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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/3658/2022

ACJC/1674/2023 du 18.12.2023 sur JTBL/394/2023 ( OBL ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3658/2022 ACJC/1674/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 18 DECEMBRE 2023

 

Entre

Madame A______, Monsieur B______, Madame C______ et Monsieur D______, p.a. E______ [régie immobilière], ______, appelants d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 19 mai 2023, tous représentés par
Me Jacopo RIVARA, avocat, rue Robert-Céard 13, 1204 Genève,

et

Monsieur F______, domicilié ______, intimé, représenté par l'ASLOCA, rue
du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/394/2023 du 19 mai 2023, le Tribunal des baux et loyers a annulé le congé notifié le 21 janvier 2022 à F______ pour le 30 juin 2022 concernant le studio n° 1______ situé au 6ème étage de l'immeuble sis rue 2______ no. ______ à Genève (ch. 1 du dispositif), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 2) et a rappelé que la procédure était gratuite (ch. 3).

En substance, le Tribunal a retenu que le contrat de bail conclu en 1985 n'avait pas prévu la constitution d'une garantie de loyer. A la suite de la procédure en évacuation s'étant achevée en 2012, F______ avait continué à occuper le studio et versé régulièrement le loyer. Les propriétaires s'en étaient accommodés jusqu'en 2019. Un contrat de bail avait ainsi été conclu tacitement. Les parties avaient ensuite signé un contrat en juillet 2020, prévoyant la constitution d'une garantie, laquelle n'était pas un élément subjectivement et objectivement important. L'absence d'établissement de celle-ci ne justifiait pas une résiliation du contrat, même de manière ordinaire. La résiliation ne répondait à aucun intérêt digne de protection en comparaison avec celui de F______ de conserver son logement.

B. a. Par acte du 23 juin 2023 à la Cour de justice, A______, B______, C______ et D______ (ci-après également les bailleurs) ont formé appel de ce jugement, sollicitant son annulation. Ils ont conclu à ce que la Cour déclare valable le congé notifié le 21 janvier 2021 (recte 2022) à F______ pour le 30 juin 2022 concernant le studio litigieux, ne lui octroie aucune prolongation de bail, condamne le précité à libérer ledit studio et à leur remettre les clés du logement et de sa dépendance et les autorise à faire appel à la force publique pour procéder à l'évacuation de F______.

b. Dans sa réponse du 27 juillet 2023, F______ a conclu à la confirmation du jugement entrepris.

c. Par réplique et duplique des 14 septembre et 23 octobre 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

d. Elles ont été avisées par plis du greffe du 16 novembre 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Par contrat de bail du 8 octobre 1985, la SI G______ - alors propriétaire de l'immeuble sis no. ______, rue 2______ à Genève - a remis en location un studio n° 1______ situé 6ème étage de l'immeuble précité à H______, lequel exploitait à l'époque le café-restaurant à l'enseigne "I______". Ce studio était destiné "à l'usage d'habitation pour son personnel". L'adresse du locataire figurant sur le bail était celle dudit café-restaurant sis no. ______, rue 3______ à Genève.

Le bail a été conclu pour une période initiale de trois ans, du 1er novembre 1985 au 31 octobre 1988, et s'est depuis lors renouvelé tacitement. Le contrat ne prévoyait pas que le bail prendrait fin au décès du locataire.

b. J______ est devenu ultérieurement propriétaire de l'immeuble.

c. H______ est décédé le ______ 2008. Sa succession a été répudiée et liquidée par voie de faillite prononcée le ______ 2009, clôturée le ______ 2010.

d. Le 10 mars 2009, la E______ (ci-après également la régie) a informé l'Office des faillites que H______ était locataire du studio en cause, celui-ci étant destiné à l'usage d'habitation pour l'un des membres de son personnel, que le loyer était à jour au 28 février 2009 et qu'elle ne disposait d'aucune garantie de loyer en sa possession. Elle souhaitait dès lors savoir à partir de quand elle pourrait "disposer de cet appartement".

