Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3604/2023

ATA/1249/2023 du 20.11.2023 ( DOMPU ) , ACCORDE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3604/2023-DOMPU ATA/1249/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 20 novembre 2023

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Dina BAZARBACHI, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE intimé



Vu, EN FAIT, le recours interjeté le 3 novembre 2023 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice par A______, née le 6 août 1999, d’origine roumaine, contre la mesure d’éloignement prononcée par un agent de police le 25 octobre 2023, dont elle demande l’annulation, l’acte étant nul ; qu’elle s’adonnait à la mendicité et était en voie de régulariser sa situation administrative ; qu’elle était domiciliée à la rue B______ 7 au centre-ville ; qu’alors qu’elle se rendait à un entretien d’embauche, elle avait été interpellée et traduite au poste de police par un agent de police la connaissant en raison de rapports de contravention pour mendicité qu’il avait dressés à son encontre ; qu’elle s’était alors vu notifier la mesure d’éloignement, valable un mois ;

qu’elle n’avait pas reçu de décision formelle, ni vu un officier de police ; que la mesure ne respectait pas le principe de la proportionnalité, puisqu’elle l’empêchait de se rendre et de sortir de son domicile et qu’elle ne mendiait pas lorsque le policier l’avait interpellée ;

que, par télécopie du même jour, elle a exposé qu’elle n’avait reçu aucune décision, mais un plan relatif à la mesure d’éloignement, ce qui était contraire à l’art. 17 du règlement sur l’organisation de la police du 16 mars 2016 (ROPol – F 1 05.01) ;

que, se déterminant sur effet suspensif, le commissaire de police a exposé que la recourante avait été condamnée à plusieurs reprises depuis 2018 par le Tribunal de police pour mendicité et fait, le 31 mars et 1er avril 2023, l’objet de rapports de contravention pour mendicité ; qu’elle était dépourvue de moyens financiers ; que sa demande d’autorisation de séjour du 9 mars 2023 était lacunaire ; qu’elle n’avait pas donné suite aux demandes de renseignement complémentaire de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) des 3 août, 15 septembre et 6 octobre 2023, hormis la production d’une attestation de son logeur à la rue B______ 7 à Genève ; qu’elle avait indiqué à l’agent de police, le 25 octobre 2023, qu’elle dormait sous un pont ; que la déclaration dudit agent serait produite ; que c’était dans ce contexte que la mesure d’éloignement avait été prise par le commissaire de police, qui tenait dûment compte d’une exception, permettant à la recourante de se rendre chez son avocate ; que la décision querellée contenait le plan du périmètre interdit et une « partie formelle » ; que cette dernière comportait les autres éléments prescrits par l’art. 17 al. 4 RPol ; que la signature de la recourante manquait sur cette partie, de sorte que ce document, qui devait encore être produit, demeurait encore au poste de police ;

que la recourante ne disposait d’aucun titre de séjour ; qu’aucun intérêt public ne justifiait d’accorder l’effet suspensif, étant précisé que s’agissant d’une décision à contenu négatif, ledit effet n’était pas possible ;

que dans sa réplique sur effet suspensif, la recourante a relevé que l’autorité intimée reconnaissait ne pas avoir rendu de décision formellement valable, de sorte qu’il convenait de statuer rapidement sur son recours et constater la nullité de la mesure querellée ;

que, sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif ;

Considérant, EN DROIT, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par la vice-présidente, ou en cas d'empêchement de celles‑ci, par une juge ;

que l'art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) qui prévoit que, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/1132/2023 du 17 octobre 2023 ; ATA/795/2021 du 4 août 2021 ; ATA/1043/2020 du 19 octobre 2020) ;

qu’elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265) ; que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3) ;

que lors de l'octroi ou du retrait de l'effet suspensif, l'autorité de recours dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que l’art. 53 al. 1 let. c de la loi sur la police du 9 septembre 2014 (LPol - F 1 05) permet de prononcer une mesure d’éloignement contre une personne qui se livre à la mendicité ; que la mesure d’éloignement dépassant 24 h doit être prononcée par un commissaire de police (art. 17 al. 1 RPol) ; que la décision écrite est immédiatement exécutoire, l’art. 66 al. 3 LPA étant réservé (art. 17 al. 3 RPol) ; que la décision écrite doit mentionner certains éléments, dont la possibilité de la contester dans les 30 jours auprès de la chambre administrative ainsi que le fait qu’elle est immédiatement exécutoire (art. 17 al. 4 let. f et g RPol) ;

qu’en l’espèce, l’autorité intimée reconnaît que seul un plan du périmètre interdit a été remis à la recourante ;

qu’il apparaît, en outre, que ledit plan porte la signature d’un agent de police et non d’un commissaire ;

qu’il ne mentionne pas non plus la voie de recours ni son caractère immédiatement exécutoire ;

que ces éléments permettent de douter de la validité de la mesure d’éloignement prononcée à l’encontre de la recourante ;

que, partant, les chances de succès du recours justifient de restituer l’effet suspensif ;

que, contrairement à ce que soutient le commissaire de police, l’interdiction de périmètre ne constitue pas une décision négative, celle-ci imposant au contraire un comportement à la recourante, à savoir de s’abstenir de se rendre dans le périmètre interdit ;

qu’ainsi, le recours peut déployer un effet suspensif ;

qu’au vu de ce qui précède, l’effet suspensif sera octroyé ;

qu’il sera statué ultérieurement sur les frais du présent incident.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

restitue l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les 30 jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Dina BAZARBACHI, avocate de la recourante, au commissaire de police, ainsi qu'au Secrétariat d'État aux migrations.

 

 

La vice-présidente :

 

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :