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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4107/2023

ATA/115/2024 du 30.01.2024 ( MARPU ) , ACCORDE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4107/2023-MARPU ATA/115/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 30 janvier 2024

sur consultation des pièces et effet suspensif

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Olivier RODONDI, avocat

contre

COMMUNE D'B______
représentée par Mes Romain JORDAN et Stéphane GRODECKI, avocats

et

C______ intimées



Vu, EN FAIT, le recours interjeté le 6 décembre 2023 par A______ (ci-après : A______) auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision du 22 novembre 2023 de la commune d'B______ (ci-après : la commune) adjugeant le marché public relatif au lot 20 – Serrurerie du quartier intergénérationnel d'habitations village d'D______ (B______) à C______ (ci‑après : C______) ;

que la décision d’adjudication, adressée à A______, a retenu que C______ avait été classée en 1ère position avec un total de points de 373.16 avec une offre d'un montant de CHF 497'628.25 ; que A______ avait été classée en 2e position avec un total de points de 365.03 avec une offre d'un montant de CHF 476'927.25 ;

que, le 30 novembre 2023, A______ et les représentants de la commune ont eu un entretien téléphonique portant sur les notes reçues aux différents critères ;

que selon A______, C______, n'étant pas un constructeur métallique, devrait sous‑traiter la part de fabrication et de montage dans une mesure allant largement au-delà de la limite fixée par le dossier d'appel d'offres (30%) ; que son offre aurait dû être exclue pour ce motif ; que la commune avait abusé de son pouvoir d'appréciation en procédant à la notation de trois critères au moins ; que la note de 3 au critère relatif à l'organisation interne du soumissionnaire était arbitraire, dans la mesure où la décote que son offre avait reçue provenait d'un manque d'indication sur l'organigramme des personnes ayant pouvoir de signature au sein de l'entreprise et qu'un texte décrivant le fonctionnement de l'entreprise n'était pas requis ; que sa note relative aux références était arbitraire, dans la mesure où il lui avait été reproché d'avoir fourni une référence de trop et que ses références ne contenaient pas d'informations sur les descriptifs d'autres produits (porte coupe-feu ; boîte aux lettres, etc.) en complément du produit principal du marché ; qu'il ne serait pas juste d'accorder la note maximum à C______ pour ce critère alors qu'elle faisait appel largement à de la sous-traitance ; que A______ aurait dû au moins recevoir la note de 4, au lieu de 3.5, pour le critère n° 5.1 relatif à la qualité technique de l'offre, puisqu'elle avait fourni un détail précis de la fixation d'un garde-corps, avec une explication sur la première page et répondu aux questions de l'annexe R13 ; que cette note de 3.5 n'était pas justifiée au vu de la note de 3 reçue par une autre soumissionnaire qui n'avait pas fourni de dessin ni de détail ;

qu’elle a conclu, à titre préalable, à l’octroi de l’effet suspensif, en ce sens qu'interdiction soit faite à la commune de conclure le contrat avec C______; que, principalement, elle a conclu à la réformation de la décision d’adjudication et à l’attribution du marché public en sa faveur ; que, subsidiairement, elle a conclu à l'annulation de la décision attaquée, au renvoi du dossier pour instruction et nouvelle décision au sens des considérants ; qu'au titre de mesures d'instruction, elle a conclu à la production par la commune du dossier complet original, y compris, les offres des autres soumissionnaires, et le rapport circonstancié d'évaluation des offres et/ou le rapport d'adjudication, ainsi qu'à la tenue d'une audience de comparution personnelle des parties ;

que, le 8 décembre 2023, la juge déléguée a interdit à la commune de conclure le contrat d'exécution de l'offre jusqu'à droit jugé sur la requête en octroi de l'effet suspensif ;

que, se déterminant sur effet suspensif, la commune a indiqué que l'offre de A______ aurait dû être exclue dans la mesure où sa première offre n'avait pas été conforme aux exigences du dossier d'appel d'offres ; que A______ avait eu connaissance des prix des offres de ses concurrentes avant de déposer une nouvelle offre, le 2 novembre 2023, soit après le délai de dépôt fixé au 26 octobre 2023 ; que sa seconde offre, inférieure de CHF 15'392.70 au prix de sa première, n'aurait pas dû être prise en considération par le comité d'évaluation, dès lors que la connaissance des prix offerts par les autres soumissionnaires lui avait conféré un avantage indéniable ; que son recours devait être déclaré irrecevable pour ce motif ;

que l'intérêt privé de chacun des soumissionnaires, notamment au regard du secret des affaires, s'opposait à la consultation par A______ de ces documents ;

que l’intérêt public à la réalisation des constructions était évident au vu de la crise du logement et de la destination des salles communales, si bien que la requête d’octroi de l'effet suspensif devait être rejetée ;

que le comité d'évaluation avait commis une erreur arithmétique en reportant les points de A______ pour le critère 5.1 selon le procès-verbal d'évaluation (4 points), dans le tableau final d'évaluation (3.5 points), si bien que son total de points devait se porter en réalité à 370.03 ; que néanmoins le prix des articles modifiés dans la seconde offre aurait dû être changé, en prenant le plus haut prix fixé par les concurrents, si bien que le prix total de la seconde offre de A______ s'élevait à CHF 515'635.75 (CHF 476'927.25 + CHF 38'708.50) ; que son total de points avec ces corrections serait de 353.41, la différence de son total de points avec celui de C______ n'étant donc pas de 8.13, mais de 19.75 ; que la modification de sa note pour l'un des trois critères ou sous-critères invoqués ne suffirait donc pas pour la faire passer devant l'adjudicataire ; que les arguments de A______ ne reposaient que sur des suppositions ; que C______ avait annoncé une part de sous-traitance de 30% (25% pour la fabrication et le montage partiel par une entreprise et 5% pour le montage partiel par une autre société) ; qu'il n'y avait aucun motif d'exclusion de C______ pour violation du dossier d'appel d'offres ; que A______ et l'adjudicataire avait reçu le même nombre de point (0) pour les mêmes motifs concernant l'indication des personnes ayant pouvoir de signature ; qu'une révision de la notation de ce critère devrait conduire à une révision de la note de C______ et ne changerait donc rien au classement final ; que par équité, il avait été décidé de ne juger que les trois premières références ; que l'adjudicataire avait fourni, outre de nombreux détails d'exécution soignée, des références plus complètes et variées, ce qui justifiait l'octroi d'un nombre de points supérieur ; que la réponse de l'adjudicataire à propos du processus de mise en œuvre des garde-corps était plus convaincante que celle de A______ ; qu'il en était de même des questions relatives aux aspects techniques, de sorte que les points de 1 point pour A______ et 1.5 point pour l'adjudicataire se justifiaient ;

que, le 4 janvier 2024, A______ a indiqué que le secret des affaires n'était pas opposable s'agissant des informations contenues dans les annexes R15 (relative à la sous-traitance), Q9 (relative aux références), Q4 (relative à la capacité personnelle et à la formation de base des personnes-clés) et aux annexes P2, P4, P5, P6 et P7 ;

que, le 12 janvier 2024, la commune a conclu à un accès au dossier limité au contenu essentiel des annexes R15, Q9 et Q4 du dossier d'appel d'offres de C______, subsidiairement au contenu essentiel des autres pièces sollicitées par A______ ;

que, répliquant sur effet suspensif, A______ a relevé que les sous-traitants devaient également respecter les exigences strictes posées en termes de conditions de participation ; que si l'offre de C______ ne respectait pas les exigences fixées, notamment celle concernant la production d'attestations ou autres documents de ses sous-traitants, elle devait être exclue ; que le procès-verbal d'évaluation des offres était daté du 9 novembre 2023 ; que la commune adoptait un comportement contradictoire en soutenant, dans le cadre de la procédure de recours, que l'offre de A______ aurait dû être exclue ; qu'une telle exclusion aurait été contraire au principe de l'interdiction du formalisme excessif ; que le fait qu'elle ait demandé le procès-verbal d'ouverture des offres et eu connaissance du prix global proposé n'avait eu aucune influence, puisqu'elle ne connaissait pas le détail des articles de ses concurrents et n'avait pas modifié ses prix unitaires ; que, de plus, l'écart du montant total offert équivalait à la somme qu'il fallait recalculer en raison de la réduction du nombre de garde-corps ; que la commune avait violé le principe de transparence en arrêtant une méthode de notation des critères après le retour des offres ; qu'au vu de la correction à effectuer compte tenu de l'erreur arithmétique, la différence de points avec l'adjudicataire n'était que de 3.13 points ; qu'une révision à la hausse d'un demi-point d'une seule des notes portant sur les sous‑critères contestés lui suffirait pour se voir adjuger le marché ; que A______ aurait mérité également le 0.5 point supplémentaire dans la mesure où elle avait apporté des éléments complémentaires pertinents concernant son organisation interne ; qu'elle avait également démontré posséder des profils variés et des diplômes reconnus, si bien que 0.5 point aurait dû lui être accordé ; qu'au vu des exigences posées dans l'annexe Q9, ses références étaient en tous points comparables en termes de complexité et d'importance, de sorte que la différence de note d'avec C______ ne se justifiait pas ;

que le 18 janvier 2024, A______ a pris acte de l'accord exprès de la commune avec un droit d'accès aux pièces R15, Q9 et Q4 et qu'elle ne s'opposait pas davantage à la production du contenu essentiel des autres pièces sollicitées ; qu'il y avait lieu de mettre à disposition de A______ les annexes P2 et Q2, dès lors que les informations contenues dans ces deux documents ne pouvaient pas être qualifiées de confidentielles ;

que, sur ce, la juge déléguée a informé les parties que la cause était gardée à juger sur effet suspensif et sur la question de l'accès aux pièces ;

Considérant, EN DROIT, qu’interjeté en temps utile devant l'autorité compétente, le recours est, a priori, recevable sous ces angles (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. b du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 15 al. 1, al. 1bis let. e et al. 2 de l'accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 - AIMP - L 6 05 ; art. 3 al. 1 de la loi autorisant le Conseil d'État à adhérer à l'accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 - L-AIMP – L 6 05.0 ; art. 55 let. e et 56 al. 1 du règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 - RMP - L 6 05.01) ;

que la recevabilité du recours n'est néanmoins pas certaine, dans la mesure où elle est contestée par la commune, au motif que l'offre de la recourante aurait dû être exclue d'office ; que cette question devra faire l'objet d'un examen ultérieur, notamment au regard du principe de la bonne foi découlant directement de l’art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) ;

que la consultation des dossiers est, d'une manière générale, réglée en procédure administrative par les art. 44 et 45 LPA ;

qu'aux termes de l'art. 44 LPA, les parties et leurs mandataires sont seuls admis à consulter au siège de l'autorité les pièces du dossier destinées à servir de fondement à la décision, le droit d'accéder à leurs données personnelles que les tiers peuvent déduire de la loi sur l'information du public, l'accès aux documents et la protection des données personnelles du 5 octobre 2001 (LIPAD - A 2 08) étant réservé (al. 1) ; dès le dépôt d'un recours, les parties sont admises en tout temps à consulter le dossier soumis à la juridiction saisie (al. 2) ; l'autorité délivre copie des pièces contre émolument ; elle peut également percevoir un émolument pour la consultation des pièces d'une affaire liquidée (al. 4) ;

qu'en vertu de l'art. 45 LPA, l'autorité peut interdire la consultation du dossier si l'intérêt public ou des intérêts privés prépondérants l'exigent (al. 1) ; le refus d'autoriser la consultation des pièces ne peut s'étendre qu'à celles qu'il y a lieu de garder secrètes et ne peut concerner les propres mémoires des parties, les documents qu'elles ont produits comme moyens de preuves, les décisions qui leur ont été notifiées et les procès-verbaux relatifs aux déclarations qu'elles ont faites (al. 2) ; une pièce dont la consultation est refusée à une partie ne peut être utilisée à son désavantage que si l'autorité lui en a communiqué par écrit le contenu essentiel se rapportant à l'affaire et lui a donné en outre l'occasion de s'exprimer et de proposer les contre-preuves (al. 3) ; la décision par laquelle la consultation d'une pièce est refusée peut faire l'objet d'un recours immédiat (al. 4) ;

qu'en droit des marché publics, l'art. 11 let. g AIMP et l'art. 22 al. 1 et 3 RMP prescrivent que les informations mises à disposition par les soumissionnaires, en particulier les secrets d'affaires et de fabrication, sont traitées de façon confidentielle, et que les travaux et délibérations concernant l'évaluation des offres sont confidentiels ;

que c'est au juge qu'il appartient d'effectuer, selon les circonstances propres à chaque cas, une pondération entre le droit d'accès au dossier et la protection des secrets d'affaires et de fabrication ; il ne faut pas perdre de vue que le droit d'être entendu d'une partie ne peut être exercé utilement par une partie que si elle a accès aux éléments essentiels du dossier (Étienne POLTIER, Droit des marchés publics, 2014, n. 429 p. 274) ;

qu'en l'espèce, vu la position de la commune exprimée dans son écriture du 12 janvier 2024 et de l'absence de réaction de C______, les annexes P2 – sans l'extrait du registre du commerce, l'attestation de paiement des charges sociales, l'attestation relative à l'affiliation de C______ au régime de la prévoyance professionnelle, l'attestation d'assurance-accidents, l'attestation de l'administration cantonale des impôts, l'attestation de remise et de paiement des décomptes de la taxe sur la valeur ajoutée, l'attestation du service de l'inspection du travail, l'extrait du registre des poursuites, lesquelles n'apparaissent pas pertinentes – P4, P5 – sans l'attestation d'assurance responsabilité civile de C______, laquelle n'apparaît également pas pertinente –, P6 et P7 seront consultables ;

que l'annexe R15 – caviardée des noms des sociétés sous-traitantes – sera également consultable ; qu'il en est de même de l'annexe Q9 – caviardée des données relatives au « Nom ou raison sociale du client », « Nom et prénom de la personne de contact », « Adresse électronique du client (e-mail direct) », « Numéro de téléphone de la personne de contact », ainsi que le lieu d'exécution des travaux, étant précisé que s'agissant du document descriptif annexé à chaque référence, celui-ci devra également être caviardé du nom et du lieu d'exécution des travaux, du maître d'ouvrage et des architectes, de la direction des travaux ; que concernant l'annexe Q4 relative à la capacité en personnel et formation de base des personnes-clés, celle‑ci sera consultable sous-réserve du caviardage des « NOM et prénom » et des « Date de naissance » mentionnées dans le tableau ;

que la recourante remet en cause sa note par rapport à son organisation interne (annexe Q2) ; qu'elle se plaint plus spécifiquement de la décote reçue compte tenu du manque d'indication sur son organigramme des personnes ayant signature au sein de l'entreprise ; que la même critique a été effectuée à C______ selon le procès-verbal d'évaluation du 9 novembre 2023 ; que la recourante a eu accès audit procès-verbal ; qu'au vu de son argumentation, il n'apparaît ainsi pas nécessaire d'octroyer à l'intéressée le droit de consulter l'annexe Q2 de C______ ;

que concernant ses critiques par rapport au nombre de points obtenus pour la qualité et adéquation des solutions techniques proposées pour l'exécution du marché (annexe R13), la commune, dans son écriture du 18 décembre 2023, a reproduit – mot pour mot – les réponses de C______ pour les deux premières instructions à compléter ; que la commune a également reproduit le schéma de l'adjudicataire avec les explications ; que la recourante et l'adjudicataire ont reçu le même nombre de points pour la troisième instruction ; qu'au vu de ces éléments, la recourante dispose déjà de toutes les informations pour appuyer son grief, de sorte que l'accès à cette pièce n'est pas nécessaire ;

que pour le surplus et par rapport au dernier grief soulevé par la recourante, à savoir une violation du principe de la transparence à propos de la méthode de notation des critères, l'accès au dossier de l'adjudicataire ou des autres soumissionnaires n'est pas indispensable, puisque la question pourra être examinée à l'aune du document d'appel d'offres ;

qu'en définitive, il sera ordonné à la commune de produire un chargé de pièces en trois exemplaires contenant les pièces identifiées ci-dessus de l'offre de C______ avec des caviardages sur les seuls passages indiqués dans les considérants qui précèdent ;

que les mesures provisionnelles sont prises par la présidente ou la vice-présidente de la chambre administrative ou, en cas d'empêchement de ceux-ci, par une autre juge (art. 21 al. 2 LPA ; art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 mai 2020) ;

qu'aux termes des art. 17 al. 1 AIMP et 58 al. 1 RMP, le recours n'a pas d'effet suspensif ; toutefois, en vertu des art. 17 al. 2 AIMP et 58 al. 2 RMP, l'autorité de recours peut, d'office ou sur demande, octroyer cet effet pour autant que le recours paraisse suffisamment fondé et qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose ;

que l'examen de la requête suppose une appréciation prima facie du bien-fondé du recours ; l'effet suspensif doit être refusé au recours manifestement dépourvu de chances de succès et dont le résultat ne fait aucun doute ; inversement, un diagnostic positif prépondérant ne suffit pas d'emblée à justifier l'octroi d'une mesure provisoire, mais suppose de constater et de pondérer le risque de préjudice (ATA/987/2021 du 24 septembre 2021 ; ATA/217/2021 du 1er mars 2021 consid. 2 ; ATA/1349/2019 du 9 septembre 2019) ;

que lorsqu'une autorité judiciaire se prononce sur des mesures provisoires, elle peut se limiter à la vraisemblance des faits et à l'examen sommaire du droit, en se fondant sur les moyens de preuve immédiatement disponibles, tout en ayant l'obligation de peser les intérêts respectifs des parties (ATF 139 III 86 consid. 4.2 ; 131 III 473 consid. 2.3) ;

que l’octroi de l'effet suspensif constitue cependant une exception en matière de marchés publics et représente une mesure dont les conditions ne peuvent être admises qu'avec restriction (ATA/1349/2019 précité ; ATA/446/2017 du 21 avril 2017 consid. 2 ; ATA/62/2017 du 23 janvier 2017 consid. 2 ; ATA/793/2015 du 5 août 2015 consid. 2) ;

que l'AIMP a pour objectif l'ouverture des marchés publics (art. 1 al. 1 AIMP) ; qu’il poursuit plusieurs objectifs, soit assurer une concurrence efficace entre les soumissionnaires (art. 1 al. 3 let. a AIMP), garantir l'égalité de traitement entre ceux-ci et assurer l'impartialité de l'adjudication (art. 1 al. 3 let. b AIMP) et assurer la transparence des procédures de passation des marchés (art. 1 al. 3 let. c AIMP) ;

que le principe de la transparence n'exige pas, en principe, la communication préalable de sous-critères ou de catégories qui tendent uniquement à concrétiser le critère publié (ATF 143 II 553 consid. 7.7) ; qu’une publication n'est nécessaire que lorsque les sous‑critères sortent de ce qui est communément observé pour définir le critère principal auquel ils se rapportent ou que l'adjudicateur ne leur accorde une importance prépondérante et leur confère un rôle équivalent à celui d'un critère publié (ATF 130 I 240 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 2D_1/2021 du 8 mars 2021 consid. 5.3) ;

que selon l’art. 43 RMP, l'évaluation des offres est faite selon les critères prédéfinis conformément à l'art. 24 RMP et énumérés dans l'avis d'appel d’offres et/ou les documents d'appel d’offres (al. 1) ; que le résultat de l'évaluation des offres fait l'objet d'un tableau comparatif (al. 2) ; que le marché est adjugé au soumissionnaire ayant déposé l'offre économiquement la plus avantageuse, c'est-à-dire celle qui présente le meilleur rapport qualité/prix ; qu’outre le prix, les critères suivants peuvent notamment être pris en considération : la qualité, les délais, l'adéquation aux besoins, le service après-vente, l'esthétique, l'organisation, le respect de l'environnement (al. 3) ;

qu’en matière d'évaluation des offres, la jurisprudence reconnaît une grande liberté d'appréciation au pouvoir adjudicateur (ATF 125 II 86 consid. 6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_35/2017 du 5 avril 2018 consid. 5.1 ; ATA/1685/2019 du 19 novembre 2019 consid. 8b et les références citées), y compris s'agissant de la méthode de notation (ATA/676/2020 du 21 juillet 2020 consid. 4b et les références citées) ;

que lors de l'examen des offres, l'autorité adjudicatrice examine la conformité des offres au cahier des charges et contrôle leur chiffrage (art. 39 al. 1 RMP) ; que les erreurs évidentes, telles que les erreurs de calcul et d'écriture, sont corrigées. Lorsqu'un soumissionnaire omet un poste, c'est le plus haut prix fixé par les concurrents qui est appliqué. (art. 39 al. 2 RMP) ; que selon l'art. 40 RMP, elle peut demander aux soumissionnaires des explications relatives à leur aptitude et à leur offre (al. 1) ; que les explications sont en principe fournies par écrit ; si elles sont recueillies au cours d'une audition, un procès-verbal sera établi et signé par les personnes présente (al. 2).

que le principe d'intangibilité des offres remises et le respect du principe d'égalité de traitement entre soumissionnaires impliquent de ne procéder à ce type de questionnement que de manière restrictive, et seulement lorsque l'offre est, au demeurant, conforme aux conditions de l'appel d'offres. À cet égard, même les auteurs qui préconisent une certaine souplesse dans le traitement des informalités admettent que l'autorité adjudicatrice dispose d'un certain pouvoir d'appréciation quant au degré de sévérité dont elle désire faire preuve dans le traitement des offres, pour autant qu'elle applique la même rigueur ou la même flexibilité à l'égard des différents soumissionnaires (ATA/149/2018 du 20 février 2018 et les références citées). L'appréciation de la chambre administrative ne peut se substituer à celle de l'autorité adjudicatrice, seul l'abus ou l'excès du pouvoir d'appréciation devant être sanctionné (ATF 130 I 241 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2P.111/2003 du 21 janvier 2004 consid. 3.3 ; 2P.172/2002 du 10 mars 2003 consid. 3.2).

qu'en l'espèce et comme vu ci-dessus, la question de la recevabilité du recours est en l’état réservée ;

qu’en tant que la recourante se plaint d'une méthode de notation des critères autre que celle figurant dans l'appel d'offres, il convient de rappeler que le principe de la transparence n'exige pas, en principe, la communication préalable de sous-critères ; que le dossier d'appel d'offres rappelle cela au point 4.6 p. 22 ; qu’il n’apparaît donc pas, avec une vraisemblance suffisante pour justifier l’octroi de l’effet suspensif, que la méthode d’évaluation choisie ainsi que la pondération retenue relèveraient de l’arbitraire ;

qu'il apparaît de l'appel d'offres que la sous-traitance est admise à hauteur de 30% maximum pour l'ensemble du marché (point 3.10 p. 14 de l'appel d'offres) ; que la recourante n'a produit aucun document qui prouverait que l'adjudicataire ne serait pas un constructeur métallique et sous-traiterait à des entreprises tierces autant la fabrication que le montage des ouvrages qu'elle se voyait adjuger, si bien qu’il ne peut, au stade de l’examen prima facie, être conclu que celle-ci ne remplirait pas la condition de la sous-traitance ;

que la recourante et l'adjudicataire ont obtenu la même note s'agissant du critère relatif à leur organisation interne (annexe Q2) ; que, pour toutes les deux, les personnes ayant pouvoir d'engager l'entreprise par leur signature n'étaient pas indiquées ; qu'il semble prima facie que les sociétés ont été traitées de la même façon ; qu'une révision de la notation de ce sous‑critère pourrait également conduire à une révision du nombre de points obtenus par l'adjudicatrice, de sorte que l'opération serait finalement neutre sur le classement final ; que compte tenu également de la grande liberté d'appréciation du pouvoir adjudicateur, y compris s'agissant de la méthode de notation, il n'apparaît a priori pas et sans préjudice de l’examen au fond que la notation de ce critère serait arbitraire ou choquante ;

que selon le procès-verbal d'évaluation du 9 novembre 2023, l'adjudicataire s'est vu ajouter 0.5 point au critère relatif à sa capacité en personnel, car elle possédait une variation de profil et diplômes reconnus ; qu'il ressort de l'annexe Q4 de l'appel d'offres de la recourante que les personnes-clés de l'entreprise disposent pour deux d'une maîtrise fédérale et pour les autres de certificat fédéral de capacité ; qu'il n'est pas impossible que les personnes-clés de l'adjudicataire disposent de diplômes plus poussés, de sorte qu'une différence de points entre les deux soumissionnaires pourrait se justifier ;

que selon les explications de la commune, les références de l'adjudicataire portaient notamment sur des boîtes aux lettres et un escalier comparable, considérés comme étant des difficultés techniques semblables à celles de l'appel d'offres ; que les références de la recourante ne comportent, à première vue, pas d'éléments sur les boîtes aux lettres qui devraient être mises en œuvre ; que partant, à première vue, une différence de notation entre les deux soumissionnaires pourrait s'expliquer ;

qu'en tant que la recourante se plaint du nombre de points obtenus par rapport à la qualité des solutions techniques (annexe R13), il convient de rappeler, comme exposé ci‑avant, que l’autorité adjudicatrice dispose à cet égard d’un large pouvoir d’appréciation ; qu'il apparaît, à première vue, que les réponses de l'adjudicatrice sont plus développées que celle de la recourante ;

qu'il semble néanmoins que la recourante a fourni un dessin technique avec son annexe R13 ; que, a priori, la fourniture d'une documentation technique complète permettrait à la recourante de bénéficier de 0.5 points supplémentaire (avec une pondération de 10, ce qui ferait 5 points) ; que, avec la correction arithmétique effectuée par la commune, le total des points de la recourante est déjà de 370.03 au lieu de 365.03 ; que l'écart avec l'adjudicataire n'est plus que de 3.13 points ; que la prise en considération de cette documentation technique pourrait donc avoir une influence sur le nombre total de points reçus par la recourante par rapport à ce critère et donc sur le classement final ;

que la question d'une application de l'art. 39 al. 2 2e phr. RMP au cas d'espèce pourrait toutefois se poser compte tenu du fait que la recourante a dû fournir une mise à jour selon la nouvelle série de prix ; que cette question et l'examen de la série de prix et des éléments qui la composent devront être examinés au fond ;

qu'au surplus, la clé USB remise par la commune comportant les offres des soumissionnaires n'est pas complète ; qu'il apparaît que l'offre de la soumissionnaire E______ n'a pas été enregistrée sur la clé USB ; que de la même façon que pour la recourante, E______ n'a pas eu de points pour la remise d'une « documentation technique complète fournie » ; qu'il conviendra d'élucider au cours de l'instruction du présent recours, si E______ n'a effectivement pas fourni de schéma ou dessin justifiant ainsi une absence de points ; qu'un délai sera octroyé à la commune pour qu'elle fournisse l'offre de E______ à l'attention exclusive de la chambre de céans ;

qu'au vu de ces éléments, le recours n'apparaît en tout cas pas, a priori, dénué de chances de succès à ce stade ;

que l'intérêt public à la réalisation des constructions au vu de la crise du logement et de la destination des salles communales mis en avant par la commune doit être relativisé dans la mesure où le marché en question concerne essentiellement des ouvrages métalliques (notamment garde-corps des escaliers, balcons, fenêtres, loggia, mains courantes, portail pour le local vélos, boîtes aux lettres, portes métalliques) ; qu'il s'agit là en effet d'ouvrages à exécuter dans le cadre du second‑œuvre ; que, par ailleurs, selon les explications de la commune, les études techniques ne doivent démarrer qu'au mois de mai 2024 ;

qu'au vu de ces éléments, l'effet suspensif au recours sera octroyé ;

qu’il sera statué ultérieurement sur les frais de la présente décision.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

ordonne à la commune d'B______ de produire un chargé de pièces en trois exemplaires contenant les annexes P2 (sans les attestations), P4, P5 (sans l'attestation), P6 et P7 de l'offre de C______, ainsi que les annexes R15, Q4 et Q9 avec des caviardages sur les seuls passages indiqués dans les considérants qui précèdent, d’ici au 15 février 2024 ;

ordonne à la commune d'B______ de produire, d’ici au 15 février 2024, l'offre complète de la soumissionnaire E______ à l'attention exclusive de la chambre administrative ;

octroie l’effet suspensif au recours interjeté le 6 décembre 2023 par A______ contre la décision de la commune d'B______ du 22 novembre 2023 ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

réserve la suite de la procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n’est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

si elle soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Olivier RODONDI, avocat de A______, à Mes Romain JORDAN et Stéphane GRODECKI, avocats de la commune, à C______, ainsi qu’à la commission de la concurrence (COMCO).

 

 

La vice-présidente :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :