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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1967/2022

ATA/509/2024 du 23.04.2024 sur JTAPI/245/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1967/2022-PE ATA/509/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 avril 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Sophie BOBILLIER, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 mars 2023 (JTAPI/245/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1991, est ressortissant de la République populaire de Chine.

b. Il est arrivé à Genève le 2 novembre 2017 dans le but de poursuivre sa formation de percussionniste et obtenir un Bachelor of Arts en musique à la Haute école de Musique de Genève (ci-après : HEM). À cette fin, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) lui a délivré une autorisation de séjour pour études.

c. Il a ensuite obtenu le renouvellement de son autorisation de séjour, avec une échéance au 15 octobre 2021, afin de poursuivre ses études et obtenir un Master of Arts en interprétation musicale à la HEM.

d. Le 20 septembre 2021, il a sollicité de l'OCPM le renouvellement de son autorisation de séjour dans le but de suivre une formation auprès de la HEM lui permettant d'obtenir un Certificate of Advanced Studies (ci-après : CAS) en gestion de projets culturels et musicaux. Cette formation se déroulait sur deux semestres pour quinze crédits et il planifiait de poursuivre ses études visant l'obtention d'un Artist Diploma ou diplôme d'artiste interprète.

e. Le 24 mars 2022, l'OCPM l’a informé de son intention de refuser le renouvellement de son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse. Il n'avait pas démontré que son garant disposait des moyens financiers suffisants. Un délai de trente jours lui était imparti pour faire valoir ses observations, ce qu'il a fait le 21 avril 2022.

f. Le 20 avril 2022, A______ a sollicité de l'OCPM la délivrance d'un visa de retour afin de se rendre en France pour participer à des entretiens et des concours d'entrée pour des études artistiques.

g. Selon une attestation de la HEM du 10 juin 2022, A______ avait été admis pour suivre un Master of Arts en pédagogie musicale, orientation musique à l'école, lequel débuterait en septembre 2023. Cette formation se composait de quinze heures de cours hebdomadaires. En incluant le travail à domicile, particulièrement conséquent dans les études de musique, ainsi que la présence aux divers projets et sessions de musique d'ensemble, cela représentait des études à plein temps. D'après le plan d'étude, cette formation se déroulerait sur deux ans, avec une thèse, pour 120 crédits ECTS.

h. Par décision du 12 mai 2022, l'OCPM a refusé de renouveler l'autorisation de de A______ et a prononcé son renvoi de Suisse.

La formation qu'il visait se déroulait sur deux semestres pour quinze crédits et n'était pas considérée comme étant une formation à temps complet, celle-ci comportant moins de vingt heures de cours par semaine. En outre, le motif de cette demande de renouvellement de l'autorisation de séjour pour études n'était pas justifié. Dans le contexte de la politique migratoire menée par les autorités suisses, il convenait de tenir compte de l'évolution sociodémographique à laquelle la Suisse faisait face, tout en ne perdant pas de vue que l'admission d'un étranger était une décision autonome appartenant à tout État souverain, sous réserve des obligations de droit international public.

Le dossier ne faisait pas apparaître que l'exécution de son renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée. Un délai au 15 juillet 2022 lui était imparti pour quitter le territoire.

B. a. Par acte du 13 juin 2022, A______ a formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation et à ce qu'une autorisation de séjour lui soit octroyée. Subsidiairement, une autorisation de séjour temporaire jusqu'à l'issue de sa formation en septembre 2024 devait lui être délivrée.

C'était à juste titre que la décision querellée ne retenait plus qu'il n'avait pas démontré que son garant disposait des moyens financiers suffisants pour assurer son entretien, une attestation de garantie financière ayant été produite.

L'autorité considérait, sur la base des directives et commentaires du SEM, domaine des étrangers (ci-après : directives LEI), que la condition de la formation continue n'était pas remplie car le CAS qu'il suivait ne se composait que de quinze crédits ECTS en deux semestres et ne pouvait pas être considérée à temps complet. Or, les directives LEI n'avaient pas force de loi. En outre, ce CAS était axé sur l'économie, le marketing et le droit. Il n'avait jamais étudié ces matières et avait besoin de plus d'heures d'études. L'OCPM ne prenait pas en compte la lourde charge de travail requise par cette formation.

La condition de l'intérêt de la Suisse à promouvoir la culture artistique serait satisfaite si son autorisation était renouvelée, dès lors qu'il participait à la promotion de la musique notamment chinoise à travers de nombreux et célèbres événements. Il était en outre responsable des affaires européennes du festival PAS-China.

Le renouvellement de son autorisation de séjour lui permettrait de s'intégrer dans le monde professionnel en alliant l'enseignement à la promotion de la culture. Il souhaitait poursuivre sa formation par un master de pédagogie musicale proposé par la HEM afin de devenir enseignant. À ce propos, il avait souffert de tendinites, qui l'avaient obligé à reporter son récital de Bachelor du 13 juin 2019 et l'avaient empêché de participer à une audition le 24 juin 2021. Il avait également dû reporter son audition pour le concours d'entrée en formation au CAS. En outre, vu le contexte sanitaire, la promotion de la culture en Chine n'était pas possible, ce qui ne lui permettrait pas d'exercer sa profession dans son pays. L'OCPM avait donc violé le principe de proportionnalité.

L'exécution de son renvoi était impossible en raison des annulations des vols vers la Chine durant la pandémie.

La décision litigieuse prononçait son renvoi au 15 juillet 2022, alors qu’il devait présenter sa soutenance en vue de l'obtention de son CAS le 30 septembre 2022. L'OCPM n'avait pas pris en compte cet élément.

b. Le 12 août 2022, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

A______ était arrivé en Suisse en novembre 2017, pour étudier auprès de la HEM et avait fréquenté avec succès les filières Bachelor of Arts en musique et Master of Arts en interprétation musicale. Depuis le dépôt de sa demande de renouvellement, il avait suivi des études en gestion de projets culturels et musicaux auprès de la HEM, la soutenance de son travail de certificat étant prévue pour le 30 septembre 2022. Ses nouveaux projets d'études avancées dans le cadre de son recours, à savoir obtenir un Master of Arts en pédagogie musicale, ne faisaient pas partie de son plan d'étude initial. Il n'avait par ailleurs pas démontré que cette spécialisation devait impérativement s'effectuer en Suisse. Le but de son séjour avait donc été atteint. Enfin, l'exécution de son renvoi vers la Chine était possible.

c. Le 21 octobre 2022, A______ a répliqué.

Depuis le dépôt de son recours, il avait soutenu avec succès son CAS. En septembre 2022, il avait commencé le Master of Arts en Pédagogie musicale avec orientation musique à l'école. Cette formation complémentaire était en adéquation avec son plan d'étude et lui permettrait de postuler en tant que professeur de musique à son retour en Chine. Cette reconversion était essentielle dès lors que son état de santé s'était détérioré depuis le dépôt du recours. Pour atteindre le but visé par la première autorisation de séjour pour études, soit celui de poursuivre une formation lui permettant à terme d'exercer dans le domaine des percussions, ce second Master of Arts en pédagogie musicale était capital et s'inscrivait dans la continuité de son projet d'étude initial.

Cette formation complémentaire n'existait pas en Chine. Les études de pédagogie musicale dispensées par la HEM constituaient une formation pointue garantissant un niveau d'excellence dans les domaines de la transmission et de la création. Ce cursus bénéficiait d'une renommée internationale, reconnue par les conservatoires chinois. S'il devait rentrer en Chine avant d'avoir achevé son Master, il ne pourrait pas y reprendre de formation équivalente. Sa reconversion s'en trouverait menacée, ce d'autant que les systèmes d'éducation chinois et suisse étaient très différents.

Il avait également suivi un module de cours de piano et poursuivait ses activités artistiques extra-scolaires.

Depuis le dépôt de son recours, son état de santé s'était détérioré, ses tendinites du poignet et de l'épaule droite étant devenues chroniques. Il existait donc une nécessité médicale de réorientation professionnelle.

d. Par jugement du 6 mars 2023, le TAPI a rejeté le recours.

Le recours était devenu sans objet s’agissant du renouvellement de son autorisation de séjour pour études afin de pouvoir obtenir un CAS en études de projets culturels et musicaux, dès lors qu’il avait entre-temps obtenu ce titre. Il convenait cependant d’entrer en matière, par économie de procédure, sur la conclusion subsidiaire, étendant le bénéfice de l’autorisation de séjour au Master of Arts entamé en septembre 2022, dès lors que l’OCPM s’était déterminé à son propos.

A______ n’avait pas de droit à l’octroi d’une autorisation de séjour. Sa nouvelle formation ne faisait pas partie de son plan d’études initial. Il ne démontrait pas que la reconversion vers l’enseignement était impossible en Chine. Il avait mis les autorités devant le fait accompli en entreprenant une nouvelle formation sans attendre d’avoir son permis.

L’exécution de son renvoi vers la Chine était possible. Le grief relatif au caractère disproportionné de la date impartie était devenu sans objet, celle-ci était passée. L’autorité lui fixerait une nouvelle date de départ une fois la décision en force.

C. a. Par acte remis à la poste le 24 avril 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce qu’une autorisation de séjour lui soit délivrée. Subsidiairement, une autorisation temporaire devait lui être délivré jusqu’à l’issue de sa formation en septembre 2024.

La détérioration de son état de santé l’avait obligé à entreprendre une reconversion partielle vers l’enseignement. La formation poussée d’enseignement musical délivrée par la HEM n’avait pas son équivalent en Chine. Retourner en Chine pour ce changement de carrière serait très difficile en raison des différences entre les systèmes d’enseignement suisse et chinois. L’obtention de son Master of Arts en pédagogie musicale était prévue pour juillet 2024. Ses enseignants témoignaient de ses qualités et de son fort potentiel. Il créait des passerelles entre les cultures occidentale et chinoise. Il s’établirait en Chine au terme de ses études. Il n’entendait pas éluder les règles sur l’octroi de permis et totaliserait moins de huit ans en Suisse au terme de sa formation en juillet 2024.

Son intérêt personnel à achever la reconversion professionnelle imposée par son état de santé et l’intérêt public de la Suisse à promouvoir la diversité culturelle du pays devaient l’emporter et conduire à autoriser exceptionnellement sa réorientation.

b. Le 24 mai 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Le 21 juillet 2023, A______ a persisté dans ses conclusions.

B______, directeur du département de pédagogie musicale au haut conservatoire de musique de Chine avait confirmé dans un courrier du 13 juillet 2023 que la formation dispensée en Chine était incomparable avec le master en pédagogie délivré par la HEM, lequel était reconnu pour enseigner en Chine. Le master en pédagogie musicale chinoise lui serait inaccessible : en l’état, il devrait d’abord entamer un troisième bachelor en pédagogie musicale pour y accéder, ce qui correspondait à une formation de sept ans au total, si bien qu’il ne pourrait accéder au monde du travail avant l’âge de 39 ans.

B______ lui avait en outre indiqué que le département de pédagogie du haut conservatoire ouvrait deux places d’enseignant en 2024 pour donner des cours de « musique à l’école » aux étudiants de bachelor. Le département était très intéressé par les compétences qu’il avait acquises à la HEM et sa double formation dans l’interprétation et la pédagogie. La place lui serait offerte lorsqu’il aurait obtenu son master à Genève en juin 2024.

C______, administrative manager du Beijing Drum Tide Percussion Center, lui avait offert une place d’enseignant de percussion de trois ans dès septembre 2024.

Le Professeur D______, directeur du département de musique traditionnelle au haut conservatoire de musique de Chine et président du PAS-China, dans lequel il avait longtemps œuvré, le considérait comme très compétent et lui réservait une place dans le personnel rémunéré lorsqu’il aurait obtenu son master.

Son retour en Chine au terme de sa formation était ainsi garanti. La prolongation de son autorisation de séjour jusqu’au terme de sa formation était proportionnée et lui éviterait aussi bien de devoir reprendre une formation complète en Chine que de perdre trois opportunités d’embauche.

d. Le 14 août 2023, A______ a encore produit une attestation d’E______, professeur à la HEM et coordinateur du master en pédagogie orientation musique à l’école, selon laquelle il était courant que les étudiants entament un master en pédagogie à la suite d’un master en interprétation musicale, car celui-ci offrait une vraie formation d’enseignant-musicien, étant observé que la carrière de musicien impliquait bien souvent la conciliation entre vie d’enseignant et vie d’interprète. Sa formation s’inscrivait avec cohérence dans le plan d’études soumis aux autorités migratoires et sa présence n’empêchait pas d’autres étudiants d’y prendre part.

e. Le 7 novembre 2023, le juge délégué a entendu les parties.

ea. Le recourant a indiqué qu’il achèverait sa formation musicale en juin 2024. Il souffrait toujours d’inflammations qui limitaient sa capacité à accomplir de longues performances musicales. Une fois son master obtenu en juin 2024, il repartirait aussitôt en Chine. Le centre de percussions de Beijing l’avait en effet engagé comme enseignant pour une durée de trois ans à dater du 1er septembre 2024. Les deux autres promesses d’embauche qu’il avait documentées étaient toujours d’actualité. Poursuivre en Chine la formation qu’il achevait en Suisse se heurterait à des obstacles, notamment l’obligation de refaire tout le cursus du baccalauréat ainsi que son âge. Il pourrait en revanche obtenir la reconnaissance en Chine du master qu’il obtiendrait en juin 2024.

eb. L’OCPM a persisté dans ses conclusions.

f. Le 19 décembre 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions.

Il produisait les pièces confirmant ses déclarations lors de son audition.

g. Le 15 janvier 2024, l’intimé a persisté dans ses conclusions.

h. Vu les circonstances particulières d’espèce, il s’engageait à fixer au recourant un délai de départ au 31 juillet 2024 afin qu’il puisse parachever sa formation et organiser son retour en Chine.

i. Le 19 février 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions.

Sa formation s’achèverait dans moins de quatre mois et il quitterait la Suisse pour la Chine aussitôt son master obtenu.

j. Le 22 février 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Bien qu’il n’y conclue pas formellement, le recourant propose sa comparution personnelle.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1). Le droit d’être entendu n'implique pas le droit à l’audition orale ni à celle de témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

2.2 En l’espèce, le recourant a été entendu par la chambre de céans, si bien que sa conclusion est devenue sans objet.

3.             Le recours porte sur la conformité au droit de la décision de refus de renouveler l’autorisation de séjour pour études du recourant et prononçant son renvoi de Suisse.

3.1 Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). La chambre administrative ne connaît pas de l'opportunité d'une décision prise en matière de police des étrangers lorsqu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 a contrario de la loi d'application de la LEtr du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

3.2 La loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et ses ordonnances, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI).

3.3 Aux termes de l'art. 27 al. 1 LEI, un étranger peut être admis en vue d'une formation ou d'un perfectionnement si la direction de l'établissement confirme qu'il peut suivre la formation ou le perfectionnement envisagés (let. a), s'il dispose d'un logement approprié (let. b), s'il dispose des moyens financiers nécessaires (let. c), et s'il a un niveau de formation et les qualifications personnelles requis pour suivre la formation ou le perfectionnement prévus (let. d).

Ces conditions étant cumulatives, une autorisation de séjour pour l'accomplissement d'une formation ne saurait être délivrée que si l'étudiant étranger satisfait à chacune d'elles (arrêt du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C 1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 5.3 ; ATA/40/2019 du 15 janvier 2019 consid. 6).

L'art. 27 LEI est une disposition rédigée en la forme potestative (ou « Kann‑Vorschrift »). Ainsi, même dans l'hypothèse où toutes ces conditions sont réunies, l'étranger n'a pas droit à la délivrance d'une autorisation de séjour, à moins qu'il ne puisse se prévaloir d'une disposition particulière du droit fédéral ou d'un traité lui conférant un tel droit (ATF 135 II 1 consid. 1.1 et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_167/2015 du 23 février 2015 consid. 3). Autrement dit, l'autorisation doit être refusée lorsque ces conditions ne sont pas remplies ; lorsqu'elles le sont, l'autorité n'en dispose pas moins d'un large pouvoir d'appréciation pour statuer sur la requête, dont elle est tenue de faire le meilleur exercice en respectant les droits procéduraux des parties (arrêts du TAF F‑6364/2018 du 17 mai 2019 consid. 8.1 ; C-7279/2014 du 6 mai 2015 consid. 7.1).

3.4 À teneur de l'art. 23 al. 2 OASA, les qualifications personnelles – mentionnées à l'art. 27 al. 1 let. d LEI – sont suffisantes notamment lorsqu'aucun séjour antérieur, aucune procédure de demande antérieure, ni aucun autre élément n'indique que la formation ou le perfectionnement invoqués visent uniquement à éluder les prescriptions générales sur l'admission et le séjour des étrangers.

Une formation ou une formation continue est en principe admise pour une durée maximale de 8 ans. Des dérogations peuvent être accordées en vue d’une formation ou d’une formation continue visant un but précis (art. 23 al. 3 OASA).

L'étranger doit également présenter un plan d'études personnel et préciser le but recherché (ATA/651/2017 du 13 juin 2017 consid. 6 ; ATA/457/2016 du 31 mai 2016 consid. 5 ; ATA/208/2015 du 24 février 2015 consid. 10 ; Directives LEI d’octobre 2013 ch. 5.1.1).

À la suite de la modification de l'art. 27 LEI intervenue avec effet au 1er janvier 2011, l'absence d'assurance de départ de Suisse de l'intéressé au terme de sa formation ne constitue plus un motif justifiant à lui seul le refus de délivrance d'une autorisation de séjour pour études (arrêts du TAF C-4647/2011 du 16 novembre 2012 consid. 5.4 ; C-7924/2010 du 7 mars 2012 consid. 6.3.1). Néanmoins, cette exigence subsiste en vertu de l'art. 5 al. 2 LEI, à teneur duquel tout étranger qui effectue un séjour temporaire en Suisse, tel un séjour pour études, doit apporter la garantie qu'il quittera la Suisse à l'échéance de celui-là (ATA/139/2015 du 3 février 2015 consid. 7 et les références citées). L'autorité administrative la prend en considération dans l'examen des qualifications personnelles requises au sens des art. 27 al. 1 let. d LEI et 23 al. 2 OASA (arrêts du TAF C-2291/2013 du 31 décembre 2013 consid. 6.2.1 ; C-4733/2011 du 25 janvier 2013 consid. 6.3).

3.5 Dans l'approche, la possession d'une formation complète antérieure (arrêts du TAF C-5718/2013 et C-2291/2013 précités ; C-3143/2013 du 9 avril 2014 consid. 3), l'âge de la personne demanderesse (arrêts du TAF C-5718/2013 et C‑3139/2013 précités), les échecs ou problèmes pendant la formation (arrêt du TAF C-3170/2012 du 16 janvier 2014 consid. 4), la position professionnelle occupée au moment de la demande (arrêt du TAF C-5871/2012 du 21 octobre 2013 consid. 3), les changements fréquents d'orientation (arrêt du TAF C-6253/2011 du 2 octobre 2013 consid. 4), la longueur exceptionnelle du séjour à fin d'études (arrêt du TAF C-219/2011 du 8 août 2013 consid. 2), sont des éléments importants à prendre en compte en défaveur d'une personne souhaitant obtenir une autorisation de séjour pour études (ATA/219/2017 du 21 février 2017 consid. 10).

3.6 Compte tenu de l'encombrement des établissements (écoles, universités, etc.) et de la nécessité de sauvegarder la possibilité d'accueillir aussi largement que possible de nouveaux étudiants sur le territoire de la Confédération, il importe de faire preuve de rigueur dans l'examen des demandes, tant et si bien que la priorité sera donnée aux jeunes étudiants désireux d'acquérir une première formation en Suisse. Parmi les ressortissants étrangers déjà au bénéfice d'une première formation acquise dans leur pays d'origine, seront prioritaires ceux qui envisagent d'accomplir en Suisse un perfectionnement professionnel constituant un prolongement direct de leur formation de base (arrêts du TAF C-5015/2015 du 6 juin 2016 consid. 7.1 ; C‑5718/2013 du 10 avril 2014 consid. 7.2.3).

3.7 La nécessité d'effectuer des études en Suisse ne constitue certes pas une des conditions posées à l'art. 27 LEI pour l'obtention d'une autorisation de séjour en vue d'une formation ou d'un perfectionnement. Cette question doit toutefois être examinée sous l'angle du large pouvoir d'appréciation conféré à l'autorité dans le cadre de l'art. 96 al. 1 LEI (arrêts du TAF F-6364/2018 précité consid. 8.2.2 ; C‑5436/2015 du 29 juin 2016 consid. 7.3).

3.8 Lors de l'admission d'étrangers, l'évolution sociodémographique de la Suisse est prise en considération (art. 3 al. 3 LEI). La Suisse ne peut accueillir tous les étrangers qui désirent y séjourner, que ce soit pour des séjours de courte ou de longue durée, raison pour laquelle la jurisprudence considère qu'il est légitime d'appliquer une politique restrictive d'admission (ATF 122 II 1 consid. 3a ; arrêt du TAF C-1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 6.1 ; ATA/677/2015 du 23 juin 2015 consid. 6a).

Compte tenu du grand nombre d'étrangers qui demandent à être admis en Suisse en vue d'une formation ou d'un perfectionnement, les conditions d'admission fixées à l'art. 27 LEI, de même que les exigences en matière de qualifications personnelles et envers les écoles (art. 23 et 24 OASA), doivent être respectées de manière rigoureuse. Il y a lieu de tout mettre en œuvre pour empêcher que les séjours autorisés au motif d'une formation ou d'un perfectionnement ne soient exploités de manière abusive afin d'éluder des conditions d'admission plus sévères (Directives LEI, ch. 5.1 ; ATA/303/2014 précité consid. 7).

L'expérience démontre que les étudiants étrangers admis à séjourner sur sol helvétique ne saisissent souvent pas l'aspect temporaire de leur séjour en Suisse et cherchent, une fois le but de leur séjour atteint, à s'établir à demeure dans le pays. Confrontées de façon récurrente à ce phénomène et afin de prévenir les abus, les autorités sont tenues de faire preuve de rigueur dans ce domaine (arrêts du TAF C‑5497/2009 du 30 mars 2010 consid. 6.1 ; C-1794/2006 du 17 juillet 2009 consid. 5.2 ; C-4419/2007 du 28 avril 2009 consid. 5.2 ; ATA/303/2014 précité consid. 7).

3.9 En l’espèce, le recourant a présenté lors de son arrivée en Suisse novembre 2017 un plan d’études visant la poursuite de sa formation de percussionniste et l’obtention d’un Bachelor of Arts en musique à la HEM, titre qu’il a obtenu. Il a ensuite obtenu, en octobre 2021, le renouvellement de son autorisation de séjour pour poursuivre ses études et obtenir un Master of Arts en interprétation musicale à la HEM, titre qu’il a également obtenu.

Alors que l'OCPM l’avait informé en mars 2022 de son intention de refuser le renouvellement de son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse, il s’est présenté et a été admis dans un nouveau cursus de Master of Arts en pédagogie musicale, orientation musique à l'école, lequel a débuté en septembre 2022.

L’OCPM a considéré à l’appui de son refus de renouveler son autorisation de séjour que ses nouveaux projets d'études, à savoir l’obtention d’un Master of Arts en pédagogie musicale, ne faisaient pas partie de son plan d'étude initial, et qu’il n'avait par ailleurs pas démontré que cette spécialisation devait impérativement s'effectuer en Suisse, de sorte que le but de son séjour avait été atteint.

À cela, le recourant a objecté que la poursuite de sa formation correspondait en pratique à une réorientation imposée par ses problèmes de santé, et qu’il ne pourrait pas acquérir sa nouvelle formation en Chine.

Il ne saurait être suivi. Il fait valoir des difficultés de santé, dont il n’établit toutefois pas qu’elles seraient pérennes ou définitivement invalidantes. Quoi qu’il en soit, la réorientation n’entre pas dans le plan d’études ayant fondé la délivrance initiale de son permis de séjour, et l’octroi d’une autorisation pour suivre une formation n’emporte aucun droit d’y ajouter par la suite une reconversion si la formation acquise ne pouvait être mise à profit.

Le fait que la poursuite de sa formation d’enseignant de musique en Chine se heurterait à des obstacles insurmontables – ce qu’il n’établit au demeurant pas – n’est pas non plus pertinent, dès lors que le recourant peut quoi qu’il en soit se reconvertir dans d’autres activités professionnelles.

Enfin, le recourant a entrepris sa nouvelle formation sans attendre le renouvellement de son autorisation de séjour, et même en sachant que l’OCPM projetait de refuser celui-ci. C’est à bon droit que le TAPI a retenu qu’un tel comportement ne pouvait être admis sauf à encourager la politique du fait accompli, particulièrement dans un domaine où une application stricte du droit vise à garantir la poursuite de la politique d’accueil des étudiants étrangers. L’argumentation du recourant selon laquelle sa nouvelle formation toucherait à sa fin ne lui est de la sorte d’aucun secours.

Au vu des éléments qui précèdent, il ne peut être reproché à l’OCPM d'avoir violé son large pouvoir d'appréciation en refusant de prolonger l'autorisation pour études du recourant, étant rappelé qu’il est tenu de faire preuve de rigueur dans ce domaine.

4.             En l'absence d'autorisation de séjour en Suisse, c'est également à bon droit que l’OCPM a prononcé le renvoi du recourant de Suisse sur la base de l'art. 64 al. 1 let. c LEI.

Le recourant n’a pas fait valoir que l'exécution de ce renvoi serait impossible, illicite ou inexigible au sens de l'art. 83 al. 2 à 4 LEI, et cela ne ressort d’ailleurs pas du dossier.

Cela étant, l’OCPM s’est engagé à fixer au recourant un délai de départ au 31 juillet 2024, ce dont il lui sera donné acte.

La décision de l'autorité intimée est conforme au droit.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 600.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 avril 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 mars 2023 ;

au fond :

le rejette ;

donne acte à l’OCPM de son engagement à fixer au recourant un délai pour quitter la Suisse au 31 juillet 2024 ;

met un émolument de CHF 600.- à la charge de A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. de Lausanne 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Sophie BOBILLIER, avocate du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Valérie MONTANI, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.