du 10 juin 2020 consid. 5.2; 4A_652/2018 du 21 mai 2019 consid. 4.1).

3.1.2 Le congé est abusif notamment lorsqu'il est donné par une partie pour une raison inhérente à la personnalité de l'autre partie, à moins que cette raison n'ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l'entreprise (art. 336 al. 1 let. a CO). Le licenciement n'est en principe pas abusif lorsque le congé est donné à l'employé qui, en raison de son caractère difficile, crée une situation conflictuelle nuisant notablement au travail en commun, à condition toutefois que l'employeur ait pris toutes les mesures que l'on pouvait attendre de lui pour désamorcer le conflit (ATF 132 III 115 consid. 2.2, trad. in JdT 2006 I p. 152; arrêt du Tribunal fédéral 4A_42/2018 du 5 décembre 2018 consid. 3.1).

3.1.3 En principe, une exécution insatisfaisante de la prestation de travail est reconnue comme valant un motif légitime de licenciement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_139/2008 du 20 juin 2008 consid. 4). Toutefois, un licenciement motivé par une baisse de la qualité du travail de l'employé peut s'avérer abusif lorsque cette baisse de rendement est consécutive au harcèlement subi par le travailleur (ATF 125 III 70 consid. 2a-b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_159/2016 du 1er décembre 2016 consid. 3.1).

3.1.4 Selon l'art. 328 al. 1 CO, l'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur. Il manifeste en particulier les égards voulus pour sa santé.

Les actes de harcèlement psychologique sont prohibés par l'art. 328 al. 1 CO. Selon le Tribunal fédéral, le harcèlement psychologique, appelé aussi "mobbing", se définit comme un enchainement de propos et/ou d'agissements hostiles, répétés fréquemment pendant une période assez longue, par lesquels un ou plusieurs individus cherchent à isoler, à marginaliser, voire à exclure une personne sur son lieu de travail. La victime est souvent placée dans une situation où chaque acte pris individuellement, auquel un témoin a pu assister, peut éventuellement être considéré comme supportable, alors que l'ensemble des agissements constitue une déstabilisation de la personnalité, poussé jusqu'à l'élimination professionnelle de la personne visée (arrêts du Tribunal fédéral 4A_652/2018 du 21 mai 2019 consid. 5.1; 4D_72/2017 du 19 mars 2018 consid. 8.2; 4A_159/2016 du 1er décembre 2016 consid. 3.1; 4A_439/2016 du 5 décembre 2016 consid. 5.2).

3.1.5 Lorsque le salarié subit une atteinte à sa personnalité qui découle de son licenciement abusif, l'indemnité de l'article 336a CO comprend en principe la réparation du tort moral (Dunand, Commentaire du contrat de travail, 2013, n. 27 ad art. 336a CO). Le Tribunal fédéral admet toutefois l'application cumulative de l'article 49 CO dans des situations exceptionnelles, lorsque l'atteinte portée aux droits de la personnalité du travailleur est grave au point qu'une indemnité correspondant à six mois de salaire ne suffit pas à la réparer (ATF 135 III 405 consid. 3.1).

3.1.6 Chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu’elle allègue pour en déduire son droit (art. 8 CC).

La preuve du caractère abusif du congé incombe à la partie à laquelle celui-ci est signifié (ATF 130 III 699 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_240/2017 du 14 février 2018 consid. 3). Cependant, la preuve ayant souvent pour objet des éléments subjectifs, le juge peut présumer en fait l'existence d'un congé abusif lorsque l'employé parvient à présenter des indices suffisants pour faire apparaître comme fictif le motif avancé par l'employeur, et le motif abusif plus plausible. Cette présomption de fait n'a cependant pas pour effet de renverser le fardeau de la preuve. La partie demanderesse doit alléguer et offrir un commencement de preuve d'un motif abusif de congé. De son côté, l'employeur ne saurait alors demeurer inactif; il n'a pas d'autre issue que de fournir des preuves à l'appui de ses propres allégations quant au motif du congé (ATF 130 III 699 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_408/2011 du 15 novembre 2011; Dunand, Commentaire du contrat de travail, 2013, n. 17 ad art. 336 CO).

3.2 En l'espèce, s'agissant de la prétendue mise à l'écart alléguée par l'appelant, il y a lieu de relever qu'il a lui-même formulé une demande pour s'extraire physiquement de l'équipe de l'intimée et développer un nouveau modèle d'affaires pour une autre entité du groupe. Il s'est ainsi retrouvé seul dans un bureau, hors de l'espace de travail de l'intimée, à sa demande. Malgré ses allégations, l'appelant n'a pas démontré avoir fait l'objet de pressions. Il ne s'en est d'ailleurs jamais plaint auprès de sa hiérarchie, de ses collègues ou même auprès de proches. Ce n'est que lorsqu'il a été exclu des forums de discussions WhatsApp et Skype et que son accès aux emails au sein de l'intimée a été retiré, qu'il s'est plaint par SMS auprès de ses collègues, de cette mise à l'écart. Or, l'appelant aurait dû se rendre compte qu'une fois qu'il travaillerait pour une entité du groupe qui n'avait aucun lien opérationnel avec l'intimée, il ne pourrait plus avoir accès aux forums de discussions précités. C'est d'ailleurs ce qu'a confirmé la témoin G______, le témoin F______ affirmant même que l'appelant avait été informé de cela au préalable. En outre, l'appelant aurait dû se rendre compte que, du fait que les adresses emails étaient différentes d'une entité à l'autre, il n'aurait plus accès à ses emails au sein de l'intimée à compter du moment où il travaillerait pour l'entité monégasque. Son étonnement à propos de ces deux points, marqué par l'envoi des SMS à ses collègues, ne permet pas de renverser la conviction acquise par la Cour, à savoir que l'appelant n'a subi aucune atteinte à la personnalité de la part de l'intimée. Celle-ci a, au contraire, entrepris toutes les démarches en son pouvoir pour satisfaire les diverses demandes de l'appelant.

N'est pas non plus établi le congé de représailles allégué par l'appelant. En effet, le courriel du 2 juillet 2018 envoyé par l'appelant à l'administrateur délégué de C______ ne comporte pas de demande de paiement du bonus ou de l'arriéré de commissions, la première demande dans ce sens ayant été formulée après le licenciement de l'appelant, à savoir par courrier du 15 mars 2019. Le courriel litigieux indique que les "choses ne se déroul[ent] pas comme espéré", sans autre précision, puis traite uniquement du partage de commissions pour les "projets futurs" entre les parties et I______. L'appelant ne démontre ainsi pas le lien entre la demande de paiement de la gratification pour les projets passés et le partage des commissions proposé dans son courriel du 2 juillet 2018. Ainsi, le fait que l'appelant ait été congédié quelques jours après l'envoi de ce courriel n'apparaît pas en lien avec une éventuelle demande en paiement de la gratification pour les contrats déjà conclus.

Il est au contraire plus vraisemblable que c'est en raison de la dégradation des rapports de travail, de la nouvelle requête de l'appelant et du ton utilisé dans le courriel litigieux que l'appelant a été licencié. En effet, ce courriel pouvait être compris par l'intimée comme une menace, ce même si l'appelant n'avait en réalité pas cette intention. La formulation utilisée indique clairement qu'en l'absence d'accord s'agissant de la proposition articulée, il souhaitait discuter d'une solution de sortie et que la société I______, dont il était le gérant, cesserait de payer l'intimée. Alors que celle-ci s'était plusieurs fois montrée conciliante durant les rapports de travail, l'appelant avait formulé cette menace après s'être volontairement et délibérément désolidarisé de l'équipe de l'intimée et avoir constaté que les affaires auprès de cette nouvelle entité ne se développaient pas dans le sens espéré, ce qui avait eu pour conséquence, comme l'a retenu le Tribunal, de rompre définitivement les liens de confiance entre les parties.

Compte tenu de ce qui précède, le motif invoqué par l'intimée, à savoir que le travail fourni par l'appelant ne correspondait plus aux attentes de l'intimée, apparaît être le motif légitime du licenciement. C'est par conséquent à juste titre que le Tribunal a débouté l'appelant de ses conclusions en paiement d'une indemnité pour licenciement abusif.

3.2 A défaut d'avoir établi une atteinte à la personnalité de l'appelant causée par l'intimée, en lien ou non avec le licenciement, l'appelant doit également être débouté de sa conclusion en paiement d'une indemnité pour tort moral. Le seul fait d'avoir été en incapacité de travail en raison d'un conflit au travail ne permet en effet pas de démontrer le harcèlement allégué par l'appelant.

Aucune des prétentions financières de l'appelant n'ayant été reconnue, il n'y a pas lieu de condamner l'intimée à délivrer de nouvelles fiches de salaire mensuelles et annuelles.

Le jugement entrepris sera par conséquent intégralement confirmé.

4.             4.1 La valeur litigieuse étant supérieure à 50'000 fr., les frais judiciaires seront arrêtés à 2'500 fr., mis à la charge de l'appelant qui succombe intégralement et compensés avec l'avance de frais de même montant qu'il a versée et qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 95 al. 2, 96, art. 105 al. 1, 106 al. 1, 111 al. 1 CPC; art. 19 al. 3 let. c LaCC; art. 71 RTFMC).

4.2 Il n'est pas alloué de dépens d'appel dans les causes soumises à la juridiction des prud'hommes (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 3 :

A la forme :

Déclare recevable l'appel formé le 14 juillet 2021 par A______ contre le jugement JTPH/214/2021 rendu le 11 juin 2021 par le Tribunal des Prud'hommes dans la cause C/9833/2019-3.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais d'appel :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 2'500 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de frais de même montant versée par lui qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Monsieur Claudio PANNO, juge employeur; Madame Monique LENOIR; juge salariée; Madame Chloé RAMAT, greffière.

 

 


 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.