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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/849/2023

ATA/13/2024 du 09.01.2024 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/849/2023-FPUBL ATA/13/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 janvier 2024

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Robert ASSAËL, avocat

contre

COMMUNE B______ intimée
représentée par Me François BELLANGER, avocat

 



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1970, a été engagé le 15 août 2006 par la commune B______ (ci-après : la commune) en qualité d’ouvrier au service de l’environnement. Après une période d’essai de trois ans., il a été confirmé dans sa fonction le 3 novembre 2009.

b. Jusqu’en 2020, A______ a travaillé en qualité de chauffeur principalement dans la levée sélective des déchets.

c. A______ a fait l’objet des évaluations ou mesures suivantes :

-          selon un rapport d’évaluation du 3 septembre 2007, ses connaissances et performances étaient bonnes, de même que ses compétences et attitudes (notation de 3/5) ; le respect des directives et la ponctualité étaient appréciés (notation de 4/5) ; une bonne communication et un emportement parfois impulsif étaient notés au chapitre de la communication et de la coopération (notation de 2/5) ;

-          selon un rapport d’évaluation du 2 novembre 2009, ses connaissances, performances, compétences et aptitudes étaient bonnes (notation de 3/5), la communication étant bonne avec un emportement parfois impulsif (notation de 2/5) ;

-          selon un courrier de sa hiérarchie du 5 mars 2012, il avait tenu des propos malveillants, voire insultants, à l’encontre d’un collègue et porté atteinte à sa personnalité ; il ne s’agissait pas du premier conflit généré par une attitude inappropriée ; il devait faire preuve de respect, de discernement et de discrétion sur son lieu de travail ; en aucun cas un tel comportement ne serait toléré à l’avenir ;

-          selon un entretien de collaboration du 20 décembre 2012, il répondait aux exigences (notation de 3/4) quant aux connaissances professionnelles, à la qualité des prestations et à la volonté d’apprendre ; il répondait partiellement aux exigences (notation de 2/4) quant à l’engagement et à l’initiative, étant observé qu’il ne réagissait pas de la bonne façon face aux difficultés, notamment dans ses relations avec ses collègues et avait des réactions souvent trop agressives lorsqu’un problème se présentait, quant au volume des prestations, la confiance et le respect mutuel, étant observé que la communication avec ses collègues était parfois problématique en raison de son caractère et en lien avec le comportement interpersonnel et qu’il devait faire preuve de calme et de retenue ; il ne répondait pas aux exigences en matière de comportement interpersonnel (notation de 1/4), étant observé que dans ses relations et discussions avec ses collègues, il devait faire un effort dans le ton qu’il utilisait (souvent trop agressif) et faire preuve de plus de discrétion, qu’un courrier lui avait été adressé et qu’il avait depuis fait des efforts visibles ;

-          selon un rapport d’évaluation du 30 août 2016, des problèmes de dos chroniques et importants rendaient certaines tâches incompatibles avec son état de santé ;

-          selon un rapport d’évaluation du 1er février 2018, il s’était formé sur des véhicules de levée de déchets ; ses connaissances professionnelles, son engagement et son initiative, la qualité de ses prestations et sa volonté d’apprendre répondaient aux exigences (notation de 3/4) ; le comportement interpersonnel, le volume des prestations ainsi que la confiance et le respect mutuels ne répondaient que partiellement aux exigences (notation de 2/4), étant observé des difficultés à admettre ses erreurs et à en tirer les enseignements, y compris durant l’entretien d’évaluation (sur ce point, A______ disait accepter les remarques de ses supérieurs lorsque ces dernières étaient justifiées, contrairement au point de vue de sa hiérarchie et il avait la volonté de progresser, mais avec de nouvelles technologies), et qu’il devait impérativement faire preuve de plus de discrétion, de calme et de tact de manière générale, et garder son calme face aux difficultés et aux problèmes rencontrés et ne plus s’emporter face aux remarques de ses supérieurs (sur ce point, A______ trouvait que la discussion était impossible avec ses supérieurs et que les contacts étaient difficiles, étant précisé qu’il ne pouvait pas tout faire en même temps) ;

-          selon un entretien de collaboration du 25 juin 2020, le projet d’adopter un comportement interpersonnel conforme au statut du personnel, notamment en terme de respect des consignes données ainsi que des collègues et de la hiérarchie n’était pas réalisé ; A______ avait ajouté à la main « Pas de respect de la part de ma hiérarchie. Pas de projet en cours, ne peut pas être pas atteint » ; les connaissances professionnelles répondaient aux exigences ; les autres rubriques (engagement et initiative, comportement interpersonnel, qualité des prestations, volonté d’apprendre, volume des prestations, confiance et respect mutuel) répondaient partiellement aux exigences (notation de 2/4) ; sur les quatre premières, A______ avait biffé la coche et coché la case « répond aux exigences » (notation de 3/4), indiquant pour les quatre premières et la dernière « ne correspond pas à l’entretien » et ajoutant pour le quatrième « démotivé face à l’indifférence de sa hiérarchie à régler les problèmes à l’interne » ; A______ évaluait son supérieur hiérarchique très négativement ; l’appréciation globale relevait que le comportement de A______ était inapproprié et ses colères répétées envers ses collègues et supérieurs devaient impérativement être corrigées ; les règles de respect mutuel et d’éthique devaient être appliquées ; leur transgression répétée n’était pas compatible avec une activité professionnelle au sein de l’administration de la commune ; A______ n’avait pas approuvé le rapport.

d. A______ a été en arrêt de travail à 100% pour cause de maladie du 12 novembre 2019 au 30 avril 2020. Son incapacité est ensuite passée à 50% du 1er mai au 31 août 2020, à 40% du 1er septembre au 31 octobre 2020 et enfin à 20% du 1er novembre au 18 décembre 2020.

e. Le 6 février 2020, A______ a été reçu par la secrétaire générale adjointe et une gestionnaire des ressources humaines à sa demande et s’est plaint de sa hiérarchie. Le camion mis à sa disposition n’était pas adapté, les tâches confiées trop nombreuses, la levée du compost n’était pas distribuée de manière équitable. Il avait été accusé à tort en relation avec les dispositifs de sécurité et il était mis en cause de manière récurrente par son responsable direct. Sa santé physique s’était nettement améliorée. La demande de son employeur qu’il passe un examen de la vue était un abus de pouvoir. Il refusait de s’y soumettre pour des raisons de fierté. Il avait besoin d’aide.

f. Le 24 février 2020, il a refusé de signer le procès-verbal de l’entretien du 6 février 2020, car il ne correspondait pas à ce qu’il avait indiqué et tous les faits se retournaient contre lui. Il avait été surpris de devoir passer un contrôle de la vue alors qu’il en avait subi un pour le permis de conduire le 10 octobre 2019 par le médecin de l’État. D’autres collègues endommageaient les camions et ne devaient pas passer d’examens ophtalmologiques.

g. Le 11 mai 2020, le secrétaire général de la commune lui a enjoint de se soumettre à un examen de la vue, nécessaire pour la conduite d’un camion, à défaut de quoi des mesures adéquates seraient prises.

h. Le 8 juin 2020, le secrétaire général lui a indiqué qu’au terme de la visite médicale du 18 mai 2020 sa vision devait être corrigée afin d’être apte à la conduite, et l’a invité à prendre les mesures nécessaires.

i. Le 29 juin 2020, la commune a reçu un certificat du Dr C______, ophtalmologue FMH, établi à la demande de A______ et indiquant qu’il serait dans la norme pour conduire un camion sans lunettes mais qu’il serait préférable qu’il en porte, en tout cas la nuit, pour un meilleur confort et une meilleure acuité visuelle.

j. Le 11 juillet 2020, A______ a annoncé son cas à l’assurance-invalidité.

k. Le 11 novembre 2020, il a été déclaré apte à la conduite des véhicules moyennant le port de lunettes.

l. Le 4 février 2021, toute l’équipe de chauffeurs de la voirie a été avertie de ne plus bloquer les dispositifs de sécurité, sous peine de renvoi.

m. A______ a été en arrêt de travail à 100% du 3 au 16 mai 2021, puis à 50% du 17 au 31 mai 2021, puis à 100% du 29 mai au 13 juin 2021, puis à 100% du 30 juin au 6 juillet 2021.

n. Le 26 mai 2021, sous la plume d’un conseil, il s’est plaint d’avoir été accusé à tort de désactiver le système de sécurité de son camion et a demandé confirmation qu’il réintégrerait son poste.

o. La commune a répondu le 6 juillet 2021 qu’il n’avait pas été accusé en relation avec les systèmes de sécurité et que les modalités de sa réintégration étaient à l’étude.

p. Le 22 octobre 2021, la commune a averti A______ qu’il s’exposerait à des sanctions s’il persévérait dans le comportement inacceptable qu’il avait eu les 1er et 15 octobre 2021.

Lors de la réunion du 15 octobre 2021, il avait été entendu au sujet d’un échange survenu avec son responsable de section, D______, le 1er octobre 2021, au cours duquel il lui avait exprimé son profond désaccord par rapport au véhicule qui lui avait été assigné pour la viabilité hivernale. Il avait alors dit à son supérieur « Est-ce que tu es un homme ? », « Comment ton fils te regarde ? », « Tu n’as pas de fierté ! », « Qu’est-ce que tu vas faire si je ne viens pas ? ». Il avait ensuite fait mine de soulever le bureau de son supérieur, lequel avait mis fin à l’entretien et lui avait ordonné de quitter son bureau. Lors de cet entretien, il avait également affirmé qu’il ne répondrait pas si on l’appelait pour un déneigement pendant son piquet. Or, un camion neuf, d’une valeur considérable, lui avait été attribué, ce qui constituait une marque de confiance. Il avait fini, sur l’insistance de la secrétaire générale adjointe de la commune, par admettre qu’il devrait répondre en cas de déneigement durant son piquet.

q. Le 6 décembre 2021, A______ a répondu au courrier de la commune du 22 octobre 2021.

À aucun moment il ne s’était levé le 1er octobre 2021 en brandissant la table et en insultant son supérieur hiérarchique. Il avait expliqué le 15 octobre 2021 s’être levé et avoir perdu l’équilibre à cause de son genou douloureux. Il n’aurait jamais tenu de tels propos envers son supérieur. Il avait relevé que son camion n’était sorti qu’en dernier ressort. À propos du téléphone, il avait seulement dit qu’il pourrait faire comme certains de ses collègues et ne pas répondre aux appels de piquet. Ses propos avaient largement été déformés. Il était le seul à devoir faire preuve de polyvalence. On lui avait affirmé lors de son embauche qu’il serait chauffeur. Il n’avait nullement admis que les tâches confiées faisaient partie de la description de son poste. Ses supérieurs l’accusaient à tort et depuis il subissait au quotidien des humiliations. Le lien de confiance avait été rompu. Il demandait ce qu’il en serait dans six mois. « Mes supérieurs m’accuseront d’avoir volé ou tapé quelqu’un dans le but de trouver un bouc émissaire ?? ».

r. Le 16 décembre 2021, la commune lui a répondu que le personnel était affecté en fonction des besoins du service, ce qui impliquait une capacité de polyvalence. Dans son service, six personnes étaient dotées de compétences analogues aux siennes.

s. Le 2 mai 2022 a eu lieu une séance à laquelle ont participé A______, E______, responsable du service environnement, F______, secrétaire générale adjointe et G______, assistant au service des ressources humaines.

Selon le procès-verbal, la séance avait pour but de permettre à A______ de relater sa version des événements qui s’étaient produits lors de l’apéritif organisé le vendredi 29 avril 2022 pour célébrer le départ à la retraite d’un collègue.

A______ a expliqué ne se rappeler que du début de la soirée. Il avait commencé par une partie de pétanque à 16h15. Il avait bu du vin, mais peu car il était mauvais. Il avait reçu un message de sa femme et lui avait répondu en lui demandant de l’attendre pour manger car il n’envisageait pas de rentrer tard. Ensuite, c’était comme si quelqu’un avait retiré la prise et il ne se rappelait plus de rien. Le samedi, il s’était réveillé chez lui, couché par terre avec des convulsions. Il avait remarqué qu’il avait vomi dans les toilettes. Toute la journée, il avait eu des palpitations. Sa femme l’avait réprimandé car il avait endommagé une malle et avait des yeux de démon en rentrant. Il avait raconté tout cela à sa sœur, qui travaillait dans un hôpital, le samedi soir et celle-ci lui avait conseillé de consulter car elle pensait qu’il avait été drogué. Il s’était rendu à l’hôpital N______ le dimanche matin, et avait subi des examens de sang et d’urine, qui n’avaient révélé aucune trace d’alcool ou de drogue. Le médecin lui avait expliqué que ses symptômes évoquaient ceux d’une personne droguée à son insu, mais ne pouvaient pas être objectivés car la drogue n’était détectable que durant 24 heures. Son épouse lui avait relaté qu’il lui avait dit en rentrant s’être battu avec son collègue H______. Cela l’avait étonné, car celui-ci était l’un des hommes les plus gentils. Il l’avait appelé et lui avait laissé deux messages d’excuses. Le lundi, un collègue lui avait rapporté qu’il s’était emporté comme un diable et que trois collègues avaient dû le retenir. Il ne se rappelait pas de cela, ni de comment il était rentré chez lui en France. Il n’était pas du genre agressif quand il buvait, ce que son entourage avait confirmé à l’hôpital. Il s’entendait bien avec H______ et « rigolait » tout le temps avec lui. On lui avait dit qu’il était devenu comme fou. Il ne touchait jamais aux drogues.

F______ l’a informé avoir entendu plusieurs personnes, et qu’il s’agissait de faits d’une gravité extrême.

La commune avait décidé de le suspendre de son obligation de travailler pendant 48 heures, le temps pour l’instruction d’avancer.

t. La commune a recueilli plusieurs témoignages le 2 mai.

-          H______ a déclaré que durant le tournoi de pétanque A______ l’avait poussé et avait déchiré son T-shirt. Des collègues les avaient séparés mais A______ avait tenté de lui donner un coup de poing. Il s’était blessé à la main gauche en tentant de se protéger. Trois collègues avaient plaqué A______ au sol. Celui-ci avait saisi une boule de pétanque et tenté de la lui jeter dessus. Il y avait ensuite eu un moment de calme, après quoi A______ était à nouveau venu vers lui pour le frapper. Des collègues étaient à nouveau intervenus. Après une accalmie, A______ avait essayé de le blesser en jetant une boule dans sa direction. Sur conseil d’un collègue, il avait quitté les lieux tremblant et en larmes. Durant la soirée, A______ l’avait insulté, lui disant « Suisse de merde », « je vais te tuer ». Il avait déposé plainte contre lui. Il ne dormait plus. Il ne voulait plus travailler avec lui.

-          I______ a déclaré avoir vu le T-shirt déchiré d’H______, vu que A______ avait « pété un câble » et qu’il avait attrapé une boule de pétanque, l’avoir retenu pour l’empêcher de la jeter contre H______, être resté discuter avec A______ pour tenter de le calmer, et que par deux fois celui-ci, comme il tentait de le calmer, avait voulu faire mal à H______, notamment en tentant à nouveau de lui jeter une boule de pétanque, et avoir été témoin plus tard que A______ avait voulu lancer un pavé sur H______.

-          J______ a déclaré avoir vu le T-shirt déchiré d’H______, trouvé que A______ n’était pas dans son assiette, vu des collègues le retenir pour protéger H______, considérer A______ comme une personne dangereuse et se sentir mal à l’aise à l’idée de le croiser au travail.

-          D______ a notamment déclaré que durant la partie de pétanque, A______ avait affirmé que son équipe n’avait pas perdu une manche et avait accusé l’équipe d’H______ d’avoir triché pour arriver en finale, ce à quoi H______ avait répondu « On sait A______, tu es le meilleur ». A______ s’était alors énervé et approché d’H______, l’avait poussé et avait déchiré son T-shirt. Des collègues s’étaient interposés et les avaient séparés. A______ était reparti à la charge et avait donné un coup de poing à H______. Plusieurs collègues l’avaient retenu et l’avaient plaqué au sol. Alors qu’il était au sol, A______ avait saisi une boule de pétanque et avait tenté de la jeter en direction d’H______. Plusieurs collègues l’avaient écarté pour le calmer, mais il avait cherché à prendre une brique ou un pavé pour se battre. Il s’était ensuite calmé et était retourné discuter avec H______, mais s’était à nouveau emporté. Il avait été plaqué au sol et avait à nouveau tenté de saisir une boule de pétanque. H______ avait alors décidé de partir, ce qui avait mis fin à l’incident.

u. Par décision du 3 mai 2022, la commune a libéré provisoirement A______ de son obligation de travailler.

Cette décision n’a pas été contestée et est entrée en force.

v. Le 5 mai 2022, F______ et E______ ont reçu A______.

Dans un courrier du même jour, formalisant l’entretien, ils lui ont annoncé l’intention de la commune de résilier les rapports de service pour violation d’importantes obligations légales ou contractuelles.

Le 29 avril 2022, il avait agressé H______ et tenté de l’agresser à plusieurs reprises, et des collègues avaient dû le maîtriser.

Le 1er octobre 2021, il avait tenu envers D______ des propos agressifs et adopté un comportement laissant entendre qu’il allait soulever son bureau et annoncé qu’il ne répondrait pas au téléphone durant le piquet de déneigement. Le 15 octobre 2021, il avait affirmé ne pas se souvenir des propos et n’avoir à aucun moment fait mine de soulever le bureau. Il avait finalement accepté de répondre durant le piquet. Un courrier de recadrage du 22 octobre 2021 l’avait mis en garde contre les conséquences de comportements ultérieurs de même nature.

w. Par décision du même jour, déclarée exécutoire nonobstant recours, la commune a prononcé la suspension provisoire de A______ avec maintien de son traitement.

Cette décision n’a pas été contestée et est entrée en force.

x. Par certificat médical du 13 mai 2022, le Dr K______, médecin praticien FMH et médecin traitant de A______, a indiqué avoir effectué un examen clinique le jour même, qui lui permettait d’attester que son patient présentait une amnésie rétrograde à la suite d’une probable intoxication par une drogue administrée par une tierce personne le 24 avril 2022 vers 19h00.

Selon un rapport du 13 mai 2022 établi par le centre d’imagerie médicale L______, une IRM effectuée le même jour avait révélé l’absence de lésion cérébrale significative récente, l’absence d’argument en faveur d’une maladie neuro-dégénérative significative et la présence de plusieurs microséquelles vasculaires constituées du cervelet à droite et une possible microséquelle à gauche sans sténose vasculaire significative du cercle de Willis, l’ensemble pouvant être en rapport avec un status post-dissection vertébro-basilaire post-traumatique.

Selon un rapport du 18 mai 2022, une IRM cérébrale et des troncs supra-aortiques effectuée le même jour par le même institut n’avait révélé aucune anomalie significative des troncs supra-aortiques, en particulier absence de
pseudo-anévrisme.

y. Le 28 mai 2022, A______ a transmis à la commune son récit des faits.

Il n’avait aucun souvenir de l’altercation et avait reconstitué les faits par ce qu’on lui avait rapporté. Il s’était senti mal tout le samedi et également le dimanche matin, souffrant de tachycardie et de palpitations, d’essoufflement et de nausées.

Sa sœur et son médecin traitant pensaient qu’il avait été drogué. Il était toujours essoufflé et avait une douleur à l’arrière du crâne. Il n’avait pas terminé ses examens médicaux et personne ne pouvait lui garantir que dans six mois il n’aurait pas de séquelles liées à cet événement.

Il ressortait des échos qu’il avait eus de la soirée qu’H______ l’aurait longuement « cherché » pour une raison inconnue, comme s’il avait volontairement voulu qu’il sorte de ses gonds. Il avait quitté la soirée en même temps que les autres, en scooter, et était arrivé chez lui vers 23h00. Il n’en avait aucun souvenir et avait reconstitué l’historique.

Il avait vraisemblablement été drogué par un collègue sur le lieu de la fête. Il espérait que cela n’aurait pas de conséquences physiques pour lui. Il déposerait plainte contre inconnu au Ministère public.

Il réitérait sa détermination sur les événements des 1er et 15 octobre 2021.

Il demandait s’il était normal qu’un collègue avec lequel il partageait les vestiaires lui touche les parties intimes trois à quatre fois par semaine et lui montre son sexe, à lui et à d’autres collègues. Depuis qu’il avait osé dire, en 2019, qu’il y avait des erreurs commises par ses supérieurs et qu’il était accusé à tort, il avait subi des humiliations et du mobbing, des accusations infondées, et il était régulièrement déplacé pour ne pas déranger, alors qu’il n’avait commis aucune erreur professionnelle. Il avait toujours fait correctement le travail demandé. Depuis 2019, bon nombre d’événements étaient dirigés injustement contre lui, comme si ses supérieurs cherchaient des déclencheurs pour lui faire perdre son poste. Ses supérieurs avaient délibérément coupé le lien de confiance en l’accusant à tort.

z. Par décision du 22 juin 2022, la commune a résilié les rapports de service.

Le comportement de A______ s’était significativement dégradé dès l’année 2019. Il n’avait pas accepté la démarche de ses collègues visant à restaurer un bon climat de travail dans l’équipe. Il s’était plaint à tort d’avoir été accusé de manquements aux consignes de sécurité pour les véhicules. C’était en raison de son refus de contrôler sa vue que ses tâches avaient été modifiées. Il s’était montré agressif avec son chef de service D______ et avait fait mine de renverser son bureau. Il avait agressé à plusieurs reprises H______ lors de l’apéritif de retraite d’un collègue.

La situation s’était détériorée depuis 2012 déjà. Ses comportements avaient violé son devoir de fidélité ainsi que les prescriptions relatives à la protection de l’intégrité personnelle et physique des employés de la commune. Les agressions répétées contre un collègue faisaient suite à divers épisodes reflétant un comportement inadéquat survenus dès 2012, malgré plusieurs mises en garde.

Ses justifications (intoxication par un tiers au GHB, actes d’ordre sexuel subis dans les vestiaires) étaient circonstancielles, récentes s’agissant des abus sexuels, et peu crédibles. Aucune place vacante ne pouvait lui être proposée dans la commune.

aa. Le 27 juin 2022, M______, épouse de A______, a adressé à la commune un courriel indiquant que son mari connaissait de « gros soucis de santé » suite à la soirée du 29 avril 2022. Elle transmettait un rapport de l’hôpital N______ du 16 juin 2022 révélant la découverte de plusieurs microséquelles vasculaires constituées du cervelet à droite. Son mari examinait la possibilité de se « retourner contre la commune ou directement contre son supérieur pour non-assistance à personne en danger ». Tout la monde avait cru qu’il avait bu alors qu’il n’était pas dans son état normal. Une plainte pénale avait été déposée contre H______ pour attouchements durant cette soirée et une autre pour diffamation et faux témoignage contre O______. Il était incapable de travailler depuis le 29 avril 2022.

bb. Selon certificats du Dr K______, A______ a été en arrêt de travail à 100% du 10 mai au 10 juillet 2022, du 24 juin au 27 juillet 2022, du 11 juillet au 15 août 2022, du 15 août au 14 septembre 2022, du 15 septembre au 14 octobre 2022, du 6 octobre au 18 novembre 2022, puis du 18 novembre 2022 au 27 janvier 2023. Selon certificat du Dr W______, il a été en arrêt de travail à 100% du 14 janvier au 5 février 2023, avec reprise à 100% dès le 6 février 2023.

cc. Le 8 juillet 2022, la commune a pris acte des certificats médicaux et exprimé un doute au sujet de celui du 28 juin 2022 rétroagissant au 10 mai 2022, en contradiction avec un précédent certificat. Elle a contesté intégralement les accusations portées contre elle en relation avec les allégations selon lesquelles A______ aurait été drogué, notamment celle de « non-assistance à une personne en danger ».

dd. Le 12 juillet 2022, la commune a demandé à A______ s’il souhaitait une rencontre en vue de formuler une plainte interne pour atteinte à sa personnalité. Il pouvait également formuler sa demande par écrit.

ee. Le 25 juillet 2022, le Dr P______ a indiqué à la commune que le résultat pathologique de l’examen médical réalisé le 13 mai 2022 avait probablement motivé le médecin de famille à changer d’avis quant à l’état général de son patient et à délivrer un arrêt de travail. Il ne pouvait en revanche lier l’altercation violente avec un collègue le 29 avril 2022 et le problème médical en cours d’évaluation.

ff. Le 29 juillet 2022, la commune a informé A______ que le courrier de résiliation des rapports de service du 22 juin 2022 était nul compte tenu de son incapacité de travail. Les griefs n’étaient cependant nullement remis en cause.

gg. Le 3 août 2022, A______ a indiqué à la commune que la résiliation des rapports de service était nulle compte tenu des certificats médicaux fournis et qu’il avait chargé un avocat de la défense de ses intérêts.

hh. Selon un rapport de l’hôpital N______ du 6 septembre 2022, A______ présentait des lésions cérébrales.

ii. Selon un rapport de l’hôpital N______ du 7 octobre 2020, A______ présentait des lésions cérébrales ischémiques. Il décrivait une fatigue importante depuis le mois d’avril 2022 et une dyspnée à l’effort. L’électroencéphalogramme montrait une activité un peu instable sans toutefois d’évidence en faveur d’une épilepsie. Pour l’épisode de trouble du comportement, un accident ischémique, qui ne se voyait par définition pas à l’IRM, transitoire ne pouvait être exclu, et serait favorisé par le shunt mis en évidence.

jj. Le 8 novembre 2022, la commune a informé A______ qu’elle envisageait de résilier les rapports de service, pour les mêmes motifs invoqués le 5 mai 2022.

L’éventuel harcèlement dont il disait avoir été la victime n’avait aucun rapport avec les reproches fondant le licenciement. Ses comportements inappropriés et inacceptables s’étaient perpétués depuis 2012 malgré plusieurs avertissements et recadrages. Aucune place vacante ne correspondait à ses compétences et aptitudes.

kk. Le 5 décembre 2022, A______ s’est déterminé.

Il était attaché à son emploi et souhaitait réintégrer son poste. Il contestait que de très nombreux problèmes auraient émaillé son parcours professionnel et qu’il aurait exprimé sa colère de manière répétée. Il n’avait pas adopté un positionnement de défiance quant à la démarche pour restaurer un bon climat de travail mais pointé d’importants dysfonctionnements nuisant à la sérénité de l’équipe. Il avait bien été accusé par ses supérieurs d’avoir inactivé le dispositif de sécurité de son camion et avait été atteint par ces accusations. Il avait effectué un contrôle de la vue le 21 octobre 2019 et n’avait pas de raison de s’y soumettre à nouveau en décembre 2019. Il avait par la suite demandé deux contrôles, les 23 juin et 29 octobre 2020, qui ne concluaient pas qu’il devait porter des lunettes. Il contestait fermement les propos qu’on lui avait prêtés à l’égard de D______. Il n’avait pas adopté de comportement menaçant, ni n’avait laissé entendre qu’il allait soulever le bureau de son chef. Il contestait avoir affirmé qu’il ne répondrait pas aux appels durant le piquet et avoir finalement accepté de mauvaise grâce de répondre. Il réitérait son désarroi et son incompréhension au sujet des événements du 29 avril 2022. Il ne se souvenait de rien. Les trois verres bus ce jour-là n’expliquaient ni son comportement ni son amnésie. Au vu des nombreux examens médicaux effectués, il était clair qu’il n’était pas dans son état normal ce soir-là. Les évènements, indépendants de sa volonté, ne pouvaient lui être reprochés. Il subissait depuis plusieurs années les pressions de ses supérieurs. D______ se permettait de s’adresser à lui dans des termes insultants, sans que des mesures ne soient prises, après qu’il eût informé le secrétaire général.

ll. Le 31 janvier 2023, il a informé la commune qu’il avait subi le même jour une opération visant à refermer le foramen oval perméable entre les deux oreillettes de son cœur.

Compte tenu de son solde de vacances, il souhaitait prendre deux semaines de congé et pourrait reprendre le travail dès le 20 février 2023. La commune était invitée à organiser son retour au travail.

mm. Par décision du 3 février 2023, déclarée exécutoire nonobstant recours, la commune a résilié les rapports de service de A______ avec effet au 31 mai 2023, pour les motifs invoqués le 22 juin 2022.

Le rappel des règles de sécurité concernant les véhicules avait été adressé à tous les collaborateurs pour éviter des accidents graves, et aucune sanction n’avait été prise contre lui. L’examen de la vue qui lui avait été demandé visait à établir ses capacités de conduite à titre professionnel. L’attestation du 23 juin 2020 qu’il avait finalement transmise indiquait qu’il pourrait conduire un camion sans lunettes mais qu’il était préférable qu’il en porte en tout cas la nuit pour un meilleur confort et une meilleure acuité. Son déplacement avait été décidé par précaution, dans l’attente de connaître son aptitude à la conduite.

Contrairement à ses affirmations, ses supérieurs hiérarchiques n’avaient pas eu une attitude inappropriée à son égard, pas plus qu’ils ne l’avaient harcelé psychologiquement. Indépendamment des changements dans sa hiérarchie, ses problématiques de comportement étaient restées les mêmes et n’avaient fait que s’aggraver avec le temps nonobstant toutes les mises en garde. Ses allégations de mobbing semblaient être un moyen de défense dilatoire. Il ne les avait plus réitérées dans ses observations du 5 décembre 2022.

Les lésions mises en évidence par les examens médicaux ne justifiaient aucun de ses comportements. Aucun élément médical ne permettait de confirmer que ses problèmes de comportement depuis 2007 jusqu’aux derniers événements d’octobre 2021 et avril 2022 étaient consécutifs à un éventuel accident ischémique transitoire (ci-après : AIT) ou à un problème cardiaque. Les symptômes d’un AIT étaient notoirement des troubles moteurs et sensitifs, de troubles de la parole et du langage, de la vision, de l’équilibre et des maux de tête inhabituels et persistants ne répondant pas à un traitement antidouleur. Aucun des événements d’octobre 2021 ou avril 2022 ne pouvait s’expliquer par un AIT ou des problèmes cardiaques.

Ses comportements agressifs et impulsifs inappropriés, contraires aux art. 13 al. 2 et 91 al. 2 du statut du personnel de la commune B______ du 14 décembre 2020 (SP - LC 30 151), s’étaient multipliés et aggravés depuis 2007 nonobstant toutes les mesures prises, jusqu’à ce que la situation entraîne une rupture des relations de confiance, vu l’impact toujours plus important sur le bon fonctionnement du service concerné.

Le licenciement était fondé sur des motifs pertinents au sens de l’art. 35 SP.

Aucune place vacante au sein de la commune ne correspondait à ses aptitudes et capacités. Aucune réintégration ne serait envisagée. Il était libéré de son obligation de travailler.

B. a. Par acte remis à la poste le 6 mars 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation, à ce qu’il soit dit que la résiliation était contraire au droit, à ce que la commune soit condamnée à lui verser une indemnité équivalent à six mois de son dernier traitement brut et à ce que la commune soit condamnée à lui délivrer un certificat de travail.

Le 11 janvier 2012, il avait exprimé son mécontentement à un collègue qui l’avait laissé rentrer à pied au dépôt durant la pause de midi. Le recadrage qu’il avait subi de la commune était injustifié.

L’ambiance de travail était lourde depuis 2019, en raison d’une répartition très inéquitable de la charge de travail entre équipes, ce qu’il avait signalé à sa hiérarchie. Il avait pointé ses difficultés avec sa hiérarchie et mis en exergue que le responsable, Q______, dénigrait sans cesse le travail des collaborateurs. Les difficultés avec sa hiérarchie duraient depuis des années. En 2018 il avait entendu D______ dire à son propos « il est toujours pas là l’autre con ? », et Q______ l’avait menacé de le frapper d’un coup de poing dans la figure.

Il avait passé un examen de la vue pour son permis français le 10 octobre 2019. Aucun problème n’avait été relevé, raison pour laquelle il n’y avait pas lieu qu’il se soumette à un nouvel examen en décembre 2019. Après les deux examens qu’il avait subis en mai et juin 2020, il avait fait faire une paire de lunettes, qu’il portait toujours pour conduire son camion.

R______ avait insisté pour qu’il reconnaisse devant D______ et Q______ avoir inactivé un dispositif de sécurité. Il avait dû faire intervenir ses collègues S______, T______, U______ et V______ pour qu’ils confirment que c’était en réalité Q______ qui « scotchait » les dispositifs. Il en avait éprouvé un grand sentiment d’injustice.

Il contestait avoir tenu à D______ les propos qu’on lui prêtait et d’avoir fait mine de soulever son bureau. Il s’était simplement levé et avait perdu l’équilibre en raison d’une douleur persistante au genou due à une lésion du ménisque. Il contestait avoir dit qu’il ne répondrait pas au téléphone durant les piquets. Il avait dit qu’il serait disponible et l’avait été. Il avait réfuté avoir créé un climat de travail rendant le dialogue difficile.

Il résultait des examens médicaux que les agissements du 29 avril 2022 ne lui étaient pas imputables. Il était encore traumatisé par ce qui lui était arrivé, d’autant plus qu’il n’avait bénéficié d’aucun appui de sa hiérarchie, qui, au contraire, s’était appuyée sur les événements pour justifier son licenciement.

H______ avait retiré la plainte pénale qu’il avait déposée contre lui. Une ordonnance de classement avait été rendue par le Ministère public. Les frais de la procédure et une juste indemnité pour ses frais avaient été mis à charge d’H______.

Les motifs du licenciement étaient infondés. La commune n’avait pas de légitimité pour remettre en cause les résultats d’examens médicaux. Or, force était de constater, au vu de ceux-ci, qu’il n’était pas dans son état normal le 29 avril 2022. Il n’avait commis aucun acte susceptible de porter atteinte aux intérêts de la commune. Les deux lettres de recadrage étaient infondées et l’une datait de plus de dix ans. La résiliation, prononcée sans aucune sanction disciplinaire préalable, était contraire au droit.

La commune ne souhaitant pas le réintégrer, il réclamait une indemnité de six mois de son dernier traitement brut.

b. Le 10 mai 2023, la commune a conclu au rejet du recours, à la comparution personnelle des parties et à l’audition de nombreux témoins.

Le fait de ne pouvoir s’intégrer dans une équipe ou de présenter des défauts de comportement ou de caractère tels que toute collaboration était difficile ou impossible était de nature à fonder la résiliation des rapports de service.

La directive communale relative à la protection de l’intégrité personnelle des employés de la commune prévoyait qu’en fonction de leur gravité, des agissements ne respectant pas ses termes pouvaient entraîner une résiliation ordinaire ou immédiate du contrat de travail.

La résiliation était fondée et respectait le principe de proportionnalité. Toutes les démarches et toutes les stratégies possibles avaient été tentées pour ramener le recourant dans le droit chemin. Aucune réintégration ne pouvait lui être imposée et aucune indemnité n’était due.

c. Le 27 juillet 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions.

Le 4 juin 2023, le Dr W______ avait confirmé que des lésions cérébrales ischémiques avaient été découvertes. Il avait précisé qu’il n’avait pas d’argument pour une origine épileptique pouvant expliquer le trouble du comportement du patient. Une origine ischémique restait une possibilité. En effet, certaines structures pouvaient donner lieu à un état confus en cas d’ischémie (thalamus, lobe temporal). Ses médecins tenaient donc pour possible que l’épisode du 29 avril 2022 ait été causé par un problème médical.

d. Le 19 septembre 2023, le juge délégué a entendu les parties et des témoins.

d.a. Le recourant ne se rappelait pas d’une partie de la soirée et de la nuit du 29 avril 2022. Il s’était réveillé le lendemain dans la chambre d’amis, par terre, avec son chien qui lui léchait le visage. Sa femme lui avait dit qu’il était rentré très énervé et avait donné un coup de pied dans la malle servant à entreposer le bois de cheminée au salon. L’enregistrement de la caméra de surveillance le montrait nerveux et sortant avec son chien. Avant de sortir, il avait dit à sa femme qu’il s’était « pris la tête avec H______ ». La caméra enregistrait également le son. Le lendemain, son voisin lui avait dit qu’il l’avait trouvé à 7 km de chez lui avec son chien. Il avait appelé son collègue pour s’excuser mais celui-ci ne voulait plus lui parler et le traitait de monstre. Il avait appelé sa sœur, qui travaillait comme urgentiste à l’hôpital X______. Elle lui avait conseillé d’aller consulter rapidement, mais il n’avait pas écouté son conseil. Elle lui avait dit de garder son urine, ce qu’il avait fait dans la nuit de samedi à dimanche, mais à l’hôpital N______ on avait jeté son échantillon. Il ne se souvenait pas s’ils lui avaient fait une prise de sang, mais il se souvenait que le rapport mentionnait « intoxication OH », soit une intoxication à l’alcool. Le lundi matin ses collègues lui avaient dit qu’il était très difficile à maîtriser et avait de la bave à la bouche. Il avait toujours été convaincu qu’il n’avait pas été drogué, mais quelqu’un dans son entourage qui connaissait la loi lui avait dit que c’était mieux pour lui qu’il affirme cela. Il n’avait jamais déposé plainte. Il était convaincu que ses collègues ne l’avaient pas drogué. Son épouse avait écrit pour lui le courrier du 28 mai 2022.

d.b. Y______ n’avait pas vu l’altercation. Il avait eu avec A______ une conversation normale avant celle-ci. Tant lorsqu’ils étaient égaux entre 2007 et 2010 que par la suite quand il est devenu son chef, il n’avait jamais eu de problèmes avec A______, qui ne s’était jamais emporté contre lui. Il l’avait vu s’emporter contre D______, en relation avec le travail. Lui-même et D______ avaient plusieurs fois dit à A______ qu’il ne servait à rien de s’énerver quand il haussait la voix. Il l’avait vu s’énerver et s’emporter, mais jamais être violent physiquement. À sa connaissance, il n’y avait pas de conflit entre H______ et A______. D______ et lui-même avaient fait des remarques à A______ car il « discutait à droite à gauche » et le travail n’était pas accompli. Ils en avaient parlé lors d’un entretien d’évaluation et A______ s’était énervé. Il ne supportait pas qu’on lui fasse des remarques. Il se justifiait, mais ce n’était pas la réponse à ce qu’on lui faisait observer.

d.c. D______ se souvenait très bien de l’entretien du 1er octobre 2021. A______ avait réagi un peu vivement à l’affichage du planning des opérations de déneigement. Il n’était pas satisfait du véhicule qui lui était attribué. Il l’avait invité à en discuter dans son bureau et lui avait expliqué les arguments pour la répartition du planning. Ils avaient échangé leurs points de vue et à un moment donné A______ s’était emporté et avait dit qu’il ferait comme ses collègues et ne répondrait pas au téléphone. Il n’arrivait quasiment jamais que des collègues désignés sur le planning ne répondent pas au téléphone, et il lui avait dit qu’un tel refus équivalait à un abandon de poste. A______ avait alors mal réagi et lui avait dit « Qu’est-ce que tu vas faire ? Qu’est-ce que tu vas faire ? Qu’est-ce que tu vas faire ? », avant de saisir sa table et de la soulever un petit peu, étant précisé qu’il était assis. Ce n’était qu’après avoir fait mine de soulever son bureau qu’il s’était levé. Il avait alors mis fin à l’entretien. C’était après qu’il avait mis fin à l’entretien que A______ lui avait tenu les propos qu’on lui reprochait, notamment au sujet de son fils.

Ce n’était pas la première fois qu’il observait un comportement inadéquat de A______. Il avait dû le calmer alors qu’il s’était énervé en revenant au travail après un arrêt. Il avait une tendance à s’emporter et à se mettre en colère, et de la difficulté à accepter les remarques. C’était là le problème. Durant toutes ces années, il y avait eu plusieurs fois des emportements et il avait fallu plusieurs fois mettre les choses au point. Les qualités professionnelles de A______ étaient bonnes et son travail de bonne qualité. Il y avait eu des périodes où il s’entendait bien avec tous ses collègues et des périodes où il y avait eu des frictions. Les accrochages avaient surtout lieu avec sa hiérarchie, soit ses supérieurs successifs. Quand il était arrivé, A______ travaillait à 50% et ne parlait plus à son chef direct. Celui-ci avait été remplacé par Y______ et cela était allé mieux durant une période. Puis Y______ et lui avaient fait des remarques à propos du temps perdu et des priorités. A______ avait demandé à changer d’équipe et à ne plus être sous les ordres d’Y______.

Il avait assisté aux événements du 29 avril 2022. Durant la partie de pétanque, le ton était monté. Un collègue avait charrié A______, dont l’équipe était en tête. H______ était intervenu et avait dit à ce collègue que A______ avait raison et était bien en tête, et lui avait demandé de le laisser tranquille. Il avait également demandé à A______ d’arrêter de parler et de jouer. A______ s’était alors approché d’H______ et avait tenté de le frapper à la tête. Ce dernier avait esquivé le coup, mais son T-shirt s’était déchiré dans l’empoignade et des collègues étaient alors intervenus pour maîtriser A______. Ce dernier était parti se calmer dans un coin, mais était revenu assez vite vers H______, avait échangé deux mots avec lui puis s’était à nouveau emporté et avait dû être une nouvelle fois maîtrisé. Il avait tenté de saisir une boule de pétanque, mais sans succès. Ce soir-là il n’avait pas vu A______ boire plus que de raison. Il se souvenait s’être fait la réflexion que celui-ci avait dû « prendre quelque chose » car la violence était montée en flèche. Après le départ d’H______, A______ était de nouveau calme et posé. Il avait discuté un bon moment avec le responsable des parcs et promenades. Il avait l’air un peu éméché mais on voyait qu’ils se comprenaient. Il se souvenait l’avoir entendu dire : « Voilà où j’en suis arrivé, voilà tout ce qu’ils m’ont fait subir. »

Les accrochages avaient lieu surtout avec la hiérarchie, plus rarement avec les collègues. Il avait fait des remarques désobligeantes lors de la livraison d’un camion en présence des fournisseurs et il avait dû lui demander de se taire. Il prenait les remarques comme des critiques personnelles, même lorsqu’elles étaient adressées au groupe.

A______ avait conduit un camion dont le dispositif de sécurité (limiteur) avait été désactivé (scotché). Un supérieur lui avait fait la remarque et il avait répondu que ce n’était pas lui qui avait « scotché » le camion. À la même question, le chef d’équipe Q______ avait également répondu ne pas être l’auteur du « scotchage ». Or, il s’était avéré que c’était bien le chef d’équipe qui avait « scotché » le camion. Des mesures avaient été prises à l’encontre du chef d’équipe, mais A______ était mécontent et voulait qu’on le licencie. Il avait alors été rappelé que tous les chauffeurs, y compris A______, savaient en conduisant un camion que le limiteur de vitesse était désactivé dès lors qu’ils parvenaient à dépasser la vitesse de 30 km/h, et qu’ils prenaient ainsi tous le risque d’un accident, de sorte qu’une mesure de licenciement aurait dû concerner tout le monde. A______ n’avait subi aucune sanction en relation avec la désactivation des limiteurs.

C’était suite à des incidents, des « touchettes », et après que des collègues eurent affirmé que A______ avait de la peine à « voir clair » avant le lever du jour qu’ils avaient demandé au médecin conseil de lui faire passer un test de la vue, ce que A______ avait refusé, expliquant qu’ils n’avaient pas le droit de l’exiger de lui dès lors qu’il avait son permis. Il avait été décidé de ne pas le faire conduire aussi longtemps qu’il n’aurait pas fait le test.

Il y avait eu suffisamment de discussions et d’aménagements pour permettre à A______ de bien vivre au travail.

e. Le 1er novembre 2023, la commune a persisté dans ses conclusions.

f. Le 15 novembre 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions et demandé l’audition de Z______, V______ et M______.

C’était en regardant l’enregistrement de sa caméra de surveillance qu’il avait découvert qu’il avait dit à son épouse le soir après être rentré qu’il s’était « pris la tête » avec un collègue. Il avait alors immédiatement appelé celui-ci pour savoir ce qui s’était passé et éventuellement lui présenter ses excuses.

Il était tout à fait injuste de sanctionner aussi sévèrement, par une décision de licenciement, une personne qui ne se trouvait à l’évidence pas dans son état normal.

g. Le 17 novembre 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

h. Il sera revenu en tant que de besoin dans la partie en droit sur les allégués et les pièces des parties.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La conclusion en délivrance d’un certificat de travail excède le cadre du litige et est irrecevable.

3.             À titre préalable, le recourant demande l’audition de trois témoins.

3.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

3.2 En l’espèce, le recourant s’est vu offrir l’occasion de se déterminer et de produire toutes pièces utiles tant devant la commune que la chambre de céans. L’épisode du « scotchage » des limiteurs de vitesse est suffisamment instruit, et le fait de savoir si le recourant aurait été rappelé à l’ordre plus que ses collègues est sans pertinence pour l’issue du litige, de sorte que l’audition de Z______ et V______ ne se justifie pas. La séance du 15 octobre 2021 est également instruite à satisfaction, étant rappelé qu’elle avait pour but de permettre au recourant de se déterminer sur ses agissements du 1er octobre 2021, qu’elle a été résumée dans un courrier de l’intimée du 22 octobre 2021 et que la détermination du recourant est connue, de sorte que l’audition de son épouse sur ce point n’apparaît pas nécessaire. La chambre de céans considère qu’elle dispose d’un dossier complet et en état d’être jugé.

Il ne sera pas donné suite à la demande d’actes d’instruction.

4.             Le litige a pour objet le bien-fondé de la décision par laquelle la commune a résilié les rapports de service du recourant.

4.1 Les rapports de service entre le recourant et l’intimée sont régis par le SP.

Selon l’art. 2 SP, les rapports de travail entre l'employeur et son personnel sont régis par le SP et par les contrats individuels de travail de droit public conclus par l'administration. S'il y a contradiction entre le SP et le contrat de travail, la disposition contenue dans le SP est applicable (al. 1). Les dispositions pertinentes de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) s'appliquent par analogie aux rapports de travail, à titre de droit public supplétif, pour toutes les questions non réglées par le SP et les contrats de travail (al. 2).

4.2 Selon le SP, les valeurs internes qui caractérisent la commune et son engagement vis-à-vis des collaboratrices, des collaborateurs, des partenaires, des citoyennes et des citoyens sont la compétence, le respect – soit favoriser le vivre ensemble, respecter les diversités et le pluralisme sans perdre de vue l'intérêt général, cultiver l'éthique professionnelle et respecter l'intégrité de l'individu – et le dynamisme (art. 4 SP). La commune veille à prévenir l'arbitraire dans les rapports de travail, à garantir des relations respectueuses et à éviter toutes formes de discrimination notamment à l'embauche (art. 5 al. 2 SP). Elle met en œuvre les mesures propres à assurer la protection de la personnalité, de la santé, de l'intégrité et de la sécurité au travail des membres du personnel (art. 6 let. c SP). Elle veille à la protection de la personnalité et de la dignité du personnel par des mesures de prévention, d'information ou par tous autres moyens adéquats (art. 13 al. 1 SP). Chaque membre du personnel a droit à un traitement correct et respectueux de la part de ses supérieurs, de ses collègues et des usagers, dans le cadre de son activité professionnelle ou dans d'autres lieux s'ils portent préjudice à la personne dans le cadre de son emploi (art. 13 al. 2 SP). La commune met en place un système de gestion des conflits adéquat (art. 13 al. 3 SP). Toute forme de harcèlement est interdite, passible de sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu'au licenciement immédiat (art. 13 al. 4 SP).

4.3 Les membres du personnel ont un devoir de fidélité envers la commune. Ils sont tenus en toutes circonstances, d'agir conformément à ses intérêts légitimes et n'accomplir aucun acte susceptible de porter préjudice aux intérêts de la commune (art. 91 al. 1 SP). En application de ce devoir, les membres du personnel doivent notamment remplir leurs obligations avec diligence. Ils doivent n'avoir aucun comportement qui soit de nature à porter atteinte à son image, à son personnel ou à la confiance portée par les habitants de la commune à cette dernière. Ils doivent se montrer dignes de la considération et de la confiance que leur fonction exige (art. 91 al. 2 SP).

Ils sont tenus de respecter l'ordre hiérarchique, notamment en se conformant aux instructions de leurs supérieurs et en exécutant les ordres avec conscience et discernement (art. 92 SP).

Ils doivent s'entraider et se remplacer dans leur travail, selon les besoins du service et respecter scrupuleusement toutes les instructions données pour garantir leur sécurité dans l'exercice de leurs fonctions (art. 99 al. 1 let. c et f SP).

Lorsqu'elle le juge utile, la commune peut, aux frais de l'administration, convoquer chez le médecin-conseil le membre du personnel qui, pour des motifs de santé, n'exerce plus pleinement les tâches qui lui sont confiées. Elle peut également astreindre le personnel à se soumettre à des examens de contrôle médical prévus dans le cadre de mesures de médecine préventive (art. 108 SP).

4.4 Sous le titre « gestion des conflits », l’art. 114 SP prévoit que le personnel communal et les responsables de service s'efforcent de résoudre les conflits par la négociation (al. 1). La commune établit une procédure de gestion interne ou externe des conflits. Toute personne qui, dans sa relation de travail avec d'autres collaborateurs, rencontre d'importantes difficultés qui peuvent porter atteinte à sa personnalité, est victime de harcèlement ou rencontre un conflit de travail, peut librement faire appel à la procédure interne ou externe de gestion des conflits (al. 2). Aucun membre du personnel ne sera victime de représailles pour avoir recours à ce processus. Ce processus est couvert par une totale confidentialité (al. 3). Selon la gravité des faits, et sur demande de la personne plaignante, la commune, sur préavis du service des ressources humaines, ouvre immédiatement une enquête administrative visant à établir l'existence ou non d'un cas d'atteinte à la personnalité et, le cas échéant, à proposer des mesures aptes à y remédier (al. 4). Une procédure interne (al. 5 à 8) et une procédure externe (al. 9 et 10) sont prévues.

4.5 Après la période d'essai, les parties peuvent résilier le contrat de travail pour la fin d'un mois moyennant un préavis de trois mois. La commune peut accepter un délai plus court. Des délais et des termes de résiliation plus courts peuvent être prévus dans les contrats individuels de travail pour des catégories de personnel particulières (art. 33 SP).

Sous le titre « résiliation par l'administration pour motif objectivement fondé de la collaboratrice, du collaborateur », l’art. 35 SP prévoit que la commune résilie les rapports de travail par voie de décision après avoir accordé au collaborateur le droit d'être entendu (al. 1). Pour résilier des rapports de travail, elle doit invoquer un motif pertinent tel que : (a) violation d'importantes obligations légales ou contractuelles ; (b) manquements répétés ou persistants dans les prestations ou dans le comportement, malgré deux avertissements écrits ; (c) aptitudes ou capacités insuffisantes pour effectuer le travail convenu dans le contrat ou mauvaise volonté de la personne à accomplir ce travail ; (d) la suppression du poste sans qu'il soit possible d'affecter la personne concernée à un autre emploi correspondant à ses capacités et aptitudes professionnelles ; (e) l'échec définitif aux examens obligatoires d'aptitude à l'exercice de sa profession (al. 2). La décision de résiliation doit être notifiée par écrit. Elle mentionne les motifs et la voie de recours (al. 3). La décision de licenciement est exécutoire nonobstant recours. Si la chambre administrative juge que la résiliation des rapports de service est contraire au droit, elle peut proposer à la commune la réintégration, sauf si l'employeur a d'ores et déjà signifié durant la procédure qu'une réintégration était impossible. En cas d'impossibilité de réintégrer la personne concernée, la chambre administrative fixe une indemnité pour résiliation contraire au droit qui ne peut être supérieure à six mois du dernier traitement de base à l'exclusion de tout autre élément de rémunération (al. 4). La commune peut libérer de ses fonctions un collaborateur dont les rapports de travail ont été résiliés. Le solde de vacances et le solde d'heures sont pris dans la mesure du possible sur le délai de congé (al. 5).

4.6 Il y a motif fondé – au sens de l'art. 22 de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05), dont les termes sont similaires à ceux de l’art. 35 SP – lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de : l'insuffisance des prestations (let. a) ; l'inaptitude à remplir les exigences du poste (let. b) ; la disparition durable d'un motif d'engagement (let. c). Le motif fondé n'implique pas l'obligation pour l'employeur de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration. L'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration, déterminant en la matière, sert de base à la notion de motif fondé, lequel est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel. Le premier cas de figure visé par la loi est aisé à saisir. Le second concerne par exemple un collaborateur incapable de s'adapter à un changement dans la manière d'exécuter sa tâche. Il en va ainsi de collaborateurs incapables de se former à de nouveaux outils informatiques. Le troisième cas concerne par exemple des collaborateurs frappés d'invalidité et, dès lors, durablement incapables de travailler (ATA/821/2023 du 9 août 2023 consid. 3.2 et les références citées).

Selon la jurisprudence portant sur ces dispositions, les motifs fondés de renvoi des fonctionnaires ou d'employés de l'État peuvent procéder de toutes circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, excluent la poursuite des rapports de service, même en l'absence de faute. De toute nature, ils peuvent relever d'événements ou de circonstances que l'intéressé ne pouvait éviter, ou au contraire d'activités, de comportements ou de situations qui lui sont imputables (arrêt du Tribunal fédéral 8C_585/2014 du 29 mai 2015 consid. 5.2 ; ATA/821/2023 précité consid. 3.3).

Des manquements dans le comportement de l'employé ne peuvent constituer un motif de licenciement que lorsqu'ils sont reconnaissables également pour des tiers. Il faut que le comportement de l'employé perturbe le bon fonctionnement de l'entreprise ou qu'il soit propre à ébranler le rapport de confiance avec le supérieur (ATA/821/2023 précité consid. 3.3 et les références citées).

4.7 L'employeur jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour juger si les manquements d'un fonctionnaire sont susceptibles de rendre la continuation des rapports de service incompatible avec le bon fonctionnement de l'administration. Les rapports de service étant soumis au droit public (ATA/1343/2015 du 15 décembre 2015 consid. 8 ; ATA/82/2014 du 12 février 2014 consid. 11 et les références citées), la résiliation est en outre assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité (art. 5 al. 1 Cst.), de l’égalité de traitement (art. 8 Cst.), de l’interdiction de l’arbitraire (art. 9 Cst.) et de la proportionnalité (art. 5 al. 2 et 36 al. 3 Cst. ; ATA/993/2021 du 28 septembre 2021 consid. 4e ; ATA/562/2020 du 9 juin 2020 consid. 6e et les références citées).

4.8 Le principe de proportionnalité, garanti par l'art. 36 al. 3 Cst., se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2).

4.9 Dans le cas du licenciement d’un employé d’une commune, la chambre de céans a considéré que pris isolément, il était douteux que le grief d’avoir adopté un ton démontrant peu de considération envers ses supérieurs et certains de ses collègues pouvait à lui seul fonder un licenciement. Le licenciement a toutefois été confirmé car d’autres manquements étaient également reprochés (ATA/598/2021 du 8 juin 2021 consid. 10 et 11).

La chambre de céans a confirmé la résiliation des rapports de service d’une fonctionnaire cantonale qui, en réaction à des rumeurs infamantes qu’une collègue avait fait circuler à son sujet, avait apposé sur plusieurs véhicules stationnés sur le parking du service un tract affichant une photo de celle-ci, son numéro de téléphone portable ainsi qu’un texte la dépeignant de manière particulièrement dégradante et offensante comme une nymphomane à la recherche de rencontres éphémères. La résiliation des rapports de service était une mesure apte à et nécessaire pour assurer le bon fonctionnement du service. La hiérarchie ne pouvait plus accorder sa confiance à la recourante, appelée à faire face au quotidien à des situations bien plus stressantes. Elle devait s’assurer que ses agents ne s’en prennent pas à leurs collègues sous l’effet du stress (ATA/562/2020 du 9 juin 2020 consid. 7).

Elle a confirmé la résiliation des rapports de service d’un employé des transports publics genevois auquel il était entre autres reproché d’avoir proféré des menaces verbales contre des collègues, d’avoir donné un coup de pied à un collègue et d’en avoir bousculé un autre, et ce quand bien même il avait par ailleurs subi de leur part des désagréments sous forme d’enfantillages, car ces agissements étaient à même de rompre le lien de confiance avec l’employeur (ATA/472/2018 du 15 mai 2018 consid. 9).

La chambre de céans a confirmé la révocation d’un fonctionnaire cantonal qui avait agressé verbalement et physiquement un supérieur hiérarchique dans un contexte professionnel et ce alors qu’il avait des relations conflictuelles avec sa hiérarchie, lesquelles ne permettaient pas d’établir un rapport de travail serein, que son comportement à l’endroit de ses supérieurs s’était progressivement aggravé et quand bien même il n’avait jusque-là fait l’objet d’aucune sanction (ATA/531/2011 du 30 août 2011 consid. 11).

Elle a confirmé la révocation d’une fonctionnaire cantonale qui avait réitéré depuis des années des comportements inadéquats envers ses collègues, puis frappé une collègue et tenu des propos grossiers et menaçants à l’endroit d’une autre. Malgré les efforts de l’employeur, qui avait accepté de la déplacer selon ses souhaits et qui lui avait offert des cours de français, aucune évolution positive de son comportement n’avait été observée. Au vu de la répétition des violences verbales envers les collègues, la poursuite des relations de service n’était plus envisageable, le service ne disposant pas d’autres sanctions pour maintenir une bonne entente entre employés (ATA/21/2010 du 19 janvier 2010 consid. 9).

4.10 En l’espèce, le recourant reproche à la commune d’avoir établi les faits de manière incorrecte et violé l’art. 35 SP.

4.10.1 Le recourant conteste avoir tenu des propos insultants à l’égard de ses collègues en 2012.

Or, le courrier de la commune, du 5 mars 2012, lui reproche les « propos malveillants, voire insultants [qu’il] a tenus publiquement à l’égard de [son] collègue » AA______, et mentionne qu’il ne s’agit pas du premier conflit généré par une attitude inappropriée. Ce courrier comporte la signature du recourant en accusant réception.

L’épisode est rappelé dans l’évaluation périodique du 20 décembre 2012, avec la mention que le recourant a depuis lors fait des efforts visibles pour pallier à ce manquement. L’évaluation porte la signature du recourant, lequel n’a pas émis de commentaire particulier.

Le recourant ne soutient pas qu’il aurait contesté en 2012 la relation de son comportement. Il explique aujourd’hui qu’il aurait alors simplement exprimé son mécontentement à un collègue qui, après ne pas avoir effectué son travail durant la matinée, était parti en voiture peu avant la pause de midi, le laissant lui et un autre collègue rentrer à pied au dépôt. Ce faisant, il ne conteste pas s’en être pris à un collègue, mais relativise l’intensité de son emportement. Le recourant échoue ainsi à rendre vraisemblable que le reproche de l’intimée serait infondé.

Cela étant, le comportement reproché au recourant en 2012 est ancien de sorte qu’il ne peut être pris en compte pour fonder son licenciement.

4.10.2 Le recourant conteste avoir méprisé les règles de sécurité en « scotchant » les régulateurs de vitesse ou en refusant de se soumettre à un test de la vue.

La décision attaquée ne reproche nullement au recourant d’avoir « scotché », ou inactivé, les dispositifs de sécurité limitant la vitesse des camions. L’intimée indique s’être limitée à l’époque à rappeler les règles de sécurité à toute l’équipe.

Le recourant se plaint cependant de ce qu’il aurait été accusé à tort à l’époque. L’intimée a expliqué qu’il lui avait simplement été demandé, comme à un autre collègue, s’il avait « scotché » son camion, ce qu’il avait nié, et qu’il avait finalement été découvert que c’était l’autre collègue qui avait inactivé le limiteur de vitesse. Quoi qu’il en soit, aucun reproche en rapport avec le « scotchage » n’est fait au recourant à l’appui de son licenciement.

La décision attaquée reproche au recourant d’avoir refusé dans un premier temps, en mai 2020, de se soumettre à un examen médical, comprenant un examen de la vue, pour faire le point sur ses aptitudes après une longue période d’absence, ce qui aurait contraint l’intimée à réorganiser temporairement son affectation.

Le recourant ne conteste pas avoir refusé de se soumettre à l’examen de la vue, mais explique qu’il avait subi un tel examen en France en octobre 2019, lequel n’avait pas révélé d’inaptitude, de sorte que l’examen qu’on lui réclamait n’était pas nécessaire. Ce faisant, il perd toutefois de vue qu’il était appelé à subir une visite médicale d’aptitude professionnelle, et non un examen ordinaire de la vue. Cela ressortait clairement de la première convocation, qu’il avait reçue le 22 novembre 2019 et à laquelle il avait déjà refusé de donner suite.

Quoiqu’il en soit, l’art. 108 SP prévoit que lorsqu'elle le juge utile, la commune peut, aux frais de l'administration, convoquer chez le médecin-conseil le membre du personnel qui, pour des motifs de santé, n'exerce plus pleinement les tâches qui lui sont confiées, et qu’elle peut également astreindre le personnel à se soumettre à des examens de contrôle médical prévus dans le cadre de mesures de médecine préventive. Il appartient plus généralement à la commune, en sa qualité d’employeur, de s’assurer (cura in custodiendo) que ses employés sont aptes à exercer leurs fonctions et ne mettent pas en danger les tiers, à peine d’engager sa responsabilité en cas de dommage. Il n’appartenait donc pas au recourant de décider en l’espèce de la pertinence d’un test ophtalmologique d’aptitude à la conduite de véhicules professionnels. L’intimée était d’autant plus fondée à considérer son refus comme présomptueux que les tests que le recourant allait finalement consentir à passer, s’ils ne prescrivaient pas formellement, recommandaient du moins le port des lunettes pour la conduite des camions, en particulier la nuit, et que le recourant lui-même, dans ses écritures, a indiqué qu’il s’était fait faire une paire de lunettes qu’il avait ensuite systématiquement portée quand il était au volant.

4.10.3 Le recourant conteste avoir adopté envers sa hiérarchie un positionnement défiant et inapproprié.

Ce positionnement ressort cependant des rapports d’évaluation. Le rapport d’évaluation du 3 septembre 2007 note un emportement parfois impulsif au chapitre de la communication et de la coopération (notation de 2/5). Le rapport d’évaluation du 2 novembre 2009 note un emportement parfois impulsif (notation de 2/5). Selon l’entretien de collaboration du 20 décembre 2012, il ne réagit pas de la bonne façon face aux difficultés, notamment dans ses relations avec ses collègues et a des réactions souvent trop agressives lorsqu’un problème se présente, quant au volume des prestations, la confiance et le respect mutuel ; la communication avec ses collègues est parfois problématique en raison de son caractère et en lien avec le comportement interpersonnel ; il doit faire preuve de calme et de retenue ; il ne répond pas aux exigences en matière de comportement interpersonnel (notation de 1/4) ; dans ses relations et discussions avec ses collègues, il doit faire un effort dans le ton qu’il utilise (souvent trop agressif) et faire preuve de plus de discrétion ; un courrier lui a été adressé le 5 mars 2012 et il a depuis fait des efforts visibles. Le rapport d’évaluation du 1er février 2018 note que le comportement interpersonnel, le volume des prestations et la confiance et le respect mutuels ne répondent que partiellement aux exigences (notation de 2/4) ; il a des difficultés à admettre ses erreurs et à en tirer les enseignements, y compris durant l’entretien d’évaluation ; il doit impérativement faire preuve de plus de discrétion, de calme et de tact de manière générale, garder son calme face aux difficultés et aux problèmes rencontrés et ne plus s’emporter face aux remarques de ses supérieurs. Il ressort de l’entretien de collaboration du 25 juin 2020 que son comportement est inapproprié et que ses colères répétées envers ses collègues et supérieurs doivent impérativement être corrigées ; les règles de respect mutuel et d’éthique doivent être appliquées ; leur transgression répétée n’est pas compatible avec une activité professionnelle au sein de l’administration de la commune.

Si les évaluations de 2007, 2009 et 2012 ainsi que les événements de 2012 sont anciens et ne sauraient fonder le licenciement du recourant, ils attestent cependant que les difficultés relationnelles et les comportements, inadéquats, existaient depuis longtemps et ne se sont pas améliorés sur la durée.

Sur le fond des reproches, le recourant a, certes, indiqué sur le rapport du 1er février 2018 accepter les remarques de ses supérieurs lorsque ces dernières étaient justifiées, contrairement au point de vue de sa hiérarchie et avoir la volonté de progresser, mais avec de nouvelles technologies. Il a également objecté que la discussion est impossible avec ses supérieurs et que les contacts sont difficiles, précisant qu’il ne peut pas tout faire en même temps. Il a par ailleurs contesté les résultats de l’entretien de collaboration du 25 juin 2020.

Cela étant, il a cherché à minimiser l’épisode de 2012 en contestant la version de sa hiérarchie. Il s’est montré défiant envers sa hiérarchie lors de l’épisode du contrôle de la vue en 2019 et 2020. Il a de sa main biffé les coches et amélioré la notation puis annoté les remarques de l’intimée dans un compte-rendu de l’entretien de collaboration du 25 juin 2020. Il admet avoir contesté la répartition des camions par son supérieur D______ le 1er octobre 2021. Le témoin Y______, s’il a indiqué que le recourant n’avait jamais eu de problèmes avec lui lorsqu’il était son supérieur, a précisé que celui-ci pouvait s’énerver facilement, qu’il s’était emporté contre ses supérieurs en revenant d’un entretien de collaboration, et plusieurs fois contre son supérieur D______ et qu’il ne supportait pas que ses supérieurs lui fassent des remarques. Le témoin D______ a également indiqué que le recourant avait de la peine à accepter les remarques et que les accrochages avaient surtout lieu avec sa hiérarchie.

Le recourant, qui se borne à nier l’attitude de défiance que lui reproche la décision attaquée, ne rend pas vraisemblable que les faits auraient été établis de manière incorrecte. La chambre de céans retiendra qu’il a montré dès 2007 une propension à l’emportement et un tempérament impulsif, qui l’ont conduit de manière répétée à se mettre en colère puis, graduellement, en opposition avec sa hiérarchie, dont il a régulièrement contesté, et de façon toujours plus véhémente, les choix et les instructions.

4.10.4 Le recourant conteste le comportement qui lui a été reproché durant l’entretien du 1er octobre 2021 avec son supérieur D______.

Il reconnaît avoir contesté la répartition des véhicules décidée par celui-ci et l’avoir suivi dans son bureau lorsqu’il lui a proposé d’en discuter. Il nie par contre lui avoir affirmé qu’il ne répondrait pas au téléphone comme ses collègues, l’avoir interpellé vivement au sujet de son fils et avoir fait mine de soulever son bureau.

Cependant, D______ a expliqué lors de son audition avoir voulu apaiser le recourant, qui avait réagi vivement à la répartition des camions, lui avoir expliqué les motifs de son choix, mais que celui-ci s’était emporté et avait dit qu’il ne répondrait pas au téléphone comme le faisaient ses collègues, et que c’était lorsqu’il lui avait dit qu’il considérerait une telle réaction comme un abandon de poste que le recourant aurait soulevé un peu sa table, lui demandant ce qu’il allait faire, sur quoi il avait mis fin à la discussion et le recourant lui avait alors parlé de son fils.

Le recourant aurait, selon le compte-rendu dressé par l’intimée le 22 octobre 2021, affirmé le 15 octobre 2021 qu’il ne se souvenait pas des propos qu’il avait tenus, contesté avoir fait mine de soulever le bureau et fini par admettre qu’il devait répondre aux appels de piquet. Le recourant nie depuis lors avoir tenu les propos reprochés et explique s’être appuyé sur la table à cause d’une douleur au genou et alors qu’il se levait, ce qui aurait pu prêter à confusion. Le témoin D______ a cependant contesté devant la chambre de céans cette allégation et affirmé que le recourant était assis lorsqu’il a soulevé son bureau.

Ainsi, les déclarations du recourant, qui ont varié, ne sont pas de nature à remettre en cause les déclarations constantes de son supérieur.

Le chambre de céans retiendra que les reproches de l’intimée sont établis et que les dénégations du recourant ne sont pas crédibles.

4.10.5 Le recourant conteste enfin avoir « agressé, avec conscience et volonté », son collègue H______. Il ne conteste pas ses agissements, tels que rapportés de manière unanime par plusieurs témoins, mais soutient, ou à tout le moins laisse entendre, qu’il aurait été privé de son discernement.

Il y a lieu d’observer préalablement que le recourant a soutenu dans un premier temps avoir été drogué à son insu durant l’apéritif, avec une substance dont toute trace aurait disparu dans les 24 h, à l’instar par exemple de la drogue dite « GHB » ou « drogue du violeur ». Il a expliqué que cette hypothèse avait initialement été formulée par sa sœur, médecin urgentiste en Italie. Il l’a présentée aux médecins qu’il a consultés, ainsi qu’il ressort des anamnèses. Il l’a toutefois finalement abandonnée, expliquant lors de son audition devant la chambre de céans qu’il avait toujours été convaincu qu’il n’avait pas été drogué mais que quelqu’un dans son entourage qui connaissait la loi lui avait dit que c’était mieux pour lui qu’il affirme cela.

Il reste à examiner les résultats des examens neurologiques, que le recourant reproche à l’intimée de ne pas avoir pris en compte.

Le recourant ne soutient pas explicitement que les lésions anciennes révélées par ces examens seraient la cause de son comportement, mais affirme dans son recours que « au vu des résultats des examens médicaux, il est clair [qu’il] n’était pas dans son état normal le 29 avril 2022 ».

Il souligne l’observation du Dr W______, selon lequel « en ce qui concerne l’épisode du trouble du comportement, nous ne pouvons pas exclure un AIT (accident ischémique transitoire) qui par définition ne se voit pas à l’IRM. Cet AIT serait favorisé par le shunt mis en évidence ».

Ne pas exclure un AIT ne signifie toutefois pas que celui-ci se serait produit, et encore moins qu’il aurait pu causer le comportement reproché au recourant et priver celui-ci de toute responsabilité.

Le recourant ne rend pas vraisemblable qu’un AVC aurait causé en l’espèce les agressions répétées et caractérisées de sa part sur une seule personne.

À ce propos, le recourant fait grief à l’intimée de remettre en question les résultats d’examens médicaux. Tel n’est toutefois pas le cas. La commune ne discute pas la découverte de lésions ischémiques, mais soutient qu’un AVC est sans pertinence pour la solution du litige. À raison, car les rapports médicaux ne concluent pas qu’une lésion ou une ischémie auraient provoqué le comportement du recourant.

Le déroulement des faits, tel qu’il ressort du dossier, montre que le recourant semble en réalité avoir réagi à un mot d’H______ alors que se déroulait la partie de pétanque et s’en être pris exclusivement et systématiquement à ce dernier. Selon les témoins, le recourant a plus d’une fois été maîtrisé par ses collègues et a paru reprendre son calme, avant de se précipiter à nouveau sur H______. Une fois ce dernier parti, le recourant n’aurait plus montré d’agressivité, aurait discuté avec un collègue et se serait plaint de tout ce qu’on lui avait fait subir.

Sans qu’il soit besoin d’ordonner une expertise, le comportement du recourant semble pouvoir être attribué à son tempérament coléreux et explosif et à sa propension à s’en prendre à ses collègues. Le recourant a évoqué des provocations qu’on lui aurait rapportées (H______ l’aurait « cherché »). Ces allégations ne trouvent toutefois aucun fondement dans la procédure. Il ressort plutôt des témoignages qu’H______ aurait demandé au recourant de se taire et de jouer, ce qui ne saurait être considéré comme une provocation et ne justifie en aucun cas le déferlement de violence par lequel le recourant a réagi.

Certes, le recourant affirme n’avoir aucun souvenir de l’agression et de la nuit qui l’a suivie – autre que les récits de son épouse, de son voisin et de ses collègues, ainsi que l’enregistrement de sa caméra de surveillance domestique. Cette assertion doit cependant être accueillie avec circonspection. Elle pourrait viser consciemment ou inconsciemment à éviter au recourant d’avoir à se confronter avec des agissements blâmables, et a en tout cas pour effet de dispenser celui-ci de s’expliquer sur le reproche le plus grave que lui a adressé son employeur.

La chambre de céans exclura ainsi que le recourant ait pu agir sous l’emprise d’une altération soudaine et totale de sa faculté de comprendre ou de vouloir.

4.10.6 Il reste à déterminer si la commune était fondée à prononcer le licenciement du recourant.

Il n’est pas douteux que l’agression commise par le recourant sur H______ constitue la violation d’importantes obligations légales ou contractuelles au sens de l’art. 35 al. 2 let. a SP, ne serait-ce que l’obligation de respecter la personnalité ainsi que l’intégrité psychique et physique des collègues, et justifie à elle seule la résiliation des rapports de service, conformément aux précédents jurisprudentiels cités plus haut.

Même s’il fallait admettre une altération partielle de la capacité de discernement du recourant, due à l’ivresse ou à un trait de personnalité pathologique telle la propension à la colère et à l’impulsivité, il ne pourrait être attendu de la commune qu’elle garde à son service un collaborateur qui serait susceptible de mettre en danger à l’avenir l’intégrité physique de ses collègues, et il faudrait admettre en toute hypothèse que le lien de confiance est irrémédiablement rompu.

Les autres reproches adressés au recourant pourraient peut-être, pris isolément, ne pas suffire pour justifier le prononcé d’un licenciement. Toutefois, pris ensemble et sans l’agression contre H______, dans la durée, et compte tenu de tous les efforts consentis par la commune pour aménager la situation du recourant et lui permettre de s’amender, ils dénotent chez ce dernier des traits caractériels qui sont allés en s’aggravant et qui ne permettent plus un fonctionnement satisfaisant du service.

La position de défiance adoptée par le recourant, son penchant à contester toute faute, à remettre constamment en question sa hiérarchie, à lui imputer la responsabilité de tous les dysfonctionnements et à l’accuser de vouloir lui nuire, justifient pleinement que la commune considère que le lien de confiance est irrémédiablement rompu et se sépare de lui.

Le licenciement apparaît ainsi pleinement fondé. Le recourant ne soutient pas, à juste titre, qu’une autre mesure moins incisive permettrait d’atteindre le but de l’écarter des effectifs de la commune pour préserver celle-ci de son comportement.

La conclusion en allocation d’une indemnité devient ainsi sans objet.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de procédure de CHF 1'500.-, tenant compte de l’audience d’enquêtes, sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la commune, qui compte plus de 10'000 habitants, soit une taille suffisante pour disposer d'un service juridique, et est par conséquent apte à assurer la défense de ses intérêts sans recourir aux services d'un avocat (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/953/2023 du 5 septembre 2023 consid. 9).

Compte tenu des conclusions du recours, la valeur litigieuse est supérieure à CHF 15'000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure de sa recevabilité, le recours interjeté le 6 mars 2023 par A______ contre la décision de la commune B______ du 3 février 2023 ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Robert ASSAËL, avocat du recourant ainsi qu'à Me François BELLANGER, avocat de commune B______.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Florence KRAUSKOPF, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :