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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/5237/2022

ACJC/1474/2023 du 06.11.2023 sur JTBL/323/2023 ( OBL ) , CONFIRME

Normes : CPC.321.al1; CO.257c; CO.267.al1
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5237/2022 ACJC/1474/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 6 NOVEMBRE 2023

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [GE], recourante contre un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 2 mai 2023,

et

B______, intimée, représentée par [la régie immobilière] C______, ______ [GE].

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/323/2023 du 2 mai 2023, expédié aux parties pour notification le 2 mai 2023 et non pas le 23 mai 2023 comme indiqué au pied de la première page de la décision, le Tribunal des baux et loyers a déclaré irrecevables les conclusions reconventionnelles prises par A______ dans ses écritures du 16 septembre 2022 (chiffre 1 du dispositif), condamné A______ à payer à B______ les sommes de 439 fr. 50 (ch. 2) et 3'211 fr. 50 (ch. 3), écarté définitivement l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, à due concurrence (ch. 4), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) et dit que la procédure était gratuite (ch. 6).

A______ n'a pas retiré le pli recommandé contenant ledit jugement dans le délai de garde, échéant le 10 mai 2023.

B. a. Par acte expédié le 8 juin 2023 à la Cour de justice, A______ forme recours contre le jugement précité, dont elle requiert l'annulation, avec suite de frais judiciaires et dépens. Elle ne prend pas de conclusions formelles au fond.

Préalablement, elle conclut à ce que la Cour ordonne l'apport des causes C/2______/2016 et C/3______/2019 et constate "le caractère abusif" de la continuation de la cause C/2______/2016, du jugement du 18 septembre 2018, de la requête d'évacuation du 12 décembre 2019, ainsi que du jugement du 6 février 2020 rendu dans la cause C/3______/2019.

Elle produit trois pièces nouvelles, soit une facture de D______ SARL du 24 juin 2021, un "contrat de self stockage" daté du 2 juillet 2021 et un courrier du 25 février 2022 de la fondation E______.

Elle allègue nouvellement que les meubles et accessoires qu'elle a elle-même débarrassés entre le 23 et le 29 juin 2021 ont été entreposés dans un dépôt "qui lui est facturé entre CHF 650.- et CHF 750.- par mois", que le logement litigieux a été "intégralement refait" après le 29 juin 2021 et que les frais d'huissier apparaissent "pour le moins excessifs" pour "quelques coups de fil et la rédaction d'une facture".

b. Par décision AJC/3473/2023 du 6 juillet 2023, le Service de l'assistance judiciaire a rejeté la requête d'assistance judiciaire formée à titre préalable par A______ dans l'acte du 8 juin 2023.

c. Dans sa réponse du 18 août 2023 au recours, B______ conclut principalement à l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement à l'irrecevabilité des conclusions préalables de A______ et au rejet du recours.

d. Les parties ont été informées le 29 septembre 2023 par la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Le 11 février 2009, B______, bailleresse, et A______ (anciennement : [A______]), locataire, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement de 4.5 pièces situé au 4ème étage de l'immeuble sis rue 5______ no. ______ à Genève.

Le contrat a été conclu pour une durée initiale d'un an et quinze jours, du 16 février 2009 au 28 février 2010, renouvelable tacitement d'année en année. Le préavis de résiliation était de trois mois.

Le loyer mensuel, charges et téléréseau compris, a été fixé à 878 fr. 95 dès le 1er janvier 2015.

b. La bailleresse a résilié le contrat pour défaut de paiement, par avis de résiliation du 7 février 2017 avec effet au 31 mars 2017.

Par jugement du Tribunal du 14 septembre 2018, le congé a été déclaré valable (cause C/2______/2016).

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour du 19 août 2019 et le recours de A______ au Tribunal fédéral a été rejeté par arrêt du 22 octobre 2019.

c. A______ avait également requis une réduction de son loyer, laquelle a fait l'objet d'une procédure C/4______/2017.

Par jugement du 23 juin 2021, le Tribunal a débouté A______ de ses conclusions, lesquelles tendaient à une réduction de loyer et à des dommages-intérêts. Ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour du 17 janvier 2022.

d. Lors d'une audience du 6 février 2020 qui s'est tenue dans le cadre d'une procédure en évacuation dirigée contre A______ (cause C/3______/2019), cette dernière s'est engagée à libérer l'appartement litigieux avant le 30 septembre 2020, l'accord conclu entre les parties et homologué par le Tribunal valant jugement d'évacuation dès le 1er octobre 2020 et la bailleresse étant autorisée à requérir l'exécution de l'évacuation par la force publique dès cette date.

e. Le 3 novembre 2020, la bailleresse a accordé à A______ un ultime délai au 31 mars 2021 pour restituer le logement.

f. Le 1er mars 2021, la bailleresse a fixé l'état des lieux de sortie au 31 mars 2021.

g. L'entreprise [de serrurerie] F______, intervenue dans l'appartement le 23 juin 2021 à la demande de Me G______, huissière judiciaire mandatée par la bailleresse, a facturé 592 fr. 35 à B______ le 2 juillet 2021 pour un déplacement et la fourniture/pose de deux cylindres à linguette.

h. Le 8 juillet 2021, H______ SARL a transmis à la bailleresse une facture d'un montant de 895 fr. 95 relative à l'évacuation de A______. Ladite facture mentionne trois interventions, la première le 29 juin 2021 "Ouverture à 08h00 / Fermeture à 17h15", la deuxième le 2 juillet 2021 "Ouverture à 08h00 / Fermeture à 15h00" et la troisième le 7 juillet 2021 "3.0 heures x 2 hommes et un camion. Préparation, tri, mise en cartons et sacs. Chargement. Transport vers la décharge. Déchargement". La facture indique que la taxe de décharge a été calculé sur 340 kg.

i. Par courrier du 8 juillet 2021, reçu le lendemain, Me G______ a remis à B______ "les clés provenant de l'évacuation" de A______, en précisant que le contenu de logement avait été vidé par H______ SARL.

L'huissière judiciaire a annexé au courrier précité également une facture de 1'723 fr. 20 pour l'ouverture du dossier, la correspondance et les entretiens téléphoniques, l'avis judiciaire à la locataire, une vacation sur place le 22 juin 2021, la mise en œuvre du serrurier et de H______ SARL ainsi que pour le retour des clés et des pièces.

j. Par courrier du 17 août 2021, la bailleresse a informé A______ que son compte présentait un solde débiteur de 3'651 fr., comprenant 439 fr. 50 d'indemnité pour occupation illicite "pour le demi-mois de juillet 2021", 592 fr. 35 selon la facture de F______, 895 fr. 95 selon la facture de H______ SARL et 1'723 fr. 20 à titre d'honoraires de Me G______. A______ était invitée à verser ce montant avant le 30 septembre 2021.

Un ultime délai au 30 novembre 2021 pour procéder au versement lui a été imparti le 20 octobre 2021.

k. La bailleresse a fait notifier le 27 décembre 2021 à A______ un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur les montants de 439 fr. 50 avec intérêts à 5% dès le 16 juillet 2021, 592 fr. 35, 895 fr. 95 et 1'723 fr. 20.

Ce commandement de payer a été frappé d'opposition.

l. La bailleresse a déposé le 16 mars 2022 devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers une demande en paiement à l'encontre de A______.

La Commission de conciliation a rendu le 6 mai 2022 une proposition de jugement condamnant A______ à verser à la bailleresse les sommes de 439 fr. 50 à titre d'indemnité pour occupation illicite du 1er au 15 juillet 2021 et 3'211 fr. 50 à titre de frais d'évacuation de l'appartement litigieux et écartant l'opposition faite au commandement de payer précité à due concurrence.

A______ ayant fait opposition à la proposition de jugement, une autorisation de procéder a été délivrée à la bailleresse le 27 mai 2022.

La cause a été portée devant le Tribunal le 16 juin 2022. La bailleresse a conclu à la condamnation de A______ au paiement des indemnités pour occupation illicite pour la période du 1er au 15 juillet 2021 de 439 fr. 50 et des frais d'évacuation et de désencombrement de l'appartement litigieux d'un montant total de 3'211 fr. 50, ainsi qu'au prononcé de la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer.

m. Par acte du 16 septembre 2022, A______ a conclu, principalement, au rejet des conclusions de B______. Elle a également pris des conclusions reconventionnelles, lesquelles ne sont plus litigieuses devant la Cour.

Préalablement, elle a demandé au Tribunal d'"accorder l'assistance juridique à la défenderesse, en particulier pour sa présente demande reconventionnelle, ordonner l'apport des causes C/2______/2016 et C/3______/2019 de la juridiction des Baux et loyers à la présente cause, constater l'arbitraire de la suspension de ladite cause du 16 avril 2018, le caractère abusif de la continuation de la cause C/2______/2016 et du jugement du 18.9.2018, comme de la requête d'évacuation du 12 décembre 2019 de la demanderesse, du jugement du 6 février 2020 cause C/3______/2019 du TBL, et de l'évacuation du 23 juin 2021 de la défenderesse du logement sis no. ______ rue 5______ à Genève".

Toujours préalablement, elle a demandé d'ordonner "conformément à l'art. 160 al. 1 lettre b CPC, la production à l'attention de votre Tribunal des preuves des encaissements des loyers de la demanderesse, paiements/effectué par la défenderesse et par l'HG depuis 2009, la comparution personnelle des parties en particulier le/la maire de la ville de Genève, l'audition du témoin : Monsieur I______, ancien Avocat au Barreau de Genève à la retraite, domicilié no. ______, rue 6______, [code postal] J______ [GE]".

A______ a allégué que l'évacuation avait été exécutée le 23 juin 2021 et qu'elle avait aussitôt restitué l'intégralité des clés de l'appartement aux représentants de H______ SARL, de sorte qu'elle ne comprenait pas le motif de l'intervention de F______. D'un commun accord avec H______ SARL, A______ avait eu deux jours pour faire enlever ses affaires et libérer l'appartement que H______ SARL venait ouvrir à cette fin, ensuite de quoi, le 29 juin 2021 à 17h15, ladite entreprise avait fermé l'appartement, ce dont I______ pouvait témoigner. Elle avait dû engager d'urgence des déménageurs pour vider et nettoyer l'appartement. Elle ignorait le motif de l'ouverture le 2 juillet 2021 mentionnée sur la facture de H______ SARL qui ne la concernait plus. L'évacuation ayant eu lieu le 23 juin 2021, elle ne devait pas le demi-loyer du mois de juillet 2021 réclamé par la bailleresse.

n. Lors de l'audience du Tribunal du 1er décembre 2022, A______ n'était ni présente ni représentée.

La bailleresse a contesté les allégués de A______, en particulier l'allégué selon lequel celle-ci aurait restitué les clés le 23 juin 2021, relevant qu'il ne correspondait pas à la réalité et que les clés avaient été restituées le 9 juillet 2021.

La bailleresse a persisté dans ses conclusions dans le cadre des premières plaidoiries et le Tribunal a ouvert les débats principaux. Sur quoi, le Tribunal a ordonné une audience de débats principaux pour les plaidoiries orales.

o. Par courrier du 16 décembre 2022, A______ a sollicité du Tribunal la reconvocation de l'audience susmentionnée, invoquant des raisons de santé pour justifier son absence, et a produit un certificat médical selon lequel elle avait été reçue en consultation médicale par un médecin les 16 et 21 novembre 2022 dans le cadre d'un syndrome infectieux aigu ayant nécessité la prescription d'anti-infectieux et une mesure d'isolement social.

p. Par ordonnance du 13 janvier 2023, le Tribunal a rejeté la demande de reconvocation de l'audience du 1er décembre 2022, considérant que l'absence de A______ n'était pas justifiée - dans la mesure où il ne ressortait pas du certificat médical produit qu'elle aurait été empêchée de participer à ladite audience - et que cette dernière aurait l'occasion de s'exprimer lors de l'audience de débats principaux.

q. Une citation à comparaître a été adressée aux parties le 13 janvier 2023 pour une audience prévue devant le Tribunal le 2 février 2023.

A______ n'a pas réclamé dans le délai de garde le pli recommandé contenant la citation, de sorte que celui-ci a été retourné au Tribunal.

r. Lors de l'audience du Tribunal du 2 février 2023, A______ n'était ni présente ni représentée.

Le Tribunal a procédé à l'interrogatoire de B______, qui a confirmé les allégués de sa demande, ajoutant que A______ n'avait rien payé depuis le dépôt de cette dernière.

Le Tribunal a clos les débats principaux et ordonné les plaidoiries finales.

La bailleresse a plaidé et persisté dans ses conclusions.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

s. Dans le jugement attaqué, sur les questions demeurées litigieuses, le Tribunal a considéré que A______ ne démontrait pas avoir vidé l'appartement et remis toutes les clés à la bailleresse avant que cette dernière ne les reçoive de la part de l'huissière judiciaire le 9 juillet 2021. Partant, il fallait retenir que l'appartement avait été restitué à cette date. La locataire devait ainsi à B______ 439 fr. 50, correspondant à l'indemnité pour occupation illicite pour la période du 1er au 15 juillet 2021, dans la mesure où il ne pouvait être attendu de la bailleresse qu'elle reloue l'appartement avant cette date.

Par ailleurs, B______ avait démontré avoir encouru des frais d'expulsion ainsi que des frais de serrurier et de déménagement. A______ n'avait pour sa part pas prouvé avoir remis toutes les clés à la bailleresse ni avoir vidé intégralement l'appartement, la facture de H______ SARL faisant état de l'intervention de deux hommes pendant trois heures pour préparer, trier, mettre en cartons, charger, transporter vers la décharge et décharger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC). Le recours est recevable contre les décisions finales de première instance qui ne peuvent pas faire l'objet d'un appel (art. 319 let. a CPC).

1.2 En l'espèce, la valeur litigieuse est de 3'651 fr., de sorte que seule la voie du recours est ouverte.

1.3 Le recours a été interjeté dans le délai prescrit par la loi (art. 321 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable de ce point de vue.

1.4
1.4.1
Le recours doit être motivé (art. 321 al. 1 CPC).

Les exigences quant à la motivation du recours sont celles énoncées pour l'appel : un simple renvoi au dossier ne suffit pas, et, inversement, l'appelant doit s'abstenir de développements prolixes. La motivation d'un recours doit ainsi, à tout le moins, satisfaire aux exigences qui sont posées pour un mémoire d'appel (arrêts du Tribunal fédéral 5D_65/2014 du 9 septembre 2014 consid. 5.4.1; 5A_247/2013 du 15 octobre 2013 consid. 3.3).

S'il est vrai que, contrairement à l'appel, le recours extraordinaire de l'art. 319 déploie avant tout un effet cassatoire, le recourant ne peut se limiter à conclure à l'annulation de la décision attaquée; il devra prendre des conclusions au fond sous peine d'irrecevabilité du recours, de façon à permettre à l'autorité supérieure de statuer à nouveau dans le cas où les conditions de l'art. 327 al. 3 let. b CPC sont réunies (JEANDIN, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2019, ad art. 321 n. 2 et 5 ainsi que les références citées).

Par ailleurs, pour satisfaire à son obligation de motivation, le recourant doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance de recours puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF
138 III 374 consid. 4.3.1).

1.4.2 En l'espèce, le mémoire de recours consiste essentiellement en un "copié/collé" des faits allégués et de l'argumentation juridique que la recourante a présentés dans son mémoire de réponse du 16 septembre 2022 au Tribunal. L'acte contient des développements prolixes concernant également des questions définitivement réglées dans d'autres procédures ayant opposé les parties. De plus, la recourante se borne à requérir l'annulation du jugement, sans formuler des conclusions qui pourraient être reprises dans le dispositif de l'arrêt à rendre.

Néanmoins, la formulation de l'acte de recours permet de discerner que la recourante souhaite que les prétentions en paiement de sa partie adverse soient rejetées, mais n'entend pas reprendre ses conclusions reconventionnelles; pour la motivation, elle exprime en quoi à son avis, la décision attaquée est inexacte.

Le recours, considéré avec indulgence s'agissant d'un plaideur en personne, sera donc déclaré recevable.

1.5 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

2. Les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours (art. 326 al. 1 CPC). La Cour examinera donc la cause sur la base du dossier dont disposait le Tribunal.

3. La recourante fait grief au Tribunal de l'avoir condamnée à verser à l'intimée l'indemnité pour occupation illicite relative à la période du 1er au 15 juillet 2021, alors qu'elle "avait accepté et mis en œuvre son départ volontaire du logement à la fin du mois de juin 2021".

3.1 Selon l'art. 257c CO, le locataire doit payer le loyer et, le cas échéant, les frais accessoires, à la fin de chaque mois, mais au plus tard à l'expiration du bail, sauf convention ou usage local contraires.

Aux termes de l'art. 267 al. 1 CO, à la fin du bail, le locataire doit restituer la chose dans l'état qui résulte d'un usage conforme au contrat. La restitution n'intervient, au sens de l'art. 267 al. 1 CO, que lorsque le locataire a, d'une part, restitué les clés et, d'autre part, enlevé les objets qui s'y trouvent et n'appartiennent pas au bailleur (arrêts du Tribunal fédéral 4D_128/2010 du 1er mars 2011 consid. 2.3; 4C_224/1997 du 17 février 1998 consid. 3b; LACHAT, Le bail à loyer, Lausanne 2019, n. 2.2 et 2.3 p. 1033). Si le locataire ne restitue pas les locaux à la fin du bail, il doit au bailleur une indemnité pour occupation illicite déterminée selon le loyer convenu. L'absence de restitution constitue la violation d'une obligation contractuelle (celle résultant de l'art. 267 al. 1 CO) et donne lieu à des dommages-intérêts en application de l'art. 97 CO.

Pour éviter que le locataire qui se maintient sans droit dans les locaux soit mieux traité que si le bail durait encore, la jurisprudence constante, inspirée du droit allemand, a admis que l'indemnité devait correspondre au loyer convenu, sans que le bailleur n'ait à prouver qu'il aurait pu relouer immédiatement les locaux pour un loyer identique (ATF 131 III 257 consid. 2 et 2.1 et les arrêts cités).

Le dommage auquel peut prétendre le bailleur comprend notamment le loyer échu depuis le départ du locataire et jusqu'à la relocation de l'appartement ou, si l'appartement n'était pas reloué, jusqu'à la première échéance contractuelle. Il incombe au bailleur de faire diligence pour relouer l'appartement et ainsi limiter au maximum son préjudice (art. 99 al. 3 et 44 CO). Dès lors, on diminuera l'indemnité du montant que le bailleur aurait pu récupérer, s'il avait recherché activement un nouveau locataire (LACHAT, op. cit., p. 883-884, n. 2.3.12 et les références citées). Le bailleur doit démontrer que, malgré de réels efforts, il n'a pas été à même de relouer le logement aussitôt après la résiliation du bail (ATF 127 III 548 consid. 5 et 6).

3.2 En l'espèce, même en admettant que la recourante a libéré le logement de sa personne et de tous ses biens à fin juin 2021 comme elle le prétend, l'on ne pouvait raisonnablement exiger de la bailleresse qu'elle retrouve un nouveau locataire avant la deuxième moitié de juillet 2021. Objectivement, elle n'était pas à même de relouer le logement aussitôt après sa (prétendue) libération, soit dès le 1er juillet 2021.

C'est ainsi à juste titre que le Tribunal a considéré que la recourante restait devoir à l'intimée la somme de 439 fr. 50, soit la moitié d'un loyer mensuel. Le recours sera donc rejeté en tant qu'il vise le chiffre 2 du dispositif du jugement attaqué.

4. La recourante reproche au Tribunal d'avoir mis à sa charge les frais d'huissier, de déménagement et de serrurier. Elle prétend qu'elle a "remis toutes les clés, de surcroit devant témoins le 23 juin 2021, puis en définitive devant témoin, après l'évacuation le 29 juin 2021" et ce, "après avoir intégralement vidé l'appartement, ce dont peut aussi témoigner M. I______". En première instance, elle indiquait qu'elle n'entendait pas assumer les frais d'huissier, au motif qu'ils avaient été causés par "une évacuation injustifiée, abusive et fomentée depuis 2016 criminellement par d'aucuns".

4.1 Le locataire qui enfreint ses devoirs en matière de restitution découlant de l'art. 267 al. 1 CO doit des dommages-intérêts en application de l'art. 97 CO. Le bailleur peut notamment obtenir le remboursement des frais qu'il a dû assumer si le locataire a omis de vider et/ou de nettoyer les locaux (arrêt du Tribunal fédéral 4A_456/2012 précité, consid. 2.1); en effet, l'on attend en principe du locataire qu'il vide entièrement les locaux et les nettoie (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2013 du 7 janvier 2014 consid. 2.1).

Les frais de la procédure d'expulsion, y compris éventuellement les frais des opérations du greffe, de la force publique ou des auxiliaires (déménageurs, serrurier, garde-meubles), exécutée par la collectivité publique, peuvent être mis à la charge du locataire expulsé (LACHAT, op. cit., p. 1053, n. 7.8 et les références citées).

4.2 En vertu de l'art. 8 CC, chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit. Cette disposition règle, pour tout le domaine du droit civil fédéral, la répartition du fardeau de la preuve; elle détermine quelle partie supporte les conséquences de l'absence de preuve. Le juge viole l'art. 8 CC lorsqu'il tient pour exactes les allégations non prouvées d'une partie, nonobstant leur contestation par la partie adverse (ATF 130 III 591 consid. 5.4).

4.3 En l'espèce, il n'est pas contesté que la recourante n'a pas libéré les locaux au terme fixé par la bailleresse, soit au 31 mars 2021, de sorte que celle-ci a dû requérir l'exécution de son évacuation par huissier judiciaire en juin 2021.

Il résulte des pièces produites que l'huissière judiciaire mandatée s'est rendue sur place le 22 juin 2021 et qu'elle a mis en œuvre une entreprise de serrurerie - qui, le lendemain, a fourni et posé deux cylindres -, ainsi qu'une entreprise de déménagement - qui est intervenue les 29 juin, 2 et 7 juillet 2021 pour débarrasser au moins 340 kg de matériel se trouvant dans le logement litigieux. Par courrier du 8 juillet 2021, reçu le lendemain, l'huissière judiciaire a confirmé à la bailleresse que le contenu du logement avait été vidé par H______ SARL et lui a remis les clés "provenant de l'évacuation" de la recourante.

Aucun élément du dossier ne permet de mettre en doute ce qui précède. La recourante n'a pas établi qu'elle avait remis l'intégralité des clés à la bailleresse les 23 ou 29 juin 2021, ni qu'elle avait elle-même complètement vidé le logement avant l'intervention de H______. Devant la Cour, la recourante ne sollicite l'audition d'aucun témoin. En première instance, elle n'a d'ailleurs réitéré aucune offre de preuve ni lors des premières plaidoiries, ni lors des plaidoiries finales, puisqu'elle a fait défaut à toutes les audiences du Tribunal.

En définitive, c'est à bon droit que le Tribunal a condamné la recourante à verser à l'intimé 3'211 fr. 50, comprenant 1'723 fr. 20 de frais d'huissier, 895 fr. 95 de frais de déménagement et 592 fr. 35 de frais de serrurier. Le recours sera donc rejeté également en tant qu'il vise le chiffre 3 du dispositif du jugement attaqué.

Il en ira de même en tant qu'il porte sur le chiffre 4 du même dispositif, dans la mesure où celui-ci prononce la mainlevée définitive de l'opposition formée par la recourante au commandement de payer qui lui a été notifié sur réquisition de l'intimée, à concurrence des montants alloués à celle-ci.

L'apport des causes C/2______/2016 et C/3______/2019, sollicité à titre préalable par la recourante, n'apparaît pas nécessaire à la solution du litige. Les autres conclusions préalables de la recourante, constatatoires et visant des procédures définitivement jugées, ne sont manifestement pas recevables.

5. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 8 juin 2023 par A______ contre le jugement JTBL/323/2023 rendu le 2 mai 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/5237/2022-17-OSD.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Pauline ERARD et Madame
Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Zoé SEILER et Monsieur
Jean-Philippe FERRERO, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

Le président :

Ivo BUETTI

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 15'000 fr.