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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/66/2024

ATA/192/2024 du 12.02.2024 ( FORMA ) , ACCORDE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/66/2024-FORMA ATA/192/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 12 février 2024

sur mesures provisionnelles

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Lionel HALPERIN, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE intimée



Vu le recours interjeté le 8 janvier 2024 par A______ contre la décision sur opposition de l’Université de Genève, Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation (ci-après : la faculté), du 21 novembre 2023 confirmant son élimination du baccalauréat universitaire en psychologie, au motif qu’il n’avait obtenu, durant l’année académique 2022/2023, que 36 crédits sur les 42 nécessaires ; qu’il avait été placé sous curatelle de représentation et de gestion par ordonnance du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après : TPAE) du 18 février 2020 ; que Me Lionel HALPERIN avait été désigné aux fonctions de curateur ; que par décision du 21 avril 2021 l’office cantonal des assurances sociales a accordé à A______ une rente d’assurance-invalidité entière basée sur un degré d’invalidité de 100 % ; qu’il a produit un bilan neuropsychologique de six pages, établi le 24 mars 2023 par B______, psychologue spécialisée en neuropsychologie ; qu’elle a notamment retenu des capacités intellectuelles supérieures à la norme ; que ne trouvant pas de travail à la hauteur des diplômes précédemment obtenus, l’intéressé avait souhaité se reconvertir et s’était inscrit à la faculté en septembre 2020 ; qu’il avait obtenu de bons résultats depuis le début de son cursus ; qu’il avait toutefois mal calculé le nombre de crédits à valider lors de la troisième année de bachelor et s’était vu éliminer ; qu’il avait fait opposition à la décision sans l’aide d’un conseil juridique ni même de son curateur ; qu’il n’y avait pas évoqué son état de santé ;

que dans son recours, l’intéressé a requis la restitution de l’effet suspensif afin de pouvoir suivre les cours et s’inscrire pour passer les examens ; qu’il n’avait pas pu s’inscrire à la session d’automne 2023 et avait perdu un semestre ; qu’il était âgé de 46 ans ; qu’aucun intérêt ni privé ni public ne primait son intérêt à la restitution de l’effet suspensif ;

que, se déterminant sur la requête en restitution de l’effet suspensif, la faculté a conclu au rejet de celle-ci ; que la restitution de l’effet suspensif reviendrait à autoriser le recourant à rester étudiant au sein du cursus alors qu’il en avait été éliminé en application du règlement d’études ; que le recourant n’avait pas obtenu le nombre de crédits exigés par le règlement ce qui impliquait son élimination ; que l’argumentation développée dans son recours était contradictoire avec celle de son opposition ;

que le recourant n’ayant pas souhaité répliquer, la cause a été gardée à juger sur effet suspensif ;

considérant, en droit, l’art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par le président de ladite chambre, respectivement par la vice-présidente, ou en cas d’empêchement de ceux-ci, par un juge ;

qu’aux termes de l’art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3) ;

que, par ailleurs, l’art. 21 al. 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles ;

que, selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l’effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) - ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/1514/2019 du 14 octobre 2019 consid. 5 ; ATA/1467/2019 du 2 octobre 2019 consid. 4 ; ATA/1430/2019 du 26 septembre 2019). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités) ;

qu’un effet suspensif ne peut être restitué lorsque le recours est dirigé contre une décision à contenu négatif ; la fonction de l’effet suspensif est de maintenir un régime juridique prévalant avant la décision contestée (ATF 127 II 132 ; 126 V 407 ; 116 Ib 344) ;

qu’à teneur de l’art. 15.1 du règlement de baccalauréat universitaire en psychologie entré en vigueur le 14 septembre 2020, l’étudiant doit acquérir un minimum de 42 crédits par année d’études sous peine d’élimination ;

que selon l’art. 58 al. 4 du statut de l’université, la décision d’élimination est prise par la doyenne de la faculté, laquelle tient compte des situations exceptionnelles ;

qu’en l’espèce, la décision querellée porte sur l’élimination du recourant du baccalauréat universitaire en psychologie en raison du fait qu’il n’a pas obtenu les 42 crédits nécessaires ;

que, s’agissant d’une décision négative, seule entre en considération l’hypothèse de mesures provisionnelles, permettant à l’intéressé d’être admis audit baccalauréat pendant la durée de la procédure de recours ;

que de jurisprudence constante, la chambre administrative, lorsqu’elle en est requise dans le cadre des recours dont elle est saisie contre des décisions d’élimination, refuse généralement de restituer l’effet suspensif ou de prononcer des mesures provisionnelles autorisant l’étudiant à poursuivre ses études (ATA/1474/2019 du 4 octobre 2019 ; ATA/879/2019 du 13 mai 2019 ; ATA/103/2019 du 30 janvier 2019) ;

qu’en l’espèce le recourant est sous curatelle de représentation et de gestion ; que le rapport médical de la Docteure B______ du 24 mars 2023 est extrêmement fouillé ; que si les « conclusion et discussion » du rapport ne font pas mention prima facie de façon évidente de difficultés importantes en termes d’organisation, force est de constater que les tâches confiées au curateur par le TPAE portent spécifiquement sur sa représentation en matière d’affaires administratives et juridiques et la gestion de ses affaires courantes ; que l’étudiant a, à première vue, de bons résultats ; que son élimination n’est pas due à une ou plusieurs branches dont il n’aurait pas acquis les connaissances et dont les notes seraient insuffisantes ; que la décision litigieuse est consécutive, selon les allégations du recourant et à première vue, à un mauvais calcul des crédits nécessaires pour pouvoir passer des examens et poursuivre ses études ; que l’intéressé est âgé de 46 ans ; qu’il ne lui reste plus qu’une année pour obtenir son Bachelor ; que cette formation lui semble indispensable pour pouvoir se reconvertir ; qu’au vu de son parcours professionnel et de l’examen neuropsychologique précité il semble de prime abord qu’il a les compétences pour obtenir le titre souhaité ; qu’au vu de la curatelle dont il bénéficie il n’apparaît pas, prima facie et contrairement à l’argumentation de l’intimée, qu’il puisse lui être reproché des contradictions dans sa motivation puisqu’il a formé opposition sans l’aide de son curateur ; que l’intérêt public à ce que seuls les étudiants remplissant les conditions de réussite puissent suivre les cours à l’université est important ; que toutefois l’intérêt de l’étudiant doit, au vu des circonstances particulières du cas, primer l’intérêt public précité ; qu’en conséquence il se justifie de faire une exception à la règle ; que les mesures provisionnelles seront donc octroyées et l’étudiant autorisé à suivre les cours ;

que l’attention du recourant sera toutefois expressément attirée sur le fait que cette décision n’implique, en l’état, pas de droit à se présenter ultérieurement aux examens, même s’il en a suivi les cours ;

qu’aux fins d’instruire les modalités de l’erreur sur le nombre de crédits, une audience de comparution personnelle des parties sera fixée jeudi 7 mars 2024 à 8h45 ; qu’une convocation séparée sera adressée aux parties ;

que les frais de la procédure seront réservé jusqu’à droit jugé au fond.

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

autorise A______ à suivre les cours du semestre de printemps 2024 du bachelor en psychologie jusqu’à droit jugé au fond ;

convoque les parties pour une audience de comparution personnelle le jeudi 7 mars 2024 à 8h45, salle Y2, rue de Saint-Léger 10, 1205 Genève ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF, s’il porte sur le résultat d’examens ou d’autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d’exercice d’une profession ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de
l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Lionel HALPERIN, avocat du recourant, ainsi qu’à l’Université de Genève.

 

Le président :

C. MASCOTTO

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :