Décisions | Chambre des baux et loyers
ACJC/700/2023 du 05.06.2023 sur JTBL/471/2022 ( OBL ) , CONFIRME
En droit
Par ces motifs
rpublique et | canton de genve | |
POUVOIR JUDICIAIRE C/1015/2020 ACJC/700/2023 ARRæT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre des baux et loyers DU LUNDI 5 JUIN 2023 |
Entre
1) Madame A______, p.a B______ SA sise ______, appelante et intime sur appel joint d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 17 juin 2022, comparant par Me Pascal PETROZ, avocat, rue du Mont-Blanc 3, 1211 Genve 1, en l'tude duquel elle fait lection de domicile,
2) VILLE DE GENEVE, Service juridique, rue de l'Htel-de-Ville 4, case postale 3983, 1211 Genve 3, appelante et intime sur appel joint, comparant en personne,
et
Monsieur C______ et Madame D______, domicilis ______, intims et appelants sur appel joint, comparant tous deux par Me Mark MULLER, avocat, rue Ferdinant-Hodler 13, 1207 Genve, en l'tude duquel ils font lection de domicile.
A. Par jugement JTBL/471/2022 du 17 juin 2022, le Tribunal des baux et loyers a donn acte la VILLE DE GENEVE de son intervention dans la procdure (ch. 1 du dispositif), a donn acte A______ de ce qu'elle avait dnonc l'instance aux Chemins de fer fdraux (ci-aprs : CFF) (ch.2), a rduit de 15% le loyer de l'appartement de 6 pices situs au 6me tage de l'immeuble sis no. ______, rue 1_____, [code postal] Genve, pour la priode du 18 novembre 2014 au 15 dcembre 2019 (ch. 3), a dbout les parties de toutes autres conclusions (ch. 4) et a dit que la procdure tait gratuite (ch. 5).
En substance, les premiers juges ont retenu que, compte tenu de toutes les circonstances, les nuisances rsultant du chantier du CEVA constituaient un dfaut de la chose loue. Ils ont galement considr que le principe d'une rduction de loyer fonde sur l'art. 259d CO devait tre admis et qu'au vu des lments de fait au dossier et de la jurisprudence, une rduction de loyer moyenne pour l'ensemble des locaux de 15% du 1er janvier 2013 au 15 dcembre 2019 tait adquate. Toutefois, en raison des rgles applicables en matire de prescription la rduction de loyer ne pouvait tre accorde qu' compter du 18 novembre 2014.
B. a. Par acte expdi le 22 aot 2022 la Cour de justice, A______ forme appel contre ce jugement. Elle en sollicite l'annulation et conclut, principalement, au dboutement de C______ et de D______ de l'entier de leurs conclusions.
b. Par dterminations du 16 septembre 2022, la VILLE DE GENEVE conclut l'annulation du jugement entrepris et au dboutement de C______ et de D______ de l'entier de leurs conclusions.
c. Par acte expdi le 26 septembre 2022, C______ et D______ forment appel joint contre le jugement entrepris et concluent, principalement, ce que le loyer de l'appartement litigieux soit rduit de 35% pour la priode courant du 1er janvier 2012 au 15 dcembre 2019.
d. Le 31 octobre 2022, A______ a rpliqu sur appel principal et rpondu sur appel joint. Elle a persist dans ses conclusions.
e. Le 5 dcembre 2022, C______ et D______ ont dupliqu sur appel principal et rpliqu sur appel joint. Ils ont persist dans leurs conclusions.
f. Le 5 dcembre 2022, la VILLE DE GENEVE a conclu sur appel principal l'annulation du jugement entrepris et sur appel joint au dboutement de C______ et D______ de leurs conclusions.
g. Le 2 fvrier 2023, A______ a dupliqu sur appel joint et persist dans ses conclusions.
h. Les parties ont t avises le 19 mai 2022 par le greffe de la Cour de ce que la cause tait garde juger.
C. Les faits pertinents suivants rsultent de la procdure :
a. Par contrat du 21 avril 1982, C______ et D______ ont pris bail, en qualit de locataires, un appartement de 6 pices au 6me tage de l'immeuble sis no. ______, rue 1_____ Genve.
Le bail a t conclu pour une dure de trois ans, du 1er mai 1982 au 30 avril 1985.
L'appartement est traversant, les chambres des enfants donnent sur la rue 2______.
b. Le loyer a t fix en dernier lieu 30'000 fr. par an, soit 2'500 fr. par mois, charges non comprises, compter du 1er mai 2012.
c. A______ est propritaire de l'immeuble susmentionn.
d. Dans le cadre de la construction de la ligne de train Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse (CEVA), la construction de la gare Champel-Hpital, situe sur le plateau de Champel, entre l'avenue de Champel et l'avenue Alfred-Bertrand, a dbut au mois de dcembre 2011.
e. Les travaux de construction de la gare de Champel-Hpital se sont drouls en plusieurs tapes :
Pralablement, les 7 et 8 dcembre 2011, des travaux de bcheronnage ont t effectus.
La premire tape des travaux a consist dvier les rseaux souterrains (eau, gaz, lectricit, tlphone, etc.); elle a dur de dcembre 2011 fvrier 2013, avec une interruption entre le 16 dcembre 2011 et le 16 janvier 2012.
Des travaux de gros Ïuvre, soit schmatiquement l'enveloppe en bton de l'ouvrage, ont ensuite t raliss entre janvier 2013 et mars 2016. Ils ont consist en :
- la ralisation de l'enceinte extrieure de la halte en parois moules, excutes entre janvier 2013 et avril 2014;
- la ralisation de murets de guidage des parois moules et l'abaissement du niveau du sol devant les n¡ 51, 53 et 55 de l'avenue de Champel, effectus entre fvrier et avril 2013;
- des dviations de rseaux, excutes en mars et avril 2014;
- le creusement dans l'enceinte construite, la ralisation des dalles extrieures, la ralisation de carottage et pr-sciage de parties de la paroi moule situe au nord de la halte, la construction des quais et des banquettes et le dmontage de la grue et de la centrale bton et l'enlvement de gros containers, qui ont eu lieu entre les mois de mai 2014 et mars 2016.
Un avis de travaux exceptionnels le samedi 13 juin 2015 de 7h 18h et un avis de travaux hors des dlais standard, soit entre 6h et 23h, durant deux semaines ds le 27 juillet 2015, ont t publis dans les fiches d'information du chantier des CFF (ci-aprs : fiche info) n¡ 20 et 21.
Les travaux de second Ïuvre, qui ont consist en l'installation de la charpente mtallique de la gare avec ses modules de briques de verre et la ralisation des systmes de chauffage, ventilation, sanitaires et lectrique, ont dbut en juin 2016 et se poursuivaient encore en novembre 2016. Des avis de travaux exceptionnels les samedis 18 et 25 juin, 2, 9 et 16 juillet, 12 et 19 novembre 2016 de 7h 19h ont t publis dans les fiches info n¡ 28 et 29.
En parallle, le tunnel de Champel a t creus entre mars 2014 et le 8 juin 2017. Les travaux ont consist dans le percement du tunnel depuis les deux extrmits, l'aide de pelles mcaniques; la consolidation de la future vote du tunnel, ralise l'aide de tubes mtalliques insrs dans le terrain sur environ un mtre; le soutnement, avec du bton projet sur la paroi de la vote au fur et mesure de l'avancement du perage, le revtement du tunnel (travaux d'tanchit) et la cration des sorties de secours. Entre mars et juin 2016, le forage se situait la hauteur de la gare Champel-Hpital.
Entre juin 2017 et mai 2018, les travaux de revtement intrieur ont t raliss, soit le btonnage de la vote, du radier et des banquettes ainsi que la construction des dalles flottantes, de mme que l'installation des quipements ferroviaires.
Des campagnes de mesurage de vibrations et bruit solidien ont t effectues, le 5 mars 2016, l'intrieur de la halte Champel-Hpital et les 1er, 2 avril 2017, 10, 11, 16, 17 et 18 mars 2018 entre le portail Val d'Arve et la halte Champel-Hpital et entre la halte Champel-Hpital et l'Avenue Thodore-Weber. Les tests, effectus entre 9h00 et 17h00, ont consist en une trentaine de priodes de vibrations (30 secondes).
A cinq reprises, les 14, 19 et 30 novembre 2018, le 16 avril 2019 et le 27 aot 2019, la ventilation et le dispositif de dsenfumage de la gare ont t tests.
f. Des travaux d'amnagement du Plateau de Champel et de l'espace public autour de la halte ont t raliss, de mi-septembre 2018 au printemps 2020, par la VILLE DE GENEVE, principalement sur les parcelles 2114 et 1646 dont elle est propritaire. Au pralable, la VILLE DE GENEVE a fait procder l'abattage de neuf arbres pendant trois jours.
Les travaux ont ensuite port sur la mise en sparatif des canalisations d'eaux claires et uses, l'immeuble dans lequel se situait les locaux lous ayant t concern pendant le dernier trimestre 2018. En 2019, les amnagements extrieurs ont dbut. Ils ont consist en des travaux de terrassement et de remblayage - le plateau de Champel, qui tait l'tat de terrain vague, ayant t remis niveau - la ralisation de rseaux d'arrosage, de rseaux d'clairage public, d'lots vgtaliss, la rnovation de la chausse et des trottoirs, la mise en place d'un revtement phono-absorbant et la plantation d'arbres. Les travaux ont t raliss par tronons, sur l'avenue Alfred-Bertrand, d'abord entre l'avenue Peschier et le temple de Champel du 14 janvier fin fvrier 2019; ensuite entre le temple de Champel et l'avenue Dumas du 4 mars fin avril 2019 et enfin entre l'avenue Dumas et l'avenue de Miremont du 8 avril fin juin 2019. L'immeuble objet de la procdure a t concern par ces travaux entre avril et aot 2019.
Le Lman Express a t inaugur le 12 dcembre 2019 et mis en service le 15 dcembre suivant, avec deux ans de retard sur le planning initialement prvu.
La plus grande partie des amnagements du plateau de Champel tait alors termine.
g. Par courrier du 29 janvier 2012 adress A______, C______ et D______ se sont plaints de nuisances sonores et olfactives dues aux travaux du CEVA ainsi que du ralentissement du trafic sur l'avenue de Champel, et ont sollicit une rduction de loyer.
h. Sans rponse de A______, C______ et D______ lui ont adress un second courrier le 29 dcembre 2012, sollicitant nouveau une adaptation de leur loyer compte tenu des nuisances occasionnes par le chantier du CEVA.
i. Le 5 fvrier 2013, C______ et D______ ont form par devant la Commission de conciliation en matire de baux et loyers une requte en rduction de loyer. Ils n'ont pas produit les conclusions dposes.
Non concilie lors de l'audience du 9 avril 2013, la cause n'a pas t introduite devant le Tribunal.
Par courrier du 6 mai 2013 adress A______, C______ et D______ ont pris acte de la position de cette dernire, savoir qu'elle considrait qu'il tait prmatur de dterminer une rduction de loyer conscutive aux travaux du CEVA, et lui ont indiqu qu'ils patienteraient.
j. Entre le 29 janvier 2012 et le 16 septembre 2019, les locataires ont rgulirement adress des courriers A______ pour se plaindre des nuisances causes par le chantier du CEVA.
k. Par courrier du 18 novembre 2019 adress A______, C______ et D______ ont relev que depuis presque huit ans, ils taient confronts des nuisances sonores importantes ds les premires heures du matin, aux odeurs nausabondes, la poussire provenant du chantier et des vibrations importantes dans l'appartement. L'accs l'immeuble tait galement rendu compliqu par les travaux et la circulation tait obstrue, voire arrte sur les rues parallles ou perpendiculaires l'immeuble. En consquence, ils sollicitaient une rduction de loyer de 35% pour la priode du 17 janvier 2012 au 15 dcembre 2019.
l. Le 21 novembre 2019, A______ a rpondu qu'elle n'entendait pas entrer en matire sur la demande de baisse de loyer qu'elle estimait excessive.
m. Par requte dpose le 16 janvier 2021 devant la Commission de conciliation en matire de baux et loyers, dclare non concilie lors de l'audience du 12 mars 2020 et introduite devant le Tribunal le 15 avril suivant, C______ et D______ ont principalement conclu une rduction de loyer de 35% pour la priode du 1er janvier 2012 au 15 dcembre 2019.
Ils ont fait valoir que pendant les huit annes de dure du chantier, ils avaient souffert de nuisances sonores et olfactives, d'missions de poussire, de vibrations, et du fait que l'accs l'immeuble avait t compliqu et la circulation dvie ses abords plusieurs reprises. Les nuisances dues aux travaux dbutaient tt le matin et se prolongeaient des heures tardives, mme parfois le week-end.
n. Dans son mmoire rponse du 12 juin 2020, A______ a conclu pralablement ce que le Tribunal lui donne acte de ce qu'elle avait dnonc valablement l'instance la VILLE DE GENEVE et aux CFF le 9 juin 2020. Principalement, elle a conclu ce que C______ et D______ soient dbouts de toutes leurs conclusions et subsidiairement ce qu'il lui soit donn acte que le loyer tait rduit de 15% pour la priode du 1er dcembre 2014 au 15 dcembre 2019.
Elle a reproch en substance aux locataires, dans leur expos de l'historique du chantier, de n'avoir fait aucune distinction en fonction de l'volution gographique des travaux et de n'avoir pas prcis les tapes et les priodes qui leur avaient caus de relles nuisances. Compte tenu du primtre du chantier, C______ et D______ n'avaient pas subi des nuisances ininterrompues pendant huit ans.
o. Intervenant la procdure, la VILLE DE GENEVE a conclu dans ses critures du 17 aot 2020 ce que C______ et D______ soient dbouts de toutes leurs conclusions.
Elle a fait valoir qu'elle avait commenc les travaux d'amnagement en septembre 2018, de sorte que les nuisances antrieures cette date telles qu'allgues par C______ et D______ avaient t gnres par la direction de projet du CEVA.
p. Les CFF n'ont pas donn suite la dnonciation.
q. A______ s'est exprime sur les critures de la VILLE DE GENEVE le 24 septembre 2020 et C______ et D______ le 2 octobre 2020.
r. Les dbats principaux ont t ouverts le 2 fvrier 2021. Dans le cadre de la procdure, A______ a produit les baux conclus dans l'immeuble litigieux depuis le 1er juin 2012, dont les conditions sont les suivantes :
- appartement de 6 pices au 4me tage pour un loyer index de 5'000 fr. par mois du 1er juin 2012 au 31 mai 2017;
- appartement de 5 pices au 6me tage pour un loyer de 3'800 fr. par mois du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2017;
- appartement de 5 pices au rez-de-chausse pour un loyer de 3'350 fr. par mois du 1er novembre 2012 au 31 octobre 2017;
- bureaux d'environ 100 m2 au 3me tage pour un loyer annuel chelonn de 34'800 fr. du 1er mai 2013 au 31 dcembre 2015, de 37'500 fr. du 1er janvier 2016 au 31 dcembre 2016 et de 40'200 fr. du 1er janvier 2017 au 31 dcembre 2018. A______ a accord une rduction de 5'400 fr. (13.43%) sur le loyer annuel de 40'200 fr. du 1er mai 2013 au 31 dcembre 2015, et de 2'700 fr. (6.71%) du 1er janvier 2016 au 31 dcembre 2016 en raison des travaux du CEVA;
- appartement de 5.5 pices au rez-de-chausse pour un loyer de 3'700 fr. du 1er juin 2013 au 31 mai 2018. En raison des travaux du CEVA, A______ a accord une rduction de 9'600 fr. (17.77%) sur le loyer annuel de 54'000 fr. qu'elle a fix 44'400 fr.;
- appartement de 5 pices au 5me tage pour un loyer de 3'600 fr. du 7 juillet 2014 au 31 juillet 2019;
- appartement de 5 pices au 4me tage pour un loyer de 3'400 fr. du 1er juin 2016 au 31 mai 2021. A______ a accord une rduction de 9.33% sur le loyer annuel de 45'000 fr. pour une dure de 24 mois, du 1er juin 2016 au 31 mai 2018;
- appartement de 5 pices au 5me tage pour un loyer de 3'450 fr. du 16 octobre 2016 au 31 octobre 2021;
- appartement de 5 pices au 6me tage pour un loyer de 3'450 fr. du 1er mars 2017 au 28 fvrier 2022. A______ a accord une rduction provisoire de 12.22% sur le loyer annuel de 43'200 fr. pour une dure de 24 mois et 15 jours, soit du 16 novembre 2016 au 30 novembre 2018;
- appartement de 6 pices au 4me tage pour un loyer de 3'950 fr. du 1er mars 2017 au 28 fvrier 2022. A______ a accord une rduction provisoire de 5.95% sur le loyer annuel de 50'400 fr. pour une dure de 24 mois, soit du 1er mars 2017 au 28 fvrier 2019;
- appartement de 6 pices au 2me tage pour un loyer de 3'800 fr. du 16 juillet 2017 au 31 juillet 2022;
- appartement de 5 pices au 6me tage pour un loyer de 3'600 fr. du 1er dcembre 2018 au 30 novembre 2023;
- appartement de 3 pices au rez infrieur pour un loyer de 1'400 fr. du 16 mars 2019 au 31 mars 2024.
s. Lors de l'audience de dbats principaux du 31 aot 2021, le Tribunal a procd l'interrogatoire des parties et l'audition de trois tmoins.
D______ a dclar que les nuisances taient essentiellement causes par les machines de chantier (marteaux piqueurs, camions, pelles mcaniques et foreuses). A ses dires, les travaux dbutaient 7h00 du matin. Il y avait une quarantaine de camions en mouvement perptuel sous les fentres de la chambre coucher. Il tait arriv que des travaux soient raliss les samedis, le soir et la nuit. De la poussire se dposait sur les meubles et sur les tapis ainsi que sur les vitres et les odeurs de gaz d'chappement montaient jusqu' l'appartement. Les vibrations avaient t importantes au dbut du chantier, au moment de sa prparation et de la pose des palplanches, les machines utilises pendant quelques mois tapaient fort. Des vibrations s'taient galement produites au moment de l'essai des trains. Des palissades de 1.5 2 mtres avaient t installes pendant toute la dure du chantier, le trottoir tait rtrci et il n'tait pas possible d'arriver devant l'immeuble en taxi. Les nuisances taient ressenties dans tout l'appartement; les enfants les ressentaient dans leur chambre coucher donnant sur l'avenue Peschier. Entre juin 2012 et mai 2014, D______ tait mre au foyer.
C______ a dclar qu'il exerait son activit de comptable domicile, mais qu'en raison des nuisances il n'avait pas pu recevoir les clients chez lui. Il avait cotis l'AVS jusqu'en 2017.
A______ a dclar qu'elle n'tait pas entre en matire sur la demande de rduction forme par C______ et D______ en raison de la dnonciation d'instance.
E______, charg de diriger les travaux d'emmnagement extrieur de gnie civil a dclar qu'il tait prsent sur le chantier ds septembre 2018 et jusqu' la fin, au moins 80%. Pour les travaux de mise en sparatif des canalisations, une pelle pneus d'environ 18 20 tonnes, charge de dumpers, avait t utilise pour la partie terrassement et pour effectuer des fouilles environ 4 mtres de profondeur. Pour le remblayage, des plaques vibrantes pour la partie sous-structure et des cylindres pour la partie sur structure, soit des machines usuellement utilises dans ce type de travaux, avaient t mises en Ïuvre. Les zones d'accs avaient t arroses afin de diminuer l'mission de poussire. Les engins taient pourvus de filtres particules, conformment aux normes, ayant pour but d'attnuer les odeurs et les dgagements de fume. S'agissant du bruit, il n'existait pas de mesures pour l'attnuer. Les ouvriers travaillaient de 7h00 (8h00 en hiver) 12h00 et de 13h00 17h00. Ils avaient travaill un samedi pour raliser le revtement l'avenue de Champel et un autre samedi, au dbut dcembre 2019, pour effectuer les travaux de maonnerie sur l'escalier menant la gare. Un camion tournait quotidiennement, pour charger et dcharger, notamment du bton et du gravier. En fonction des besoins, la cadence du tournus des camions avait t augmente. S'agissant d'un chantier en ville, au maximum 4 5 vhicules taient utiliss en mme temps et uniquement pendant les travaux de revtement qui s'taient tendus sur une anne, mais pas en continu devant l'immeuble litigieux.
F______, chef de projet depuis la phase de concours lanc par la VILLE DE GENEVE en 2012 jusqu' la ralisation des travaux d'amnagement, a dclar qu'il avait pilot les divers intervenants sur le chantier. Il a confirm que l'accessibilit aux immeubles avait t garantie durant le chantier, que les plans taient soumis l'Office cantonal des transports pour validation et que, parfois, il avait fallu amnager des parcours particuliers pour les pitons.
G______, assistant technique depuis janvier 2016 au sein de la rgie en charge de la gestion de l'immeuble litigieux, a confirm que des questions de rduction de loyer en lien avec les travaux du CEVA s'taient poses pour d'autres locataires de l'immeuble. Les demandes avaient t examines au cas par cas, A______ n'y avait pas apport de rponse uniforme.
t. Par ordonnance du 10 dcembre 2021, le Tribunal a notamment clos les dbats principaux et fix aux parties un dlai pour le dpt de plaidoiries finales crites.
A______ et C______ et D______ ont respectivement persist dans leurs prcdentes conclusions les 31 janvier et 4 mars 2022 et rpliqu spontanment les 22 et 24 mars 2022. C______ et D______ ont produit des dterminations et une pice nouvelle le 4 avril 2022.
La cause a t garde juger le 14 avril 2022.
1. A______ sera dsigne comme l'Ç appelante È et C______ et D______ comme les Ç intims È. La VILLE DE GENEVE sera dsigne comme l'Ç appelante sur appel joint È.
1.1 L'appel est recevable contre les dcisions finales et les dcisions incidentes de premire instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier tat des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).
Selon la jurisprudence constante du Tribunal fdral, les contestations portant sur l'usage d'une chose loue sont de nature pcuniaire (arrt du Tribunal fdral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).
1.2 Dans le cas d'espce, le loyer mensuel s'lve 2'500 fr. Une rduction de 15% sur la priode du 18 novembre 2014 au 15 dcembre 2019 reprsente 22'875 fr., de sorte que la valeur litigieuse est suprieure 10'000 fr.
La voie de l'appel est ds lors ouverte.
1.3 L'appels et l'appel joint, crits et motivs (art. 311 al. 1 CPC) ont t interjets dans le dlai prescrit par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Ils sont ainsi recevables.
2. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir constat les faits de manire inexacte et fait preuve d'arbitraire dans l'apprciation des preuves, notamment en se rfrant aux arrts ACJC/173/2018 et ACJC/377/2007 l'appui de son raisonnement. En effet, selon l'appelante, aucune analyse des travaux n'avait t opre par la Cour dans ses arrts prcits, qui portaient respectivement sur un appartement de six pices au 1er tage, dont le loyer s'levait 5'000 fr. et sur une villa impacte par des travaux nocturnes, soit deux situations non comparables avec celle de l'appartement litigieux.
Dans la partie en droit du jugement attaqu et relativement aux dfauts lis l'existence d'un chantier voisin, le Tribunal a mentionn les rgles de droit tablies dans les arrts ACJC/173/2018 et ACJC/377/2007, parmi d'autres dcisions judiciaires, dans le but de mettre en lumire la casuistique existante en matire de rduction de loyer lors de nuisances provoques par un chantier voisin. S'il a mentionn le contenu de ces arrts, le Tribunal n'a au contraire pas retenu les faits de ceux-ci l'appui de son raisonnement qui repose sur les pices au dossier, auxquelles il est fait rfrence. Il ne ressort pas de l'examen du raisonnement du Tribunal qu'il aurait procd un tablissement erron des faits, une apprciation inexacte des preuves ou une transposition incorrecte des jurisprudences prcites au cas d'espce.
Infond, le grief doit tre rejet.
3. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir constat les faits de manire inexacte, fait preuve d'arbitraire dans l'apprciation des preuves et viol les art. 259d CO et 4 CC en retenant que les travaux du CEVA diligents par les CFF ds dcembre 2011, puis par l'appelante sur appel joint ds le 17 septembre 2018, taient constitutifs d'un dfaut de la chose loue justifiant une rduction de loyer de 15%.
L'appelante soutient que l'essentiel des travaux mens par les CFF se droulaient en sous-sol et n'engendraient pas de nuisances visuelles ou olfactives. Elle concde quelques lgres vibrations et immissions sonores lors des tests mens et estime pour le surplus que la mise en place du revtement de bton du tunnel et la pose de la verrire de couverture de la gare constituaient tout au plus des gnes qui n'taient pas propres justifier une baisse de loyer.
S'agissant des travaux mens par l'appelante sur appel joint, qui ont dbut aprs une priode de plus d'une anne exempte de travaux, selon l'appelante, il s'agissait de travaux dont l'intensit et la gravit ne pouvaient tre qualifies de dfaut de la chose loue. En particulier, suivre l'appelante, les travaux ont eu lieu pendant les horaires de travail, par zones, parfois loignes de l'immeuble litigieux, ont t maills de priodes creuses et pouvaient tre qualifis de Ç chantier de ville È. Enfin, les nuisances sonores ne dpasseraient pas celles inhrentes tout chantier.
Quand bien mme elle se plaint formellement de constatation inexacte des faits et d'apprciation arbitraire des preuves, l'appelante ne dmontre pas quel fait aurait t tabli de manire errone, de sorte qu'elle se plaint en ralit d'une mauvaise apprciation des preuves.
3.1 En vertu de l'art. 259d CO, si le dfaut entrave ou restreint l'usage pour lequel la chose a t loue, le locataire peut exiger du bailleur une rduction proportionnelle du loyer partir du moment o le bailleur a eu connaissance du dfaut et jusqu' l'limination de ce dernier.
Le dfaut de la chose loue est une notion relative; son existence dpend des circonstances du cas concret; il convient de prendre en compte notamment la destination de l'objet lou, l'ge et le type de la construction, ainsi que le montant du loyer (arrt du Tribunal fdral 4A_582/2012 du 28 juin 2013); en l'absence de prcision dans le bail, l'usage est apprci objectivement selon toutes les circonstances du cas d'espce, soit notamment le montant du loyer, la destination de l'objet lou, l'environnement des locaux, l'ge de l'immeuble et son tat apparent, les normes usuelles de qualit et les rgles de droit public applicables, ainsi que les usages courants (ACJC/173/2018 du 12 fvrier 2018 consid. 3.1 et les rfrences).
Le locataire doit compter, selon le cours ordinaire des choses, avec la possibilit de certaines entraves mineures inhrentes l'usage de la chose qui ne constituent pas un dfaut. En revanche, si l'entrave est plus importante et sort du cadre raisonnable des prvisions, elle devient un dfaut (ACJC/173/2018 prcit ibid.).
Le dfaut peut consister notamment dans les nuisances provenant d'un chantier, dans la privation de l'usage d'un ascenseur ou encore d'infiltrations d'eau (ACJC/173/2018 prcit ibid.).
Un chantier voisin peut ainsi engendrer un dfaut ds lors que les nuisances qu'il provoque excdent les inconvnients mineurs inhrents la vie en milieu urbain (ACJC ACJC/173/2018 prcit ibid.).
Peu importe que les immissions de ce chantier (bruit, poussire, vibrations) chappent ou non la sphre d'influence du bailleur (arrt du Tribunal fdral 4C_219/2005 du 24 octobre 2005 consid. 2.2; ACJC/173/2018 prcit ibid.; ACJC/1016/2017 du 28 aot 2017 consid. 3.1).
Un dfaut est grave lorsqu'il exclut ou entrave considrablement l'usage pour lequel la chose a t loue (art. 258 al. 1 et 259b let. a CO). Tel est notamment le cas (É) lorsque le locataire ne peut pas habiter le logement ou ne peut pas faire usage des pices importantes (cuisine, salon, chambre coucher, salle de bains) pendant un certain temps (ACJC/173/2018 prcit ibid.).
Le locataire qui entend se prvaloir des art. 258 ss CO doit prouver l'existence du dfaut (ACJC/173/2018 prcit ibid.). Dans le cadre de la maxime inquisitoire sociale, le tribunal n'est soumis qu' une obligation d'interpellation accrue, les parties devant recueillir elles-mmes les lments du procs (ATF 141 III 569 consid. 2.3.1). Ainsi, conformment la jurisprudence rendue sous l'empire des art. 274d al. 3 et 343 al. 4 aCO, en premire instance, les parties doivent renseigner le juge sur les faits de la cause et lui indiquer les moyens de preuve propres tablir ceux-ci. De son ct, le juge doit les informer de leur devoir de cooprer la constatation des faits et l'administration des preuves. Il doit les interroger pour s'assurer que leurs allgus de fait et leurs offres de preuves sont complets s'il a des motifs objectifs d'prouver des doutes sur ce point. Son rle ne va toutefois pas au-del (ATF 141 III 569 consid. 2.3.2 et les rfrences).
Le fait qu'un chantier soit d'intrt public signifie que les nuisances qui y sont lies doivent tre tolres et qu'il s'agit de perturbations invitables qui excluent toute action en cessation de trouble. En revanche, ce fait n'exclut pas une rduction de loyer selon l'art. 259d CO (arrt du Tribunal fdral 4C_377/2004 du 2 dcembre 2004, consid. 2.2).
3.2 En l'espce, les travaux de construction de la gare de Champel-Hpital, situe ct de l'immeuble litigieux, ont dbut en dcembre 2011. Les travaux de gros-Ïuvre se sont drouls entre janvier 2013 et mars 2016 (comportant notamment le creusement dans l'enceinte construite, la ralisation des dalles extrieures et la ralisation de carottage et pr-sciage de parties de la paroi moule situe au nord de la halte). Ces travaux ont t suivis du dmontage de la grue et de la centrale bton, puis l'enlvement de gros containers. Certaines priodes ont vu les horaires des travaux tendus en soire ou durant le week-end en 2015 et 2016.
Les travaux de second Ïuvre ont dbut en juin 2016 et se sont poursuivis tout le moins jusqu' novembre 2016. Le tunnel de Champel a t creus entre mars 2014 et le 8 juin 2017, l'aide de pelles mcaniques. Entre mars et juin 2016, le forage tait la hauteur de la gare Champel-Hpital.
A cela se sont ajouts, entre juin 2017 et mai 2018, des travaux de revtement intrieur, ainsi que des campagnes de mesurage de vibrations et bruit solidien, consistant, sur plusieurs jours, en une trentaine de priodes de vibrations (30 secondes) et de test de la ventilation et du dispositif de dsenfumage de la gare.
Enfin, de mi-septembre 2018 au printemps 2020, l'appelante sur appel joint a ralis des travaux d'amnagement de l'espace public au Plateau de Champel, par tronons et l'immeuble litigieux a t concern entre avril et aot 2019.
Il est tabli que le chantier du CEVA a revtu une importance et une intensit particulires et a comport diverses phases propres gnrer des nuisances importantes impliquant de nombreux engins de chantier, vibrations, poussires, bruits et odeurs incommodants. A certains moments, les travaux dans le tunnel, sur le site de la gare et aux alentours ont t mens simultanment, ce qui renforce l'importance des nuisances constates.
Dans son arrt ACJC/173/2018 (consid. 3.2), la Cour a retenu de manire gnrale s'agissant du chantier du CEVA que les fiches d'informations permettaient d'en comprendre l'ampleur, dans leur dure comme dans leur intensit. Ainsi, l'importance du chantier ne peut tre nie.
Certaines priodes ont t moins intenses et propres gnrer des nuisances. De mme, certains travaux ont moins touch l'immeuble litigieux, notamment au regard de la distance les sparant de ce dernier.
Il rsulte de ce qui prcde que l'apprciation de l'appelante quant aux nuisances engendres par le chantier, savoir que celles-ci seraient de moindre importance et ne constitueraient pas un dfaut de la chose loue, ne peut tre suivie. En raison de la proximit de l'immeuble litigieux avec le chantier, les intims ont souffert des nuisances manant de celui-ci.
Par consquent, le Tribunal a considr avec raison que l'appartement litigieux tait entach d'un dfaut de la chose loue.
4. Tant l'appelante que les intims critiquent le taux de rduction de loyer fix par le Tribunal. Celui-ci a retenu que la qualit de vie des intims a t rduite sur une priode particulirement longue, mais galement qu'ils n'avaient pas dmontr avoir t entravs dans l'exercice de leur activit professionnelle, respectivement de mre au foyer et que les travaux avaient principalement eu lieu en journe et durant la semaine. Le Tribunal a encore relev que les rductions de loyer accordes par l'appelante au sein de l'immeuble lors de la conclusion de nouveaux baux oscillaient entre 12% et 17.77%.
L'appelante fait valoir que l'absence de dfaut de la chose loue ne justifierait pas une telle baisse et qu'en tout tat le loyer modeste pay par les intims, contrairement aux autres locataires de l'immeuble, imposerait de rduire de manire trs restrictive le loyer des intims.
Les intims, quant eux, soutiennent que le Tribunal aurait, tort, omis de tenir compte de l'activit de comptable domicile, de juin 2013 juin 2019, de l'intim, qui n'aurait pu rencontrer ses clients plusieurs reprises, ainsi que de l'activit de mre au foyer de l'intime. Le Tribunal aurait d, selon les appelants, retenir le nombre lev de soirs et de week-ends durant lesquels des travaux s'taient drouls. En revanche, les taux de rduction de loyer accords d'autres locataires de l'immeuble ne seraient pas pertinents.
4.1 La rduction de loyer que peut exiger le locataire en application de l'art. 259d CO doit tre proportionnelle au dfaut et se dtermine par rapport la valeur de l'objet sans dfaut. Elle vise rtablir l'quilibre des prestations entre les parties (ATF 130 III 504 consid. 4.1; 126 III 388 consid. 11c). Lorsqu'un calcul concret de la diminution de valeur de l'objet entach du dfaut n'est pas possible, notamment lorsque l'intensit des nuisances est variable et se prolonge sur une longue priode, de sorte que les preuves de l'intensit des nuisances et de l'entrave l'usage ne peuvent tre fournies au jour le jour, le tribunal procde une apprciation en quit, par rfrence l'exprience gnrale de la vie, au bon sens et la casuistique (ATF 130 III 504 consid. 4.1; arrt du Tribunal fdral 4C.219/2005 du 24 octobre 2005 consid. 2.3 et 2.4; ACJC/1016/2017 du 28 aot 2017 consid. 3.1;).
A cet gard, le juge doit apprcier objectivement la mesure dans laquelle l'usage convenu se trouve limit, en tenant compte des particularits de chaque espce, au nombre desquelles la destination des locaux prvues dans le contrat joue un rle important (arrt du Tribunal fdral 4A_490/2010 du 25 janvier 2011 consid. 2.1).
En matire de dfauts lis des nuisances provenant d'un chantier, les taux de rduction de loyer sont en gnral compris selon la casuistique entre 10% et 25%. Les cas o les nuisances sonores ont conduit des rductions de loyer de 5% 10% sont plutt des situations de bruits intermittents qui, bien que gnants, n'empitent gnralement pas sur la priode nocturne. Une rduction de 15% a galement t retenue dans le cadre d'un chantier relatif la construction d'un complexe de quatre immeubles proximit de l'objet lou, en raison du bruit, de la poussire, des trpidations engendres par de type de travaux; ce qui reprsentait une moyenne entre les priodes objectivement les plus pnibles et celles plus calmes (ACJC/550/2015 du 11 mai 2015 consid. 4.1; ACJC/202/2013 du 18 fvrier 2013 consid. 6.1).
Le Tribunal fdral a approuv une rduction de 37% du loyer de locaux destins un cabinet d'ophtalmologie, en raison du bruit caus par deux chantiers proches, qui se sont drouls successivement et, pour partie, cumulativement (arrt du Tribunal fdral 4C_377/2004 du 2 dcembre 2004).
Le Tribunal fdral a galement confirm une rduction de 60% du loyer pour des locaux lous une agence de placement qui avait t empche de travailler normalement (arrt du Tribunal fdral 4C.219/2005 du 24 octobre 2005).
En matire de baux d'habitation, la Cour de justice a confirm une diminution de loyer hauteur de 20%, pris en tant que taux moyen, pendant une anne et demie l'occasion d'importants travaux entrepris sur les voies et les quais de la gare de Cornavin, situs 30 mtres du logement de la locataire et effectus momentanment 24 heures sur 24 ou le week-end. S'y taient ajouts le chantier du CEVA et la construction d'une nouvelle ligne de tramway galement proximit de l'immeuble. La Cour a notamment retenu que le bruit gnr par les chantiers tait sensiblement plus gnants que celui de la circulation routire et ferroviaire auquel l'appartement tait expos. Durant la priode concerne, le repos des habitants du quartier avait t particulirement affect par des travaux effectus pendant la nuit ou le week-end (ACJC/578/2009 du 11 mai 2009 consid. 4.2).
Dans un arrt du 2 avril 2007 (ACJC/377/2007), la Cour de justice a accord une rduction du loyer de 15% durant 18 mois, en lien avec la construction de la troisime voie de chemin de fer entre Genve et Coppet, des locataires occupant une villa situe en bordure de cette voie de chemin de fer. Elle a retenu l'importance du chantier, comportant des travaux de nuit, ainsi qu'un loyer relativement lev, mais aussi les nuisances prexistantes inhrentes une habitation en bordure d'une voie ferre trs frquente.
4.2 En l'espce, il n'y a pas lieu de revenir sur l'existence et l'intensit des nuisances qui ont t traites ci-dessus, sous considrant 3.2.
S'agissant des activits menes par les intims telles qu'allgues, force est de constater, avec le Tribunal, qu'aucun lment au dossier ne permet d'en attester la ralit.
Quant aux travaux ayant eu lieu en-dehors des heures de bureau, ils ne sont pas totalement anecdotiques, mais restent accessoires, l'essentiel des travaux tant intervenu en journe et en semaine.
Enfin, s'agissant du montant du loyer, il y a lieu d'en tenir compte, parmi les autres critres fixs par la loi, dans le cadre de la fixation en quit de la rduction de loyer, qui s'impose en l'espce face l'impossibilit de dterminer prcisment l'ampleur de chaque nuisance et la temporalit de celles-ci.
En rsum, les nuisances ont t particulirement durables, mme si d'intensit variable, et ont port atteinte de manire substantielle la qualit de vie des intims au quotidien. L'essentiel des nuisances a eu lieu en journe et en semaine, sans qu'il ait t dmontr que les intims en auraient particulirement souffert en raison d'activits leur domicile.
Compte tenu de toutes les circonstances d'espce mentionnes ci-dessus, il apparat que la rduction de loyer de 15% accorde par le Tribunal s'inscrit dans les limites fixes par le droit et la casuistique en matire rduction de loyer suite un dfaut de la chose loue.
Par consquent, le jugement sera confirm sur ce point.
5. Les intims reprochent au Tribunal d'avoir retenu qu'une partie de leur crance tait prescrite, sans prendre en considration que leur retard tait d un comportement contradictoire et abusif de l'appelante. Ils estiment en effet que l'appelante les aurait incits ne pas poursuivre leurs dmarches visant une rduction de loyer suite l'audience de conciliation du 9 avril 2013. Se prvaloir de la prescription lors de la prsente procdure serait, ds lors, constitutif d'un abus de droit de la part de l'appelante.
5.1 Selon l'art. 2 al. 2 CC, l'abus manifeste d'un droit n'est pas protg par la loi.
Le comportement contradictoire forme une des catgories d'actes susceptibles de constituer un abus de droit. Commet ainsi un abus de droit la personne qui, par son comportement initial, inspire autrui une confiance digne de protection qui est ensuite trahie par des comportements ultrieurs (ATF 143 III 666 consid. 4.2; arrt du Tribunal fdral 4A_320/2018 du 13 dcembre 2018 consid. 4.2.1).
Une faute de l'auteur des actes contradictoires n'est pas ncessaire; il suffit que par son comportement interprt normativement, il ait suscit une confiance lgitime qui est ensuite due (arrt du Tribunal fdral 4A_320/2018 du 13 dcembre 2018 consid. 4.2.1).
Est notamment digne de protection la confiance de celui qui, sur la base de l'attitude initiale de son partenaire, a pris des dispositions qui se rvlent ensuite dsavantageuses en raison du revirement d'attitude (ATF 125 III 257 consid. 2a; 121 III 350 consid. 5b).
La question d'un abus de droit doit se rsoudre au regard des circonstances concrtes de chaque cas. L'art. 2 CC est un remde destin viter que l'application de la loi conduise dans un cas particulier une injustice flagrante. L'emploi dans le texte lgal du qualificatif Ç manifeste È dmontre que l'abus de droit doit tre admis restrictivement (ATF 143 III 666 consid. 4.2; 143 III 279 consid. 3.1; arrt du Tribunal fdral 5A_490/2019 du 19 aot 2019 consid. 3.1.3).
5.2 Les intims ont requis une rduction de loyer par courriers des 29 janvier 2012 et 29 dcembre 2012, suivis par l'introduction d'une requte de conciliation le 5 mars 2013. L'appelante a estim qu'il tait prmatur de dterminer une rduction de loyer en 2013. Les intims en ont pris acte par courrier du 6 mai 2013 et ont indiqu qu'ils patienteraient. Par la suite, les intims ont adress de nombreux courriers l'appelante, mais n'ont sollicit une baisse de loyer, hauteur de 35%, que le 18 novembre 2019.
L'opinion de l'appelante quant au fait qu'il aurait t prmatur de se dterminer sur une rduction de loyer ne constitue pas, en soi, un comportement propre susciter une confiance lgitime de la part de ses adverses parties. Il ne ressort pas non plus de la procdure qu'une promesse aurait t faite, ni qu'un change aurait eu lieu, permettant de tisser une telle confiance. Il est difficile d'interprter la position de l'appelante comme visant autre chose qu' dfendre ses propres intrts, soit notamment comme une concession en faveur des intims. Certes, l'appelante n'a pas ragi au courrier du 6 mai 2013. Toutefois, celui-ci ne comportait aucune prcision supplmentaire et rien ne permettait d'en infrer que les dlais de prescription ne seraient pas pris en compte par les intims ou que ceux-ci taient induits en erreur. Ces derniers n'taient d'ailleurs pas empchs de prendre toute mesure apte assurer la sauvegarde de leurs droits.
L'interprtation restrictive qui doit tre faite de la notion d'abus de droit impose ds lors de considrer que le comportement de l'appelante ne peut tre considr comme tel en l'espce et que les rgles relatives aux dlais de prescription doivent tre appliqus.
Pour le surplus, les parties ne critiquent pas le raisonnement du Tribunal quant la date retenue et permettant de dterminer le point de dpart de la crance en restitution, soit le 18 novembre 2019, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'y revenir et que le jugement sera confirm sur ce point galement.
6. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prlev de frais dans les causes soumises la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).
* * * * *
La Chambre des baux et loyers :
A la forme :
Dclare recevables l'appel interjet le 22 aot 2022 par A______, ainsi que les appels joints interjets le 26 septembre 2022 par C______ et D______ et le 16 septembre 2022 par la VILLE DE GENEVE contre le jugement JTBL/471/2022 rendu le 17 juin 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/1015/2020.
Au fond :
Confirme le jugement entrepris.
Dit que la procdure est gratuite.
Dboute les parties de toutes autres conclusions.
Sigeant :
Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, prsidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Nicolas DAUDIN et Madame
Zo SEILER, juges assesseurs; Madame Mat VALENTE, greffire.
La prsidente : Nathalie LANDRY-BARTHE |
| La greffire : Mat VALENTE |
Indication des voies de recours :
Conformment aux art. 72 ss de la loi fdrale sur le Tribunal fdral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le prsent arrt peut tre port dans les trente jours qui suivent sa notification avec expdition complte (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fdral par la voie du recours en matire civile.
Le recours doit tre adress au Tribunal fdral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pcuniaires au sens de la LTF suprieure ou gale 15'000 fr.