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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3607/2025

ATA/1270/2025 du 12.11.2025 sur JTAPI/1101/2025 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3607/2025-MC ATA/1270/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 novembre 2025

en section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Déborah GREAUME, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 octobre 2025 (JTAPI/1101/2025)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1990, alias B______, originaire du Maroc, a fait l’objet de condamnations pénales en Suisse, notamment :

- par ordonnance pénale du Ministère public du canton de Genève (ci-après : MP) du 23 février 2015 pour rixe (art. 133 al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 ; CP - RS 311.0) ;

- par jugement du Tribunal correctionnel de Genève du 2 mai 2016, notamment pour dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), violation de domicile (art. 186 CP), vol par métier (art. 139 ch. 2 CP), entrée illégale au sens de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) ;

- par arrêt de la chambre pénale d’appel et de révision de la Cour de justice de Genève (ci-après : CPAR) du 15 août 2022, sous l'alias de B______, pour vol et tentative de vol (art. 139 ch. 1 CP), injure, dommages à la propriété, violation de domicile et faux dans les certificats (art. 252 CP).

b. Il a fait l’objet d’une expulsion pénale de Suisse d’une durée de cinq ans, prononcée par l’arrêt précité de la CPAR.

c. Une interdiction d'entrée en Suisse a été prononcée à son encontre par le secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) le 25 septembre 2018, notifiée le 25 novembre 2021, valable jusqu’au 24 septembre 2025.

B. a. Le 17 décembre 2024, démuni de document d'identité valable, prétendant s’appeler B______ et être né en Algérie, A______ a été arrêté à la suite d’un contrôle d’identité effectué par l'office fédéral de la douane et de la sécurité aux frontières (ci-après : OFDF).

b. Le 18 décembre 2024, le MP a condamné A______ par ordonnance pénale pour infractions à la LEI et pour rupture de ban (art. 291 CP), puis l’a remis en mains des services de police.

c. Le 18 décembre 2024, à 16h25, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre d’A______ pour une durée de trois mois : il avait franchi la frontière malgré une interdiction d'entrée et une expulsion et avait été condamné pour vol, infraction constitutive de crime. Un vol pour le Maroc était en cours d’organisation, l’intéressé ayant été identifié par les autorités de ce pays le 26 juin 2023 comme étant citoyen marocain.

Au commissaire de police, A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi, expliquant qu'il suivait un traitement médical pour des douleurs à l'estomac.

d. Lors de l'audience du 20 décembre 2024 devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), A______ a précisé qu’il s’appelait B______, originaire d’Algérie. L’identité d’A______ découlait d’un faux permis de conduire qu’il avait présenté à la police à la fin de l’année 2021. Il avait signalé, lors de son audition par le commissaire de police, qu’un renvoi forcé « pourrait mal finir », étant donné qu’il avait une fragilité du radius droit. Il était en traitement médical en raison d’une infection bactérienne de l’estomac. Ce traitement avait été interrompu lors de son interpellation et devait être repris, sous peine d’une opération chirurgicale. Il avait également suivi des traitements psychiatriques et avait fait des malaises lors de son incarcération à Champ-Dollon. Il avait suivi ces traitements médicaux en Suisse.

e. Par jugement du 20 décembre 2024, le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention administrative pour une durée de trois mois, soit jusqu’au 17 mars 2025 inclus.

C. a. Par requête du 3 mars 2025, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a sollicité la prolongation de la détention administrative d’A______ pour une durée de deux mois.

b. Lors de l'audience du 11 mars 2025 devant le TAPI, A______ a confirmé qu’il n’était pas d'accord de repartir au Maroc pour des questions médicales. Il a déposé une radiographie de son coude réalisée en 2020. Il était tombé le 28 février [recte : janvier] 2025 dans les escaliers de l’établissement de détention de Favra (ci-après : FAVRA) et s’était blessé au coude. Il devait suivre 45 séances de physiothérapie à Genève, prescrites par un spécialiste orthopédique des HUG, mais n’avait pas pu les commencer, ayant été transféré au centre de détention de Sion le 28 février 2025.

Il était opposé à son renvoi et ne monterait pas à bord du vol avec escorte policière (DEPA) à destination du Maroc prévu le 18 mars 2025.

c. Par jugement du 13 mars 2025, le TAPI a prolongé la détention administrative d’A______ jusqu’au 17 mai 2025 inclus.

Une inexigibilité du renvoi pour raisons de santé ne pouvait pas être retenue à ce stade. Le rapport de l'OSEARA établi le 28 janvier 2025 n'excluait pas l'exécution du renvoi par avion et ne prévoyait aucune assistance médicale particulière durant le transport. En ce qui concernait la blessure au coude, aucune pièce n’avait été produite attestant des éventuelles lésions subies et des traitements prescrits – notamment les 45 séances de physiothérapies – pas plus que des éventuelles restrictions à voyager qui auraient été portées à sa connaissance par un médecin. Aucun élément du dossier ne permettait de retenir que les médicaments qui lui auraient été prescrits ou les séances de physiothérapie ne seraient pas disponibles au Maroc, pays au demeurant doté d'un système d'assurance-maladie qui prenait en principe en charge les frais des soins indispensables des personnes démunies et non assurées.

D. a. Par courrier du 20 mars 2025, A______ a interjeté recours contre ce jugement devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Il a conclu à l’annulation du jugement et à sa libération immédiate, subsidiairement conditionnée à une obligation de s’annoncer quotidiennement auprès de l’autorité. Plus subsidiairement, il devait être constaté que la détention au sein de l’établissement de l’aéroport de Zurich était inadéquate et son transfert dans celui de Frambois devait être ordonné.

Il présentait une fragilité du radius droit datant de 2020, comme en attestait le docteur C______. Il produisait une radiographie réalisée à l’hôpital de Sion le 23 février 2025 à la suite de sa chute à FAVRA. Cet accident avait causé une fracture du radius proximal du coude droit et des séances de physiothérapie avaient été prescrites par un spécialiste orthopédique des HUG. Son dossier médical se trouvait toutefois dans ce dernier établissement. Son coude était complètement bloqué.

Il souffrait par ailleurs d’une infection bactérienne de l’estomac, selon le document d’OSEARA du 28 janvier 2025. À ce tableau s’ajoutaient des syncopes vasovagales. Des troubles anxieux lui avaient été diagnostiqués. Il suivait un traitement à base d’antidépresseurs, d’anxiolytiques et de médicaments contre la schizophrénie, ce que l’attestation d’OSEARA du 28 janvier 2025 évoquait.

Il critiquait les conditions de détention dans le centre sédunois où il avait été placé le 31 janvier 2025. Le 20 mars 2025, il avait été transféré à l’établissement de détention administrative de l’aéroport de Zurich, lequel n’avait pas mis en œuvre les mesures nécessaires pour lui fournir les soins adaptés à sa blessure au coude. Il n’avait bénéficié d’aucune séance de physiothérapie alors que cela lui avait été prescrit. Son transfert à Frambois devait être ordonné.

Il y avait pénurie de personnel médical et en particulier de psychiatres et de psychologues au Maroc. En matière de santé mentale, les moyens des établissements publics étaient insuffisants et les consultations dans les cabinets privés onéreuses.

Son renvoi n’était pas exécutable vu ses nombreux problèmes médicaux, tant psychiques que physiques. Seule une remise en liberté, couplée à des mesures thérapeutiques et à l’obligation de s’annoncer tous les jours auprès de l’autorité pourrait remplir le but recherché par la mise en détention administrative tout en respectant le principe de la proportionnalité.

b. Par arrêt du 2 avril 2025, la chambre administrative a rejeté le recours.

Le recourant ne contestait pas, à juste titre, qu'il existait, dans son cas, un motif de détention administrative en vue du renvoi au sens de l'art. 76 LEI.

Il invoquait l’inexécutabilité de son renvoi. Si certes l’intéressé n’était pas en excellente santé, les affections médicales qu’il présentait n’étaient pas d’une gravité telle qu’elles seraient de nature à mettre gravement en danger sa vie ou son intégrité physique. Ni les suites de son accident au coude droit, ni les problèmes d’estomac, ni même les problèmes psychiques n’impliquaient un risque réel d'être exposé à un déclin grave en cas de retour dans son pays, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie au sens de la jurisprudence. Par ailleurs, les traitements médicaux étaient disponibles au Maroc, quand bien même certains pouvaient être plus difficiles ou longs à obtenir, notamment en matière de consultations psychiatriques et que le personnel médical serait en nombre insuffisant. Enfin, l’exécution du renvoi ne pourrait en tous les cas intervenir qu’après une analyse médicale conformément aux art. 15 let. p et r de l’ordonnance sur l’exécution du renvoi et de l’expulsion d’étrangers du 11 août 1999 (OERE - RS - 142.281).

Il se plaignait de ses conditions de détention. Il ne contestait pas les soins médicaux reçus dans le canton de Genève. Il critiquait leur absence dans les établissements sédunois et zurichois. Il ressortait toutefois des pièces produites un rapport médical de l’hôpital de Sion le 19 février 2025 ainsi qu’une radiographie de son coude prise le 23 février 2025. Les griefs d’une non prise en charge médicale par le centre de détention sédunois étaient en conséquence dénués de fondement. De même, le recourant avait été transféré à Zurich, selon ses dires, le 20 mars 2025. Ses critiques à l’encontre de l’établissement suisse alémanique avaient été formulées le 26 mars 2025, soit moins d’une semaine après son arrivée, sans qu’il ne soit allégué que son état de santé aurait nécessité des soins urgents pendant les six jours en question, et que l’établissement n’y aurait pas donné suite. Dans sa réplique du 31 mars 2025, le recourant s’était limité à maintenir ses conclusions, n’émettant alors aucune critique spécifique sur une non-prise en charge de son état de santé. Enfin, la nécessité d’avoir 45 séances de physiothérapie telle qu’alléguée ne ressortait d’aucune pièce au dossier, leur nombre apparaissant pour le surplus relativement élevé. Le fait que cette prescription se trouverait dans son dossier médical aux HUG ne suffisait pas pour pouvoir considérer que ce fait était établi, en l’absence de toute copie de ce document et même de toute mention d’une telle prescription sur les pièces médicales produites, y compris le certificat du Dr C______ du 30 janvier 2025.

Le principe de la proportionnalité était respecté.

c. Le 10 avril 2025, après avoir été déclaré apte à prendre l’avion, A______ a refusé de monter à bord du vol DEPA prévu.

Il s’est ultérieurement plaint de violences exercées à son encontre par la police lors de cette tentative de renvoi.

E. a. Par requête du 6 mai 2025, l’OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative d’A______ pour une durée de deux mois.

b. Par jugement du 13 mai 2025, le TAPI a prolongé la détention administrative de l’intéressé pour une durée de deux mois, soit jusqu’au 17 juillet 2025. Un vol avait été réservé pour le 10 juin 2025.

c. Le 30 mai 2025, le SEM a informé les services compétents du canton de Genève que le vol DEPA du 10 juin 2025 devait être annulé. L’Ambassade du Royaume du Maroc à Berne avait en effet transmis au SEM un dossier médical concernant A______, que l'intéressé semblait leur avoir adressé dans l’intention d’empêcher la délivrance d’un laissez-passer.

F. a. Le 7 juillet 2025, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative d’A______ pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 17 novembre 2025.

b. Lors de l'audience du 15 juillet 2025, A______ a confirmé s’être adressé au consulat de son pays en transmettant des éléments de son dossier médical et en demandant expressément à ce qu’un laissez-passer ne soit pas délivré.

c. Par jugement du 16 juillet 2025, le TAPI a prolongé la détention administrative de l’intéressé pour une durée de quatre mois, soit jusqu’au 16 novembre 2025 inclus. L’intéressé était la source de l’impossibilité actuelle de procéder à son renvoi jusqu’à ce jour. Par conséquent, l’impossibilité de procéder à son expulsion ne pouvait être prise en considération. Il suffirait qu’il décide de retourner volontairement au Maroc pour lever cette impossibilité.

G. a. Par requête du 29 août 2025, A______ a déposé une demande de mise en liberté, faisant valoir les violences subies lors de l’intervention policière du 10 avril 2025, l’atteinte à sa santé et l’interruption des soins médicaux en raison de ses transferts, avec risque d’aggravation irréversible de son état de santé, ses transferts abusifs, toujours juste avant des rendez-vous médicaux et la violation de ses droits fondamentaux (« art. 10 Cst., 2, 3 CEDH, 81 LEI et 312 CP »). Il sollicitait par ailleurs la garantie du maintien de ses rendez-vous médicaux et la reconnaissance des violences subies et de l’abus des transferts répétés. Il joignait plusieurs pièces médicales.

b. Bien que dûment convoqué, A______ ne s’est pas présenté à l'audience du 9 septembre 2025 devant le TAPI. Interpellé par le TAPI, le centre de détention administrative de Zurich (ci-après : ZAA) a indiqué que l’intéressé, bien qu’aucune contre-indication médicale à son transport en fourgon « JTS » n’existe, avait refusé d’être transporté à Genève, déclarant ne pas vouloir assister à l’audience.

Représenté par son avocate, il a notamment expliqué avoir refusé son transport non pas par désintérêt de la procédure mais parce qu’il souhaitait être transporté à Genève dans un véhicule médicalisé, ayant déjà fait l’objet de malaises lors de transports dans un fourgon. Il avait déposé plainte pénale suite aux violences subies et « abus de transfert ». Il avait également déposé plainte « auprès de » l’établissement de Frambois. Ces plaintes étaient en cours de traitement.

c. Par jugement du 9 septembre 2025, le TAPI a rejeté la demande de mise en liberté et confirmé, en tant que de besoin, la détention jusqu’au 16 novembre 2025.

H. a. Par acte du 23 septembre 2025, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative contre ce jugement. Il a conclu à l’annulation de celui-ci et à sa libération immédiate. Subsidiairement, il devait être assigné à résidence avec une obligation hebdomadaire de s’annoncer auprès de l’autorité.

Faute d’une prise en charge médicale adéquate des séquelles de son bras droit suite à sa chute, le 25 janvier 2025, dans les escaliers en raison de son incarcération, la mobilité de son coude droit était désormais quasi nulle. Sur le plan psychique, il redoutait les séquelles durables pouvant définitivement compromettre l’usage de son bras droit, pourtant indispensable à l’exercice de sa profession de carreleur et de soudeur. Cette inquiétude lui causait des symptômes dépressifs et anxieux, ce dont attestait notamment un certificat médical du 30 juillet 2025 du docteur D______ du service médical de Frambois, spécialiste FMH en médecine générale. Selon un certificat du 28 janvier 2025 de la docteure E______, les violences subies lors de l’exécution du renvoi forcé le 10 avril 2025, pour lesquelles il avait porté plainte, avaient entraîné une aggravation de ses troubles anxieux ainsi qu’une recrudescence de ses cauchemars. Il souffrait depuis les faits d’un trouble de stress post‑traumatique complexe avec une anxiété importante, une hypervigilance, un épuisement et des insomnies. Le contexte carcéral dans lequel il évoluait depuis des mois déjà était anxiogène et lui causait un sentiment d’insécurité. Son transfert vers Zurich, dans un établissement dont il ne parlait pas la langue ou ne pourrait pas bénéficier de séances de physiothérapie, aggravait son état psychologique.

Depuis décembre 2023, l’ambassade du Maroc ne délivrait plus de laissez-passer pour ses ressortissants ayant des problèmes médicaux. Un courrier du SEM du 2 juin 2025 en attestait. L’ambassade marocaine ayant été informée de ses problèmes de santé, aucun laissez-passer ne lui serait accordé dans les mois à venir.

Son dossier médical témoignait d’un état physique et psychique grave, ancien, documenté et nécessitant des soins spécialisés. Ces soins avaient été systématiquement interrompus ou rendus impossibles en raison des multiples transferts carcéraux et l’absence de transmission de son dossier médical. Certains rendez-vous médicaux avaient été annulés pour cause de manque d’effectifs de la BSA. Le ZAA allait confirmer qu’aucune physiothérapie n’était disponible sur place. Compte tenu des éléments objectifs de la politique connue du Maroc, il était improbable, sinon impossible, que l’exécution du renvoi puisse intervenir dans un délai prévisible. Le maintien en détention ne pouvait donc plus se justifier sur la base d’une exécution imminente du renvoi.

Le contexte carcéral exacerbait l’état de stress post-traumatique et le manque de soins adaptés lui faisait courir un risque de séquelles permanentes. Il souhaitait pouvoir bénéficier des traitements nécessaires afin de retrouver l’usage normal de son bras, ces derniers n’étant manifestement pas disponibles au ZAA. Il n’avait par ailleurs aucun intérêt à se soustraire à la procédure, étant suivi depuis de nombreuses années aux HUG, et dans l’attente de soins spécialisés. Une mesure moins incisive pouvait atteindre le même objectif que la détention tout en respectant son intégrité physique et psychique.

Son renvoi était inexigible et ses conditions de détention incompatibles avec le respect de sa dignité de son intégrité.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique, A______ a relevé que l’OCPM ne s’était pas déterminé quant à l’exécutabilité du renvoi, alors même qu’une rencontre était prévue en septembre à Rabat, au cours de laquelle, selon les dires de l’OCPM dans le cadre de la demande de prolongation de la détention du 7 juillet 2025, son cas devait être abordé. La diligence et la célérité des démarches entreprises par l’OCPM en vue du renvoi interpellaient. Son cas n’ayant pas été résolu lors de ladite rencontre, son renvoi paraissait manifestement impossible dans un délai prévisible et raisonnable. Sa détention devait être levée.

d. Par arrêt du 2 octobre 2025, la chambre administrative a rejeté le recours.

Les conditions d’une mise en détention administrative, telles que prévues par l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI en lien avec l'art. 75 al. 1 let. a, c et h LEI, étaient réalisées, ce qui n’était pas contesté.

La chambre administrative avait déjà relevé que, si le recourant présentait des problèmes de santé, ses affections médicales ne mettaient pas gravement en danger sa vie ou son intégrité physique. Certes, la Dre E______, psychiatre ayant suivi le recourant lors de sa détention à Frambois, avait évoqué une péjoration de l’état de santé psychique de son patient, la médication ayant dû être augmentée sans qu’une amélioration puisse être constatée. De même, le Dr D______, médecin interniste ayant suivi le recourant pendant la même période, avait fait état d’une mobilité quasiment nulle du coude du recourant, contribuant à la péjoration de sa santé psychique. Si cette évolution était regrettable, il ne pouvait être soutenu au vu des nombreux rapports médicaux versés au dossier que le recourant aurait manqué de soins. De même, si les transferts dans un autre établissement de détention avaient impliqué l’annulation de rendez-vous médicaux importants, un suivi médical était disponible dans tous les établissements concernés. La prescription de séances de physiothérapie ne ressortait d’aucune pièce du dossier quand bien même elle semblait avoir l’appui du service médical de Frambois. En l’état, une nécessité de maintenir le recourant dans un établissement de détention genevois ne ressortait pas du dossier, aucun praticien n’ayant émis de contre‑indication à une détention au ZAA ou à toute détention hors d’un établissement genevois en raison d’un traitement médical. A fortiori, aucun document médical n’était de nature à justifier la libération à laquelle le recourant concluait. Par ailleurs et comme déjà retenu dans les décisions précédemment rendues, les traitements médicaux nécessaires étaient disponibles au Maroc, quand bien même certains pouvaient être plus difficiles ou plus longs à obtenir, notamment en matière de consultations psychiatriques. L’exécution du renvoi ne pourrait en tous les cas intervenir qu’après une analyse médicale conformément aux art. 15 let. p et r OERE. Le renvoi était donc médicalement exécutable.

Le recourant avait pu faire valoir ses droits pour les faits de violences et les menaces intervenus selon lui lors de la tentative de renvoi du 10 avril 2025 puisqu’il avait déposé plainte pénale et que la procédure suivait son cours. Il ne pouvait en déduire aucun droit dans le cadre de sa demande de mise en liberté.

Il n’avait jamais été expressément indiqué que le cas du recourant serait abordé lors de la réunion de Rabat mais uniquement que la problématique (des renvois de personnes atteintes dans leur santé) serait discutée. D’autre part, dès lors que les retards dans la délivrance du laissez-passer faisaient suite à l’envoi, par le recourant, de son dossier médical à l’ambassade, il ne pouvait rien tirer de complications dont il était lui-même à l’origine. Dans ces conditions, son renvoi au Maroc ne pouvait nullement être qualifié d’impossible au sens de l’art. 80 al. 6 let. a LEI, dès lors que les autorités marocaines lui avaient accordé un laissez-passer pour les vols des 18 mars et 10 avril 2025 et que des discussions étant en cours. Le fait que les démarches entreprises par le recourant retardent son rapatriement ne pouvait être assimilé à une impossibilité à l'exécution du renvoi.

La détention administrative demeurait proportionnée dans son principe et sa durée, au demeurant conforme à l’art. 79 LEI, avait été confirmée par jugement du TAPI du 16 juillet 2025, devenu définitif faute de recours.

e. A______ a formé un recours au Tribunal fédéral contre cet arrêt (cause 2C_607/2025).

I. a. Par lettre du 14 octobre 2025, A______ a une nouvelle fois demandé sa mise en liberté, indiquant souhaiter être remis en liberté afin de pouvoir poursuivre correctement les traitements médicaux nécessaires et vivre dans des conditions dignes. Il était actuellement suivi psychologiquement à la suite de l’agression dont il avait été victime de la part de policiers. Il souffrait également de douleurs physiques importantes, notamment au coude droit, et le mouvement de ses bras était limité notamment lors des transferts entre établissements de détention administrative. Il perdait connaissance lorsqu’il était transporté dans un véhicule fermé, ce qui lui rendait impossible le trajet de Zürich à Genève.

b. Il ne s’est pas présenté à l’audience tenue le 21 octobre 2025 par le TAPI dans le cadre de l’instruction de cette demande de mise en liberté. Selon les pièces versées au dossier, il aurait dû être transporté la veille de Zürich à Genève, étant précisé que, selon un certificat établi le 17 octobre 2025 par le service médical du ZAA, l’existence d’une atteinte durable à sa santé justifiait qu’il puisse porter les menottes devant lui et non derrière. Le moment venu, il avait toutefois refusé d’être transporté, expliquant ne pas vouloir participer à l’audience fixée au lendemain.

Présente à l’audience, son avocate a indiqué qu’il avait refusé d’être transporté en fourgon de peur de perdre connaissance mais qu’il maintenait son intérêt à la procédure.

c. Selon sa représentante à l’audience, A______ n’avait pas vu de médecin généraliste depuis le mois d’août 2025. Ses coude et bras droits étaient toujours bloqués et douloureux, ce qui le contraignait à porter une attelle, et il demeurait dans l’attente d’un traitement de physiothérapie. Il vivait dans un mal-être important, ressentait une grande anxiété et faisait des cauchemars. Sa situation médicale était préoccupante. Il avait demandé son dossier médical mais celui-ci ne lui avait pas été transmis.

Il a conclu à ce que sa mise en liberté soit ordonnée en raison de sa situation de santé, de l’impossibilité de son renvoi et du caractère disproportionné de sa détention.

d. Le représentant de l’OCPM a produit une pièce nouvelle, soit un courrier adressé le 8 octobre 2025 par le SEM à l’ambassade du Maroc en réponse aux « notes verbales » concernant A______. Il était confirmé aux autorités marocaines que les mesures de renvoi étaient conduites conformément au droit suisse et aux engagements internationaux de la Suisse. Ces dernières étaient par ailleurs invitées, si elles avaient besoin d’informations supplémentaires sur la situation judiciaire ou médicale de leur ressortissant, à prendre contact avec l’OCPM.

Les renvois généralisés au Maroc, y compris de personnes souffrant de problèmes de santé, avaient été possibles jusqu’à la fin de l’année 2023. Depuis lors, les autorités marocaines ne délivraient plus de laissez-passer pour des personnes souffrant de problèmes de santé. Une rencontre entre le SEM et les autorités marocaines pour discuter de ce blocage avait eu lieu à Rabat en septembre 2025 mais n’avait en l’état pas conduit à un déblocage généralisé pour ce type de renvoi.

A______ ne collaborait pas à son renvoi. S’il acceptait de rentrer volontairement au Maroc, les autorités marocaines lui délivreraient un laissez-passer. Au jour de l’audience, ces autorités n’avaient pas pris contact avec l’OCPM.

L’OCPM a conclu au rejet de la demande de mise en liberté, le renvoi demeurant exécutable et aucun élément nouveau n’étant apparu depuis la précédente demande de mise en liberté.

e. Par jugement du 21 octobre 2025, le TAPI a rejeté la demande de mise en liberté formée le 14 octobre 2025.

Les pièces figurant au dossier ne permettaient pas de retenir que l’état de santé d’ A______ se serait péjoré depuis son dernier examen par le TAPI le 16 juillet 2025, et il n’était pas non plus établi que les soins médicaux dont il avait besoin lui auraient été refusés au ZAA. La question de l’exécutabilité du renvoi avait été examinée par la chambre administrative dans son arrêt du 2 octobre 2025 et la situation ne s’était pas fondamentalement modifiée depuis lors, l’OCPM ayant au contraire indiqué qu’un déblocage dans un avenir proche n’était pas exclu. La durée de la détention demeurait proportionnée.

J. a. Par acte adressé le 31 octobre 2025 à la chambre administrative, A______ a recouru contre ce jugement, concluant à son annulation et à sa mise en liberté immédiate.

Il souffrait de troubles psychiques et physiques pour lesquels il ne bénéficiait pas d’un accès suffisant aux soins nécessaires. Ses conditions de détention étaient donc incompatibles avec le respect de sa dignité humaine et de son intégrité.

Au vu de l’attitude des autorités marocaines, qui refusaient depuis la fin de l’année 2023 de délivrer des laissez-passer pour les renvois contraints de personnes souffrant de problèmes de santé, son renvoi devait être considéré comme inexécutable.

La durée de la détention était disproportionnée, compte tenu de l’absence de possibilité d’exécuter le renvoi et des effets du milieu carcéral sur son état de santé.

b. L’OCPM a conclu au rejet de la demande de mise en liberté.

Les pièces du dossier établissaient qu’A______ avait pu bénéficier, dans tous les établissements de détention où il avait été placé, d’un suivi médical aussi bien psychologique que physique. Son renvoi était exécutable et pourrait du reste être exécuté rapidement s’il y coopérait. Enfin, la durée de la détention demeurait proportionnée au vu de l’intérêt public élevé à son renvoi, compte tenu des crimes et délits pour lesquels il avait été condamné et de l’expulsion prononcée à son encontre.

c. Dans sa réplique, le recourant a contesté avoir bénéficié et bénéficier à ce jour des soins médicaux nécessaires, en particulier de physiothérapie. Les autorités marocaines n’avaient délivré aucun laissez-passer depuis le mois de mai 2025 et la situation était aujourd’hui bloquée, sans perspective concrète d’évolution. La détention ne pouvait donc plus être justifiée par la perspective d’un renvoi imminent, ou même prochain, étant rappelé que selon la jurisprudence le contrôle de l’exécutabilité du renvoi devait se faire sans prendre en considération le comportement de la personne concernée. La durée de la détention, proche de onze mois, n’était pas proportionnée au vu de l’absence de possibilité de renvoi prochaine.

d. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             2.1. Selon l’art. 10 al. 2 LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 3 novembre 2025 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

2.2.  À teneur dudit art. 10 LaLEtr, elle est compétente pour apprécier l’opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2e phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l’étranger (al. 3 1re phr.).

3.             L’existence de motifs de détention administrative, au sens de l’art. 76 LEI, a déjà été examinée dans les précédentes décisions relatives à la détention administrative du recourant, en particulier les arrêts rendus les 2 avril et 2 octobre 2025 par la chambre de céans. Il n’y sera donc pas revenu.

Il en ira de même de la question de l’exécutabilité du renvoi sous l’angle de l’art. 83 al. 4 LEI, examinée de manière approfondie dans les deux arrêts susmentionnés, sur laquelle le recourant ne revient d’ailleurs pas.

4.             Le recourant dénonce ses conditions de détention, alléguant ne pas avoir accès aux soins médicaux nécessaires, avec pour conséquence une péjoration de son état de santé psychique comme physique.

4.1 À teneur de l’art. 81 al. 2 LEI, la détention a lieu dans un établissement servant à l’exécution de la détention en phase préparatoire, de la détention en vue du renvoi ou de l’expulsion ou de la détention pour insoumission. Si ce n’est exceptionnellement pas possible, notamment pour des raisons de capacités, les étrangers doivent être détenus séparément des personnes en détention préventive ou purgeant une peine. La forme de la détention doit tenir compte des besoins des personnes à protéger, des mineurs non accompagnés et des familles accompagnées d’enfants (al. 3). En outre, les conditions de détention sont régies : a. pour les cas de renvois à destination d’un pays tiers : par les art. 16, al. 3, et 17 de la directive 2008/115/CE240 ; b. pour les cas liés à un transfert Dublin : par l’art. 28, al. 4, du règlement (UE) no 604/2013241 ( ) (al. 4). La jurisprudence a déduit de l'art. 81 al. 2 LEI que les détenus administratifs doivent bénéficier des soins dont ils ont besoin (arrêt du Tribunal fédéral 2C_490/2012 du 11 juin 2012 consid. 6.1).

Si les conditions de détention ne respectent pas les exigences légales, il appartient au juge d'ordonner les mesures qui s'imposent ou – s'il n'est pas possible d'assurer une détention conforme à la loi dans les locaux de l'établissement de détention préventive – de faire transférer à bref délai le recourant dans d'autres locaux. Si la situation légale n'est pas rétablie dans un délai raisonnable, le recourant doit être libéré (ATF 149 II 6 consid. 6.1 ; 122 II 299 consid. 8).

4.2 En l’occurrence, les conditions de détention de l’intéressé au sein des centres de détention où il a été successivement placé, de même que l’accès aux soins de santé dont il a bénéficié, ont été examinées dans les décisions précédentes relatives à sa détention administrative, en particulier dans les arrêts de la chambre de céans des 2 avril et 2 octobre 2025. Il en est ressorti que, même s’il était regrettable que, dans un premier temps, les transferts d’établissement successifs auxquels il avait été procédé aient eu pour conséquence l’annulation de certains rendez-vous médicaux, lesdits établissements disposaient tous d’un service médical et que rien ne permettait de considérer qu’il aurait été privé des soins nécessaires.

Les pièces produites à l’appui du recours, toutes antérieures à l’arrêt du 2 octobre 2025, ne conduisent pas à revenir sur cette constatation. Elles comportent en particulier un procès-verbal des visites et soins médicaux dont le recourant a bénéficié au ZAA pour la période du 4 août au 5 septembre 2025 (le document n’allant pas au-delà), dont il résulte qu’il a été l’objet d’une prise en charge extensive destinée à préserver son état de santé tant psychologique que physique, y compris la prescription de nombreux médicaments. S’agissant plus particulièrement des soins de physiothérapie, ce procès-verbal mentionne qu’il a demandé le 18 août 2025 un certificat attestant que de tels soins ne pouvaient lui être fournis ; le fait qu’un tel document n’ait pas été établi – sans quoi le recourant n’aurait pas manqué de le produire – est de nature à démentir une telle impossibilité de principe. Le recourant a par ailleurs lui-même indiqué, dans sa demande de mise en liberté, bénéficier d’un suivi psychologique.

Les griefs du recourant relatifs à l’absence de soins médicaux nécessaires et à l’aggravation consécutive de son état de santé se fondent, pour la période postérieure au mois de juillet 2025, sur ses propres appréciations, dont le bien-fondé scientifique n’est pas établi. Il sera par exemple relevé qu’il a été considéré apte à voyager dans un fourgon par le service médical du ZAA, sous réserve de porter les menottes devant, mais a néanmoins renoncé à se présenter à l’audience fixée devant le TAPI au motif que son état de santé n’était pas compatible avec un tel mode de transport. Comme la chambre administrative a déjà eu l’occasion de le relever, la nécessité de séances de physiothérapie, réclamées par le recourant, n’a pas été médicalement établie. Il résulte par ailleurs du procès-verbal des visites et soins médicaux susmentionné que le recourant a eu un accès régulier à un médecin du service médical du ZAA, le docteur F______. L’affirmation selon laquelle son état de santé se serait détérioré ne repose elle non plus sur aucun document médical. Enfin, l’absence volontaire du recourant lors de l’audience du 21 octobre 2025 devant le TAPI, destinée à instruire sa demande, a eu pour conséquence qu’il n’a pas été possible d’obtenir de sa part des éclaircissements sur les traitements dont il estime avoir été privé à tort et leur fondement médical.

Le grief relatif à des conditions de détention inadéquates et à des soins médicaux insuffisants doit ainsi être rejeté.

5.             Le recourant fait valoir que son renvoi au Maroc serait impossible, cet état ne délivrant plus depuis près de deux ans de laissez-passer pour ses ressortissants souffrant de problèmes médicaux.

5.1 La détention doit être levée notamment si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles (art. 80 al. 6 let. a LEI). Dans ce cas, la détention dans l'attente de l'expulsion ne peut en effet plus être justifiée par une procédure d'éloignement en cours ; elle est, de plus, contraire à l'art. 5 par. 1 let. f CEDH (ATF 130 II 56 consid. 4.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_955/2020 du 10 décembre 2020 consid. 5.1). Les raisons juridiques ou matérielles empêchant l'exécution du renvoi ou l'expulsion doivent être importantes (« triftige Gründe »).

L'exécution du renvoi est impossible lorsque le rapatriement est pratiquement exclu, même si l'identité et la nationalité de l'étranger sont connues et que les papiers requis peuvent être obtenus (arrêt du Tribunal fédéral 2C_984/2020 du 7 janvier 2021 consid. 4.1 et les références). Tel est par exemple le cas lorsqu'un État refuse explicitement, ou du moins de manière clairement reconnaissable et cohérente, de reprendre certains de ses ressortissants (ATF 130 II 56 consid. 4.1.3 ; 125 II 217 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_768/2020 du 21 octobre 2020 consid. 5.1). Le facteur décisif est de savoir si l'exécution de la mesure d'éloignement semble possible dans un délai prévisible ou du moins raisonnable avec une probabilité suffisante (arrêts du Tribunal fédéral 2C_955/2020 précité consid. 5.1 ; 2C_597/2020 du 3 août 2020 consid. 4.1).

5.2 Tant que l’impossibilité du renvoi dépend de la volonté de l’étranger de collaborer avec les autorités, celui-ci ne peut se prévaloir de cette impossibilité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2011 du 16 septembre 2011). Cette jurisprudence, rendue dans le cadre d’une détention pour insoumission, en rapport avec l’obligation de collaborer de l’art. 78 al. 6 LEI, est a fortiori valable dans un cas de détention en vue du renvoi, phase à laquelle s’applique l’obligation de collaborer de l’art. 90 al. 1 let. c LEI (ATA/1436/2017 du 27 octobre 2017 consid. 6a ; ATA/881/2015 du 28 août 2015 et les références citées).

5.3 Il doit en l’espèce être relevé que, dans un premier temps, les autorités marocaines avaient délivré au recourant un laissez-passer pour un vol retour DEPA qui aurait dû avoir lieu le 10 avril 2025. Il a toutefois refusé de monter dans l’avion, ce qui a entraîné l’échec de cette tentative de renvoi. Il a ensuite communiqué son dossier médical aux autorités marocaines et demandé à ces dernières de ne plus lui délivrer de laissez-passer, ce qu’elles ont effectivement refusé de faire depuis lors. L’impossibilité temporaire de procéder au renvoi est donc exclusivement due à son manque de coopération.

Rien ne s’oppose par ailleurs, aujourd’hui encore, à un retour volontaire au Maroc.

Dans ces conditions, et conformément à la jurisprudence précitée, le recourant, dont seul le manque de coopération fait obstacle au renvoi, ne peut se prévaloir de l’art. 80 al. 6 let. a LEI. C’est en vain à cet égard qu’il invoque l’ATF 147 II 49, qui concerne un cas de détention pour insoumission (art. 78 LEI) dans lequel l’impossibilité temporaire d’exécuter le renvoi n’était pas due exclusivement au manque de coopération de la personne concernée, mais également à un obstacle technique objectif dont la durée n’était pas encore prévisible.

À cela s’ajoute qu’il ne peut être retenu à ce jour que le refus des autorités marocaines de délivrer des laissez-passer à des personnes souffrant de problèmes médicaux, même s’il persiste depuis presque deux ans, se poursuivra encore pendant une longue période. Il résulte à cet égard de la procédure, en particulier de la lettre adressée le 8 octobre 2025 par le SEM à l’ambassade du Maroc, d’une part que les discussions en vue de résoudre cette problématique générale se poursuivent et, d’autre part, que le cas particulier du recourant a été évoqué avec les autorités marocaines, qui ont été invitées à prendre contact directement avec l’OCPM afin d’obtenir d’éventuelles informations complémentaires. Un déblocage de la situation dans un délai raisonnable paraît donc, à ce stade, pouvoir être anticipé avec une probabilité suffisante.

Le grief doit donc être rejeté.

6.             Le recourant invoque enfin le caractère disproportionné de sa détention, sous l’angle de sa durée.

6.1 Le principe de proportionnalité, garanti par l'art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2).

6.2 Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

6.3 Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; ATA/1305/2022 du 21 décembre 2022 consid. 4d ; ATA/611/2021 du 8 juin 2021 consid. 5a). Le principe de célérité est violé si les autorités compétentes n'entreprennent aucune démarche en vue de l'exécution du renvoi pendant une durée supérieure à deux mois et que leur inactivité ne repose pas en première ligne sur le comportement des autorités étrangères ou de la personne concernée elle-même (ATF 139 I 206 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1132/2018 du 21 janvier 2019 consid. 3.3).

6.4 En l’espèce, l’intérêt public à l’exécution de l’éloignement du recourant est certain, celui-ci ayant commis à réitérées reprises des infractions et fait l’objet d’une décision d’expulsion pénale. Son refus constant d’être renvoyé dans son pays d’origine, de même que les mesures actives qu’il a prises pour que les autorités de ce pays ne lui délivrent pas de laissez-passer, font craindre que, s’il devait être remis en liberté, un renvoi forcé ne puisse plus être exécuté le moment venu, de telle sorte qu’aucune mesure moins incisive n’entre en considération. Sous l’angle de la proportionnalité au sens étroit, l’intérêt public important à l’exécution du renvoi doit primer sur celui du recourant à recouvrer sa liberté, nonobstant les troubles psychologiques induits selon ses allégations par le contexte carcéral.

Aucune violation du principe de célérité ne peut être reprochée aux autorités chargées de l’exécution du renvoi. Celles-ci ont rapidement pris les mesures utiles en vue de l’organisation d’un vol retour et, après que le recourant eut refusé d’y embarquer puis fut parvenu à faire obstacle à la délivrance d’un nouveau laissez-passer, sont régulièrement intervenues auprès des autorités marocaines, en dernier lieu par lettre du 8 octobre 2025, afin d’obtenir le déblocage de la situation.

Enfin, la durée de la mesure, d’environ onze mois à ce jour, demeure compatible avec la limite posée par l’art. 79 LEI. Elle a été considérée adéquate et nécessaire par le TAPI dans son jugement du 16 juillet 2025 – non contesté – au vu des démarches devant encore être accomplies pour exécuter le renvoi du recourant. Aucun élément nouveau ne justifie de revenir sur cette appréciation, étant relevé qu’il incombera au TAPI, s’il devait être saisi par l’OCPM d’une nouvelle demande de prolongation de la détention administrative, d’examiner cette question pour la période postérieure au 17 novembre 2025.

Au vu de ce qui précède, la détention administrative du recourant est conforme au droit et au principe de proportionnalité.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

7.             La procédure est gratuite. Vu son issue, il n’y a pas lieu à l’allocation d’une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 31 octobre 2025 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 octobre 2025 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Déborah GREAUME, avocate du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'Etat aux migrations ainsi qu'à l'établissement de détention administrative de l'aéroport de Zurich (Flughafengefängnis), pour information.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Patrick CHENAUX, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

A.-S. SUDAN PEREIRA

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :