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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/710/2023

ATA/1225/2023 du 14.11.2023 ( AMENAG ) , REJETE

Descripteurs : CARRIÈRE;AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;MESURE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE;PLAN D'AFFECTATION CANTONAL;CIRCONSTANCES;MODIFICATION(EN GÉNÉRAL);RÉVISION(PLAN D'AMÉNAGEMENT)
Normes : LaLAT.13.al1.leti; LaLAT.13A.al2; LAT.21.al2
Résumé : Rejet d’un recours déposé contre un arrêté du Conseil d’État jugeant irrecevable la demande de réexamen de la commune de Bernex déposée à l’encontre d’un plan d’extraction de gravière adopté le 30 octobre 2013. Examen du droit d’être entendu et du devoir d’instruction d’office. Les conditions d’un réexamen ne sont pas remplies, même s’il fallait retenir que la commune avait un intérêt pour ce faire, question qui a été laissée indécise.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/710/2023-AMENAG ATA/1225/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 novembre 2023

 

dans la cause

 

COMMUNE A______ recourante
représentée par Me Nicolas WISARD, avocat

contre

 

CONSEIL D’ÉTAT

et

B______ SA
C______ SA
D______ SA intimés

représentées par Me Laurent BAERISWYL, avocat



EN FAIT

A. a. Le plan d’extraction de gravière « E______ » PE 1______ a été adopté par le Conseil d’État par arrêté du 30 octobre 2013. Il recouvre une surface de 103 hectares en zone agricole et s’étend au nord de la route de F______ de part et d’autre de la route d’G______. Le quart nord-ouest du périmètre est situé sur le territoire de la commune d’G______, le reste du périmètre est sis sur la commune A______. Ce plan correspondait à une zone d’exploitation du plan directeur des gravières, adopté le 28 juillet 2010 par le Conseil d’État, avec un volume potentiel d’environ 25 millions de m3. Le plan d’extraction reposait notamment sur un rapport d’impact sur l’environnement de mars 2013 (ci-après : RIE 2013), établi par H______ SA (ci-après : H______).

L’exploitation du site était prévue sur cinq étapes A à E, divisées chacune en secteurs et sur une soixantaine d’années.

b. Le 25 août 2016, une autorisation d’exploiter no 2______ se rapportant à l’exploitation des secteurs A1 à A6 de l’étape A et des secteurs B1 à B4 de l’étape B du plan d’extraction a été délivrée par le service de géologie, sols et déchets (ci‑après : GESDEC) agissant pour le compte du département devenu depuis lors celui du territoire (ci-après : le département) en faveur d’un consortium de sociétés :

-          B______ SA (ci-après : B______) est inscrite au registre du commerce (ci‑après : RC) du canton de Genève depuis le 14 juin 2013 et a son siège à I______. Elle a pour but l’exploitation de gravières, le recyclage et le négoce de matériaux et toutes activités s’y rapportant ;

-          C______ SA (ci-après : C______) est inscrite au RC du canton de Genève depuis le 16 mars 2016 et a son siège au J______. Elle a pour but l’exploitation de gravières, le transport, la vente et le commerce de sables, de graviers et de tous matériaux ainsi que toutes opérations qui s’y rattachent ;

-          D______ SA (ci-après : D______), est inscrite au RC de K______ depuis le 9 décembre 1961 et a son siège à K______. Elle a pour but notamment l’extraction, la transformation et la distribution de sables et de graviers ainsi que la fabrication et la distribution de béton prêt à l’emploi et de produits apparentés.

L’autorisation reposait sur un RIE, datant de 2016, réalisé par H______ (ci-après : RIE 2016).

Les exploitants ont conclu des contrats de servitude de gravière avec la commune ainsi qu’avec les autres propriétaires des parcelles concernées, s’engageant à verser une redevance par m3 de matériaux extraits.

 

Les travaux d’extraction ont débuté en 2017 sur le périmètre de l’étape A, constitué notamment de parcelles propriétés de la commune A______ (nos 2'341, 2'428, 8'398, 8'783).

Une requête d’autorisation complémentaire incluant les secteurs B5 et B6 (n3______) a été déposée le 12 octobre 2021. Un addendum au RIE 2016 a été établi en mars 2022.

c. Le 30 juin 2021, la commune A______ a saisi le GESDEC d’une demande de réexamen du plan d’extraction. La réalité du potentiel d’exploitation était en totale dissonance avec les projections du RIE sur lesquelles reposait le plan d’extraction adopté. En effet, les volumes extraits étaient très inférieurs à ceux prévus. En sa qualité de plan d’affectation, le plan d’extraction était soumis au mécanisme du réexamen. Les circonstances révélées par l’exploitation effective du gisement ayant apporté un éclairage nouveau important, un réexamen s’imposait.

Le 17 novembre 2021, le GESDEC a invité la commune à émettre un préavis sur un projet de plan d’extraction PE 4______.

Les 23 novembre et 14 décembre 2021, la commune a réitéré sa demande de réexamen du PE 1______, rappelant les faits nouveaux. Elle a requis la suspension du projet de plan PE 4______ et de la demande d’autorisation d’exploiter pour l’étape B et formulé un préavis défavorable.

Le 16 décembre 2021, le GESDEC a répondu à la commune qu’il procédait à une réévaluation des volumes exploitables sur l’ensemble du périmètre du plan d’extraction, l’opportunité d’un réexamen serait évaluée début 2022, à l’achèvement de la réévaluation.

Le 10 février 2022, la commune a réitéré sa demande au GESDEC, lequel est venu présenter au Conseil administratif, le 28 avril 2022, les données actualisées du potentiel exploitable des gravières de E______ selon les investigations complémentaires effectuées par L______. Il n’y avait pas lieu de modifier le plan PE 1______. Un volume de « découverte » non valorisable à peine plus élevé que selon les pronostics des RIE était constaté.

Le 19 mai 2022, la commune a contesté l’estimation du GESDEC sur le volume de « découverte » et l’a sommé de traiter sa requête en réexamen. Sans réponse, elle a réitéré sa demande le 30 juin 2022.

d. Le 30 juin 2022, la commune a élargi sa demande de réexamen à l’autorisation d’exploiter no 2______ en raison des données rendues disponibles par le GESDEC illustrant les écarts de potentiel exploitable pour les étapes B1 à B4. Le réexamen devait aboutir à l’annulation de l’autorisation s’agissant des étapes B1 à B4.

Le 19 mai 2022, le GESDEC a proposé à la commune de mandater un expert géologue indépendant pour réévaluer les volumes des différents types de matériaux sur le périmètre non encore exploité et, cela fait, d’évaluer si un réexamen du PE 1______ devait être effectué.

Le 5 septembre 2022, la commune a répondu au GESDEC qu’elle n’acceptait pas que sa demande de réexamen du 30 juin 2021 soit encore différée.

e. Le 14 septembre 2022, la commune a interjeté un recours en déni de justice auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) pour enjoindre au GESDEC, pour le compte du département, d’entrer en matière sur sa demande de réexamen de l’autorisation d’exploiter no 2______, non encore mise en œuvre, à l’exception du décapage superficiel de la terre végétale.

Le 4 novembre 2022, la commune a demandé, à titre de mesures super provisionnelles, l’interruption immédiate de toutes démarches et/ou travaux concernant l’exploitation des étapes B1 à B4 jusqu’à droit décidé, voire jugé, sur la demande de réexamen de l’autorisation no 2______.

f. Le 5 novembre 2022, le GESDEC a rendu une décision d’entrée en matière sur la demande de réexamen de l’autorisation d’exploiter no 2______.

Cette décision a entraîné le retrait du recours en déni de justice le 20 octobre 2022 (RTAPI/371/2022 du 29 octobre 2022).

Le 23 décembre 2022, sans réponse du GESDEC, la commune a recouru auprès du TAPI pour déni de justice dans le cadre de la demande en réexamen de l’autorisation d’exploiter.

B. a. En parallèle, le 14 septembre 2022, la commune a interpellé le Conseil d’État, en sa qualité d’autorité décisionnaire quant aux plans d’extraction et a requis qu’il ordonne au GESDEC d’entrer en matière sur sa demande de réexamen du plan d’extraction.

Elle a renouvelé sa demande le 4 novembre 2022. Au vu de la décision du GESDEC du 5 octobre 2022 admettant l’existence de faits nouveaux au sujet du potentiel exploitable des gisements de E______, une entrée en matière sur sa requête se justifiait. Elle mettait le Conseil d’État en demeure de statuer dans les plus brefs délais, les travaux en cours créant une situation de fait irréversible.

b. Le 23 décembre 2022, après n’avoir reçu que des accusés de réception à ses demandes faites au Conseil d’État, la commune a interjeté un recours en déni de justice auprès de la chambre administrative de la Cours de justice (ci-après : la chambre administrative). Ce recours a été enregistré sous A/4399/2022.

c. Le 25 janvier 2023, le Conseil d’État a adopté un arrêté déclarant irrecevable la demande de réexamen du plan d’extraction de la commune et la rejetant au besoin.

Le plan d’extraction ne faisait pas partie des plans explicitement énumérés à l’art. 13 al. 1 et. a et b de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30). Les plans d’extraction figuraient à la let. i de cet article et avaient donc été sciemment écartés par le législateur comme possible objet d’un réexamen (art. 13A al. 2 LaLAT). Pour le surplus, la condition du délai de dix ans depuis l’adoption du plan n’était pas non plus remplie, celui-ci étant en force depuis neuf ans. En outre, les circonstances ne s’étaient pas sensiblement modifiées au sens de l’art. 21 al. 2 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700).

C. a. Par acte mis à la poste le 27 février 2023, la commune a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre l’arrêté du Conseil d’État, concluant à son annulation et à ce qu’il soit ordonné à ce dernier de procéder au réexamen du plan d’extraction PE 5______.

Elle invoquait une violation de son droit d’être entendue du fait que le Conseil d’état n’avait pas versé au dossier le rapport complet de L______ SA, seulement un extrait très réduit. Le rapport avait été mis en consultation par le GESDEC pour la commune mais, malgré ses demandes, elle n’avait pas eu accès au dossier. Elle n’avait pas non plus eu accès aux déterminations des exploitants. Aucun échange d’écritures n’était intervenu ni n’avait été communiqué durant la phase d’instruction de la demande de réexamen.

Le Conseil d’état avait violé son devoir d’instruire d’office. À sa connaissance, il n’avait procédé à aucune mesure d’instruction suite à la demande de révision. Tout laissait penser qu’il n’avait pas à disposition des données mises à jour correspondant en qualité et quantité à ce qui avait été initialement requis pour l’élaboration des RIE. Une mise à jour du RIE devait être conduite avec rigueur, transparence et dans un délai compatible avec les échéances liées à la progression de l’exploitation.

Le Conseil d’État avait violé l’obligation de réexaminer le plan d’extraction. La jurisprudence rendue au sujet de l’art. 21 al. 2 LAT impliquait que la phase d’entrée en matière ne pouvait être court-circuitée par la vision que l’autorité se faisait d’ores et déjà de l’avenir du plan, sous peine de priver sa décision des bases factuelles nécessaires pour qu’elle soit prise en connaissance de cause.

La voie du réexamen des plans d’affectation pour unechte Nova était ouverte comme s’il s’agissait de décisions administratives. De tels faits nouveaux anciens avaient été mis en lumière, les pronostics posés lors de l’élaboration du plan puis de l’octroi de l’autorisation d’exploiter étaient très largement erronés. Selon les chiffres transmis par les exploitants, le volume de tout-venant extrait (c’est-à-dire de matériaux valorisables) ne représentait que moins de 30% du volume pronostiqué par le RIE 2013.

Ces faits nouveaux étaient pertinents et importants quant à l’objet du plan d’extraction. Ceux-ci devaient permettre d’effectuer une pesée globale de tous les intérêts concernant l’aménagement du territoire, la protection de l’environnement, la gestion des eaux et la protection de la nature et du paysage.

Dans la pesée des intérêts, la prééminence donnée à la protection des investissements des exploitants était excessive et infondée. Elle n’avait jamais été informée des indications qu’auraient fournies les exploitants au sujet de leurs investissements.

La confirmation par le Conseil d’État de l’intérêt prépondérant à l’exploitation des gravières constituait une pesée erronée des intérêts, ne tenant pas compte de l’impact sur la biodiversité et sur les surfaces d’assolement.

b. Le 15 mai 2023, D______, B______ et C______ (ci-après : les exploitants), ont répondu au recours par acte commun, concluant à son rejet.

La commune qualifiait d’inexploitable l’ensemble des matériaux issus de la gravière de E______ non soumis à redevance selon le contrat de servitude signé entre les exploitants et la commune. Elle mélangeait les aspects économiques relatifs à ses intérêts privés et le caractère exploitable au sens technique des différents types de matériaux composant le gisement de E______.

Il fallait distinguer :

-          le tout-venant, la phase graveleuse constituée de mélange de sable et de petits graviers ou galets, exploitable et rentable ;

-          la découverte morainique, phase limono graveleuse, exploitable mais non rentable ;

-          la découverte argileuse, couches inexploitables de la gravière, soit la terre végétale, sa sous-couche arable, le retrait würmien ainsi que la moraine würmienne.

Ces catégories étaient théoriques et le contenu en matériel fin et la présence de consolidation argileuse pouvaient, en fonction des proportions, rendre le matériel initialement exploitable intraitable.

Dès le début de l’exploitation, des rapports périodiques des volumes extraits avaient été transmis aux propriétaires des parcelles. Au cours de l’année 2018, il avait été constaté que les sols de l’étape A comportaient une découverte argileuse plus importante que prévu et, d’autre part, que le traitement d’une partie des cailloutis morainiques, s’il restait exploitable, était non rentable. Les redevances versées avaient été moins élevées qu’escompté, n’étant payées que sur le tout‑venant. La découverte morainique n’était pas rentable mais demeurait exploitable. Les différences de volumes s’expliquaient par trois motifs, dont le fait qu’une part importante du volume ne pourrait être exploitée qu’à la fin de l’exploitation de la gravière, soit les matériaux situés au droit des pistes de chantiers, des installations et des plateformes. Malgré les explications données, les relations avec la commune s’étaient dégradées. Cette dernière avait déposé une demande en conciliation auprès du Tribunal de première instance le 3 mars 2021 mais n’avait pas jugé opportun de déposer une demande au fond.

L’exploitation de l’étape A était arrivée à échéance dans le premier tiers de l’année 2023, sauf les parties qui ne pourraient être exploitées qu’à la fin, estimées à 790'000 m3. Les chiffres étaient les suivants : tout-venant : 733'000 m3, découverte moraine : 451'500 m3, découvert argileuse : 609'500 m3.

Elles n’avaient jamais transmis le rapport de L______ au GESDEC. Seule une synthèse avait été présentée. Il n’y avait aucune raison de mettre en doute les volumes calculés sur la base du rapport de L______ et pris en compte par le GESDEC. La véritable critique était d’avoir mal qualifié la découverte morainique. Il était démontré que celle-ci était exploitable. La géologie d’un terrain pouvait varier considérablement sur quelques mètres. Il n’était donc pas exceptionnel que l’estimation des volumes des étapes B à E faite par la synthèse soit diminuée d’un tiers par rapport aux pronostics du RIE 2016 et non pas de la moitié comme cela avait été le cas sur l’étape A.

La recourante n’avait pas d’intérêt direct à obtenir la modification, voire l’annulation du plan d’extraction, dans la mesure où les parcelles en sa propriété avaient déjà été largement exploitées dans le cadre de l’étape A. Les conditions d’un réexamen n’étaient pas réalisées. La commune avait attendu la fin de l’exploitation de ses parcelles et d’avoir perçu ses propres redevances pour demander le réexamen du plan d’extraction PE 1______.

c. Le 15 mai 2023, l’office cantonal de l’environnement, pour le Conseil d’état a déposé des observations, concluant au rejet du recours.

Il répondait point par point aux allégations de la recourante. Celles concernant les volumes exploitables étaient formellement contestées. Il n’entendait pas prendre position dans le cadre du litige civil que la commune avait initié en mars 2021.

Il n’avait identifié aucun fait nouveau susceptible de conduire à modifier ou révoquer le plan d’extraction. La demande d’un nouveau RIE n’était pas recevable à ce stade.

Il restait selon les estimations 662'000 m3 de volume de matériaux valorisables à exploiter de l’étape A. Ajouté à celui du gravier extrait de la découverte morainique valorisée, on obtenait un volume exploitable de 1'843'500 m3, la différence avec les estimations représentait 15%. Pour l’ensemble du plan, elle serait de 30%. Il en ressortait que la différence était marginale et ne revêtait pas une importance suffisante pour conduire à une décision différente.

Concernant l’impact sur la biodiversité et les surfaces d’assolement, la commune utilisait ces arguments pour faire valoir des moyens propres aux recours contre les décisions. Or la demande en réexamen ne le permettait.

d. Le 13 juillet 2023, la commune a répliqué, faisant valoir qu’une nouvelle distinction terminologique était employée par les intimés, soit celle entre les matériaux exploitables et les matériaux valorisables (ou rentables).

Il n’y avait pas de preuve permettant de considérer la découverte morainique comme étant réellement exploitable. Il y avait des contradictions sur l’exploitation de ce matériau ainsi que dans les explications concernant les importants volumes stockés provisoirement sur le site et du flou concernant la destination et l’utilisation des matériaux extraits.

Tant que les preuves requises quant au sort des matériaux et du caractère exploitable des découvertes morainiques n’étaient pas apportées, elle persisterait dans les motifs et conclusions de son recours.

e. Le 18 août 2023, les exploitants ont dupliqué.

La phase limino-graveleuse de l’alluvion ancienne, aujourd’hui appelée volume de découverte morainique mais initialement assimilé au tout-venant, avait toujours été considérée comme exploitable. L’emploi de cette notion avait été rendu nécessaire pour s’opposer aux prétentions civiles de la commune en paiement de la redevance sur un matériau exploitable mais non rentable. Cette notion n’était pas pertinente au moment de l’adoption du plan d’extraction, ni pour analyser la question de son réexamen.

f. Le 18 août 2023, le Conseil d’État a persisté dans ses conclusions.

g. Le 5 septembre 2023, la commune s’est déterminée.

Depuis le dépôt du recours, les exploitants utilisaient de nouvelles distinctions terminologiques pour se prévaloir du caractère exploitable de la découverte morainique et pour éviter la remise en cause du plan d’extraction. Les thèses des exploitants étaient contradictoires puisque depuis 2017, ils se plaignaient de manière constante du prétendu caractère stérile de la découverte morainique, pour éviter de payer des redevances et pour modifier le processus d’exploitation et chercher à obtenir une modification du plan d’extraction pour stocker ces matériaux sur d’autres parcelles.

h. Le 6 septembre 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de l’arrêté du Conseil d’État statuant sur la demande de réexamen d’un plan d’extraction de gravière PE1______ adopté le 30 octobre 2013. Le Conseil d’État a jugé irrecevable la demande de réexamen qui devait, en tant que de besoin, être rejetée.

2.1 La recourante fait valoir une violation de son droit d’être entendue, le rapport de L______ SA, mentionné dans l’arrêté litigieux, n’ayant pas été versé au dossier.

2.1.1 Le droit d’être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l'autorité de recours n'est pas possible, l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 144 I 11 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_485/2022 du 24 mars 2023 consid. 4.2 ; ATA/549/2021 du 25 mai 2021 consid. 2a et les références ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, p. 696 n. 1982). Ce moyen doit par conséquent être examiné en premier lieu (ATF 141 V 495 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_740/2017 du 25 juin 2018 consid. 3.2). Sa portée est déterminée d'abord par le droit cantonal (art. 41 ss LPA) et le droit administratif spécial (ATF 126 I 15 consid. 2 ; 125 I 257 consid. 3a et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_11/2009 du 31 mars 2009 consid. 2.1). Si la protection prévue par ces lois est insuffisante, ce sont les règles minimales déduites de la Constitution qui s’appliquent (art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, pp. 518-519 n. 1526 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, 2013, vol. 2, 3e éd., p. 615 n. 1317 ss). Quant à l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), il n'accorde pas au justiciable de garanties plus étendues que celles découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. (arrêt du Tribunal fédéral 4P.206/2005 du 11 novembre 2005 consid. 2.1 et les références) et ce pour autant qu’il soit applicable vu la nature du litige et la qualité de collectivité publique de la recourante.

Tel qu’il est garanti par cette dernière disposition, le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_700/2022 du 28 novembre 2022 consid. 3 et les références ; ATA/949/2021 du 14 septembre 2021 consid. 5a et les références).

2.1.2 En l’espèce, la recourante se plaint de n’avoir pas eu accès à un rapport de L______ SA. Or, le Conseil d’État indique que ce n’est qu’une synthèse du rapport qui a été transmise au GESDEC concernant le potentiel exploitable des étapes B à E, synthèse qui a également été mise à disposition de la recourante lors de la présentation orale faite le 28 avril 2022. La recourante s’est même déterminée à son sujet le 19 mai 2022, contestant les chiffres avancés, incompatibles avec ceux résultants de l’étape A. L’arrêté litigieux ne mentionne effectivement que cette synthèse. Le grief tombe donc à faux.

Quant à l’absence d’échange d’écritures avant que le Conseil d’État ne prenne sa décision, comme il s’agit d’une décision de non entrée en matière sur une demande de réexamen, soit d’irrecevabilité, l’échange d’écriture n’apparaît pas nécessaire, la recourante ayant pu alléguer tous les faits qu’elle estimait nécessaire à fonder sa requête.

En conséquence, le grief de la recourante sera écarté.

2.2 La recourante invoque une violation du devoir d’instruction d’office (art. 19 LPA), le Conseil d’État n’ayant pas procédé à une analyse plus complète du rapport de L______ SA.

La recourante critique non pas les chiffres retenus mais la qualification d’une partie du matériau excavé et la répartition géographique des volumes exploitables.

Sa critique se confond ainsi avec celle qu’elle fait des éléments retenus par le Conseil d’État pour fonder sa décision et sera donc examinée ci-dessous.

3.             Le litige concerne le réexamen d’un plan d’extraction de gravier.

3.1 Les plans d’affectation règlent le mode d’utilisation du sol et distinguent en premier lieu les zones à bâtir, les zones agricoles et les zones à protéger (art. 14 al. 1 LAT). Selon l’art. 18 al. 1 LAT, le droit cantonal peut prévoir d’autres affectations que les zones précitées.

Les plans d’extraction visés par la loi sur les gravières et exploitations assimilées du 28 octobre 1999 (LGEA - L 3 10) sont de tels plans d’affectations de droit cantonal, adoptés par le Conseil d’État conformément à l’art. 15 al. 2 LaLAT (art. 13 al. 1 let. i LaLAT). Les zones de gravières sont délimitées en général en zone agricole et un plan d’extraction en fixe les modalités d’exploitation (art. 21A LaLAT).

3.2 À teneur de l’art. 21 al. 1 LAT, les plans d’affectation ont force obligatoire pour chacun. Lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées, les plans d’affectation feront l’objet des adaptations nécessaires (art. 21 al. 2 LAT).

En droit genevois, l’art. 13A al. 1 LaLAT est le pendant de l’art. 21 al. 2 LAT et dispose que, lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées, les plans d’affectation sont réexaminés et, si nécessaire, adaptés.

3.2.1 Le droit genevois prévoit que tout propriétaire peut demander au Conseil d’État le réexamen d’un plan d’affectation du sol au sens de l’art. 13 al. 1 let. a et b LaLAT, dix ans au moins après son entrée en vigueur (art. 13A al. 2 LaLAT). A contrario, cela n’est pas le cas pour les plans d’extraction visés à l’art. 13 al. 1 let. i LaLAT.

3.2.2 Le Tribunal fédéral a admis un droit de nature formelle à un réexamen du plan d’affectation pour le propriétaire, en ce qui concernait son immeuble ou des immeubles voisins, au motif qu’à la suite d’un changement sensible des circonstances, les mesures prévues n’étaient plus compatibles avec la garantie de la propriété (Thierry TANQUEREL, in Heinz AEMISEGGER/Pierre MOOR/ Alexander RUCH/Pierre TSCHANNEN [éd.], Commentaire pratique LAT : Planifier l’affectation, 2016, n. 65 ad art. 21 LAT).

3.2.3 La commune a qualité pour recourir contre l’adoption d’un plan d’extraction (art. 35 al. 3 LaLAT). Le recours n’est toutefois recevable devant la chambre administrative que si la voie de l’opposition a été préalablement épuisée (art. 35 al. 4 LaLAT).

3.2.4 L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA. Une telle obligation existe lorsque la décision dont la reconsidération est demandée a été prise sous l'influence d'un crime ou d'un délit (art. 80 let. a LPA) ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 let. b LPA ; faits nouveaux « anciens » ; ATA/651/2023 du 20 juin 2023 consid. 4.1 ; ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 5b).

3.3 En l’espèce, les questions de savoir si la commune disposait du droit de demander le réexamen ou la révision du plan d’extraction et si elle a un quelconque intérêt pour ce faire, souffriront de rester indécises, le Conseil d’État ayant examiné celle de l’existence ou non de faits nouveaux pertinents.

4.             Toutes les procédures de demande de réexamen ou de révision citées ci-dessus se déroulent en deux étapes.

4.1 La première permet d’identifier si un fait nouveau et pertinent est de nature à amener à une décision différente. Dans la négative, l’administration rend une décision de non-entrée en matière, comme en l’occurrence. Dans la positive, elle rend une décision d’entrée en matière et entame la deuxième étape permettant de déterminer dans quelle mesure le fait nouveau est susceptible de modifier la décision prise.

Cette procédure en deux étapes ne saurait toutefois être trop absolue et le Tribunal fédéral a ainsi, à diverses reprises, affirmé que plus les modifications envisagées étaient incisives, plus les motifs militant en faveur d’une modification devaient être importants, sans préciser s’il s’agissait de la première pesée d’intérêt ou la seconde (Thierry TANQUEREL, op. cit. n 35 ad art. 21 LAT)

4.2 Les dispositions sur le réexamen des plans d’affectation tendent à assurer à la planification une certaine stabilité, sans laquelle les plans d’aménagement ne peuvent remplir leur fonction (ATF 144 II 41 consid. 5.1 ; 128 I 190 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_387/2016 du 1er mai 2017 consid. 4.2 ; ATA/473/2009 du 29 septembre 2009 consid. 7). La stabilité des plans est un aspect du principe, plus général, de la sécurité du droit, qui doit permettre aux propriétaires fonciers, comme aux autorités chargées de mettre en œuvre la planification, de compter sur la pérennité des plans d’affectation (ATF 128 I 190 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_176/2016 du 10 mai 2017 consid. 5). De manière générale, on considère que plus un plan est récent, plus on doit pouvoir compter sur sa stabilité, ce qui implique que les motifs justifiant une révision doivent être d'autant plus importants (Thierry TANQUEREL, op. cit., n 39 ad art. 21 LAT).

4.3 Selon la jurisprudence, l'écoulement du temps n'est pas prévu par le droit fédéral ou cantonal comme fondant à lui seul une obligation de soumettre à une nouvelle enquête publique un plan d'affectation. Seule une modification sensible des circonstances, qui imposerait un réexamen et une éventuelle adaptation des plans, créerait cette obligation. Les circonstances à prendre en considération, qui peuvent être de fait ou de droit, sont celles en lien avec les buts de la réglementation et celles ayant fondé les choix faits dans le plan qui la concrétise (arrêt du Tribunal fédéral 1C_317/2009 du 15 janvier 2010 consid. 4.2 et la jurisprudence citée ; ATA/436/2023 du 25 avril 2023 consid. 5.2 ; ATA/251/2009 du 19 mai 2009 consid. 4 et 5).

4.4 L’art. 21 al. 2 LAT est une solution de compromis entre deux exigences contradictoires : d'une part, l'aménagement du territoire étant un processus continu, et la détermination des différentes affectations impliquant des pesées d'intérêts fondées sur des circonstances changeantes et des pronostics qui ne se confirment jamais entièrement, l'adaptation périodique des plans d'affectation est indispensable pour assurer, progressivement, leur conformité aux exigences légales ; d'autre part, il faut tenir compte des intérêts privés et publics dont la protection nécessite une certaine sécurité juridique. La jurisprudence souligne que, pour apprécier l'évolution des circonstances et la nécessité d'adapter un plan d'affectation, une pesée des intérêts s'impose. L'intérêt à la stabilité du plan doit être mis en balance avec l'intérêt à l'adoption d'un nouveau régime d'affectation. Selon les cas, des intérêts publics pourront également justifier soit la stabilité du plan, soit son adaptation. Il incombe donc à l'autorité appelée à statuer sur un projet de modification d'un plan en vigueur d'examiner, en fonction des circonstances concrètes, une pluralité d'intérêts (ATF 132 II 408 consid. 4.2).

De façon générale, il y a lieu de reconnaître que les circonstances se sont sensiblement modifiées lorsque l'on pouvait raisonnablement estimer que la collectivité aurait pris des décisions différentes si elle avait été confrontée à ces circonstances au moment où elle s'est déterminée. Cette vision statique de la position de la collectivité compétente doit être nuancée par l’intégration de considérations tenant à l’écoulement du temps et d’éventuelles exigences liées à la protection de la bonne foi (Thierry TANQUEREL, op. cit., n 43 ad art. 21).

5.             La recourante soutient avoir mis en lumière des faits nouveaux « anciens » pertinents et importants justifiant le réexamen et l’annulation du plan d’extraction.

5.1 Selon la commune, la qualité réelle du sous-sol des terrains compris dans le plan d’extraction a été révélée par l’exploitation effective de la première étape du périmètre. Les données communiquées par les exploitants à la commune au titre de son contrat de servitude de gravière révélaient que les parcelles communales sur l’étape A n’auraient produit, depuis l’ouverture de l’exploitation en 2016 et jusqu’au 19 décembre 2022, que 464'100 m3 de matériaux valorisables « nobles ». Elle retient que le volume de tout-venant extrait ne représentait que moins de 30% du volume pronostiqué par le RIE. De plus, en raison de cette diminution du volume exploitable, il y aurait une augmentation de déchets, ce qui aurait des incidences majeures sur les modalités d’exploitation et un impact sur l’environnement et les surfaces d’assolement.

5.2 Les intimés contestent cette analyse.

5.2.1 S’agissant de la diminution du volume exploitable telle que retenue par la commune, celle-ci était erronée car elle qualifiait faussement la découverte morainique de volume inexploitable, alors qu’elle était valorisée par son utilisation pour fournir localement les sites de construction à raison de 90% et 10% pour le remblayage de l’excavation.

La diminution constatée sur l’étape A était de moins de 50% et non 75% comme allégué et celle prévisible sur les étapes B à E, contenues dans la synthèse du rapport L______ SA, prévoyait une diminution de 33% du volume exploitable par rapport aux pronostics effectués par les RIE. En outre, l’étape A n’avait pas encore été entièrement exploitée, notamment s’agissant des matériaux situés au droit des pistes de chantiers, des installations ainsi que des plateformes permettant un dépôt pour l’exploitation des autres secteurs B à E. Finalement, une différence de 15% entre les estimations du volume exploitable et la réalité de l’exploitation de la gravière était constatée. Cette différence était qualifiée de modeste par l’autorité intimée compte tenu des incertitudes existant en la matière.

Ces chiffres ne sont plus vraiment contestés par la recourante après les échanges d’écritures. Elle retient par contre que les exploitants utilisaient des termes différents et opéraient des distinctions terminologiques qui avaient, selon elle, des conséquences sur le potentiel exploitable du site.

Or, il ressort du plan directeur des gravières que la gravière de E______ constitue « la plus importante ressource potentielle » mise au plan directeur cantonal, malgré « la qualité souvent moyenne du gisement ». Il s’agit, selon le RIE 2013, d’une des dernières grandes réserves de gravier du canton (plan directeur p. 14 ; RIE 2013 p. 9). Le plan directeur retient pour la totalité du canton un potentiel de 65 millions de m3 et de 27 millions de m3 pour le site de « E______ » (plan directeur p. 14), le second site le plus grand possédant près de 11 millions de m3, en comparaison, les 27 autres millions étant répartis sur six sites différents.

En conséquence, une diminution entre les volumes estimés au moment de l’adoption du plan et ceux constatés lors de l’exploitation n’est pas susceptible de remettre en question l’extraction telle que prévue dans le plan litigieux, compte tenu de l’intérêt public à exploiter cette réserve de gravier, parmi les plus grandes du canton. Suivant les dernières estimations, la diminution devant être de l’ordre de 30% pour l’ensemble du plan, il n’est pas possible de considérer que ce fait aurait conduit à une décision différente. En effet, rien ne le laisse supposer, le plan directeur prévoyant notamment d’autres sites d’exploitation potentiels de gravières avec des qualités dites « moyennes », les zones les plus favorables du point de vue qualitatif et du recouvrement ayant déjà été largement exploitées par le passé (plan directeur p. 14).

5.2.2 Dans la pesée d’intérêts qui doit être opérée, la recourante avance l’intérêt à la protection des surfaces d’assolement et des biotopes. Ce faisant, elle n’avance toutefois aucun fait pertinent nouveau.

En effet, ces intérêts ont déjà été pris en compte dans la pesée réalisée au moment de l’adoption du plan, comme l’atteste l’analyse faite dans le RIE 2013, que la recourante ne remet pas en cause. Cette étude concluait à un impact transitoire de soustraction à l’agriculture durant trois ans en moyenne pour chaque parcelle et prévoyait des mesures d’accompagnement et de compensation, notamment par l’apport de matériaux de sous-couche et de terre végétale pour recréer des sols de 1 m d’épaisseur, rendant à l’agriculture une situation améliorée (p. 77 à 95 du RIE 2013 et 77 à 88 du RIE 2016, pour la protection de l’environnement et p. 60 à 65, ainsi que 59 à 63, pour la protection des sols et la pratique agricole).

Les exigences en matière de surface d’assolement n’ont pas été modifiées depuis l’adoption du plan et ne sauraient ainsi justifier un réexamen de celui-ci comme le suggère la recourante, comme ne le sont pas non plus la diminution du nombre de lièvres recensés depuis 2018, le nombre fluctuant de cette espèce ne pouvant être attribué à l’exploitation des gravières. En 2021, la population était équivalente à celle de 2009 à M______. De plus, il pourrait même y avoir un effet favorable constaté dans d’autres secteurs d’exploitation du canton, à N______ par exemple, comme cela ressort des pièces figurant au dossier.

La justification du projet de plan d’extraction retenue dans la RIE 2013 étant d’une part, la présence d’une des dernières grandes réserves de graviers du canton, et d’autre part, la situation proche de grands axes routiers ainsi que des stations de traitement. Par ailleurs, l’exploitation de parcelles agricoles cultivées n’impliquait pas de destruction de biotopes naturels de forte valeur. De plus, le choix d’utiliser d’importantes ressources locales se justifiait aisément par les besoins du canton en termes de matériaux de construction tout en répondant aux exigences environnementales actuelles (RIE 2013 p. 9).

Ces considérations restent d’actualité, même avec la diminution constatée des volumes exploitables et aucun fait nouveau permettant d’exiger un réexamen, consistant à l’abolition du plan d’extraction tel que souhaitée par la recourante, n’a été établi en l’espèce.

Le recours contre le refus de procéder à un réexamen du plan d’extraction PE 1______ doit donc être rejeté.

6.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante qui ne défend par sa propre décision (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée aux exploitants intimés, solidairement, à la charge de la recourante (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 février 2023 par la commune A______ contre l’arrêté du Conseil d’État no 6______ du 25 janvier 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de la commune A______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à B______ SA, C______ SA et D______ SA, solidairement, à la charge de la commune A______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Nicolas Wisard, avocat de la commune A______, au Conseil d’État, à Me Laurent Baeriswyl, avocat de B______ SA, C______ SA et D______ SA, ainsi qu’à l’office fédéral du développement territorial et à l’office fédéral de l’agriculture.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Valérie LAUBER, Claudio MASCOTTO, juges.

 

 

 

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :