Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/1831/2024

ATAS/22/2025 du 20.01.2025 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1831/2024 ATAS/22/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 janvier 2025

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

 

recourant

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______ 1999, célibataire, originaire de Macédoine, entré en Suisse en juin 2012, est titulaire d’une autorisation de séjour F.

b. Le 14 décembre 2017, il a déposé une demande de prestations d’invalidité en raison de troubles émotionnels et troubles spécifiques des acquisitions scolaires.

B. a. Le 16 avril 2018, le docteur B______, spécialiste FMH en pédiatrie, a attesté d’une déficience intellectuelle modérée. Une formation professionnelle initiale devait lui être proposée sous forme pratique de type IN505.

b. Le 24 avril 2018, la docteure C______, spécialiste FMH en médecine interne générale, a attesté de difficultés d’apprentissage ; l’assuré était actuellement dans un encadrement spécialisé.

c. Du 1er au 5 avril 2019, l’assuré a suivi un stage découverte à l’Orif – Organisation romande pour l’intégration et la formation professionnelle (ci‑après : Orif) en carrelage. Il a été absent pour maladie les trois derniers jours de stage, lequel n’a, en conséquence, pas pu être validé.

d. Du 6 au 10 mai 2019, l’assuré a suivi un stage en carrelage à l’Orif, lequel a été validé, laissant la possibilité à l’assuré d’intégrer le site dès la rentrée d’août 2019.

e. L’office cantonal de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI) a pris en charge les coûts d’une orientation professionnelle auprès de l’Orif du 13 août au 31 décembre 2019, en section peinture, carrelage et vente, puis une mesure préparatoire auprès du secteur carrelage de l’Orif du 1er janvier au 31 juillet 2020 (en vue d’une formation pratique en tant qu’aide-carreleur), laquelle a permis de conclure le 17 juin 2020 à l’octroi d’une formation professionnelle initiale dans le domaine du carrelage octroyée par l’OAI le 1er août 2020 au 31 juillet 2021, auprès du secteur carrelage de l’Orif.

f. Le rapport de fin de mesure du 11 juin 2021 de l’Orif relève que les difficultés cognitives de l’assuré sont importantes et qu’une autonomie et une intégration durable nécessitent un investissement important d’un professionnel à ses côtés.

g. L’OAI a prolongé la formation professionnelle initiale du 1er août 2021 au 31 juillet 2022 en tant que praticien en carrelage. Le rapport de fin de formation de l’Orif du 14 juin 2020 (recte : 2022) conclut qu’une attestation fédérale de formation professionnelle (AFP) n’est pas envisageable et que l’assuré devrait exercer une activité de manœuvre. En l’état, ses difficultés de comportement et de mémorisation ne lui permettaient pas d’évoluer davantage. La décision de synthèse finale du 7 juin 2022 mentionne qu’« aucune mesure de suivi par notre service intégration n’est envisagée ».

h. Un courriel du 27 juin 2022 de la psychologue de l’OAI à l’Orif relève que les conclusions du rapport de fin de formation ne semblent pas correspondre à la décision de synthèse.

i. Le 5 juillet 2022, l’Orif a établi un certificat de compétences attestant que l’assuré avait bénéficié d’une formation professionnelle initiale en tant que praticien en carrelage.

j. L’OAI a pris en charge un placement à l’essai au sein de D______ du 15 août 2022 au 15 février 2023 et un coaching auprès de l’Orif

k. Le 23 février 2023, l’OAI a conclu à l’octroi d’une allocation à l’initiation au travail (AIT) de 50% en faveur de l’assuré, lequel avait reçu une offre d’engagement de la part de l’entreprise D______. L’assuré a été licencié pour le 31 juillet 2023, l’employeur ayant relevé que les compétences de l’assuré ne correspondaient pas à celles d’un aide-carreleur et son attitude n’était pas conforme à leurs attentes.

l. Le 8 mars 2024, l’OAI a estimé que la capacité de travail de l’assuré était de 100% comme manœuvre. Il a fixé le degré d’invalidité à 11% en 2023 (revenu sans invalidité de CHF 80'159.- fondé sur l’ESS 2020, TA1, total, niveau 1, pour 41,7 heures de travail par semaine, et un revenu d’invalide de CHF 71'097.- fondé sur l’ESS 2020, TA1, lignes 41-43 construction, pour 41,3 heures de travail par semaine, sans abattement) et à 20% en 2024, sur la même base, en appliquant une déduction de 10% sur le revenu d’invalide.

m. Par projet de décision du 12 mars 2024, et décision du 3 mai 2024, l’OAI a rejeté la demande de prestation, en constant que les taux d’invalidité de 11 et 20% n’ouvraient pas le droit à une rente d’invalidité.

C. a. Le 29 mai 2024, l’assuré a recouru à l’encontre de la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Il a joint un certificat médical de la docteure E______, spécialiste FMH en médecine interne, mentionnant des difficultés d’apprentissage, avec probablement un trouble anxieux sous-jacent et une situation limite dans les possibilités professionnelles et d’apprentissage. Un bilan neuropsychologique et une prise en charge psychiatrique étaient nécessaires.

b. Le 23 juillet 2024, l’OAI a conclu au rejet du recours, le recourant présentant une capacité de 100% dans toute activité de manœuvre.

c. Le 15 août 2024, le recourant a répliqué, en mentionnant qu’il travaillait depuis quelques mois dans une agence et que le patron n’était pas content de lui, il lui reprochait de faire tomber des murs. Il était stressé, triste, avec un grand manque d’attention et de mémoire et n’avait personne pour l’aider.

d. Le 7 octobre 2024, les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle.

Le recourant a expliqué qu’il avait été licencié de son dernier emploi, exercé pendant trois mois en été 2024, comme carreleur, pour incompétence. Il avait besoin d’une aide de l’AI pour être formé comme carreleur ou chauffeur.

La représentante de l’intimé a indiqué que l’OAI n’allait pas prendre en charge une nouvelle formation, le recourant ayant bénéficié de celle d’aide carreleur.

e. Le 24 octobre 2024, l’OAI s’est rallié à une note de travail du service de réadaptation du 10 octobre 2024, selon laquelle une mesure de placement à l’essai avec un accompagnement du service intégration de l’Orif avait été mise en place du 15 août 2022 au 15 février 2023, de sorte que le rapport Orif de fin de formation du 14 août 2022 contenait une erreur puisqu’il indiquait qu’« aucune mesure de suivi par notre service intégration n’est envisagée ».

f. A la demande de la chambre de céans, l’Office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) a versé le dossier du recourant à la procédure. Il ressort de celui-ci que le recourant s’est inscrit à l’Office régional de placement (ci-après : l’ORP) le 1er août 2023 et a effectué des recherches d’emploi en tant que préparateur de commande, agent de salle, agent de déchetterie, équipier, aide-carreleur, aide de cuisine, animateur parascolaire, ouvrier polyvalent, poseur de résine, vendeur, magasinier, livreur, serveur, caissier, maçon, peintre, étancheur, paysagiste, chauffeur, horticulteur et employé de logistique.

L’entretien de conseil du 25 août 2023 relève que le ciblage le plus convaincant est celui de manœuvre du bâtiment mais que l’assuré est aussi autorisé à rechercher dans d’autres secteurs (nettoyage, restauration). Le contrat d’objectif de recherches d’emploi du 2 mai 2024 mentionne comme activités recherchées : aide-carreleur, aide-maçon, manœuvre du bâtiment et « tout emploi en rapport avec ses capacités ».

Du 29 janvier au 17 mai 2024, l’ORP a enjoint l’assuré de participer à un stage auprès de REALISE (programme d’emploi temporaire fédéral).

Le 25 juin 2024, F______ a proposé à l’assuré un contrat de mission comme carreleur avec AFO classe B chez G______ dès le 26 juin 2024, pour une durée de trois mois. L’ORP a annulé son dossier. L’assuré a travaillé pour F______ du 26 juin au 16 août 2024 et du 26 août au 26 septembre 2024.

Le 27 juillet 2024, le bilan de formation de REALISE relève que l’assuré peut être recommandé pour des postes de manœuvre et qu’il avait démontré d’excellentes capacités d’apprentissage et avait développé de bonnes connaissances de base en maçonnerie et coffrage.

L’assuré s’est réinscrit à l’ORP le 2 octobre 2024, le procès-verbal de l’entretien de conseil du 25 novembre 2024 mentionne que l’assuré n’a pas le niveau de français pour être assigné comme conducteur de bus.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA [applicable par le renvoi de l’art. 1 al. 1 LAI] ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI ; RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

2.1 En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence).

2.2 En l’occurrence, la décision querellée, datée du 3 mai 2024, a été rendue postérieurement au 1er janvier 2022. Il s’ensuit que les dispositions applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.

3.             Le litige porte, conformément aux conclusions du recourant, sur le droit de celui-ci à la prise en charge par l’intimé d’une mesure professionnelle.

3.1 Selon l’art. 8 al. 1er LAI, les assurés invalides ou menacés d’une invalidité (art. 8 LPGA) ont droit à des mesures de réadaptation pour autant que ces mesures soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d’accomplir leurs travaux habituels (let. a) et que les conditions d’octroi des différentes mesures soient remplies (let. b). Le droit aux mesures de réadaptation n’est pas lié à l’exercice d’une activité lucrative préalable. Lors de la fixation de ces mesures, il est tenu compte de l’âge de l’assuré, de son niveau de développement, de ses aptitudes et de la durée probable de la vie active (art. 8 al. 1bis LAI en vigueur dès le 1er janvier 2008). L’art. 8 al. 3 let. b LAI dispose que les mesures de réadaptation comprennent les mesures d’ordre professionnel, soit en particulier l’orientation professionnelle (art. 15 LAI) et la formation professionnelle initiale (art. 16 LAI).

En cas d’interruption d’une mesure de réadaptation, l’octroi de la même mesure ou d’une autre mesure de réadaptation est examiné à nouveau conformément aux al. 1 et 1bis (art. 8 al. 1ter LAI). Selon le message relatif à l’introduction de cette disposition, en vigueur depuis le 1er janvier 2022, cette règle vise avant tout les jeunes et les jeunes adultes. Il est dans la nature des choses que, dans cette phase de la vie où le passage de l’enfance à l’âge adulte coïncide normalement avec le passage de l’école à la vie active, les interruptions ou les réorientations dans la formation soient relativement fréquentes. Les problèmes de santé peuvent renforcer encore cet effet (FF 2017 p. 2473). C’est ici qu’intervient la réforme de l’AI : il faut que les mesures de réadaptation puissent être octroyées à plusieurs reprises et que l’objectif de réadaptation puisse être régulièrement réexaminé et adapté. L’adaptation proposée vise à optimiser encore les efforts de réadaptation déployés spécialement pour les jeunes assurés vulnérables de 13 à 25 ans et éviter que ceux-ci ne deviennent tributaires d’une rente (FF 2017 p. 2399). Plus l’assuré est jeune, plus grands seront les efforts de réadaptation que l’office AI devra déployer (FF 2017 p. 2473).

3.2 Aux termes de l’art. 15 LAI, dans sa nouvelle teneur, l’assuré auquel son invalidité rend difficile le choix d’une profession a droit à l’orientation professionnelle et à une mesure préparatoire à l’entrée en formation. Avant la réforme de la LAI, il n’existait guère de mesures préparatoires pour les jeunes atteints dans leur santé qui, au terme de leur scolarité obligatoire, n’avaient pas encore fait de choix professionnel (FF 2017 p. 2401). Ces mesures ont pour objectif de permettre au jeune terminant le degré secondaire I d’acquérir une maturité suffisante pour faire un choix professionnel, ou un comportement approprié au travail. Par ces mesures, le jeune peut combler ses lacunes dans les connaissances transmises par l’instruction obligatoire, se familiariser avec les métiers de différents domaines s’il n’a pas encore de projet professionnel, bénéficier d’un suivi adéquat et ainsi se préparer à entamer une formation professionnelle initiale ou à entrer dans le marché du travail (FF 2017 p. 2499).

L’art. 4a RAI précise qu’une orientation professionnelle au sens de l’art. 15 LAI peut se composer des éléments suivants : des entretiens de conseil, des analyses et des tests diagnostiques réalisés par des professionnels (al. 1 let. a) ; des mesures préparatoires à l’entrée en formation au sens de l’art. 15 al. 1 LAI (al. 1 let. b) ; des mesures d’examen approfondi de professions possibles au sens de l’art. 15 al. 2 LAI (al. 1 let. c). Sont considérées comme mesures au sens de l’al. 1 let. b, les mesures proches du marché du travail se déroulant après l’école obligatoire, dans des entreprises du marché primaire du travail ou en institution et visant à déterminer les aptitudes et les envies de l’assuré en matière de formations et à initier celui-ci aux exigences du marché primaire du travail. Ces mesures sont limitées à douze mois (al. 2). Sont considérées comme mesures au sens de l’al. 1 let. c, les mesures se déroulant dans des entreprises du marché primaire du travail ou en institution et visant à déterminer les aptitudes et les envies de l’assuré concernant les professions et activités possibles. Ces mesures sont limitées à trois mois au total. En l’absence des connaissances nécessaires au choix de la profession ou de l’activité, les mesures peuvent être prolongées de trois mois au plus (al. 3). Les objectifs et la durée des mesures visées aux al. 2 et 3 sont fixés individuellement en fonction des aptitudes de l’assuré. La mesure est interrompue en particulier : lorsque le but est atteint ou ne peut pas être atteint (al. 4 let. a) ; lorsqu’une mesure de réadaptation plus appropriée s’impose (al. 4 let. b) ; lorsque la poursuite de la mesure ne peut, pour des raisons d’ordre médical, être raisonnablement exigée (al. 4 let. c).

Le Tribunal fédéral a rappelé que l'orientation professionnelle se démarque des autres mesures d'ordre professionnel (art. 16 ss LAI) par le fait que, dans le cas particulier, l'assuré n'a pas encore fait le choix d'une profession. L'art. 15 LAI suppose que l'assuré soit capable en principe d'opérer un tel choix, mais que seule l'invalidité l'en empêche, parce que ses propres connaissances sur les aptitudes exigées et les possibilités disponibles ne sont pas suffisantes pour choisir une profession adaptée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_882/2008 du 29 octobre 2009 consid. 5.1 et les références).

Selon la Circulaire sur les mesures de réadaptation professionnelle de l’AI (CMRPr) de l'office fédéral des assurances sociales, état au 1er janvier 2023, les mesures préparatoires durant l’orientation professionnelle n’ont pas pour objet de combler des lacunes scolaires mais visent à vérifier dans la pratique les formations possibles, à tester l’aptitude de la personne assurée, et à l’accoutumer aux exigences du marché du travail afin de faciliter son entrée en formation. À cette fin, une convention d’objectifs est passée entre la personne assurée, l’office AI et le fournisseur de prestations, destinée à fixer des objectifs à atteindre par la personne assurée tant d’un point de vue qualitatif (tester les types de formations possibles dans un environnement de travail réel, etc.) que quantitatif (capacité de présence et de rendement permettant à la personne assurée de participer à des mesures d’ordre professionnel de l’AI, ou à des offres adéquates de formation professionnelle ou de l’assurance-chômage ; ch. 1009-1014 CMRPr).

3.3 Selon l'art. 16 LAI, l’assuré qui a arrêté son choix professionnel, qui n’a pas encore eu d’activité lucrative et à qui sa formation professionnelle initiale occasionne, du fait de son invalidité, des frais beaucoup plus élevés qu’à une personne valide a droit au remboursement de ses frais supplémentaires si la formation répond à ses aptitudes (al. 1). Sont assimilés à la formation professionnelle initiale : la formation dans une nouvelle profession pour les assurés qui, après la survenance de l’invalidité, ont entrepris de leur propre chef une activité professionnelle inadéquate qui ne saurait être raisonnablement poursuivie (al. 3 let a). L’art. 16 al. 1 LAI pose les conditions de prise en charge par l’AI des frais occasionnés par la FPI du fait de l’invalidité. Il faut que l’assuré ait arrêté son choix professionnel pour prétendre au remboursement de ses frais dans le cadre d’une FPI. Ce complément établit une limite claire entre cette prestation, d’une part, et les mesures préparatoires ou d’orientation professionnelle, d’autre part. Ces dernières interviennent à la fin du degré secondaire I et ont pour objectif d’orienter l’assuré vers un choix professionnel, de le préparer à une FPI ou de le préparer à entrer sur le marché du travail.

Selon l'art. 5 al. 1 RAI, est réputée formation professionnelle initiale après l’achèvement de la scolarité obligatoire toute formation professionnelle initiale au sens de la loi fédérale du 13 décembre 2002 sur la formation professionnelle (LFPr ; let. a) ; la fréquentation d’une école supérieure, professionnelle ou universitaire (let. b) ; la préparation professionnelle à un travail auxiliaire ou à une activité en atelier protégé (let. c).

3.4 Pour déterminer si une mesure est de nature à maintenir ou à améliorer la capacité de gain d'un assuré, il convient d'effectuer un pronostic sur les chances de succès des mesures demandées (ATF 132 V 215 consid. 3.2.2 et les références). Celles-ci ne seront pas allouées si elles sont vouées à l'échec, selon toute vraisemblance (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 388/06 du 25 avril 2007 consid. 7.2). Le droit à une mesure de réadaptation présuppose qu'elle soit appropriée au but de réadaptation poursuivi par l'assurance-invalidité, et cela tant objectivement en ce qui concerne la mesure, que sur le plan subjectif en rapport avec la personne de l'assuré. En effet, une mesure de réadaptation ne peut être efficace que si la personne à laquelle elle est destinée est susceptible, partiellement au moins, d'être réadaptée. Partant, si l'aptitude subjective de réadaptation de l'assuré fait défaut, l'administration peut refuser de mettre en œuvre une mesure (arrêt du Tribunal fédéral 9C_846/2018 du 29 novembre 2019 consid. 5.1 et les références), sans qu'il soit nécessaire de recourir à la procédure préalable de mise en demeure prévue par l'art. 21 al. 4 LPGA (arrêts du Tribunal fédéral 8C_480/2018 du 26 novembre 2018 consid. 7.3 et les références ; 9C_59/2017 du 21 juin 2017 consid. 3.3 et les références), une telle procédure préalable n'étant requise que si une mesure de réadaptation a été commencée et qu'il est question de l'interrompre (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_783/2015 du 7 avril 2016 consid. 4.8.2 et les références). L'absence de capacité subjective de l'assuré doit toutefois être établie au degré de la vraisemblance prépondérante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_667/2015 du 6 septembre 2016 consid. 5.3 et les références).

Sont réputées nécessaires et appropriées toutes les mesures de réadaptation professionnelle qui contribuent directement à favoriser la réadaptation dans la vie active. L’étendue de ces mesures ne saurait être déterminée de manière abstraite, puisque cela suppose un minimum de connaissances et de savoir-faire et que seules seraient reconnues comme mesures de réadaptation professionnelle celles se fondant sur le niveau minimal admis. Au contraire, il faut s’en tenir aux circonstances du cas concret. Celui qui peut prétendre au reclassement en raison de son invalidité a droit à la formation complète qui est nécessaire dans son cas, si sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être sauvegardée ou améliorée de manière notable (ATF 124 V 108 consid. 2a; VSI 1997 p. 85 consid. 1).

3.5 C’est le lieu de rappeler que la réforme de l’assurance-invalidité avait précisément pour but de garantir un meilleur soutien aux transitions entre école et formation ainsi qu’entre formation et activité lucrative pour les jeunes assurés de 13 à 25 ans. Cela permet ainsi de lutter contre le décrochage scolaire et de réduire le nombre de jeunes qui se retrouvent à l’assurance-invalidité. Ainsi que l’a relevé le Conseil fédéral dans son message, dans cette phase de la vie où le passage de l’enfance à l’âge adulte coïncide normalement avec le passage de l’école à la vie active, il est dans la nature des choses que les interruptions ou les réorientations dans la formation soient relativement fréquentes. Le message souligne ainsi la nécessité de faire plus d’efforts pour éviter que des jeunes adultes atteints dans leur santé n’abandonnent leur formation et ne sortent du monde du travail. Pour ce faire, le message propose notamment d’étendre la possibilité de bénéficier de mesures de réadaptation à plusieurs reprises (FF 2017 p. 2397).

4.             En l’espèce, il est admis que le recourant présente des troubles émotionnels et des troubles spécifiques des acquisitions scolaires ainsi qu’une déficience intellectuelle modérée, diminuant ses possibilités de gain sur le marché du travail équilibré et qui lui ont ouvert le droit à des prestations de la part de l’intimé. L’intimé a estimé par ailleurs que l’invalidité du recourant est de 20% dès 2024, taux qui ouvre, en particulier, le droit à une mesure de reclassement (ATF 130 V 488).

4.1 Le recourant a bénéficié d’une formation de praticien en carrelage auprès de l’Orif. Le rapport du 14 juin « 2020 » de l’Orif mentionne qu’une formation en vue d’une AFP n’est pas envisageable et que les difficultés de compréhension et de mémorisation du recourant ne lui permettraient pas d’évoluer davantage. Au vu de son parcours, il serait envisageable qu’il exerce comme manœuvre. Il a de gros problèmes de compréhension et il lui est compliqué d’effectuer des calculs de base nécessaires à la profession. Il n’arrive pas à mémoriser les informations de jour en jour.

L’entreprise D______ qui l’avait engagé comme aide carreleur l’a licencié. Aucun certificat de travail n’a été établi par l’entreprise. Selon le recourant, il a été licencié pour des raisons d’incompétences. Quant à G______, qui l’a engagé pour une mission temporaire comme carreleur, elle lui aurait signalé qu’elle ne le reprendrait pas, également en raison de son incompétence (procès-verbal d’audience du 7 octobre 2024). L’intimé ne conteste pas que les employeurs du recourant ont été insatisfaits du travail de celui-ci.

Au vu de ce qui précède, il apparait que la formation de praticien en carrelage, n’a pas atteint le niveau d’une AFP et ne permet pas au recourant d’exercer la profession d’aide carreleur, en particulier au vu de ses difficultés à effectuer les calculs de base nécessaires à la profession, ce que l’intimé ne conteste pas. L’Orif a d’ailleurs conclut, à l’issue de la formation du recourant, à une activité exigible de celui-ci de manœuvre et non pas de praticien en carrelage. L’orientation du recourant vers une activité d’aide carreleur s’est ainsi révélée erronée.

4.2 L’intimé estime que le recourant est à même d’exercer toute activité sans formation, comme celle de manœuvre.

Certes, le rapport de REALISE atteste que le recourant est à même d’effectuer une activité de manœuvre. Cependant, au vu de l’échec de la FPI d’aide carreleur, il apparait justifié que le recourant puisse accéder à une formation correspondant à ses compétences, ce d’autant que son aptitude subjective à la réadaptation n’est pas contestée, sa motivation et sa persévérance ayant été soulignées en particulier dans le rapport de REALISE du 25 juin 2024.

Ainsi, tenant compte tant des particularités du cas d’espèce que du but de la réforme récente de la LAI, la chambre de céans considère qu’il y a lieu d’encourager le recourant, âgé de 24 ans au jour de la décision litigieuse, à accomplir une formation professionnelle et à apprendre un métier qui lui permettrait d’intégrer l’économie libre.

Le suivi d’une formation professionnelle initiale suppose toutefois que l’assuré ait arrêté son choix professionnel. Or, il ressort de l’audience du 7 octobre 2024 que le recourant sollicite des formations irréalistes. À cet égard, le recourant prétend à une formation AFP de carreleur ou à une formation de chauffeur. Cependant le rapport de l’Orif a déjà exclu la première et une formation de conducteur de bus a été considérée par l’OCE comme inappropriée vu le faible niveau de français du recourant. Seules des mesures préparatoires ou d’orientation professionnelle, qui ont pour objectif d’orienter l’assuré vers un choix professionnel ou de le préparer à une formation professionnelle, entrent ainsi en ligne de compte. De telles mesures constituent bien, dans le cas d’espèce, des mesures nécessaires, simples et adéquates en vue d’augmenter la capacité de gain du recourant. L’intimé examinera par la suite si d’autres mesures professionnelles seront encore nécessaires.

La décision entreprise doit en conséquence être réformée en ce sens que le recourant a droit à une mesure d’orientation professionnelle au sens de l’art. 15 LAI (mesure d’orientation professionnelle et/ou mesure préparatoire à l’entrée en formation).

5.             Bien que le recourant obtienne partiellement gain de cause, il n’est pas représenté et n’a pas fait valoir de frais engendrés par la présente procédure. Il n’a ainsi pas droit à des dépens (cf. ATAS/595/2022 du 9 juin 2022 consid. 9 ; ATAS/1320/2021 du 16 décembre 2021 consid. 9 ; ATAS/177/2021 du 4 mars 2021 consid. 11 ; ATAS/1001/2022 du 11 novembre 2022 consid. 11).

La procédure de recours en matière de contestation portant sur l’octroi ou le refus de prestations de l’assurance-invalidité étant soumise à des frais de justice, un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge de l’intimé (cf. art. 69 al. 1bis LAI).

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Réforme la décision du 3 mai 2024 en ce sens que le recourant a droit à une mesure d’orientation professionnelle au sens de l’art. 15 LAI.

4.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le