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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/17/2025

ATA/423/2025 du 15.04.2025 sur JTAPI/149/2025 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/17/2025-PE ATA/423/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 avril 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______, agissant pour elle-même et son enfant mineur,

B______ recourants

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________



Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 février 2025 (JTAPI/149/2025)


EN FAIT

A. a. Le 25 novembre 2024, l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a reçu un formulaire de A______, née le ______ 1998, ressortissante roumaine, domiciliée sur Genève, l’informant de son changement d’adresse. Elle quittait le C______ pour s’établir, avec son fils B______ né le ______ 2014, au D______ « chez l’association E______ ».

b. Par décision du 4 décembre 2024, l’OCPM a refusé de faire droit à la demande d’autorisation de séjour avec activité lucrative de A______ et a prononcé son renvoi de Suisse.

Le regroupement familial pour son fils, B______, était également refusé.

Un délai au 4 février 2025 leur était imparti pour quitter le territoire suisse.

La décision a été envoyée à son adresse à la rue C______ à Genève.

B. a. Par acte du 6 janvier 2025, A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision précitée. Elle remerciait le TAPI de prendre bonne note de sa nouvelle adresse.

b. Par lettre du 7 janvier 2025, envoyée sous pli recommandé à l’adresse D______ c/o Association E______, le TAPI a imparti à A______ un délai au 6 février 2025 pour procéder au versement d’une avance de frais d’un montant de CHF 500.-, sous peine d’irrecevabilité de son recours.

c. La destinataire a été avisée par la poste pour retrait du recommandé le 8 janvier 2025.

La lettre n’ayant pas été réclamée dans le délai échéant le 15 janvier 2025, elle a été retournée au TAPI le 16 janvier 2025.

d. Par jugement du 7 février 2025, le TAPI a déclaré le recours irrecevable. La demande de paiement de l’avance de frais avait été correctement acheminée, par courrier recommandé, à l’adresse de la recourante laquelle correspondait à celle mentionnée dans l’acte de recours. Elle avait donc été notifiée de manière régulière. La partie recourante était réputée en avoir pris connaissance. L’avance de frais n’avait pas été effectuée, et rien ne permettait de retenir que la recourante avait été victime d’un empêchement non fautif de s’en acquitter en temps utile.

Le jugement a été adressé par pli recommandé à l’adresse rue D______ le 7 février 2025. Il n’a pas été réclamé.

C. a. Par acte du 5 mars 2025, A______ a déposé auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) une requête en nullité et en annulation du jugement précité.

Elle a conclu, principalement, au constat de l’irrégularité de la notification de la demande de paiement de l’avance de frais du 7 janvier 2025, de la violation de son droit d’être entendue, de la nullité du jugement pour vice de procédure grave. Subsidiairement, l’irrégularité de la notification de la demande de paiement de l’avance de frais devait être constatée à l’instar de la violation de son droit d’être entendue et le jugement être annulé.

La recourante était représentée par un juriste de l’association CAVA (cercle associatif vers l’autonomie). Seuls un numéro de téléphone et une adresse électronique du mandataire étaient mentionnés. La notification de l’arrêt devrait se faire au D______. La procuration pour faire recours était produite.

Elle n’avait jamais réceptionné le courrier du 7 janvier 2025 du TAPI qui avait été envoyé à son ancienne adresse à la rue C______.

b. Un délai a été imparti au juriste précité pour transmettre tous les documents permettant de s’assurer de sa qualité de mandataire professionnellement qualifié (ci-après : MPQ).

Celui-ci, après avoir communiqué une adresse pour la correspondance, n’a pas retiré le pli recommandé, lequel est revenu avec la mention non réclamé. Aucune suite n’a été donnée par l’intéressé au courrier de la chambre de céans.

c. L’OCPM n’a pas souhaité se déterminer s’agissant d’une problématique d’avance de frais. Il a précisé que sa décision du 4 décembre 2024 avait été envoyée par erreur à l’ancienne adresse de la recourante.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé du jugement du TAPI déclarant le recours irrecevable en l’absence du paiement de l’avance de frais dans le délai échéant le 6 février 2025.

2.1 L’exigence de l’avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non‑paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d’organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1262/2017 du 5 septembre 2017 consid. 2a et les références citées).

En vertu de l’art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l’avance n’est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).

À rigueur de texte, l’art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l’avance de frais n’intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l’al. 1 de cette disposition laisse une certaine marge d’appréciation à l’autorité judiciaire saisie (ATA/184/2019 du 26 février 2019 consid. 3c ; ATA/916/2015 du 8 septembre 2015 consid 2c).

2.2 Aux termes de l’art. 16 LPA, un délai fixé par la loi ne peut être prolongé ; les cas de force majeure sont réservés (al. 1) ; le délai imparti par l’autorité peut être prolongé pour des motifs fondés si la partie en fait la demande avant son expiration (al. 2) ; la restitution pour inobservation d’un délai imparti par l’autorité peut être accordée si le requérant ou son mandataire a été empêché sans sa faute d’agir dans le délai fixé ; la demande motivée doit être présentée dans les dix jours à compter de celui où l’empêchement a cessé (al. 3).

Selon la jurisprudence constante, il convient d’appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l’art. 16 al. 1 LPA afin d’examiner si l’intéressé a été empêché sans sa faute de verser l’avance de frais dans le délai fixé (ATA/158/2020 du 11 février 2020 ; ATA/38/2020 du 14 janvier 2020 ; ATA/636/2017 du 6 juin 2017 consid. 4b et les références citées).

2.3 La notification d’un acte soumis à réception, comme une décision ou une communication de procédure, est réputée faite au moment où l’envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, n. 2.2.8.3 p. 302 s). Il suffit que celui-ci puisse en prendre connaissance (ATF 137 III 308 consid. 3.1.2 ; 118 II 42 consid. 3b). Celui qui, pendant une procédure, omet de prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux lui soient transmis ne peut se prévaloir de son absence lors de la tentative de notification d’une communication officielle à son adresse habituelle s’il devait s’attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une telle communication (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_549/2009 du 1er mars 2010 consid. 3.2.1 et les références citées).

La preuve de la notification d’un acte et de la date de celle-ci incombe en principe à l’autorité qui entend en tirer une conséquence juridique. L’autorité qui veut contrer le risque d’un échec de la preuve de la notification peut communiquer ses décisions par pli recommandé. En tel cas, lorsque le destinataire de l’envoi n’est pas atteint et qu’un avis de retrait est déposé dans sa boîte aux lettres ou dans sa case postale, l’envoi est considéré comme notifié au moment où il est retiré. Si le retrait n’a pas eu lieu dans le délai de garde, il est réputé notifié le dernier jour de celui-ci (ATF 134 V 49 consid 4 ; ATA 130 III 396 consid. 1.2.3).

Cette fiction de notification n'est cependant applicable que lorsque la communication d'un acte officiel doit être attendue avec une certaine vraisemblance, ce qui est le cas lorsque l'intéressé est partie à une procédure pendante (ATF 139 IV 228 consid. 1.1).

2.4 Le formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l’accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9 ; 134 II 244 consid. 2.4.2).

Il n’y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d’une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l’inobservation de ce délai (ATF 104 Ia 105 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 du 25 mars 2013 consid. 3.1 ; 2C_645/2008 du 24 juin 2009 consid. 2.2). La gravité des conséquences d’un retard dans le paiement de l’avance sur la situation du recourant n’est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_703/2009 du 21 septembre 2010 consid. 4.4.2 ; 2C_645/2008 précité consid. 2.2).

2.5 En l’espèce, les recourants contestent l'irrecevabilité de leur recours devant le TAPI pour non‑paiement de l'avance de frais au motif qu'ils n'ont pas reçu l'avis de retrait de la lettre de ladite juridiction qui les invitait à s'acquitter d'une telle avance.

La lettre du TAPI du 7 janvier 2025 contenant la demande d'avance de frais a été envoyée aux recourants sous pli recommandé à l'adresse postale que ceux-ci avaient indiquée dans leur mémoire de recours. Les recourants n'ayant pu être atteints, un avis de retrait a été déposé dans leur boîte aux lettres le 8 janvier 2025, selon le système de suivi des envois recommandés établi par la Poste suisse. Le retrait n'ayant pas eu lieu dans le délai de garde échéant le 15 janvier 2025, l'envoi est réputé avoir été notifié à cette date.

Les recourants, qui devaient s'attendre à recevoir du courrier de la part du TAPI à la suite de leur recours déposé devant cette juridiction le 6 janvier 2025, n'invoquent aucune circonstance propre à tenir cette notification pour irrégulière.

Ils évoquent devant la chambre de céans une possible erreur d’adressage par le TAPI. Tel n’est toutefois pas le cas puisque ladite juridiction a tenu compte du déménagement des intéressés et leur a communiqué le pli à leur nouvelle adresse, telle que mentionnée dans leur acte de recours.

En l’absence de paiement du montant de l’avance de frais dans le délai imparti, bien que les recourants en aient été avertis de façon conforme aux exigences légales et jurisprudentielles, le jugement du TAPI est fondé.

Le recours sera rejeté.

3.             Les parties, à moins qu’elles ne doivent agir personnellement ou que l’urgence ne le permette pas, peuvent se faire représenter par un conjoint, un ascendant ou un descendant majeur, respectivement par un avocat ou par un MPQ pour la cause dont il s’agit (art. 9 al. 1 LPA).

3.1 Les personnes, même juristes, qui ne bénéficient ainsi pas de la présomption de fait reconnue par la loi aux avocats quant à leur aptitude à représenter efficacement les intérêts des parties dans les procédures administratives doivent, pour se voir reconnaître la qualité de MPQ, faire état de solides connaissances dans le domaine considéré, en démontrant par exemple avoir suivi une formation particulière dans ce domaine ou avoir déjà soutenu des recours portant sur une problématique analogue. De plus, la qualité de MPQ ne doit pas être examinée selon la qualité intrinsèque du recours, mais d’après les connaissances dont son auteur peut se prévaloir dans le domaine considéré (arrêt du Tribunal fédéral 1P.416/2004 du 28 septembre 2004 consid. 2.3).

3.2 En l’espèce, en l’absence de justification, par le juriste concerné, de solides connaissances dans le domaine considéré, il ne sera pas considéré comme MPQ.

Le recours sera notifié à l’adresse des recourants conformément à leur demande (art. 46 LPA).

4.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 mars 2025 par A______, agissant pour elle-même et pour son fils B______, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 février 2025 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal-Fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la recourante invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Patrick CHENAUX, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

 

M. RODRIGUEZ ELLWANGER

 

 

la présidente siégeant :

 

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.