Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3571/2015

ATA/867/2024 du 23.07.2024 sur JTAPI/459/2016 ( PE ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DES ÉTRANGERS;ACCORD SUR LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES;LOI FÉDÉRALE SUR LES ÉTRANGERS ET L'INTÉGRATION;RESSORTISSANT ÉTRANGER;AUTORISATION DE SÉJOUR;CAS DE RIGUEUR;RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS);EXCÈS ET ABUS DU POUVOIR D'APPRÉCIATION;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;CONSTATATION DES FAITS;OBJET DU LITIGE;NOUVEAU MOYEN DE FAIT;MODIFICATION DES CIRCONSTANCES;REGROUPEMENT FAMILIAL;RESPECT DE LA VIE FAMILIALE;RESPECT DE LA VIE PRIVÉE;PESÉE DES INTÉRÊTS
Normes : CEDH.8; aLCP.4; aLCP.6; aLCP.12; aLCP.16.par2; aLCP.2 annexe I; aLCP.3 annexe I; aLCP.24 annexe I; OLCP.16.al1; Cst.29.al2; LEI.1; LEI.2; LEI.43; LEI.50; LEI.64.al1.letc; LEI.83; LEI.96; LEI.126.al1; OASA.31.al1; LPA.19; LPA.20; LPA.22; LPA.68
Résumé : confirmation d'un refus de renouvellement d'une autorisation de séjour pour une ressortissante kosovare et ses deux enfants, âgés d'onze et trois ans et respectivement de nationalité portugaise et allemande. Pas de droit au regroupement familial tiré de la relation avec les pères respectifs (art. 3 annexe I ALCP). Pas de droit à un séjour de durée indéterminée au regard de la jurisprudence dite « Zhu et Chen », le recourant émargeant à l'aide sociale notamment. Durée du séjour de la recourante (quinze ans) et de sa fille aînée (onze ans) à elle seule insuffisante pour retenir un cas d'extrême gravité, la majorité de ce séjour ayant été effectuée au bénéfice d'une simple tolérance et à défaut notamment d'une intégration professionnelle et sociale particulièrement réussie. Pas de violation du droit au respect de la vie privée et familiale. Renvoi exécutable. Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3571/2015-PE ATA/867/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 juillet 2024

1e section

 

dans la cause

 

A______

représentée par Me Agrippino RENDA , avocat

et

B______ et C______, enfants mineurs
agissant par Me Gilbert DESCHAMPS, curateur

recourants

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 mai 2016 (JTAPI/459/2016)


EN FAIT

A. a. A______, née le ______1986, est ressortissante kosovare. Elle est domiciliée, selon le registre informatisé « Calvin » (ci-après : le registre « Calvin ») de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), au ______, rue D______, à E______. Elle possède un niveau de français A2 à l'oral et A1 à l'écrit.

b. Le 5 juin 2009, elle a épousé, à Genève, F______, ressortissant portugais au bénéfice d’une autorisation d’établissement sur le territoire suisse, valable jusqu'au 17 octobre 2014 selon le registre « Calvin ».

c. À compter du 5 juin 2009, A______ a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour au titre de regroupement familial avec son époux, valable jusqu’au 4 juin 2014.

Le 1er novembre 2011, ce dernier a annoncé à l’office cantonal de la population, devenu depuis lors l'OCPM, son départ du territoire genevois pour la Chaux‑de‑Fonds.

d. Le ______ 2012 est née B______, de nationalité kosovare, fille de A______ et de F______. L'enfant a obtenu la nationalité portugaise le 29 juin 2022.

e. A______ a travaillé du 1er juin 2014 jusqu'à une date indéterminée (mais au maximum jusqu'au 30 mai 2015) pour G______ Sàrl, du 1er juin 2015 au 31 août 2015 pour celle-ci, puis du 1er février 2016 jusqu'à une date indéterminée (mais seulement quelques mois) pour H______ Sàrl, du 1er juin 2016 au 30 août 2016 pour G______ Sàrl ainsi que du 1er juin 2023 jusqu'au 31 septembre 2023 pour I______ Sàrl.

f. Depuis le 1er juillet 2015, elle perçoit des prestations de l'Hospice général (ci‑après : l'hospice).

B. a. Le ______ 2021, soit après l'ouverture de la procédure décrite ci-après, A______ a donné naissance à C______, dont le père biologique est J______, ressortissant allemand au bénéfice d'une autorisation d'établissement valable jusqu'au 29 novembre 2028. Selon le registre « Calvin », ce dernier réside à la rue Q______ à Genève et est marié à P______ depuis le 4 juin 2021.

b. J______ a reconnu C______ le 15 juin 2022, date à laquelle ce dernier a obtenu la nationalité allemande.

c. A______ et J______ exercent l'autorité parentale conjointe sur leur enfant. A______ en a la garde exclusive.

C. a. Le 14 avril 2014, A______ a requis le renouvellement de son autorisation de séjour, indiquant être mariée et résider alors avenue K______ à E______.

Le 5 juin 2014, elle a déposé une demande de renouvellement de permis de séjour, pour elle-même et pour sa fille B______, indiquant être employée par G______ Sàrl, pour une durée indéterminée.

b. L’OCPM a demandé à A______, par courrier du 8 juillet 2014 envoyé à son adresse à E______ (avenue K______ ), des renseignements complémentaires sur sa situation. Ce courrier est revenu à l’OCPM avec la mention « le destinataire est introuvable à l’adresse indiquée ».

Selon une feuille d’enquête établie le 24 septembre 2014, lors d’un passage le 5 septembre 2014 à l’avenue K______, le représentant de l’OCPM avait constaté que les noms de A______ et de son époux ne figuraient nulle part. Selon les registres de l’employeur de A______, son adresse était celle à laquelle avait eu lieu la visite. Cependant, les époux étaient inconnus des registres de la régie en charge de la location de l'appartement. A______ avait indiqué à l’OCPM qu’elle demeurait toujours avenue K______ et que son nom apparaissait sur la boîte aux lettres.

c. Le 1er octobre 2014, le contrôle des habitants de la Chaux-de-Fonds a indiqué à l’OCPM que F______, arrivé dans le canton de Neuchâtel le 1er novembre 2011, vivait à la Chaux-de-Fonds, en compagnie de L______ et de l’enfant de celle-ci.

d. Par plis simples des 10 octobre 2014 et 8 décembre 2014 et pli recommandé du 26 juin 2015, l’OCPM a requis de F______ des renseignements concernant sa relation avec son épouse et sa fille B______. Aucune suite n’a été donnée à ces courriers. Le dernier envoi du 26 juin 2015 ayant été retourné à l’OCPM avec la mention « non réclamé », une copie de celui-ci avec fixation d’un nouveau délai pour donner les informations requises a été adressée par l’OCPM à F______ par pli simple le 12 août 2015.

e. Par courrier du 15 juin 2015, A______ a indiqué à l’OCPM être domiciliée rue de la M______ à E______. Elle ne faisait plus ménage commun avec son époux depuis novembre 2014. Elle avait été hébergée par son frère, N______, qui avait subvenu à son entretien et à celui de sa fille. Elle vivait un moment « très difficile » et désirait mener une vie normale et obtenir un permis de séjour.

Était notamment joint à ce courrier un formulaire de demande adressé le 11 juin 2015 à l’OCPM à teneur duquel elle était au bénéfice d’un contrat de travail en qualité de nettoyeuse auprès de G______ Sàrl pour la période du 1er juin 2015 au 31 août 2015, pour un salaire mensuel brut de CHF 1'600.-.

f. À teneur d'une note établie le 24 juin 2015 par l'OCPM, A______ a indiqué, lors de sa visite aux guichets de l'administration le même jour, que son époux avait quitté Genève trois ans plus tôt et vivait à la Chaux-de-Fonds avec L______. Aucune procédure de divorce n’était en cours et il n’y avait aucun contact entre son époux et sa fille depuis six mois.

g. Par courrier recommandé du 15 juillet 2015, l’OCPM a informé A______ de son intention de ne pas renouveler son autorisation de séjour ni celle de sa fille et lui a fixé un délai de 30 jours pour se déterminer. Ce courrier, adressé à la rue de la M______, est revenu à l’OCPM avec la mention « non réclamé ». Le 12 août 2015, l’OCPM a renvoyé à l'intéressée, par pli simple, le courrier du 15 juillet 2015.

h. Par décision du 7 septembre 2015, l’OCPM a refusé de renouveler l’autorisation de séjour de A______ ainsi que celle de sa fille et leur a imparti un délai au 7 novembre 2015 pour quitter la Suisse.

L’union conjugale de A______ et de F______ avait duré moins de trois ans et était définitivement rompue, dès lors que ce dernier avait quitté le domicile conjugal depuis presque quatre ans, n’avait donné aucune suite à ses courriers et faisait ménage commun avec sa concubine et l’enfant de celle-ci. Son droit au séjour en Suisse avait pris naissance le jour de son mariage avec F______ et elle ne pouvait donc plus, à moins de commettre un abus de droit, se prévaloir de ce mariage en vue de conserver son autorisation de séjour.

Dans la mesure où elle ne pouvait plus se prévaloir de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681), la poursuite de son séjour en Suisse devait être examinée à l'aune de l’art. 50 de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20), devenue dès le 1er janvier 2019 la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Or, cette disposition ne pouvait trouver application, dès lors que la vie commune avec son époux avait duré moins de trois ans et que l'intéressée ne pouvait se prévaloir d’une intégration sociale ou professionnelle particulièrement marquée. De plus, elle percevait de l'hospice, depuis le 1er juillet 2015, un montant mensuel de CHF 1'214.‑.

D. a. A______ et B______, soit pour elle sa mère, ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI) contre cette décision, concluant, préalablement, à la tenue d'une audience de comparution personnelle des parties et à l'audition de F______ et, principalement, à l’annulation de ladite décision.

b. Par jugement du 6 mai 2016, le TAPI a rejeté le recours.

L'audition des parties et de F______ n'était pas nécessaire. En effet, A______ avait eu l’occasion d’expliquer sa situation et F______ avait été contacté en vain à plusieurs reprises par l'OCPM. Il avait donc refusé de faire valoir son point de vue.

A______ et son époux vivant séparés depuis plus de quatre ans, leur lien conjugal devait être considéré comme vidé de sa substance. En outre, la vie commune des époux avait duré au plus deux ans et trois mois. Dans la mesure où les liens de l'intéressée et de sa fille avec la Suisse n'étaient pas étroits, il était exigible qu'elles retournent dans leur pays d'origine, où leur réintégration sociale ne semblait pas compromise.

Aucun élément au dossier ne démontrait que F______, qui ne faisait pas ménage commun avec sa fille, exerçait un droit de visite régulier et effectif ni qu’il contribuait à son entretien. A______ et sa fille ne disposaient en conséquence pas d’un droit de séjourner en Suisse fondé sur l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

E. a. Par acte déposé le 16 juin 2016, A______ et B______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation ainsi qu'à celle de la décision de l'OCPM du 7 septembre 2015 et à ce que l'OCPM soit invité à renouveler leur autorisation de séjour. Préalablement, elles ont requis leur comparution personnelle ainsi que celle de F______.

Elles contestaient la date de séparation du couple retenue par les autorités, soit le 1er novembre 2011. Le couple avait vécu, dans l'ancien appartement familial, au‑delà de cette date. Le refus d'offrir de le prouver violait leur droit d'être entendues. Une réconciliation définitive entre les époux était possible.

L'intégration de la recourante était réussie, compte tenu des difficultés qu'elle avait rencontrées. Sa réintégration au Kosovo était impossible, toute sa famille, à l'exception de l'un de ses frères, vivant en Suisse.

b. L'OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Le 26 avril 2018 s'est tenue une audience de comparution personnelle et d'enquêtes.

La recourante, assistée d'un interprète en langue albanaise, a indiqué qu'elle et son mari avaient entrepris, depuis plus d'une année, des démarches pour que leur fille obtienne des papiers d'identité portugais. Elle passait beaucoup de temps avec sa famille et était assistée par les services sociaux. Elle comprenait les termes usuels en français mais pas les termes techniques et n'avait pas tout le temps besoin d'un traducteur. B______ parlait le français, qui était sa langue « principale », et parfois l'albanais. Cela faisait deux ans et demi qu'elle n'était plus allée au Kosovo, où elle avait encore un frère et une sœur.

F______ a indiqué qu'il n'avait pas entrepris de démarches pour que sa fille obtienne les papiers portugais mais il prenait l'engagement de le faire dans le courant du mois de mai 2018. Il ne voyait pas sa fille aussi souvent qu'il le devait, en raison de sa situation financière. Il avait quitté Genève car il avait dû accepter un poste à Neuchâtel, – et non pas parce que son couple était dans une situation de rupture –, vers la fin septembre ou octobre 2011. Il n'était pas revenu à Genève car le rythme de vie était différent à Neuchâtel et dans la mesure où il avait quitté le canton dans des conditions psychologiques difficiles. Son épouse ne l'avait pas rejoint puisqu'il habitait chez un tiers et elle lui avait fait part de ses difficultés à être, le cas échéant, séparée de sa famille. « À l'heure actuelle », il revenait à Genève uniquement pour voir sa fille, les samedis après-midis, voire les dimanches matins. Les contacts avec elle se limitaient à ces visites et ils ne se téléphonaient pas. Il ne pouvait pas lui apporter de soutien financier. Depuis son départ de Genève, il avait souvent vu son épouse mais la voyait désormais moins car ils s'étaient éloignés. Il ne pouvait toutefois pas exclure une reprise de la vie commune.

d. L'instruction de la cause a été suspendue, sur requête des recourantes et en accord avec l'OCPM, du 5 mars 2019 au 13 octobre 2021, puis du 14 février 2022 au 2 mars 2023 et enfin du 29 juin 2023 au 30 septembre 2023.

e. Le 4 mars 2019, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant a désigné Me Gilbert DESCHAMPS en tant que curateur de représentation de B______.

f. Par courriel du 3 juin 2019, l'ambassade du Portugal à Berne a informé Me DESCHAMPS que tous les documents (carte d'identité et passeport) de F______ étaient périmés depuis 2017 et que ce dernier ne les avait pas renouvelés.

g. Le 14 octobre 2021 s'est tenue une nouvelle audience de comparution personnelle et d'enquêtes.

Me DESCHAMPS a indiqué avoir fait plusieurs tentatives pour contacter le père de B______. Ce dernier se trouvait toujours à la Chaux-de-Fonds. Il ne souhaitait pas contribuer à ce que sa fille reçoive des documents d'identité portugais et ne la considérait pas comme son enfant.

Le conseil de la recourante a indiqué que F______ n'avait jamais versé le moindre montant depuis la naissance de sa fille. Il ne répondait pas à ses sollicitations. La recourante avait donné naissance à un second enfant (C______) le ______2021. Il discuterait de la pension alimentaire avec le père de ce dernier.

La recourante, assistée d'un interprète en langue albanaise, a indiqué communiquer avec son époux, qui habitait avec sa nouvelle amie, une fois par semaine. Ils n'avaient plus l'intention de vivre ensemble mais elle gardait l'espoir de reprendre la vie commune même s'ils étaient séparés depuis dix ans. Avant la pandémie de COVID-19, F______ voyait sa fille une fois par mois. Depuis la fin de la pandémie, il n'était plus venu la voir. Elle n'avait plus de travail depuis cinq ans et était à l'hospice. Elle habitait avec ses deux enfants. Ses parents et ses frères, qui habitaient à Genève, l'aidaient « un peu » financièrement. Le père de C______ avait des contacts avec ce dernier.

h. Le 22 février 2023, l'OCPM a informé la chambre administrative avoir sollicité du conseil de la recourante des informations sur la situation financière de celle‑ci (y compris le montant des éventuelles contributions d'entretien versées en faveur des enfants) et sur les contacts entretenus par les enfants avec leur père respectif.

i. Le 10 mars 2023, Me DESCHAMPS a été nommé curateur de représentation de C______.

j. Par courrier du 31 mars 2023, la recourante a confirmé être sans emploi mais avoir effectué plusieurs recherches d'emploi. B______, désormais titulaire d'une carte d'identité portugaise et sur laquelle elle exerçait de manière exclusive la garde, était scolarisée à l'école du O______. J______ et elle exerçaient l'autorité parentale conjointe sur C______ et elle exerçait de manière exclusive la garde de fait sur ce dernier. J______ exerçait sur C______ un droit de visite régulier et contribuait à son entretien courant.

k. Par courriers des 20 avril, 12 mai, 5 et 16 juin 2023, la recourante a notamment sollicité une nouvelle audience de comparution personnelle des parties. Elle a précisé être dans l'attente de la remise d'un contrat de travail.

l. Le 19 octobre 2023, sur demande de la juge déléguée, l'OCPM a indiqué ne pas avoir reçu de la recourante de demande formelle d'autorisation de travail temporaire, ni d'information sur l'évolution de sa situation ni sur les contacts entretenus par les enfants avec leur père respectif.

m. Le 23 octobre 2023, la recourante a produit un contrat de travail signé le 1er juin 2023, ainsi qu'un avenant du 1er septembre 2023, en précisant qu'elle avait été licenciée mais était sur le point de retrouver un emploi.

n. À la suite d'une requête de la recourante, la juge déléguée a prolongé au 15 février 2024 le délai qui avait été imparti aux parties pour produire leur écriture.

o. Le 15 février 2024, le curateur a indiqué que le père de B______ « serait » actuellement au Portugal mais entretenait des relations personnelles avec celle-ci. C______ entretenait, « à sa meilleure connaissance » des relations personnelles « très étroites » avec son père, qui résidait aussi dans la commune de E______. Il a conclu à ce qu'une autorisation de séjour soit octroyée à B______ et C______.

p. Le 28 mars 2024, après avoir obtenu à sa demande une nouvelle prolongation de délai, la recourante a confirmé avoir été licenciée avec effet au 30 septembre 2023 mais il était question que son ex-employeur l'engage à nouveau. Elle était également en contact avec un autre employeur et les démarches entreprises dans ce cadre devaient aboutir prochainement à la conclusion d'un contrat de travail. Elle avait entamé une procédure de divorce et envisageait de se marier avec J______.

Elle a persisté dans sa conclusion tendant à la tenue d'une nouvelle audience de comparution personnelle des parties, « pour faire un point global de la situation ».

q. L'OCPM s'est référé à ses observations du 19 octobre 2023.

r. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner avant les griefs au fond, la recourante se plaint de la violation de son droit d'être entendue, le TAPI ayant refusé d'ordonner son audition et celle de F______. Or, celles‑ci auraient permis d'établir que l'union de la recourante et de ce dernier n'avait pas pris fin le 1er novembre 2011 et que l'union conjugale n'était pas définitivement rompue.

La recourante a réitéré sa demande de comparution personnelle des parties et d'audition de F______, lesquelles, comme on le verra ci-après, ont été ordonnées par la chambre de céans et se sont tenues les 26 avril 2018 et 14 octobre 2021. Dans ses dernières écritures, elle demande une nouvelle comparution personnelle des parties.

2.1 Tel qu’il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_700/2022 du 28 novembre 2022 consid. 3 et les références citées). Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). En outre, il n'implique pas le droit à l’audition orale ni à celle de témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

2.2 La violation du droit d'être entendu doit en principe entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances du recourant sur le fond (ATF 141 V 495 consid. 2.2 ; 140 I 68 consid. 9.3). Une réparation devant l'instance de recours est possible si celle-ci jouit du même pouvoir d'examen que l'autorité intimée (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_302/2018 du 14 mars 2019 consid. 2.1). La réparation dépend cependant de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1). Elle peut se justifier en présence d'un vice grave notamment lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 ; 136 V 117 consid. 4.2.2.2). Enfin, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de la violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir eu le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu'elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/429/2024 du 26 mars 2024 consid. 3.3 et l'arrêt cité).

2.3 En l'espèce, le TAPI a refusé d'ordonner les actes d'instruction sollicités, au motif que la recourante avait eu l'occasion de s'exprimer devant l'OCPM sur sa situation à plusieurs reprises et que ce dernier avait produit son dossier. F______ avait été contacté à plusieurs reprises par l'OCPM sans donner suite à ses sollicitations et avait donc renoncé à faire valoir son point de vue.

Ce faisant, le TAPI a procédé à une appréciation anticipée des preuves qui ne prête pas le flanc à la critique. En effet, comme on le verra ci-après, il ressort tant du registre « Calvin » que des informations données par le contrôle des habitants de la Chaux-de-Fonds que F______ a quitté Genève le 1er novembre 2011. La recourante a en outre indiqué, le 24 juin 2015, que son époux avait quitté Genève trois ans plus tôt et vivait à la Chaux-de-Fonds avec une femme. Compte tenu de ces informations, le TAPI pouvait légitimement considérer, sans procéder à d'autres actes d'instruction, y compris l'audition de F______, que les époux vivaient séparés depuis plus de deux ans au moins (quatre selon le TAPI) au moment du prononcé de la décision de l'OCPM et que leur lien conjugal était vidé de sa substance.

Il convient encore de préciser que, contrairement à ce qu'elle fait désormais devant la chambre de céans, la recourante n'a pas contesté devant le TAPI la date de séparation du couple retenue par les autorités, soit le 1er novembre 2011, ni soutenu que le couple avait repris la vie commune à Genève immédiatement après le 1er novembre 2011. Elle s'est en effet limitée à alléguer que l'union conjugale n'était pas définitivement rompue, au motif que son époux ne souhaitait pas entamer une procédure de divorce et qu'il aurait renoué des contacts avec son épouse et sa fille, sans toutefois indiquer une date ni étayer ses propos. Par conséquent, elle ne saurait de bonne foi reprocher au TAPI d'avoir refusé de lui offrir la possibilité de prouver les allégations qu'elle n'a pas formulées en première instance.

Au demeurant, même à retenir une violation du droit d'être entendu des recourantes, celle-ci aurait été réparée devant la chambre de céans, celle-ci disposant du même pouvoir d'examen que le TAPI (art. 61 al. 1 et 2 LPA ; ATA/738/2024 du 18 juin 2024 consid. 3.5 ; ATA/194/2024 du 13 février 2024 consid. 3.10 et l'arrêt cité) et ayant procédé aux auditions des parties et de F______. De plus, la recourante a pu faire valoir ses arguments devant la chambre de céans aussi efficacement que devant le TAPI et un renvoi à cette juridiction aboutirait à un allongement inutile de la procédure, qui dure déjà depuis 2015 en raison notamment de sa longue suspension – requise par les parties.

Le grief sera donc écarté.

2.4 Comme exposé ci-avant, les parties, à deux reprises, et F______ ont été entendus par la chambre de céans. La requête de la recourante, présentée dans son mémoire de recours devant la chambre de céans, a donc été satisfaite.

Malgré une nouvelle demande en ce sens formulée par l'intéressée dans ses dernières écritures, il n'y a pas lieu de procéder à une nouvelle audition des parties. En effet, outre que cette demande est insuffisamment motivée (« faire un point de la situation »), la recourante et ses enfants (ci-après : les recourants) ont produit de nombreuses pièces, se sont vu offrir la possibilité de faire valoir leurs arguments devant l'OCPM, puis le TAPI et la chambre de céans, et se sont exprimés de manière circonstanciée sur l'objet du litige, non seulement par écrit tout au long de la procédure, mais également oralement devant la chambre de céans, à l'occasion de deux audiences. Les recourants n’indiquent d'ailleurs pas quels éléments supplémentaires, utiles à la solution du litige, qu’ils n’auraient pu produire par écrit seraient susceptibles d’être apportés par l'audition des parties.

Au vu de ce qui précède, la chambre de céans considère que le dossier est complet et est en état d'être jugé sans qu'il soit nécessaire de procéder aux nouveaux actes d'instruction sollicités par les recourants. Il n'y sera donc pas donné suite.

3.             Les recourants se plaignent d'une constatation inexacte et arbitraire des faits. Ils contestent la date de séparation du couple formé par A______ et F______ retenue par les autorités. Malgré l'annonce du départ de l'époux, le couple aurait continué sa vie commune à Genève, dans l'appartement familial, celle‑ci étant toutefois entrecoupée de séparations. La naissance de B______ le ______ 2012 attestait d'une reprise de la vie commune au début du mois de janvier 2012 déjà.

3.1 En application de la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public (art. 19 et 20 LPA), l’autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés ; cette maxime oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d’office l’ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier (ATF 124 II 361 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1).

Le principe de la maxime inquisitoire n'est toutefois pas absolu, sa portée étant restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui-ci comprend en particulier l'obligation pour les parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (arrêts du Tribunal fédéral 8C_1034/2009 du 28 juillet 2010 consid. 4.2 ; 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 3.3.2 ; ATA/556/2024 du 2 mai 2024 consid. 4.6 et l'arrêt cité).

3.2 La constatation des faits est, en procédure administrative, gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2e phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n’est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/560/2024 du 7 mai 2024 et l'arrêt cité).

3.3 En l'espèce, il convient au préalable de préciser que la chambre de céans revoit les faits avec un plein pouvoir d'examen (art. 61 al. 1 let. b LPA) et qu'elle n'est donc pas limitée à l'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATA/544/2024 du 30 avril 2024 consid. 3.13). Le grief des recourants tiré d'une constatation arbitraire des faits se confond ainsi avec celui de la constatation inexacte des faits et n'a donc pas de portée propre.

Comme déjà mentionné, il ressort tant du registre « Calvin » que des informations données par le contrôle des habitants de la Chaux-de-Fonds que F______ a quitté Genève le 1er novembre 2011. Le 24 juin 2015, son épouse a également indiqué à l'OCPM, après avoir changé sa version des faits telle que présentée dans son courrier du 15 juin 2015, que l'intéressé avait quitté Genève trois ans plus tôt et vivait à la Chaux-de-Fonds avec une femme. En outre, lors de son audition devant la chambre de céans, F______ a confirmé avoir quitté Genève vers la fin septembre ou octobre 2011 et surtout ne pas y être revenu, ce qui permet d'ailleurs d'exclure toute continuation, au-delà du 1er novembre 2011, de la vie commune du couple dans l'appartement familial. À cela s'ajoute que la recourante a confirmé, lors de son audition devant le chambre de céans le 14 octobre 2021, que son époux et elle vivaient séparés depuis dix ans.

Couplés les uns aux autres, tous ces éléments permettent de retenir que le couple vit séparé (et plus sous le même toit) depuis le 1er novembre 2011 à tout le moins, ce que le TAPI a correctement constaté. Les allégations de F______ selon lesquelles il était parti exclusivement pour des raisons professionnelles, et non pas parce que son couple était dans une situation de rupture, et avait souvent vu son épouse depuis son départ de Genève n'y changent rien, pas plus que la naissance de B______ le ______ 2012. En effet, d'une part, cette naissance prouve uniquement que les époux ont eu une relation intime en début d'année 2012. D'autre part et surtout, elle ne constitue pas à elle seule un indice suffisant permettant d'admettre une reprise de la vie commune à ce moment-là, vu les nombreux éléments probants mentionnés ci-avant qui confirment au contraire une cessation de celle-ci dès le 1er novembre 2011.

Le grief sera donc écarté.

4.             Le litige porté devant le TAPI portait sur le bien-fondé du refus de l’OCPM de renouveler l'autorisation de séjour de la recourante ainsi que celle de sa fille. Depuis lors, plus de sept ans se sont écoulés et des faits nouveaux sont survenus. Se pose donc la question de la prise en compte de ces derniers, étant précisé que cette question est, à titre exceptionnel dans ce contexte bien particulier, également susceptible d'influer sur l'objet du litige.

4.1 Selon l'art. 61 LPA, le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (al. 1). En revanche, la chambre administrative ne connaît pas de l'opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (al. 2 ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10 a contrario ; ATA/938/2022 du 20 septembre 2022 consid. 4 et l'arrêt cité).

4.2 Sauf exception prévue par la loi, le recourant peut invoquer des motifs, des faits et des moyens de preuves nouveaux qui ne l’ont pas été dans les précédentes procédures (art. 68 LPA).

Au cours de la procédure de recours, il n'est tenu compte des faits nouveaux que si la juridiction y est en général autorisée, si la décision ne sortit ses effets que dès la date de la décision sur recours et si l'économie de procédure l'impose (ATF 98 Ib 178 ; 92 I 327 ; 89 I 337 ; ATA/507/2023 du 16 mai 2023 consid. 5.1 et la référence citée).

À plusieurs reprises, la chambre de céans a tenu compte, d'office ou sur requête, de faits qui s'étaient produits après que la décision de première instance a été rendue (ATA/72/2024 du 23 janvier 2024 consid. 2.2 et les arrêts cités). En outre, l'autorité administrative se base sur l'état de fait actuel au moment de prendre sa décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_715/2011 du 2 mai 2012 consid. 4.2) et l'autorité de recours pour statuer (ATA/1242/2020 du 8 décembre 2020 consid. 5 et les arrêts cités).

4.3 En l'espèce, la recourante a informé la chambre administrative avoir donné naissance à un fils, C______, le ______2021, de nationalité allemande, dont le père biologique – et désormais juridique – est J______, ressortissant allemand au bénéfice d'une autorisation d'établissement valable jusqu'au 29 novembre 2028. Il ressort également des renseignements fournis le 3 juin 2019 par l'ambassade du Portugal à Berne que tous les documents (carte d'identité et passeport) de F______ sont périmés depuis 2017 et que ce dernier ne les a pas renouvelés.

Ces faits se sont produits après le prononcé de la décision de l'OCPM et du jugement du TAPI. Conformément à la jurisprudence précitée et pour des raisons évidentes d'économie de procédure, il en sera tenu compte dans l'examen du dossier.

Au vu de ces éléments, le litige porte sur le bien-fondé du refus de l’OCPM de renouveler l'autorisation de séjour de la recourante ainsi que celle de sa fille. Il doit également concerner C______, quand bien même ce dernier n'a fatalement pas pu prendre part à la procédure ayant abouti à la décision attaquée, dès lors qu'il n'était pas encore né à ce moment‑là. En effet, la particularité du cas d'espèce (plus de huit ans écoulés depuis la décision de l'OCPM du 7 septembre 2015 et présence de faits nouveaux – en lien direct avec la situation familiale – postérieurs à cette décision) et des questions d'économie de procédure commandent de statuer sur sa situation, ce d'autant plus que comme on le verra infra, l'enfant mineur étranger partage en principe le sort du parent qui en a la garde (en l'occurrence la recourante). À cela s'ajoute également que c'est en raison des faits nouveaux que la procédure a été suspendue à plusieurs reprises, avec l'accord des parties.

5.             Les recourants se plaignent de la violation de l'art. 3 annexe I ALCP. Dans son mémoire de recours, soit avant la survenance des faits nouveaux, la recourante a fait valoir qu'une réconciliation définitive entre elle et son époux était possible, ce d'autant plus que ce dernier exerçait son droit de visite sur sa fille, laquelle était à sa charge.

Dans leurs dernières écritures, soit après la survenance des faits nouveaux, les recourants ont fait valoir que B______ avait toujours été domiciliée et scolarisée à Genève. Elle bénéficiait de la nationalité portugaise et entretenait des relations personnelles avec son père, qui vivait au Portugal. Quant à C______, il vivait depuis sa naissance à Genève et possédait la nationalité allemande. Il entretenait des relations personnelles très étroites avec son père, qui résidait aussi dans la commune de E______. A______ et J______ envisageaient de se marier.

5.1 La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie de Suisse des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), dont l'ALCP. Ainsi, l'ALCP et l'ordonnance sur l'introduction progressive de la libre circulation des personnes entre, d'une part, la Confédération suisse et, d'autre part, l'Union européenne et ses États membres, ainsi qu'entre les États membres de l'Association européenne de libre-échange du 22 mai 2002 (Ordonnance sur l'introduction de la libre circulation des personnes, OLCP – RS 142.203) s'appliquent en premier lieu aux ressortissants des pays membres de l'UE/AELE, la LEI ne s'appliquant à eux que pour autant que ses dispositions soient plus favorables que celles de l'ALCP et si ce dernier ne contient pas de dispositions dérogatoires (art. 12 ALCP ; art. 2 LEI).

Dans ce contexte, il convient en premier lieu d'examiner l'application de l'ALCP à la situation de séjour de la recourante et de ses enfants, soit B______, qui possède la nationalité portugaise depuis le 29 juin 2022, et C______, qui possède la nationalité allemande.

En cas d'inapplication de l'ALCP in casu, référence doit être faite à la LEI et à l’OASA. Dans cette dernière hypothèse, il sera rappelé que le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la LEtr, dont le titre est alors devenu la LEI, et de l'OASA. Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI à la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 2C_404/2022 du 4 août 2022 consid. 6.1), les demandes déposées avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit. La demande concernant la recourante et sa fille ayant été déposée le 5 juin 2014, elle est soumise aux dispositions de la LEtr et de l'OASA dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018, étant précisé que si la plupart des dispositions sont demeurées inchangées, tel n'est pas le cas, notamment, des art. 43 et 50 LEtr (ATA/1331/2020 du 22 décembre 2020 consid. 3a), pertinents en l'espèce. C______ étant né le ______ 2021, sa situation devra être examinée selon les dispositions de la LEI et de l'OASA dans leur teneur depuis le 1er janvier 2019 (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1).

5.2 Selon l'art. 3 annexe I ALCP, en relation avec l'art. 7 let. d ALCP, les membres de la famille d'une personne ressortissant d'une partie contractante ayant un droit de séjour ont le droit de s'installer avec elle, à condition que celle-ci dispose d'un logement approprié (par. 1). Sont notamment considérés comme membres de la famille, quelle que soit leur nationalité, son conjoint et leurs descendants de moins de 21 ans ou à charge (par. 2 let. a) ainsi que les ascendants de cette personne ou ceux de son conjoint qui sont à sa charge (par. 2 let. b).

5.3 Même fondé sur l'ALCP, le regroupement familial ne doit pas être autorisé sans réserve. Il faut que le citoyen de l'UE y donne son accord, que le parent de l'enfant soit autorisé à s'en occuper ou, en cas d'autorité parentale conjointe, ait obtenu l'accord de l'autre parent et qu'il existe une relation familiale minimale entre le parent en Suisse et l'enfant résidant à l'étranger. Sur ce dernier point, une vie familiale (sociale) doit avoir effectivement existé déjà avant le regroupement familial, les proches ne devant certes pas avoir habité ensemble, mais avoir vécu leur relation avec une intensité minimale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_25/2024 du 29 mai 2024 consid. 4.1 et les arrêts cités). Enfin, le regroupement familial doit paraître approprié au regard de la Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE ; RS 0.107) et ne pas être contraire au bien-être de l'enfant (ATF 136 II 177 consid. 3.2.2 et 3.2.3). Le but que doit poursuivre le regroupement familial découlant de l'ALCP est de réunir une famille et de lui permettre de vivre sous le même toit (arrêts du Tribunal fédéral 2C_875/2020 du 2 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_131/2016 du 10 novembre 2016 consid. 4.3).

5.4 Le droit de séjour et d'accès à une activité économique est garanti aux ressortissants des États signataires en vertu des art. 4 ALCP et 2 annexe I ALCP.

Les ressortissants des parties contractantes n’exerçant pas d’activité économique dans l’État d’accueil et qui ne bénéficient pas d’un droit de séjour en vertu d’autres dispositions du présent accord ont, pour autant qu’ils remplissent les conditions préalables requises dans le chap. V, un droit de séjour. Ce droit est constaté par la délivrance d’un titre de séjour (art. 2 para. 2 annexe I ALCP)

5.5 Le droit de séjour sur le territoire d'une partie contractante est garanti aux personnes n'exerçant pas d'activité économique selon les dispositions de l'annexe I relatives aux non actifs (art. 6 ALCP). Selon l'art. 24 annexe I ALCP, une personne ressortissant d'une partie contractante n'exerçant pas d'activité économique dans le pays de résidence reçoit un titre de séjour d'une durée de cinq ans au moins, à condition qu'elle prouve aux autorités nationales compétentes qu'elle dispose pour elle-même et les membres de sa famille de moyens financiers suffisants pour ne pas devoir faire appel à l'aide sociale pendant son séjour (par. 1 let. a) et d'une assurance-maladie couvrant l'ensemble des risques (par. 1 let. b). Les moyens financiers nécessaires sont réputés suffisants s'ils dépassent le montant en-dessous duquel les nationaux, eu égard à leur situation personnelle, peuvent prétendre à des prestations d'assistance (par. 2).

Les moyens financiers des ressortissants UE/AELE ainsi que des membres de leur famille sont réputés suffisants s'ils dépassent les prestations d'assistance qui seraient allouées en fonction des directives « Aide sociale : concepts et normes de calcul » (directives CSIAS), à un ressortissant suisse, éventuellement aux membres de sa famille, suite à la demande de l'intéressé et compte tenu de sa situation personnelle (art. 16 al. 1 OLCP). On considère que la condition de l'art. 16 al. 1 OLCP est remplie si les moyens financiers d'un citoyen suisse, dans la même situation, lui fermeraient l'accès à l'aide sociale (ATF 144 II 113 consid. 4.1 et les arrêts cités), les conditions posées à l'art. 24 § 1 annexe I ALCP servant à éviter de grever les finances publiques de l'État d'accueil (ATF 144 II 113 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_243/2015 du 2 novembre 2015 consid. 3.4.2).

5.6 Examinant la question de la libre circulation de parents d'enfants mineurs ressortissants UE/AELE, provenant notamment d'États tiers, le Tribunal fédéral s'est rallié à la jurisprudence dite « Zhu et Chen » (ATF 144 II 113 consid. 4.1 ; 142 II 35 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_375/2014 du 4 février 2015 consid. 3.3) qui, certes, dès lors qu'elle est postérieure à la date de signature de l'ALCP, ne doit pas être prise en considération en vertu de l'art. 16 para. 2 ALCP. Toutefois, dans le but d'assurer une situation juridique parallèle entre les États membres de la Communauté européenne, d'une part, et entre ceux-ci et la Suisse, d'autre part, il s'inspire des arrêts rendus par la Cour de justice de l'Union européenne (ci‑après : CJUE), pour autant que des motifs sérieux ne s'y opposent pas (ATF 136 II 5 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_574/10 du 15 novembre 2010 consid. 2.2.2).

Selon la jurisprudence dite « Zhu et Chen » précitée, la législation européenne relative au droit de séjour confère un droit de séjour de durée indéterminée au ressortissant mineur en bas âge d'un État membre qui est couvert par une assurance‑maladie appropriée et qui est à la charge d'un parent, lui‑même ressortissant d'un État tiers, dont les ressources sont suffisantes pour que le premier ne devienne pas une charge pour les finances publiques de l'État membre d'accueil (arrêt « Zhu et Chen », point 41). Cette pratique permet en outre au parent qui a effectivement la garde de cet enfant de séjourner avec lui dans l'État membre d'accueil (arrêt « Zhu et Chen », point 46 s. ; 144 II 113 consid. 4.1 ; 142 II 35 consid. 5.1).

Un droit de séjour autonome peut être reconnu à un enfant mineur en tant que ressortissant UE/AELE sans activité lucrative du fait que le parent, ressortissant d'un État tiers qui en a la garde, apporte, de par l'exercice d'une activité lucrative, les moyens financiers nécessaires pour ne pas devoir dépendre de l'aide sociale (art. 6 ALCP et 24 annexe I ALCP ; ATF 136 II 65 consid. 3.4). Par ce biais, le parent ressortissant d'un État tiers peut se prévaloir – par ricochet – d'un droit de séjour en Suisse (droit dérivé) du simple fait que la garde sur l'enfant UE/AELE lui a été accordée et qu'il prouve disposer des moyens financiers suffisants tels que prévus à l'art. 24 par. 1 annexe I ALCP (ATF 135 II 265 consid. 3.3 ; Cesla AMARELLE/Nathalie CHRISTEN/Minh Son NGUYEN, Migrations et regroupement familial, 2012, p. 89 et 90).

5.7 La chambre de céans a déjà examiné la question du droit autonome au séjour d'un enfant d'un ressortissant d'un pays membre UE/AELE à la lumière de l'analyse portant sur les art. 6 ALCP cum 24 annexe I ALCP notamment dans les arrêts ATA/176/2014 et ATA/177/2014 du 25 mars 2014. Dans son arrêt ATA/1242/2020 du 8 décembre 2020, elle a précisé que le droit dérivé du parent ayant la garde de l'enfant mineur bénéficiant d'un droit de séjour issu de l'ALCP ne pouvait être considéré comme subsidiaire par rapport à l'application du droit national (ATA/476/2021 du 4 mai 2021 consid. 6e). Dans un arrêt de 2021, elle a confirmé, en lien avec la situation d'une mère marocaine et de sa fille aînée, ressortissante française, que, sous l'angle de l'ALCP, deux conditions au sens de l'art. 6 ALCP devaient principalement être remplies afin de pouvoir bénéficier d'un titre de séjour, à savoir disposer de moyens financiers suffisants pour ne pas dépendre de l'aide sociale pendant le séjour et avoir une assurance-maladie couvrant l'ensemble des risques (ATA/476/2021 du 4 mai 2021 consid. 9a). La chambre de céans a repris ce même raisonnement dans un arrêt de 2022 concernant une mère de famille et de ses enfants, tous ressortissants espagnols (ATA/938/2022 du 20 septembre 2022).

5.8 En l'espèce, conformément à la jurisprudence rappelée ci-avant, la chambre de céans statuera sur la base de l'état de fait actuel.

Compte tenu du nombre relativement important de personnes touchées, directement ou indirectement, par la présente procédure, il apparaît nécessaire de rappeler au préalable la situation de chacune d'entre elles.

5.8.1 A______ (recourante), ressortissante kosovare, au bénéfice d’une autorisation de séjour valable du 5 juin 2009 au 4 juin 2014, est mariée à F______, ressortissant portugais (et donc d'un État membre de l'UE) au bénéfice d’une autorisation d’établissement sur le territoire suisse, valable jusqu'au 17 octobre 2014. De leur union est née le ______ 2012 B______ (onze ans), laquelle a obtenu la nationalité portugaise le 29 juin 2022. Les époux vivent séparés depuis le 1er novembre 2011. A______ exerce l'autorité parentale et la garde exclusive sur B______.

A______ est également la mère de C______, né le ______ 2021 (trois ans) et détenteur de la nationalité allemande (et donc ressortissant d'un État membre de l'UE). Le père de ce dernier est J______, ressortissant allemand au bénéfice d'une autorisation d'établissement valable jusqu'au 29 novembre 2028. Il est marié à P______ depuis le 4 juin 2021. A______ et J______ exercent l'autorité parentale conjointe sur C______, selon le document intitulé « déclaration concernant l'autorité parentale conjointe après la naissance » signé le 16 juin 2022 par les intéressés ; A______ exerce de manière exclusive le garde sur l'enfant.

A______ est domiciliée avec ses deux enfants au ______, rue D______, à E______. J______ habite avec son épouse à la rue Q______ à Genève. Selon les informations en possession de la chambre de céans, F______ vit actuellement au Portugal.

5.8.2 Cela étant posé, chacun des trois recourants est susceptible de se prévaloir de l'art. 3 par. 1 annexe 1 ALCP, A______ en raison de son mariage avec F______, B______ en raison de son lien de filiation avec F______ et enfin C______ en raison de son lien de filiation avec J______.

Il ressort du registre « Calvin » que l'autorisation d’établissement sur le territoire suisse de F______ n'est plus valable depuis le 18 octobre 2014 et aucun élément du dossier ne suggère qu'elle aurait été renouvelée. Par conséquent, l'intéressé n'a plus de droit de séjour en Suisse ; il n'y habiterait d'ailleurs plus selon les dernières informations données par le curateur des enfants. Dès lors, ni A______ ni B______ ne peuvent se prévaloir de l'art. 3 par. 1 annexe I ALCP pour fonder un droit de séjour en Suisse en raison de leur lien avec F______. Cette solution s'impose au demeurant d'autant plus que les époux sont séparés depuis plus de treize ans, que la reprise de la vie commune semble désormais impossible (A______ ayant allégué vouloir entamer une procédure de divorce et envisager de se marier avec J______), que F______ n'a jamais versé de pension alimentaire en faveur de son épouse ou de sa fille et, surtout, que rien dans le dossier ne permet de retenir qu'il aurait donné son accord au regroupement familial. Pour le reste, l'affirmation selon laquelle F______ entretiendrait des relations personnelles avec sa fille n'y change rien, étant au demeurant précisé qu'elle n'est pas étayée et du reste peu plausible (cf. infra consid. 7.5).

Quant à C______, il ne ressort pas du dossier que son père, qui détient sur lui l'autorité parentale mais pas la garde, aurait demandé le regroupement familial en sa faveur, ni qu'il aurait manifesté d'une quelconque manière une volonté d’instaurer une communauté familiale. Les éléments du dossier ne permettent pas non plus de retenir que C______ et son père vivraient déjà leur relation avec une intensité minimale, étant relevé que l'affirmation selon laquelle ils entretiendraient des relations personnelles très étroites n'est pas étayée. En outre, selon le registre « Calvin », J______ est marié à une autre femme que A______ et rien n'indique qu'il serait séparé d'elle, ce qui compromet très fortement en l'état tout regroupement familial sous le même toit avec son fils et, par la force des choses, avec la mère de celui-ci (A______) et la sœur de celui-ci (B______). Dès lors, C______ ne peut pas bénéficier d’un droit de séjour au titre du regroupement familial au sens de l’art. 3 annexe 1 ALCP avec son père.

Au vu de ce qui précède, aucun des trois recourants ne peut se prévaloir de l'art. 3 § 1 annexe 1 ALCP.

5.8.3 Se pose la question de savoir si les enfants de la recourante peuvent se prévaloir d'un droit de séjour de durée indéterminée au regard de la jurisprudence dite « Zhu et Chen », ce qui permettrait à l'intéressée de séjourner par ricochet avec eux en Suisse.

La recourante exerce la garde exclusive sur ses deux enfants. Il ressort des informations transmises par celle-ci qu'elle émarge à l'aide sociale, et ce depuis le 1er juillet 2015, et qu'elle ne travaille actuellement pas. Par conséquent, elle ne dispose pas des moyens financiers suffisants tels que prévus à l'art. 24 § 1 annexe I ALCP pour ne pas dépendre de l'aide sociale, étant précisé que l'aide financière que ses parents et ses frères lui apporteraient « un peu » et dont elle se prévaut n'y change rien, puisque cette aide ne lui permet de toute évidence pas de sortir de l'aide sociale. Elle ne peut ainsi pas faire reconnaître, par ricochet, un droit de séjour autonome à ses deux enfants mineurs.

Ceux-ci ne peuvent dès lors pas se prévaloir d'un droit de séjour de durée indéterminée au regard de la jurisprudence dite « Zhu et Chen ».

Le grief sera donc écarté.

6.             Les recourants se plaignent d'arbitraire dans l'application des art. 43 et 50 LEtr ainsi que 1 ss OASA, pour les mêmes motifs que ceux invoqués précédemment. Ils exposent également que toute leur famille, à l'exception de l'un des frères de la recourante, vivrait en Suisse. La réintégration de celle-ci au Kosovo serait impossible, dans la mesure où elle aurait tissé des liens profonds avec la Suisse, où elle aurait réussi son intégration et vécu à Genève depuis l'âge de 23 ans sans discontinuer. Elle n'aurait plus de tissu familial au Kosovo et n'y aurait aucun ami ni aucun contact professionnel. Sa fille, née en Suisse, n'y aurait jamais vécu. Son départ porterait atteinte aux liens affectifs intenses existant entre sa fille et le père de celle-ci.

6.1 Selon l'art. 43 LEtr, le conjoint étranger du titulaire d’une autorisation d’établissement ainsi que ses enfants célibataires étrangers de moins de 18 ans ont droit à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité, à condition de vivre en ménage commun avec lui (al. 1). Les enfants de moins de douze ans ont droit à l’octroi d’une autorisation d’établissement (al. 3). L'art. 43 al. 6 LEI, dans sa teneur depuis le 1er janvier 2019, a la même teneur que l'art. 43 al. 3 LEtr.

Selon le ch. 6.3 de la Directive intitulée « I. Domaine des étrangers » du Secrétariat d'État aux migrations (SEM), dans sa version d'octobre 2013 actualisée le 1er juin 2024 (Directives LEI), qui, comme toute directive, ne lie pas le juge, mais dont celui-ci peut tenir compte pour assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré, pourvu qu'elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATA/45/2024 du 16 janvier 2024 consid. 5.7), un regroupement familial au titre de l’art. 43 LEI est possible lorsque le membre de la famille résidant en Suisse remplit toutes les conditions pour obtenir une autorisation d'établissement (durée du séjour, comportement), mais que celle-ci ne lui a pas encore été délivrée pour diverses raisons (retard dans le traitement du dossier, délai pour la production de documents).

Les enfants de moins de douze ans ont tout de suite le droit à l’octroi d’une autorisation d’établissement. Si les parents ne sont pas mariés mais vivent ensemble, l’enfant de moins de douze ans obtient l’autorisation d’établissement si le parent qui a la garde est au bénéfice de l’autorisation d’établissement (Directive LEI ch. 6.3.3. p. 119). En revanche, lorsque les parents ne font pas ménage commun, que l’autorité parentale est conjointe, mais que la garde est confiée exclusivement à un seul parent, l'enfant obtiendra le statut du parent avec lequel il fait ménage commun et qui détient la garde exclusive (Directive LEI ch. 6.1.2. p. 111 par renvoi de la page 119).

6.2 Selon l'art. 50 al. 1 let. a LEtr, après dissolution de la famille, le droit du conjoint et des enfants à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu des art. 42 et 43 subsiste lorsque l’union conjugale a duré au moins trois ans et l’intégration est réussie.

6.2.1 La limite légale de trois ans se calcule en fonction de la durée pendant laquelle les époux ont fait ménage commun en Suisse (ATF 136 II 113 consid. 3.3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1111/2015 du 9 mai 2016 consid. 4.1), soit depuis la date du mariage, à condition que la cohabitation ait lieu en Suisse, jusqu'à ce que les époux cessent d'habiter sous le même toit (arrêts du Tribunal fédéral 2C_594/2010 du 24 novembre 2010 consid. 3.1 ; 2C_195/2010 du 23 juin 2010 consid. 5.1). Il n'est pas nécessaire d'examiner la condition de la réussite de l'intégration lorsque l'union conjugale a duré moins de trois ans, les deux conditions étant cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 2C_352/2014 du 18 mars 2015 consid. 4).

6.2.2 Outre les hypothèses retenues à l'art. 50 al. 1 let. a LEtr, le droit au renouvellement de l'autorisation de séjour existe également si la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (art. 50 al. 1 let. b LEtr). Les raisons personnelles majeures visées à l'al. 1 let. b sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d'un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise (art. 50 al. 2 LEtr).

Lors de l'examen des raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr, les critères énumérés à l'art. 31 al. 1 OASA peuvent entrer en ligne de compte, même si, considérés individuellement, ils ne sauraient fonder un cas individuel d'une extrême gravité (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_822/2013 du 25 janvier 2014 consid. 5.2 ; ATA/981/2019 du 4 juin 2019 consid. 6b et l'arrêt cité).

Selon l'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur applicable au moment de la demande de renouvellement d'autorisation de séjour de la recourante et de sa fille, une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d’extrême gravité. Lors de l’appréciation, il convient de tenir compte notamment de l’intégration du requérant (let. a) ; du respect de l’ordre juridique suisse par le requérant (let. b) ; de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c) ; de la situation financière ainsi que de la volonté de prendre part à la vie économique et d’acquérir une formation (let. d) ; de la durée de la présence en Suisse (let. e) ; de l’état de santé (let. f); et des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).

Les critères énumérés par l'art. 31 al. 1 OASA pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération (directives LEI, ch. 5.6.12).

À elles seules, la longue durée du séjour et l'intégration (travail régulier, absence de condamnations et de dépendance à l'aide sociale) ne suffisent pas à rendre la poursuite du séjour imposable au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEI (ATA/192/2021 précité consid. 9 ; ATA/775/2018 du 24 juillet 2018 consid. 4d et les références citées). La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

Alternativement, la réintégration sociale dans le pays d'origine doit sembler fortement compromise. La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

6.2.3 Dans l'examen d'un cas de rigueur concernant le renvoi d'une famille, il importe de prendre en considération la situation globale de celle-ci. Dans certaines circonstances, le renvoi d'enfants peut engendrer un déracinement susceptible de constituer un cas personnel d'extrême gravité. D'une manière générale, lorsqu'un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d'origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l'état d'avancement de la formation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L'adolescence, une période comprise entre douze et seize ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4). Sous l'angle du cas de rigueur, il est considéré que cette pratique différenciée réalise la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par l'art. 3 al. 1 CDE (arrêts du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 ; 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; ATA/327/2024 du 5 mars 2024 consid. 4.6 et les arrêts cités).

6.3 En l'espèce, il apparaît d'emblée que la recourante et sa fille ne peuvent pas se prévaloir de l'art. 43 LEtr, leur mari et père, F______, ne bénéficiant plus d’une autorisation d’établissement en Suisse depuis le 17 octobre 2014.

Elles ne peuvent pas non plus se prévaloir d'un droit fondé sur l'art. 50 al. 1 let. a LEtr. En effet, comme déjà exposé, la recourante et son époux ne vivent plus sous le même toit depuis le 1er novembre 2011 à tout le moins. Par conséquent, et dans la mesure où ils se sont mariés le 5 juin 2009, leur vie commune a duré deux ans et cinq mois, soit moins de trois ans. Il n'est pas nécessaire d'analyser la seconde condition de l'art. 50 al. 1 let. a LEtr, soit celle de l'intégration réussie, dès lors que la première condition de cette disposition n'est pas remplie.

Sous l'angle du cas individuel d'extrême gravité, il est vrai que la recourante et sa fille vivent en Suisse depuis respectivement quinze et onze ans. Bien que leur séjour se soit déroulé en grand partie dans l'illégalité, cette durée n'est pas négligeable. B______ a en outre toujours vécu à Genève et y est scolarisée. Enfin, il ne ressort pas du dossier que la recourante aurait fait l'objet de condamnations pénales.

Toutefois, ces éléments sont insuffisants pour admettre un cas individuel d'extrême gravité, pour les motifs qui suivent.

Premièrement, l'intégration professionnelle de la recourante n'est pas exceptionnelle. En effet, Il ressort des pièces versées au dossier qu'elle a travaillé du 1er juin 2014 jusqu'à une date indéterminée (mais au maximum jusqu'au 30 mai 2015) pour G______ Sàrl (cf. contrat de travail du 1er juin 2014 ), du 1er juin 2015 au 31 août 2015 pour celle-ci (cf. contrat de travail du 1er juin 2015), puis du 1er février 2016 jusqu'à une date indéterminée (mais seulement quelques mois) pour H______ Sàrl (cf. contrat de travail du 29 janvier 2016), du 1er juin 2016 au 30 août 2016 pour G______ Sàrl (cf. promesse d'embauche du 23 mai 2016) ainsi que du 1er juin 2023 jusqu'au 31 septembre 2023 (cf. contrat d'engagement du 1er juin 2023) pour I______ Sàrl. En quinze ans de présence en Suisse, elle a ainsi travaillé un peu plus de deux ans uniquement, étant en outre précisé qu'elle ne travaille pas actuellement, qu'elle a admis, lors de l'audience du 14 octobre 2021, ne plus avoir de travail « depuis cinq ans » à ce moment-là et qu'elle semble rencontrer des difficultés à garder ses emplois.

Deuxièmement, elle est assistée des services sociaux, selon ses propres déclarations, et émarge à l'aide sociale, et ce depuis 2015, si bien que son intégration sociale ne saurait être considérée comme particulièrement poussée, ni même comme réussie.

Troisièmement, sa maîtrise du français n'est pas exceptionnelle. Malgré une présence en Suisse de quinze ans, elle a atteint le niveau A2 à l'oral et le niveau A1 à l'écrit. Elle a du reste dû faire appel à un interprète lors de ses auditions devant la chambre de céans, quand bien même elle a été à même de répondre à des questions simples en français.

Quatrièmement, elle est âgée de 38 ans et est en bonne santé, à teneur des éléments au dossier. Elle a passé dans son pays d'origine la plus grande partie de son existence et y a notamment vécu toute son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d’adulte jusqu’à l’âge de 23 ans. Ainsi, outre qu’elle en parle la langue, elle y a suivi sa scolarité et est au fait des us et coutumes. L'un de ses frères s'y trouve encore, si bien qu'elle ne saurait se prévaloir de l'absence de tissu familial. Contrairement à ce qu'elle prétend, la présence de ses parents et de ses autres frères et sœurs à Genève n'est pas déterminante, compte tenu de son âge, du fait qu'elle a déjà fondé sa propre famille et du fait que rien ne suggère qu'elle se trouverait dans un rapport de dépendance particulier avec eux. Il n'est pas non plus pertinent qu'elle n'ait plus aucun contact professionnel au Kosovo, puisque rien n'indique qu'elle sera empêchée d'y nouer de nouvelles relations.

Enfin, si la chambre de céans ne peut ignorer le fait que B______ a toujours vécu à Genève, et ce pendant onze ans, et qu'elle se rapproche de l'adolescence, sans toutefois avoir entamé cette période, les recourants n'allèguent pas, ni a fortiori ne prouvent, que la réussite scolaire de l'intéressée serait remarquable ni que celle-ci serait particulièrement attachée ou intégrée à la vie sociale genevoise, par exemple par la pratique d'un sport en club, celle d'un instrument dans une école de musique ou la participation régulière à d'autres activités sociales et culturelles. En outre, en cas de renvoi de sa famille, elle sera accompagnée de sa mère et de son petit frère, si bien qu'elle ne sera pas livrée à elle-même. Par ailleurs, elle parle l'albanais, ce qui facilitera son intégration. Pour le surplus, son départ n'est pas susceptible de porter atteinte aux faibles liens qu'elle entretient avec son père, ce d'autant plus que celui‑ci ne réside pas à Genève.

Par conséquent, la chambre de céans ne peut considérer que les liens de la recourante et de sa fille avec la Suisse sont si étroits que l’on ne saurait exiger d’elles qu’elles retournent dans leur pays d’origine. Rien n'indique d'ailleurs que leur réintégration sociale serait gravement compromise, ni même compromise.

Quant à C______, dont le père est au bénéfice d'une autorisation d'établissement, ses parents ne sont pas mariés et ne font pas ménage commun, si bien qu'il ne peut pas obtenir une autorisation de séjour fondée sur l'art. 43 al. 1 LEI. Si l'autorité parentale sur l'intéressé est conjointe, sa garde est en revanche confiée exclusivement à sa mère. Par conséquent, conformément à la directive LEI, il doit obtenir le même statut que celle-ci et ne saurait ainsi se prévaloir d'un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour fondée sur l'art. 43 al. 6 LEI, malgré son âge inférieur à douze ans.

En outre, vu son âge (trois ans), il n'est pas encore scolarisé et n'est donc pas encore intégré socialement. Ses liens prépondérants affectifs sont ceux qu'il entretient avec sa mère. Ainsi, quand bien même il n'a jamais vécu au Kosovo, son départ de Suisse ne saurait constituer un déracinement.

Le grief sera par conséquent écarté.

7.             Les recourants se plaignent de la violation de l'art. 8 CEDH, pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment.

7.1 Un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille. Il peut invoquer la protection de sa vie familiale en lien avec un membre de sa famille, pour autant qu'il soit notamment au bénéfice d'une autorisation d'établissement (ATF 146 I 185 consid 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_877/2022 du 2 mars 2023 consid. 1.1) Les relations familiales qui peuvent fonder un droit à une autorisation sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (ATF 144 II 1 consid. 6.1 ; 140 I 77 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2021 du 27 juillet 2022 consid. 9.1). Les liens familiaux doivent être particulièrement forts d'un point de vue affectif et économique, lorsque cette relation ne pourrait pratiquement pas être maintenue en raison de la distance qui sépare le pays de résidence de l'enfant du pays d'origine de son parent, et que l'étranger a fait preuve en Suisse d'un comportement irréprochable. Ces exigences doivent être appréciées ensemble et faire l'objet d'une pesée des intérêts globale (ATF 144 I 91 consid. 5.1 et les références citées).

Le lien affectif particulièrement fort est tenu pour établi lorsque les contacts personnels sont effectivement exercés dans le cadre d'un droit de visite usuel selon les standards d'aujourd'hui (en Suisse romande, il s'agit d'un droit de visite d'un week-end toutes les deux semaines et durant la moitié des vacances) ; seuls importent les liens personnels, c'est-à-dire l'existence effective de liens familiaux particulièrement forts d'un point de vue affectif et non pas seulement les décisions judiciaires ou les conventions entre parents se répartissant l'autorité parentale et la garde des enfants communs (ATF 144 I 91consid. 5.2.1 et les arrêts cités).

Le lien économique est particulièrement fort lorsque l'étranger verse effectivement à l'enfant des prestations financières dans la mesure décidée par les instances judiciaires civiles (ATF 144 I 91 consid. 5.2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_947/2015 du 10 mars 2016 consid. 3.5).

7.2 Pour des motifs du droit de la famille (art. 25 al. 1 et 301 du code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210), l'enfant mineur étranger partage en principe le sort du parent qui en a la garde. Il doit, le cas échéant, quitter le pays, lorsque ce parent ne dispose pas ou plus d'un titre de séjour en Suisse et que l'on peut exiger le départ de l'enfant (ATF 143 I 21 consid. 5.4 ; 139 II 393 consid. 4.2.3). Le parent qui n'a pas l'autorité parentale ni la garde de l'enfant ne peut d'emblée entretenir une relation familiale avec celui-ci que de manière limitée, en exerçant le droit de visite dont il bénéficie (ATF 144 I 91 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2021 du 27 juillet 2022 consid. 9.3.1).

7.3 Une ingérence dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’art. 8 CEDH est possible aux conditions de l’art. 8 par. 2 CEDH, pour autant qu’elle soit prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Le refus d’octroyer ou de prolonger une autorisation de séjour fondé sur l’art. 8 par. 2 CEDH suppose une pesée des intérêts en présence et l’examen de la proportionnalité de la mesure (ATF 139 I 145 consid. 2.2 ; 135 II 377 consid. 4.3). Cet examen se confond avec celui imposé par l’art. 96 LEI (arrêt du Tribunal fédéral 2C_419/2014 du 13 janvier 2015 consid. 4.3 ; ATA/1307/2023 du 5 décembre 2023 consid. 2.2 et l'arrêt cité).

Le Tribunal fédéral reconnaît depuis longtemps qu'indépendamment de l'existence de relations familiales, le refus d'octroyer ou de renouveler une autorisation de séjour, impliquant une mesure d'éloignement de Suisse, peut, dans certaines circonstances particulières, violer l'art. 8 CEDH, qui garantit le droit au respect non seulement de la vie familiale, mais aussi de la vie privée. La question de l'existence d'un droit à demeurer en Suisse au bénéfice d'une autorisation de séjour en raison d'un enracinement particulier dans le pays implique de se demander, dans chaque cas, si la personne étrangère concernée entretient des relations privées de nature professionnelle ou sociale particulièrement intenses en Suisse, allant au-delà d'une intégration normale (ATF 149 I 207 consid. 5.3.1 et les arrêts cités).

Lorsqu'un étranger réside légalement depuis plus de dix ans dans notre pays, il y a lieu de présumer que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour que seuls des motifs sérieux puissent mettre fin à son séjour dans ce pays (ATF 144 I 266 consid. 3.9). Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance – par exemple en raison de l'effet suspensif attaché à des procédures de recours – ne revêtent que peu de poids et ne sont par conséquent pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2021 du 27 juillet 2022 consid. 9.1).

7.4 Dans un arrêt de 2023 publié aux ATF 149 I 207 (arrêt du Tribunal fédéral 2C_734/2022 du 3 mai 2023), le Tribunal fédéral a posé le principe selon lequel il est possible, à certaines conditions, d'invoquer le droit au respect de la vie privée pour obtenir une autorisation de séjour à la suite d'un séjour illégal en Suisse de longue durée. Ainsi, si la durée de la résidence légale est inférieure à dix ans, l'étranger doit avoir fait preuve d'une forte intégration (intégration particulièrement réussie) en Suisse pour se prévaloir de manière soutenable de l'art. 8 CEDH sous l'angle de son droit à la vie privée (ATF 144 I 266 consid. 3.8 et 3.9; arrêt du Tribunal fédéral 2C_178/2024 du 31 mai 2023 consid. 1.3.2).

Dans l'arrêt 2C_734/2022 précité, le Tribunal fédéral a eu à connaître de la situation d’un ressortissant ivoirien ayant vécu en Suisse pendant douze ans mais n'ayant pas accompli les démarches pour maintenir son titre de séjour, lequel s’était éteint en 2007, et ayant ensuite vécu dans la clandestinité durant dix années. Son long séjour dans le pays impliquait d’examiner s'il ne pouvait prétendre à l'octroi d'un titre de séjour en raison d'une intégration particulière à Genève. Cela revenait à se demander si la personne entretenait des relations privées de nature professionnelle ou sociale particulièrement intenses en Suisse et dont le renvoi du pays ne se justifiait pas au regard des intérêts en présence. Retenant que l’intéressé avait, pendant son séjour « illégal », été condamné à plusieurs reprises, notamment pour violation de son obligation d'entretien, et avait accumulé des dettes totalisant plus de CHF 100'000.- sans plus jamais exercer aucune activité professionnelle, le Tribunal fédéral a considéré que quand bien même il n’avait pas émargé à l’aide social, il n'était pas possible de retenir qu’il était particulièrement bien intégré en Suisse. Certes, l'intéressé avait tissé des liens d'amitié en Suisse, notamment au sein des différentes églises dont il avait été membre. Cela n'avait toutefois rien d'extraordinaire après un séjour de près de trente ans en Suisse, dont il convenait du reste de relativiser l'importance afin de ne pas encourager les étrangers à vivre dans notre pays sans titre de séjour et de ne pas valider indirectement des comportements tendant à mettre l'État devant le fait accompli (ATF 149 I 207 consid. 5.6 et les arrêts cités).

7.5 En l'espèce, sous l'angle du droit à la protection de la vie familiale, rien dans le dossier ne permet de retenir que le lien affectif et économique entre C______ et son père serait particulièrement fort. En effet, d'une part, bien que les recourants soutiennent que l'enfant entretiendrait des relations personnelles très étroites avec son père, ces allégations ne sont pas étayées. On ignore la fréquence de ces relations, en particulier les modalités d'un éventuel droit de visite du père, les recourants ne donnant aucune information écrite sur ce point et se limitant à demander leur comparution personnelle sans toutefois expliquer pourquoi ils ne pourraient pas fournir des renseignements écrits. Nonobstant les dires des intéressés, il semble douteux que J______ habite dans la même commune (E______) que son fils, puisqu'il ressort du registre « Calvin » que l'intéressé est domicilié à la rue Q______, en ville de Genève. Cet élément, purement spatial, ne suffirait au demeurant pas à lui seul à établir l'existence d'un lien affectif particulièrement fort, ni même fort, entre le père et son fils.

D'autre part, les recourants n'allèguent pas que J______ verserait à son fils des prestations financières et aucun élément du dossier ne permet de le retenir.

C______ ne peut donc pas se prévaloir du droit au respect de sa vie familiale, en relation avec son père, au sens de l'art. 8 CEDH. Il en va de même pour B______, en relation avec son père, ce dernier ne vivant plus en Suisse et n'ayant pour le surplus jamais versé de pension alimentaire en sa faveur. Rien dans le dossier ne permet d'ailleurs de retenir que B______ et son père entretiendraient des relations personnelles. Le fait que l'intéressé ne vive pas à Genève, qu'il n'ait pas tenu son engagement de participer aux démarches visant à l'obtention de la nationalité portugaise de sa fille, qu'il ne la considère pas, selon les déclarations de Me DESCHAMPS devant la chambre de céans le 14 octobre 2021, comme son enfant et que les recourants soient dans l'impossibilité d'indiquer avec certitude où il vit suggère fortement le contraire.

Sous l'angle du droit au respect de la vie privée, les éléments apportés par les recourants permettent de retenir que A______ a séjourné sans discontinuité en Suisse depuis 2009 jusqu'à maintenant. Elle y a séjourné de façon légale jusqu'au 4 juin 2014 puis au bénéfice d'une tolérance jusqu'à maintenant. Bien que la durée de son séjour en Suisse (quinze ans) est longue, elle ne l'est toutefois pas particulièrement, au regard notamment de celle (27 ans) de la personne dont la situation a fait l'objet de l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_734/2022 précité. Elle doit en outre être relativisée du fait que la majeure partie de son séjour, soit depuis le 4 juin 2014, a été effectuée au bénéfice d'une simple tolérance, en raison notamment de la longue suspension de la procédure.

Par ailleurs, et comme cela vient d'être relevé, la recourante ne peut pas se prévaloir d'entretenir des relations privées, de nature professionnelle ou sociale particulièrement intenses en Suisse, allant au-delà d'une intégration normale. Il sera rappelé qu'elle a travaillé un peu plus de deux ans uniquement (étant précisé qu'elle ne travaille pas actuellement) en quinze ans de présence en Suisse, qu'elle émarge à l'aide sociale, et ce depuis 2015, et ne maîtrise pas notablement le français. Ses enfants sont mineurs et elle en a la garde, si bien qu'ils suivront, quelle que soit l'issue du litige, son sort et ne seront pas séparés d'elle.

Enfin, bien que B______ soit socialement intégrée et âgée d'onze ans, elle est encore mineure et doit par conséquent partager le sort de sa mère, étant rappelé que, pour les motifs qui ont déjà été évoqués (cf. supra consid. 6.3), son départ de Suisse est exigible.

En définitive, l’examen des circonstances et la pesée des intérêts en présence, dont ressort la prépondérance de l’absence d’intégration professionnelle et économique de la recourante par rapport à la durée de son séjour et aux difficultés mineures que la famille pourrait rencontrer en cas de renvoi au Kosovo, ne font pas apparaître que le refus d’une autorisation de séjour violerait l'art. 8 CEDH ou consacrerait un abus du pouvoir d’appréciation de l’OCPM.

Le grief sera donc écarté.

8.             Reste encore à examiner si les conditions permettant l’exécution du renvoi des recourants sont remplies.

8.1 Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEtr, qui est resté inchangé malgré la modification du 1er janvier 2019, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel l’autorisation de séjour est refusée ou dont l’autorisation n’est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d’une demande d’autorisation (ATA/764/2024 du 25 juin 2024 consid. 4.1).

8.2 Selon l'art. 83 LEtr, l’exécution n’est pas possible lorsque l’étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d’origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (al. 2). L’exécution n’est pas licite lorsque le renvoi de l’étranger dans son État d’origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3).

L'art. 83 al. 3 LEtr vise notamment l'étranger pouvant démontrer qu'il serait exposé à un traitement prohibé par l'art. 3 CEDH ou l'art. 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 (Conv. torture - RS 0.105 ; arrêt du TAF E-7712/2008 du 19 avril 2011 consid. 6.1 ; ATA/801/2018 du 7 août 2018 consid. 10c et l'arrêt cité).

Le renvoi n’est pas raisonnablement exigible s’il met concrètement en danger l’étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEtr).

8.3 En l'espèce, il ne ressort pas de la procédure que le renvoi des recourants se heurterait à des obstacles d'ordre technique et serait ainsi matériellement impossible au sens de l'art. 83 al. 2 LEtr, ce qu’ils ne font d'ailleurs pas valoir. En revanche, ils se prévalent à tort du fait que leur renvoi serait impossible au motif que toute la famille de A______ vivrait en Suisse, puisqu'un tel élément ne constitue pas un critère permettant d'apprécier le caractère possible de l'exécution d'un renvoi au sens de l'art. 83 al. 2 LEtr. L'exécution du renvoi est donc possible.

En outre, les recourants ne soutiennent pas que leur renvoi les exposerait à un traitement prohibé par l'art. 3 CEDH, étant relevé que leur renvoi aurait lieu au Kosovo, pays où ils ne courent aucun risque particulier.

Les conditions permettant l’exécution du renvoi des recourants sont donc remplies.

Mal fondé, le recours sera ainsi rejeté.

9.             Nonobstant l'issue du litige, aucun émolument ne sera mis à la charge des recourants, qui plaident au bénéfice de l’assistance judiciaire (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 juin 2016 par A______ ainsi que B______ et C______, enfants mineurs agissant par Me Gilbert DESCHAMPS, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 mai 2016 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

 

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession des recourants invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Agrippino RENDA, avocat de A______, à Me Gilbert DESCHAMPS, curateur de B______ et C______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.