e. Par courrier du 11 mars 2009, l'administration de la faillite de la succession de feu H______ a indiqué à la régie qu'elle n'entendait ni entrer dans le contrat de bail, ni fournir des sûretés, et qu'il lui était loisible de déplacer en garde-meubles les biens se trouvant dans le studio, à ses frais et sous son entière responsabilité, ce qui permettrait de désigner le bailleur gardien d'actifs. Elle pourrait ainsi récupérer rapidement la disposition des locaux.

f. J______ n'a pas donné suite à cette proposition. Il a indiqué à l'Office des faillites par courrier du 24 mars 2009 que le montant du loyer avait été réglé jusqu'à la date du jugement de faillite.

g. Parallèlement, par lettre du 10 mars 2009, adressée à la "succ. de M. H______, café-restaurant I______, rue 3______ no. ______", la E______ a invité celle-ci à prendre ses dispositions pour restituer le studio précité au 31 mars 2009.

h. Le 16 mars 2009, F______ a informé la régie qu'il était sous-locataire du studio sis no. ______, rue 2______ et que K______, "héritière de feu H______", était prête à reprendre le bail et à fournir les sûretés requises. En sa qualité de gérante du café-restaurant "I______", elle avait en effet un intérêt à conserver le studio litigieux pour y loger son personnel, dont F______ faisait partie.

i. Le 25 mars 2009, J______ lui a répondu qu'il occupait sans droit le studio précité et qu'une action en revendication allait être déposée à son encontre.

j. Par acte du 8 avril 2009 au Tribunal de première instance, J______ a formé une action en revendication fondée sur l'art. 641 CC à l'encontre de F______.

k. Par jugement JTPI/97174/2011 du 23 juin 2011, le Tribunal a débouté J______ de ses conclusions. Il a retenu que le contrat signé entre la SI G______ et H______ concernant le studio litigieux autorisait ce dernier à sous-louer ledit objet à l'un des employés de "I______" pour la durée du contrat de bail et que F______ était précisément un employé dudit café-restaurant depuis plus de dix ans. F______ avait ainsi prouvé avoir un droit préférable de nature personnelle à l'encontre de J______.

l. Par arrêt ACJC/782/2012 du 25 mai 2012, la Cour a confirmé ce jugement. Elle a considéré que le Tribunal avait retenu à juste titre que le bail prévoyait la possibilité de loger le personnel du restaurant dans le studio litigieux, autorisation opposable à J______. Rien ne permettait de retenir que le précité ou la précédente propriétaire de l'immeuble concerné avait donné son accord, même par actes concluants à ce que F______ occupe le studio litigieux. Bien que J______ n'ait pas autorisé cette sous-location, il ne pouvait revendiquer le studio litigieux contre F______ tant que le bail principal n'était pas résilié. Les conditions posées par l'art. 641 CC n'étaient pas réunies. Le jugement devait être confirmé par substitution partielle de motifs.

m. Le 16 juillet 2020, F______, "domicilié dans l'immeuble", a conclu un contrat de bail à loyer avec les héritiers de J______, soit A______, C______, B______ et D______, portant sur le studio susmentionné.

Le bail a débuté le 1er juillet 2020, pour une durée d'une année, renouvelable par tacite reconduction d'année en année.

Le loyer mensuel a été fixé à 825 fr. et un acompte de charges à 90 fr.

Le locataire s'est engagé, à cette occasion, à fournir une garantie de 2'475 fr.

A cette occasion, une "attestation pour l'obtention d'une garantie de loyer" établie le 10 juillet 2020 lui a été remise en vue d'établir ladite garantie.

n. Faute pour F______ d'avoir constitué une garantie, il a été relancé par la régie par courriers des 20 août 2020, 21 septembre 2020, 7 octobre 2020, 12 novembre 2020, 12 février 2021, 4 mai 2021 et 2 septembre 2021.

Il résulte de ces courriers que les démarches effectuées en ce sens par F______ n'ont pas abouti, suite au refus tant de [l'organisme de cautionnement] L______ que de [la compagnie d'assurances] M______ (correspondances des 12 novembre 2020 et 2 septembre 2021).

o. Par courrier du 15 novembre 2020, F______ a indiqué à la régie que les démarches étaient en cours et qu'elles nécessitaient un peu de temps en raison de la situation sanitaire. Il a observé que la régie avait "dormi" pendant des décennies et que, d'un coup, elle était pressée. Il lui a demandé de faire preuve d'"humanité". Il était locataire depuis plusieurs dizaines d'années et "jamais en retard".

p. Par avis officiel du 21 janvier 2022, les bailleurs ont résilié le contrat de bail avec effet au 30 juin 2022 sans indication des motifs du congé.

q. Le 22 février 2022, F______ a saisi la Commission de conciliation en matière de baux et loyers d'une requête en contestation du congé. Non conciliée à l'audience du 28 avril 2022, la requête a été introduite au Tribunal le 16 mai 2022.

r. Le 24 mai 2022, un certificat de cautionnement a été établi par N______ [société].

s. Par courrier du 1er juin 2022, la régie a indiqué au représentant de F______ que le congé était motivé par une perte de confiance, la garantie bancaire n'ayant, en dépit de nombreuses relances, pas été constituée.

t. Dans leur réponse du 11 juillet 2022, A______, C______, B______ et D______ ont conclu au déboutement de F______ de ses conclusions et ont conclu, à titre reconventionnel, à son évacuation, avec mesures d'exécution directe du jugement d'évacuation.

u. A l'audience du Tribunal du 30 janvier 2023, O______, représentant de la régie, a déclaré que, à la suite de la procédure en évacuation terminée en 2012, le dossier avait été classé, les loyers étant payés. Six ou sept ans plus tard, il avait été constaté, dans le contexte d'une régularisation des formalités liées à tout l'immeuble, qu'il n'y avait pas de contrat de bail pour cet appartement. Il avait cherché à connaître l'occupant de l'appartement, afin de signer un contrat de bail avec cette personne. Il avait pris lui-même la décision de résilier le contrat de bail, pour le motif que le locataire avait refusé de fournir une garantie de loyer. Il l'avait relancé de toutes les manières possibles et la résiliation était le seul moyen de résoudre ce dossier. O______ a précisé qu'il n'y avait pas d'autre motif de résiliation.

Interpellé quant au fait que, désormais, une garantie avait été constituée, O______ a exposé que les baux étaient résiliés en dernier recours et qu'il n'avait pas comme politique de revenir sur les résiliations. Il ne dérogeait pas à certaines questions de principe.

O______ a en outre confirmé qu'il n'y avait pas de retard dans le paiement du loyer et que tel n'avait jamais été le cas, à l'exception d'un "bug", lors du passage au QR CODE.

F______ a déclaré être âgé de 77 ans et vivre dans le logement depuis plus de vingt ans. Il n'avait pas refusé de constituer une garantie. Sur conseil de la régie, il avait pris contact avec L______, organisme qui avait, après avoir requis un extrait de poursuites, refusé d'entrer en matière.

v. Dans leurs plaidoiries écrites du 15 mars 2023 et dans leurs répliques spontanées des 23 et 30 mars 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1).

En l'espèce, le loyer mensuel de l'objet litigieux, charges comprises, s'élève à 915 fr., de sorte que la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (915 fr. x 12 mois
x 3 ans = 32'940 fr.)

La voie de l'appel est ainsi ouverte.

1.2 L'appel a été déposé dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC), de sorte qu'il est recevable.

Sont également recevables les écritures responsives ainsi que les déterminations subséquentes des parties (art. 312 al. 1, 314 al. 1 et 316 al. 2 CPC; ATF 137 I 195 consid. 2.3.1 = SJ 2011 I 345).

1.3 L'appel peut être formé pour violation du droit ou constatation inexacte des faits (art. 310 CPC).

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, Procédure civile, tome II, 2010, n. 2314 et 2416; Retornaz, Procédure civile suisse, les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel 2010, p. 349 ss, n° 121).

1.5 Dans la mesure où l'instance d'appel assure la continuation du procès de première instance, elle doit user du même type de procédure et des mêmes maximes que celles applicables devant la juridiction précédente (ATF 138 III 252 consid. 2.1; Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 6 ad art. 316 CPC).

En l'espèce, la procédure simplifiée s'applique (art. 243 al. 2 let. c CPC), s'agissant d'une procédure en contestation de congé.

Les faits sont établis d'office et la maxime inquisitoire sociale régit la procédure (art. 247 al. 2 let. a CPC).

2. Les appelants reprochent aux premiers juges d'avoir constaté les faits de manière inexacte s'agissant de la procédure en revendication. Ces faits ont été intégrés dans la partie EN FAIT du présent arrêt dans la mesure utile.

3. Les appelants font grief au Tribunal d'avoir violé l'art. 271 CO en considérant que le congé était abusif.

3.1
3.1.1
Chaque partie est en principe libre de résilier un bail de durée indéterminée pour la prochaine échéance convenue en respectant le délai de congé prévu. La résiliation ordinaire du bail ne suppose pas l'existence d'un motif de résiliation particulier (cf. art. 266a al. 1 CO; ATF 145 III 143 consid. 3.1; 142 III 91 consid. 3.2.1; 140 III 496 consid. 4.1; 138 III 59 consid. 2.1). En principe, le bailleur est donc libre de résilier le bail, par exemple pour des motifs économiques (ATF 136 III 190 consid. 2; 120 II 105 consid. 3b/bb) ou dans le but d'adapter la manière d'exploiter son bien selon ce qu'il juge le plus conforme à ses intérêts (ATF 136 III 190 consid. 3).

Lorsque le bail porte sur une habitation ou un local commercial, la seule limite à la liberté contractuelle des parties réside dans les règles de la bonne foi: le congé qui y contrevient est alors annulable (art. 271 al. 1 CO; cf. également
art. 271a CO). La protection assurée par les art. 271 et 271a CO procède à la fois du principe de la bonne foi (art. 2 al. 1 CC) et de l'interdiction de l'abus de droit (art. 2 al. 2 CC). De manière générale, un congé est contraire aux règles de la bonne foi lorsqu'il ne répond à aucun intérêt objectif, sérieux et digne de protection et qu'il apparaît ainsi purement chicanier ou consacrant une disproportion crasse entre l'intérêt du locataire au maintien du contrat et celui du bailleur à y mettre fin (ATF 145 III 143 consid. 3.1; 142 III 91 consid. 3.2.1; 140 III 496 consid. 4.; 138 III 59 consid. 2.1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_236/2022 du 24 juin 2022 consid. 3.1; 4A_460/2020 du 23 février 2021 consid. 3.1). 

Les règles de la bonne foi (art. 2 al. 1 CC) qui régissent le rapport de confiance inhérent à la relation contractuelle permettent aussi d'obtenir l'annulation du congé si le motif sur lequel il repose s'avère incompatible avec elles (ATF
120 II 105 consid. 3a).

Le but de la réglementation des art. 271 et 271a CO est uniquement de protéger le locataire contre des résiliations abusives. Un congé n'est pas contraire aux règles de la bonne foi du seul fait que la résiliation entraîne des conséquences pénibles pour le locataire (ATF 140 III 496 consid. 4.1) ou que l'intérêt du locataire au maintien du bail paraît plus important que celui du bailleur à ce qu'il prenne fin (arrêts du Tribunal fédéral 4A_297/2010 du 6 octobre 2010 consid. 2.2; 4A_322/2007 du 12 novembre 2007 consid. 6). Pour statuer sur la validité d'un congé, il ne faut examiner que l'intérêt du bailleur à récupérer son bien, et non pas procéder à une pesée entre l'intérêt du bailleur et celui du locataire à rester dans les locaux; cette pesée des intérêts n'intervient que dans l'examen de la prolongation du bail (arrêts du Tribunal fédéral 4A_18/2016 précité consid. 3.2; 4A_484/2012 précité consid. 2.3.1 et les arrêts cités).

Le bailleur est lié par le motif de résiliation qu'il a indiqué à l'appui de sa résiliation et il ne peut pas lui substituer par la suite un autre motif qui lui serait plus favorable (arrêt du Tribunal fédéral 4A_347/2017 du 21 décembre 2017 consid. 5.2.1).

Il appartient à la partie qui veut faire annuler le congé de prouver les circonstances permettant de déduire qu'il contrevient aux règles de la bonne foi. L'auteur du congé doit toutefois collaborer à la manifestation de la vérité en motivant la résiliation sur requête et, en cas de contestation, en fournissant les documents nécessaires pour établir le motif du congé (cf. art. 271 al. 2 CO; ATF 145 III 143 consid. 3.1; 138 III 59 consid. 2.1; 135 III 112 consid. 4.1).

3.1.2 Selon la jurisprudence, la conclusion par actes concluants d'un nouveau bail consécutif à une résiliation suppose que durant une période assez longue, le bailleur se soit abstenu de faire valoir le congé, d'exiger la restitution de la chose louée et qu'il ait continué à encaisser régulièrement le loyer sans formuler aucune réserve. L'élément temporel n'est pas déterminant pour décider s'il y a bail tacite; il faut prendre en compte l'ensemble des circonstances du cas. La conclusion tacite d'un bail ne doit être admise qu'avec prudence (arrêts du Tribunal fédéral 4A_499/2013 du 4 février 2014 consid. 3.3.1 et les arrêts cités; 4A_247/2008 du 19 août 2008 consid. 3.2.1, rés. in CdB 2008 p. 117/DB 2008 p. 54; 4C_441/2004 du 27 avril 2005 consid. 2.1, rés. in DB 2005 p. 15).

3.1.3 La fourniture de sûretés prévues par l'art. 257e CO sert au bailleur à se prémunir contre l'insolvabilité du locataire ou contre d'éventuels dégâts en vertu du bail (arrêt du Tribunal fédéral 4A_468/2020 du 9 février 2021 consid. 4.1.1; Higi, Zürcher Kommentar, 5e éd. 2019, n. 5 ad art. 257e CO; Lachat, Commentaire romand, 2e éd. 2012, n. 2 ad art. 257e CO).

3.2 En l'espèce, il n'est pas contesté qu'un contrat de bail tacite a été conclu, ensuite de la procédure de revendication, entre J______ et l'intimé et qu'un contrat écrit a été conclu entre les héritiers de celui-là et l'intimé le 16 juillet 2020. Il est également constant que le bail prévoit la constitution d'une garantie de loyer par l'intimé.

Les appelants ont motivé le congé ordinaire notifié à l'intimé le 21 janvier 2022 par une perte de confiance, la garantie de loyer n'ayant pas été constituée. Leur représentant a déclaré devant le Tribunal que l'intimé avait refusé de s'exécuter et qu'il avait lui-même pris la décision de résilier le bail. Il résulte toutefois de la procédure que l'intimé a entrepris des démarches en vue de constituer les sûretés requises, lesquelles n'ont, dans un premier temps, pas abouti auprès de deux établissements. La régie a eu connaissance des refus essuyés par l'intimé, ce qui résulte des correspondances des 12 novembre 2020 et 2 septembre 2021 qu'elle a adressées à ce dernier.

Le représentant des appelants a confirmé devant le Tribunal que l'absence de constitution des sûretés constituait le seul motif de résiliation. La garantie de loyer a été constituée le 24 mai 2022. Depuis la conclusion du bail, l'intimé a régulièrement réglé le loyer.

Par conséquent, le motif invoqué, soit le refus de l'intimé de constituer une garantie de loyer n'a pas été démontré. Il s'ensuit que le congé est contraire aux règles de la bonne foi.

3.3 Le jugement, en tant qu'il retient l'intérêt supérieur de l'intimé à demeurer dans l'appartement, sera confirmé par substitution de motifs.

4. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 23 juin 2023 par A______, B______, C______ et D______ contre le jugement JTBL/394/2023 rendu le 19 mai 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/3658/2022.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Zoé SEILER et Monsieur
Nicolas DAUDIN, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.