Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/450/2019

ATA/1078/2023 du 03.10.2023 sur JTAPI/269/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/450/2019-PE ATA/1078/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 octobre 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 9 mars 2023 (JTAPI/269/2023)


EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : la requérante), ressortissante camerounaise née le ______ 1952, veuve, est entrée en Suisse le 16 avril 2014 au bénéfice d’un visa Schengen pour visite familiale/amicale, valable jusqu’au 14 juillet 2014, délivré par la représentation suisse à Yaoundé (Cameroun).

Après l’échéance de son visa, l’intéressée a poursuivi son séjour en Suisse sans être titulaire d’une autorisation idoine.

b. L’intéressée a plusieurs enfants, dont deux fils résidant à Genève : B______, né le ______ 1978, et C______, né le ______ 1985.

B______, ressortissant camerounais et français, est marié et titulaire d’une autorisation de séjour. Il a résidé, dans un premier temps, à Annemasse (France), avant de s’installer à la rue D______, à Genève, à compter du 27 avril 2017. Depuis le 1er décembre 2018, il réside à la rue E______, à Genève.

C______, ressortissant camerounais titulaire d’une autorisation de séjour, est marié à une ressortissante portugaise, avec laquelle il a cinq enfants mineurs, tous ressortissants du Portugal, nés entre le ______ 2010 et le ______. Il réside à Genève depuis le 19 mars 2010.

La requérante a également une nièce, F______, ressortissante suisse et camerounaise née le ______ 1980, qui réside à Genève depuis le 24 juillet 2000. Celle-ci est mariée et mère de deux enfants.

c. La requérante a sollicité plusieurs visas de retour, soit le 13 mai 2016, pour une durée de trois mois, afin de se rendre en France pour un suivi médical et une visite familiale ; le 8 novembre 2016, pour une durée de trois mois, afin de se rendre au Cameroun pour raisons familiales ; le 5 juillet 2018, pour une durée de trois mois, afin de se rendre à Lourdes (France) pour un recueillement spirituel, ainsi qu’à Bruxelles pour une visite familiale et le 12 novembre 2018, pour une durée d’une semaine, afin de se rendre à Lourdes (France) pour un recueillement spirituel.

Le 22 octobre 2018, son fils, C______, a sollicité l’octroi de visas de retour en faveur de sa mère afin qu’elle puisse se rendre deux jours à Lourdes (France) ainsi qu’au Cameroun pour raisons familiales.

d. À teneur de l’attestation de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) du 5 avril 2017, la requérante n’était pas aidée financièrement par celui-ci.

e. Selon un extrait du registre des poursuites du 4 mai 2022, la requérante avait réglé toutes les poursuites enregistrées à son nom. Son fils B______ faisait l’objet de poursuites actives pour un montant total de CHF 6'815.70 ainsi que de cinq actes de défaut de biens pour un montant total de CHF 41'602.27 (extrait du registre des poursuites du 11 mai 2022).

B. a. Le 4 juillet 2014, la requérante a déposé auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) un formulaire M de demande d’autorisation de séjour pour traitement médical.

Était jointe une attestation établie le 4 juillet 2014 par le Docteur G______, indiquant que la requérante était en traitement chez lui pour une affection orthopédique et neurologique depuis le 3 juillet 2014. Son traitement nécessitait un séjour en Suisse de trois mois.

b. Le 8 juillet 2014, la requérante a déposé auprès de l’OCPM un formulaire M de demande d’autorisation de séjour sans activité lucrative.

c. Par courriel du 11 juillet 2014, son fils C______ a informé l’OCPM du déplacement de la date de retour de sa mère au Cameroun pour raisons de santé.

d. Par courrier du 26 septembre 2014, la requérante a donné des explications quant à sa situation et produit un rapport médical de son médecin traitant ainsi que le résultat de l’examen de son genou gauche effectué le 3 juillet 2014.

C’était sa deuxième visite familiale en Suisse. Elle avait été invitée par son fils et sa belle-fille suite à la naissance de leurs enfants, la première fois en 2012 et la deuxième fois cette année. Malheureusement, son état de santé s’était aggravé lors de son séjour à Genève et son médecin traitant avait diagnostiqué une gonarthrose gauche sévère et invalidante qui l’empêchait de marcher et la faisait souffrir au quotidien. Le médecin de son fils lui avait également diagnostiqué une « aggravation d’AVC » dont elle souffrait depuis près de dix ans. La médecine spécialisée pour ce genre d’affection était très limitée dans son pays d’origine. Étant veuve et compte tenu des circonstances familiales difficiles dans son pays, elle ne pouvait s’appuyer que sur l’aide de sa famille présente en Suisse et en Europe, et sur les meilleures infrastructures médicales que pouvaient lui offrir la Suisse et l’Europe pour survivre. Elle n’avait pas pu retourner dans son pays dans le délai qui lui avait été imposé pour des raisons de santé et d’urgence médicale.

Elle n’avait aucuns moyens financiers, mais bénéficiait du soutien de toute sa famille présente en Suisse et en Europe, à savoir ses fils, ses cousines, ses nièces et ses belles-sœurs.

Selon le rapport médical du 1er octobre 2014 du Dr G______, la requérante avait été victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC) et souffrait d’une gonarthrose gauche sévère, provoquant des douleurs mécaniques invalidantes. Le traitement médical (prise d’anti‑inflammatoires) devait être poursuivi jusqu’à l’opération (pose d’une prothèse).

e. Le 24 février 2015, la requérante a notamment produit un engagement à quitter la Suisse à l’issue de son traitement médical, un formulaire O d’attestation de prise en charge financière signé par son fils B______ accompagnée des fiches de salaire de ce dernier, une copie du contrat de bail de C______ ainsi qu’une attestation du Dr G______ datée du 4 février 2015 indiquant qu’elle souffrait d’une profonde arthrose du genou gauche dont le seul traitement nécessaire et impératif était la pose d’une prothèse de genou. Un séjour postopératoire et une rééducation seraient ensuite nécessaires en Europe pour au moins neuf mois ; la patiente était profondément handicapée et marchait difficilement avec deux cannes.

Était également jointe une lettre de C______ du 20 janvier 2015 expliquant qu’il ne pouvait s’engager pour le moment à assumer financièrement les frais de subsistance de sa mère, dès lors qu’il faisait l’objet de poursuites. En revanche, son frère B______ qui travaillait à Genève et vivait à Annemasse (France), s’engageait à le faire ainsi que d’autres membres de la famille.

f. Le 25 avril 2016, la requérante a demandé à l’OCPM de traiter sa demande tendant à l’octroi d’une autorisation de séjour en vue de traitement médical sous l’angle du cas de rigueur. Elle ne disposait en effet pas des ressources financières suffisantes et, compte tenu de son état de santé, sa famille n’envisageait pas un retour dans son pays d’origine.

Étaient joints deux rapports médicaux établis par la Docteure H______ le 12 avril 2016, indiquant notamment que l’intéressée avait des antécédents d’hypertension artérielle (ci-après : HTA) (bien contrôlée), d’AVC (en 2003 et 2014), avec une hémiparésie gauche séquellaire et qu’elle souffrait d’une gonarthrose gauche sévère, traitée actuellement avec du Dafalgan. Sur le plan orthopédique, l’évaluation était défavorable avec une gonarthrose de plus en plus invalidante. Le traitement médical (Sintrom, Coreram, Paracétamol) devrait probablement être suivi à vie. Un suivi neurologique et orthopédique, ainsi qu’un suivi médicamenteux (Sintrom), avec des contrôles IRM réguliers, étaient nécessaires. Le pronostic était mauvais sans suivi d’un traitement, tel que le Sintrom qui nécessitait des prises de sang régulières (avec un risque d’AVC ischémique ou d’hémorragie), alors que le pronostic était meilleur si le traitement médicamenteux était bien suivi. Le manque de suivi et d’infrastructures médicales ainsi que l’absence d’entourage familial pour une aide au quotidien allaient à l’encontre d’un traitement dans le pays d’origine. L’intéressée n’avait actuellement pas d’assurance-maladie et était suivie, en partie, en France.

g. Par courrier du 23 mai 2016, l’OCPM a fait part à la requérante de son intention de lui refuser l’octroi d’une autorisation de séjour à quelque titre que ce soit.

h. Le 22 juin 2016, la requérante a répondu à l’OCPM qu’elle était venue à Genève pour visite familiale. Son état de santé avait toutefois amené son fils et les médecins consultés à entamer des démarches pour qu’elle puisse demeurer en Suisse. Si ses problèmes de santé n’étaient pas survenus ces derniers mois, ses médecins étaient unanimes sur le fait que son état actuel n’était pas compatible avec un retour dans son pays d’origine, au risque de mettre en jeu son pronostic vital. Même avec l’aide de ses enfants, elle n’avait pu bénéficier du suivi médical requis par sa situation, de telle sorte que son état de santé s’était très fortement dégradé ces dernières années au Cameroun. Un retour dans ce pays mettrait inévitablement en péril son pronostic vital.

Elle a notamment joint des attestations médicales.

i. Le 18 juillet 2016, la requérante a transmis à l’OCPM plusieurs documents médicaux concernant une nouvelle maladie (cancer du col de l’utérus) qui lui avait été diagnostiquée.

j. Le 21 mars 2017, la requérante a transmis à l’OCPM une attestation de prise en charge financière signée par son fils C______.

k. Le 30 mars 2017, l’OCPM a indiqué à la requérante maintenir sa position. Il a sollicité des pièces complémentaires sur son état de santé afin d’examiner la question de l’exigibilité de son renvoi.

l. Le 26 juin 2017, la requérante a transmis à l’OCPM un rapport médical établi par le Dr G______ le 14 juin 2017, à teneur duquel elle nécessitait au plus vite la pose d’une prothèse totale du genou gauche.

m. Une prothèse totale du genou gauche a été posée en août 2017.

n. Par courrier du 15 novembre 2018, l’OCPM a une nouvelle fois fait part à la requérante de son intention de lui refuser l’octroi d’une autorisation de séjour à quelque titre que ce soit et de prononcer son renvoi de Suisse, tout en lui impartissant un délai pour exercer par écrit son droit d’être entendue.

o. Par courrier du 17 décembre 2018, la requérante a informé l’OCPM que son état de santé s’était amélioré de manière « fulgurante » au contact de sa famille en Suisse et faisait aujourd’hui l’objet de soins et d’une surveillance régulière dont elle ne pourrait pas bénéficier au Cameroun. De plus, outre sa santé physique précaire, due à l’incertitude de la situation dans laquelle elle se trouvait, elle devait également faire face à un état dépressif ainsi qu’à d’importants troubles du sommeil.

Elle a produit plusieurs rapports médicaux.

p. Par décision du 20 décembre 2018, l’OCPM a refusé de lui octroyer un titre de séjour et, par conséquent, de soumettre son dossier avec un préavis positif au secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM), et prononcé son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai au 19 février 2019 pour quitter le territoire.

L’intéressée n’avait pas respecté la procédure d’entrée en Suisse applicable pour un séjour de plus de trois mois et avait mis l’OCPM devant le fait accompli. Elle ne disposait pas non plus des moyens financiers nécessaires pour couvrir l’ensemble des frais d’un séjour en Suisse pour des raisons médicales. Pour cette raison, une partie de son suivi médical se faisait en France. Par courrier du 25 avril 2016, elle avait par ailleurs informé l’OCPM qu’elle n’avait plus l’intention de quitter la Suisse. Par conséquent, elle ne remplissait pas les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour pour traitement médical.

Elle ne se trouvait pas non plus dans une situation représentant un cas d’extrême gravité. Arrivée à Genève en 2014, la durée de son séjour ne constituait pas un élément déterminant susceptible de justifier une suite favorable à sa requête. Les années de séjour passées en Suisse devaient être relativisées avec celles qu’elle avait vécues dans son pays d’origine. De plus, ses problèmes de santé n’étaient pas nouveaux. Depuis 2003, soit bien avant son arrivée en Suisse, elle était suivie médicalement dans son pays d’origine avec le soutien de ses enfants depuis l’Europe et rien n’indiquait que son suivi ne pourrait pas continuer ainsi, ni qu’un changement notable de situation était survenu en 2014. Ayant passé la quasi-totalité de sa vie au Cameroun, sa réintégration apparaissait comme possible.

Enfin, les conditions légales pour une éventuelle demande de regroupement familial en vertu de l’art. 3 annexe I de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681) n’étaient pas remplies. L’appartement dans lequel elle était logée était un quatre pièces, ce qui était considéré comme inadéquat pour sept personnes. De plus, il apparaissait qu’elle n’était pas à la charge de C______ et de son épouse, lesquels touchaient des prestations de l’hospice.

Au surplus, elle n’avait pas démontré l’existence d’obstacles à son retour au Cameroun et le dossier ne faisait pas non plus apparaître que l’exécution de son renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée.

q. Par acte du 31 janvier 2019, la requérante a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre cette décision (cause A/450/2019).

Son était de santé était très grave et nécessitait une prise en charge et un traitement qui n’étaient pas accessibles au Cameroun. Elle avait eu deux AVC (en 2003 et 2014), avec des séquelles motrices importantes. Ses médecins avaient souligné la nécessité pour elle d’un suivi médical étroit et d’un accès facile aux soins. Elle devait être prise en charge dans une structure médicale adéquate et devait prendre des anticoagulants au quotidien et à vie. Elle n’aurait pas accès à un tel traitement au Cameroun. De plus, l’accès aux soins, lorsqu’ils étaient disponibles, était onéreux.

Son état de santé requérait de plus une aide et une assistance au quotidien. Dans ce contexte, elle vivait actuellement avec son fils B______ à Genève. Celui-ci n’émargeait pas à l’aide sociale, ne faisait l’objet d’aucune poursuite et percevait un salaire mensuel brut de CHF 4'000.-. Son autre fils, C______, avec qui elle avait vécu durant cinq ans, prenait également soin d’elle au quotidien. Deux de ses filles vivaient au Cameroun, mais elles n’avaient ni les moyens, ni la disponibilité pour s’occuper d’elle convenablement. Elle ne disposait ainsi d’aucun soutien familial ni institutionnel dans son pays d’origine.

Son état de santé était assimilable à une situation d’extrême gravité.

Elle n’avait pas respecté la procédure, car son projet initial était de venir en Suisse pour rendre visite à sa famille. Ce n’était que postérieurement à son départ du Cameroun que ses graves problèmes de santé étaient survenus. Elle n’avait aucunement voulu mettre l’autorité devant le fait accompli. Toutefois, son AVC avait révélé ses problèmes de santé et la nécessité d’une prise en charge après son entrée en Suisse.

Son renvoi dans son pays d’origine était inexigible, car elle n’aurait pas accès aux soins dont elle avait besoin, ce qui mettrait concrètement sa santé, son intégrité, voir son existence en danger.

Le recours a été enregistré sous le numéro de cause A/450/2019.

C. a. Par requête du 31 janvier 2019, la requérante a sollicité l’octroi d’une autorisation de séjour au titre du regroupement familial fondée sur l’art. 3 annexe I ALCP afin de vivre auprès de son fils B______, ressortissant français.

Depuis le 1er janvier 2019, elle vivait auprès de ce dernier, dans son appartement sis rue D______. Celui-ci ne touchait pas l’aide sociale, ne faisait l’objet d’aucune poursuite et percevait un revenu mensuel brut de CHF 4'000.-.

Elle a notamment produit un contrat de bail au nom de B______, pour un appartement de trois pièces sis rue E______ ainsi qu’une copie de son autorisation de séjour (permis B), valable jusqu’au 26 avril 2022.

b. Le 5 avril 2019, l’OCPM a sollicité la suspension de la procédure A/450/2019 afin de pouvoir examiner la nouvelle requête déposée par l’intéressée le 31 janvier 2019.

c. La procédure A/450/2019 a été suspendue d’entente entre les parties par trois décisions successives du TAPI.

d. Dans l’intervalle, par courrier du 16 octobre 2019, B______ a transmis à l’OCPM ses trois dernières fiches de salaire, des justificatifs des envois d’argent effectués en faveur de sa mère avant son arrivée en Suisse, soit, pour la période du 14 décembre 2009 au 15 février 2014, 32 transferts pour un montant total de CHF 5'024.87, un formulaire O d’attestation de prise en charge financière en faveur de sa mère, une attestation de non-poursuite le concernant datée du 15 octobre 2019 ainsi qu’un extrait du registre des poursuites concernant sa mère daté du 16 octobre 2019, mentionnant des poursuites – toutes en lien avec des frais de santé – pour un montant total de CHF 6'870.70 ainsi que cinq actes de défaut de biens pour un montant total de CHF 3'487.55.

Il a précisé que les poursuites de sa mère relevant de l’assurance-maladie de base avaient été réglées, à l’exception des factures d’hospitalisation et de soins de santé, lesquelles avaient donné lieu à des actes de défaut de biens, qu’il s’engageait à régler d’ici fin novembre 2019.

e. Le 10 décembre 2019, la requérante a informé le TAPI de l’état d’avancement de sa requête du 31 janvier 2019, indiquant notamment que sa nièce, F______, entendait contribuer à sa prise en charge.

f. Le 16 septembre 2021, l’OCPM a sollicité de la requérante des documents complémentaires, notamment des attestations récentes de l’office des poursuites, une copie de l’acte de naissance de B______ démontrant le lien de filiation, une confirmation écrite de celui-ci indiquant qu’elle vivait bien chez lui à la rue E______ ainsi qu’un rapport médical récent.

g. Par courrier du 21 octobre 2021, la requérante a annoncé à l’OCPM un changement de circonstances et une modification de sa demande, en ce sens que la demande de regroupement familial visait désormais à lui permettre de vivre auprès de F______, citoyenne suisse, notamment pour des raisons médicales, afin qu’elle soit bien entourée dans le cadre de son suivi thérapeutique.

h. Le 24 février 2022, l’OCPM a informé la requérante que les dispositions sur le regroupement familial ne s’appliquaient pas à une relation tante-nièce et que cette nouvelle requête devait être considérée comme une demande de reconsidération de sa décision du 20 décembre 2018.

i. Le 7 avril 2022, la requérante a informé l’OCPM que la demande de regroupement familial auprès de sa nièce était retirée et celle auprès de B______ maintenue.

j. Le 26 avril 2022, l’OCPM a invité la requérante à produire les pièces réclamées dans son courrier du 16 septembre 2021, à défaut de quoi il serait statué en l’état du dossier.

k. Par courrier du 14 mai 2022, la requérante a transmis à l’OCPM les documents requis, notamment un extrait du registre des poursuites la concernant, daté du 4 mai 2022, mentionnant le paiement de toutes les poursuites enregistrées à son nom (décembre 2016 à juillet 2021) et l’absence d’actes de défaut de biens, un extrait concernant B______ mentionnant des poursuites actives pour un montant total de CHF 6'815.70 ainsi que cinq actes de défaut de biens pour un montant total de CHF 41'602.27, les décomptes de chômage de ce dernier, une attestation selon laquelle la requérante vivait avec lui à l’adresse rue E______ à Genève, l’acte de naissance de ce dernier ainsi qu’un rapport médical établi le 24 février 2022 par le Docteur I______, médecin interne FMH.

Il ressortait notamment de ce dernier rapport que l’intéressée, connue pour des antécédents d’AVC et une hypertension artérielle (HTA), avait bénéficié d’une prothèse du genou gauche en 2018 (recte : 2017). Le bilan biologique était normal, sous réserve d’une hypocalcémie sévère, et l’évolution lentement favorable après supplémentation calcique et vitaminée. Le diagnostic était une pseudo-hypoparathyroïdisme (très probable), un statut post AVC avec hémiparésie gauche résiduelle sévère, une HTA et un trouble du rythme cardiaque récurrent. Le traitement médical actuel (Coverma, Calcimagon et Magnesiocard) devait être poursuivi et la patiente devait également effectuer des contrôles endocrinologiques et cardiologiques réguliers (trois à quatre fois par an), ainsi qu’une évaluation orthopédique régulière pour une correction des troubles de la marche. L’indisponibilité probable de spécialistes irait à l’encontre d’un traitement médical dans le pays d’origine.

l. Par courrier du 4 août 2022, l’OCPM a fait part à la requérante de son intention de ne pas donner une suite favorable à sa demande de regroupement familial et de renvoyer le dossier au TAPI pour une reprise de la procédure A/450/2019. Il lui a imparti un délai pour faire valoir par écrit son droit d’être entendue.

m. Le 26 août 2022, l’OCPM a requis du TAPI la reprise de l’instruction de la procédure A/450/2019.

n. Le 29 août 2022, invitée par le TAPI à se déterminer sur les suites de la procédure, la requérante a indiqué avoir introduit une « demande de reconsidération » auprès de l’OCPM le 21 octobre 2021 sur la base du rapport médical du Dr I______. Sa mobilité était réduite et nécessitait la présence continuelle d’une aide qui pourrait être assumée par les membres de sa famille.

Son fils B______ avait retrouvé un travail comme employé marketing en juillet 2022 et avait pris contact avec ses créanciers afin de trouver un arrangement de paiement. Il remplissait ainsi toutes les conditions pour qu’elle puisse se voir octroyer une autorisation de séjour. Son état de santé s’était récemment détérioré et elle était actuellement hospitalisée ; elle avait plus que jamais besoin de l’assistance de ses proches.

Elle a notamment produit une copie du contrat de travail de B______ conclu avec J______ Sàrl le 9 août 2022.

o. Le 2 septembre 2022, le TAPI a informé les parties de la reprise de l’instruction de la procédure et imparti un délai à l’OCPM pour se déterminer.

D. a. Par décision du 20 septembre 2022, l’OCPM a refusé d’octroyer une autorisation de séjour pour regroupement familial en faveur de la requérante et confirmé son renvoi de Suisse prononcé par décision du 20 décembre 2018.

Les conditions de l’art. 3 annexe I ALCP n’étaient pas remplies. En effet, bien que son fils B______ ait retrouvé le statut de travailleur au sens de l’art. 6 annexe I ALCP, il n’avait pas été démontré à satisfaction que la requérante serait à la charge de celui-ci de manière régulière et continue depuis son arrivée en Suisse en avril 2014. Au contraire, les éléments au dossier laissaient plutôt penser que c’était notamment sa nièce, F______, qui la prenait en charge. De plus, la requérante se trouvait sur le sol helvétique depuis avril 2014 contrairement à son fils qui n’avait fait usage de son droit de circuler librement au sens de l’ALCP qu’en avril 2017. Il ressortait d’ailleurs des échanges de courriers qu’elle n’avait été hébergée par celui-ci qu’à partir du 1er janvier 2019. La portée économique du regroupement familial au sens de l’art. 3 annexe I ALCP n’était manifestement pas visée dans le cas d’espèce. Dès lors, l’intéressée ne saurait se prévaloir de la disposition précitée, sans commettre un abus de droit, étant rappelé qu’elle avait modifié sa requête en cours de procédure pour pouvoir vivre auprès de sa nièce avant de finalement revenir à sa requête initiale.

La requérante ne saurait non plus invoquer les dispositions de l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), qui protégeait avant tout les relations entre conjoints et entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun. Il n’avait pas été allégué ni démontré qu’elle se trouverait dans un rapport de dépendance particulier avec son fils découlant d’un handicap ou d’une maladie grave l’empêchant de vivre de manière autonome.

Au surplus, son renvoi de Suisse et de l’espace Schengen avait d’ores et déjà été prononcé par décision du 20 décembre 2018 et le dossier ne faisait pas apparaître que son exécution ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée. En effet, ses problèmes de santé avaient déjà été pris en considération dans la décision précitée et aucun fait nouveau et important n’avait été allégué et démontré.

b. Par acte du 21 octobre 2022, la requérante a interjeté recours auprès du TAPI à l’encontre de la décision de l’OCPM du 20 septembre 2022. À titre préalable, elle a sollicité la suspension de la procédure jusqu’à droit jugé dans la procédure A/450/2019.

Ce recours a été enregistré sous le numéro de cause A/3553/2022.

Depuis la perte de son époux en 2002, elle dépendait uniquement de ses fils, sur le plan matériel, économique et social. Cette dépendance s’était aggravée en 2003 suite à un premier AVC. En 2012 (sic), elle avait été victime d’un deuxième AVC et souffrait depuis lors de plusieurs affections médicales chroniques et de séquelles invalidantes. Sa mobilité était réduite et la présence continuelle d’une aide lui était nécessaire. Cette dépendance avait contraint ses fils à revoir toute l’organisation de sa prise en charge.

Contrairement à ce que retenait l’OCPM, B______, qui travaillait à Genève depuis 2010, soit déjà avant son arrivée en Suisse, avait toujours été impliqué dans l’organisation de sa prise en charge (visite quotidienne, aide à domicile, rendez-vous médicaux, etc.). En outre, il s’était installé à Genève et elle avait emménagé avec lui dès le 1er janvier 2019. Ce dernier avait trouvé un nouveau travail depuis le 11 juillet 2022 pour un salaire mensuel brut de CHF 5'200.-, ce qui était largement suffisant pour prendre soin d’elle. Il avait également trouvé un arrangement de paiement avec ses créanciers qui se traduisait par une saisie sur salaire mensuelle de CHF 710.-. Sa demande de regroupement familial pour vivre auprès de lui était donc tout à fait légitime.

Sous l’angle de l’art. 8 CEDH, depuis la mort de son époux et ses deux AVC, elle souffrait de séquelles motrices importantes, de troubles du sommeil et d’un état dépressif profond. Sa prise en charge médicale et quotidienne n’était pas possible au Cameroun vue la nécessité d’une surveillance régulière et le risque vital qu’elle encourait à court terme en l’absence d’une telle surveillance. Ses fils et sa nièce avait mis en place une organisation qui lui permettait de bénéficier d’une surveillance constante et optimale sur le plan médical, matériel et émotionnel. Il n’existait aucun autre moyen de faire face à ses problèmes au Cameroun, car son mari était décédé et elle dépendait exclusivement du soutien de ses fils et de sa nièce.

Elle a notamment produit des documents de l’office des poursuites datés du mois d’août 2022 relatifs à une saisie sur salaire d’B______ en cours.

c. Par décision du 14 novembre 2022, le TAPI a prononcé la jonction des procédures A/450/2019 et A/3553/2022 sous le numéro de cause A/450/2019.

d. Par jugement du 9 mars 2023, le TAPI a rejeté les recours.

Séjournant en Suisse depuis avril 2014, soit depuis près de neuf ans, la requérante ne remplissait à l’évidence pas les conditions de durée de l’autorisation de séjour pour traitement médical (art. 32 al. 1 et 3 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 [RS 142.20 - LEI]). En outre, dans la mesure où elle souhaitait demeurer en Suisse puisqu’elle requérait la délivrance d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, respectivement au titre du regroupement familial, en invoquant par ailleurs le caractère non raisonnablement exigible de son renvoi de Suisse, il convenait de retenir que son retour au Cameroun n’était manifestement pas garanti.

Les conditions d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur n’étaient pas non plus remplies. La durée de séjour de neuf ans devait être relativisée, s’étant déroulé dans l’illégalité. Son intégration ne pouvait en aucun cas être qualifiée d’exceptionnelle : elle n’y avait pas travaillé, n’y avait acquis aucune formation particulière et n’avait fait état, sur le plan social, d’aucun engagement particulier, notamment amical ou associatif. Elle ne disposait en outre d’aucun moyen financier et était entièrement la charge de sa famille. Une future dépendance à l’aide sociale n’était d’ailleurs pas exclue vu la situation familiale et financière de ses deux fils. Sur le plan médical, son état actuel était stable et certaines affections étaient désormais traitées, voire guéries, même si un suivi restait nécessaire. Rien au dossier n’indiquait par ailleurs que ce suivi ne pourrait pas continuer au Cameroun, où elle avait déjà été prise en charge depuis 2003.

La requérante ne remplissait pas les conditions d’une autorisation de séjour au titre du regroupement familial sur la base de l’ALCP. Il n’avait pas été démontré à satisfaction qu’elle était à la charge d’B______ de manière régulière et continue depuis son arrivée en Suisse en avril 2014. Les éléments du dossier laissaient plutôt penser que c’était sa nièce, F______, qui la prenait en charge. B______ faisait du reste l’objet de plusieurs poursuites et actes de défauts de biens pour un montant total de plus de CHF 48'000.-, ainsi que d’une saisie sur salaire de CHF 710.- par mois, ce qui permettait de remettre en question la capacité d’entretien de l’intéressé vis-à-vis de sa mère. Son entretien n’était ainsi pas garanti. La requérante ne pouvait par ailleurs pas se prévaloir de l’art. 3 annexe I ALCP sans commettre un abus de droit. Elle se trouvait en effet déjà sur le sol helvétique depuis trois ans lorsqu’B______ avait fait usage de son droit de circuler au sens de l’ALCP. De plus, elle n’avait été hébergée chez lui qu’à partir du 1er janvier 2019, étant relevé qu’elle avait déclaré avoir emménagé dans son appartement sis rue D______, alors qu’à cette date, B______ était déjà domicilié à la rue E______. Ce n’était que suite au refus de l’OCPM de lui délivrer une autorisation de séjour – notamment pour regroupement familial auprès de C______, au motif que celui‑ci touchait des prestations de l’hospice et que le logement, de quatre pièces pour sept personnes, devait être considéré comme inadéquat – que la requérante avait déposé la demande de regroupement familial auprès de son autre fils. Ces éléments, et en particulier le laps de temps relativement court entre la décision de refus, l’emménagement de la requérante chez B______ et le dépôt de la demande de regroupement familial le 31 janvier 2019, laissaient penser que ce regroupement familial n’avait pas pour objectif la reconstitution ou le maintien de la vie familiale, mais répondait davantage à des motifs de convenance personnelle, étant encore relevé que la requérante avait modifié sa requête en cours de procédure pour pouvoir vivre auprès de sa nièce, avant de finalement revenir à sa requête initiale.

Sous l’angle de l’art. 8 CEDH, il n’était pas démontré que la requérante se trouverait dans un rapport de dépendance particulier, tel que défini par la jurisprudence, à l’égard de ses proches résidant à Genève. 

Enfin, l’exécution de son renvoi était raisonnablement exigible, la requérante n’ayant pas démontré à satisfaction de droit que ses problèmes de santé étaient d’une gravité telle qu’un retour au Cameroun apparaissait, d’un point de vue médical, insoutenable.

E. a. Par acte du 24 avril 2023, la requérante a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à l’octroi d’un titre de séjour « à quelque titre que ce soit ».

Durant son séjour en Suisse, elle avait pu bénéficier de l’assistance régulière de ses proches ainsi que des soins à domicile. Grâce à ce soutien, son état de santé s’était amélioré et était désormais stabilisé. La qualité des soins et du suivi médical proposés au Cameroun étaient incomparables à celle de la Suisse. Elle avait subi une nouvelle attaque d’AVC dernièrement et s’était fait poser une nouvelle prothèse. Elle était suivie à domicile par un physiothérapeute, par l’Institution de maintien d’aide et de soins à domicile (ci-après : IMAD) et par ses proches.

Elle ne bénéficiait d’aucun soutien au Cameroun, ses deux filles qui y résidaient étant constamment prises par leurs activités. Les conditions de commodité étaient, enfin, très limitées au Cameroun.

b. Par réponse du 25 mai 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Par réplique du 21 juillet 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions et produit des nouvelles pièces, dont des rapports médicaux du Dr I______ des 31 janvier 2022 et 27 juin 2023, une attestation de la clinique des Grangettes du 19 août 2022, des avis de sortie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) des 7 et 16 septembre 2022, une lettre de transfert des HUG du 22 novembre 2022, un compte rendu opératoire des HUG du 3 novembre 2022, des documents médicaux relatifs à une intervention de la cataracte le 30 juin 2023 et des attestations de ses filles quant aux conditions de vie au Cameroun.

d. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé des décisions de l’OCPM refusant à la recourante la délivrance d’une autorisation de séjour.

2.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), devenue la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI et à la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 2C_404/2022 du 4 août 2022 consid. 6.1), les demandes déposées avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit.

En l’occurrence, la requête ayant abouti à la décision du 20 décembre 2018 (demande d’autorisation de séjour pour traitement médical, respectivement pour cas de rigueur) a été déposée en juillet 2014, de sorte que c’est l’ancien droit qui s’applique à ce volet du litige. S’agissant de la requête ayant fait l’objet de la décision du 20 septembre 2022 (demande d’autorisation de séjour au titre de regroupement familial), elle a été déposée le 31 janvier 2019. Cette demande est donc régie par le nouveau droit. Cette distinction apparaît cependant théorique, la plupart des dispositions de la LEI étant demeurées identiques.

2.2 La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’OASA, règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Cameroun.

2.3 Aux termes de l'art. 29 LEI, un étranger peut être admis en vue d'un traitement médical. Le financement et le départ de Suisse doivent être garantis.

Même lorsque les conditions posées à l'art. 29 LEI sont cumulativement remplies, l'étranger ne dispose pas d'un droit à la délivrance d'une autorisation de séjour pour suivre un traitement médical en Suisse, l'art. 29 LEI étant en effet rédigé en la forme potestative (arrêt du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] F-235/2018 du 4 avril 2019 consid. 6.1), sauf à pouvoir se prévaloir d'une disposition particulière du droit fédéral ou d'un traité lui conférant un tel droit, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

L'autorisation de séjour pour traitement médical est une autorisation de courte durée. Elle peut ainsi être octroyée pour une durée limitée d'une année au plus (art. 32 al. 1 LEI). Une prolongation jusqu'à une durée totale de deux ans est toutefois envisageable (art. 32 al. 3 LEI).

Il ressort de la doctrine et de la jurisprudence que le séjour pour traitement médical au sens de l'art. 29 LEI est de nature temporaire et que l'étranger requérant l'application de cette disposition légale doit apporter la garantie qu'il quittera la Suisse à l'issue du traitement suivi (art. 5 al. 2 LEI ; arrêt du TAF F-235/2018 précité consid. 6.6). À ce titre, l'autorité administrative doit analyser si le retour du requérant dans son pays d'origine apparaît comme certain compte tenu, d'une part, de sa situation personnelle, familiale et professionnelle, et, d'autre part, de la situation politique, économique et sociale du pays de provenance (Martina CARONI/Lisa OTT, Bundesgesetz über die Ausländerinnen und Ausländer (AuG), 2010, n. 11 ad art. 29). Ainsi par exemple, le départ de Suisse n'est pas assuré lorsque l'intéressé doit suivre un traitement médical sur une longue période (cinq à dix ans) et que la fin de son séjour envisagé en Suisse n'est pas clairement définie (arrêt du TAF C-6330/2014 du 1er octobre 2015 consid. 4.3.2).

2.4 Aux termes de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission (art. 18 à 29 LEI) notamment dans le but de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L’art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment de sa demande d’autorisation de séjour pour cas de rigueur, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (secrétariat d'État aux migrations, Domaine des étrangers [ci-après : directives LEI], état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4 ; ATA/257/2020 du 3 mars 2020 consid. 6c). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/92/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4d).

L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire la personne requérante aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique que la personne concernée se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'elle tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles la personne requérante serait également exposée à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1 ; 2A.255/1994 du 9 décembre 1994 consid. 3). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par la personne requérante à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/163/2020 du 11 février 2020 consid. 7b).

La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du TAF C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C‑6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3).

La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée de séjour en Suisse (Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, LEtr, volume 2, 2017, p. 269 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du TAF C‑7330/2010 du 19 mars 2012 consid. 5.3 ; Minh SON NGUYEN/ Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur lorsque la personne concernée démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation. De même, la personne étrangère qui entre pour la première fois en Suisse en souffrant déjà d'une sérieuse atteinte à la santé ne saurait se fonder uniquement sur ce motif médical pour réclamer une telle exemption (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_861/2015  du 11 février 2016 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6860/2016 du 6 juillet 2018 consid. 5.2.2 ; ATA/1279/2019 du 27 août 2019 consid. 5f).

En l'absence de liens d'une certaine intensité avec la Suisse, l'aspect médical et les éventuelles difficultés de réintégration de la personne concernée dans le pays d'origine ne sauraient justifier, à eux seuls, l'octroi d'un permis humanitaire pour cas de rigueur. Le cas échéant, ces critères ne peuvent en effet être pris en considération que dans le cadre de l'examen de la licéité et de l'exigibilité de l'exécution du renvoi (arrêt du TAF F-4125/2016 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1 ; ATA/506/2023 du 16 mai 2023 consid. 7.7 ; ATA/41/2022 du 18 janvier 2022 consid. 9).

2.5 Un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 § 1 CEDH pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille. Pour qu'il puisse invoquer la protection de la vie familiale découlant de cette disposition, il doit entretenir une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 139 I 330 consid. 2.1).

Les relations familiales qui peuvent fonder un droit à une autorisation sont avant tout les rapports entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant ensemble (ATF 135 I 143 consid. 1.3.2). Un étranger majeur ne peut se prévaloir de l'art. 8 CEDH que s'il se trouve dans un état de dépendance particulier par rapport à des membres de sa famille résidant en Suisse en raison, par exemple, d'un handicap ou d'une maladie grave (ATF 129 II 11 consid. 2).

Le droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 CEDH n'est toutefois pas absolu. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible selon l'art. 8 § 2 CEDH, pour autant qu'elle soit prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Le refus de prolonger une autorisation de séjour ou d'établissement fondé sur l'art. 8 § 2 CEDH suppose une pesée des intérêts en présence et l'examen de la proportionnalité de la mesure (ATF 139 I 145 consid. 2.2 ; 135 II 377 consid. 4.3). L’examen de la proportionnalité sous l’angle de l’art. 8 § 2 CEDH se confond avec celui imposé par l’art. 96 LEI, lequel prévoit que les autorités compétentes doivent tenir compte, dans l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que ceux de son degré d'intégration (arrêts du Tribunal fédéral 2C_419/2014 du 13 janvier 2015 consid. 4.3 ; 2C_1125/2012 du 5 novembre 2013 consid. 3.1 ; ATA/519/2017 du 9 mai 2017 consid. 10d).

2.6 En l’occurrence, la recourante sollicite une autorisation de séjour « à quelque titre que ce soit ». Il convient donc d’examiner successivement son droit à une autorisation de séjour en vue de traitement médical (art. 29 LEI), pour cas d’extrême gravit (art. 30 LEI) et pour regroupement familial fondée sur l’ALCP.

S’agissant d’abord de sa requête en autorisation de séjour en vue de traitement médical (art. 29 LEI), force est de relever que le retour de la recourante au Cameroun n’est manifestement pas garanti. La recourante, qui a déposé une demande d’autorisation de séjour pour cas de rigueur en 2014, a maintes fois exprimé sa volonté de demeurer en Suisse. Les conditions – cumulatives – de l’art. 29 LEI pour l’octroi d’une autorisation de séjour en vue d’un traitement médical ne sont dès lors pas remplies, ce que la recourante ne conteste pas. C’est le lieu de préciser qu’elle n’a, quoi qu’il en soit, aucun droit à l’octroi d’une autorisation, l’art. 29 LEI ayant pour seul but d’exclure l’octroi d’un tel permis à celui qui n’en satisfait pas les conditions.

Sous l’angle du cas de rigueur, la recourante se prévaut des nombreuses atteintes à sa santé et du soutien de ses proches en Suisse.

Les problèmes de santé de la recourante sont certes nombreux. Elle a été victime de deux AVC en 2003 et 2014 ayant provoqué une hémiparésie gauche, nécessitant la marche avec une canne et des difficultés de mobilisation, ainsi qu’une HTA, traitée de longue date et bien contrôlée. À son arrivée en Suisse, une gonarthrose gauche a été diagnostiquée et le traitement, consistant en la pose d’une prothèse totale du genou gauche, a été effectué en août 2017. Selon le rapport médical du Dr I______, elle souffre encore de douleurs au genou gauche, ce qui a entraîné une hospitalisation en octobre 2022. En juin et août 2016, l’intéressée a également subi deux interventions chirurgicales pour un cancer épidermoïde micro-invasif du col de l’utérus, avec un status en ordre à deux ans de la fin du traitement (selon les rapports médicaux du 4 octobre 2018). En janvier 2022, une pseudo‑hypoparathyroïdie a été diagnostiquée, provoquant des épisodes d’hypocalcémies. En novembre 2022, la recourante a subi une chirurgie élective en raison d’un conflit femoro-patellaire de la prothèse totale de son genou gauche. Enfin, en juin 2023, la recourante a encore subi une intervention de la cataracte. S’agissant de son traitement, il consiste en la prise d’anticoagulation thérapeutique (à vie), de contrôles réguliers en endocrinologie et en cardiologie, d’une évaluation régulière en orthopédie ainsi qu’en la poursuite d’un traitement médicamenteux.

Ainsi que l’a relevé le TAPI, l’état actuel de la recourante est stable, certaines affections étant désormais traitées, voire guéries, même si un suivi reste nécessaire. La recourante l’admet du reste expressément dans ses écritures devant la chambre de céans. Rien au dossier ne vient appuyer ses dires selon lesquels elle aurait subi la pose d’une nouvelle prothèse. Les documents médicaux produits à l’appui de sa réplique font certes état d’une chirurgie élective subie en novembre 2022 en raison d’un conflit femoro-patellaire de la prothèse totale de son genou gauche. Les suites postopératoires ont toutefois été décrites comme favorables avec un contrôle radiologique satisfaisant, des douleurs bien maîtrisées, la recourante ayant rapidement récupéré son autonomie grâce à la physiothérapie de rééducation à la marche (rapport des HUG du 22 novembre 2022). Comme il sera exposé ci-après, si l’intéressée critique la qualité des soins et infrastructures de son pays d’origine, elle ne démontre pas l’impossibilité d’avoir accès aux soins et médicaments dont elle a besoin et rien au dossier n’indique que tel serait le cas, étant précisé qu’elle a déjà été prise en charge au Cameroun lors de son premier AVC en 2003. Le fait que la qualité des soins dispensés dans son pays d’origine serait inférieure à celle existant en Suisse ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation du nombre des étrangers.

Pour le reste, la recourante est arrivée en Suisse en 2014, soit il y a neuf ans. La durée de ce séjour doit toutefois doit être relativisée dans la mesure où, depuis l’échéance de son visa le 14 juillet 2014, il a été effectué dans l'illégalité, puis au bénéfice d'une tolérance des autorités de migration. Arrivée à Genève à l’âge de 62 ans, la recourante ne s’y est intégrée ni professionnellement ni socialement. Elle n'allègue pas avoir noué des relations fortes avec des personnes locales ni s'être engagée dans la vie culturelle ou associative du canton, les seuls contacts qu’elle mentionne dans ses écritures étant les membres de sa famille. Elle ne dépend certes pas de l’aide sociale, à tout le moins jusqu’en avril 2017 (date de l’attestation de l’hospice). Force est toutefois de constater qu’elle a fait l’objet de poursuites par le passé, même si, au 4 mai 2022, celles-ci ont toutes été réglées. Ainsi, et comme l’a relevé le TAPI, une future dépendance à l’aide sociale n’est pas exclue, étant précisé que son fils, C______, touche des prestations de l’hospice, et que son autre fils, B______, a contracté d’importantes dettes depuis 2019. Dans ces conditions, les seules relations qu’elle entretient avec sa famille résidant à Genève ne suffisent pas pour lui reconnaître des liens d’une certaine intensité avec la Suisse, étant rappelé qu’elle a encore des liens avec son pays d'origine, où résident ses deux filles, étant rappelé que des visas de retour ont été demandés pour raisons familiales en 2016 et 2018. La recourante ne présente donc pas une situation de détresse personnelle au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, si bien qu’il ne se justifie pas de déroger aux conditions d'admission en Suisse en sa faveur, au vu de la jurisprudence très stricte en la matière.

La recourante ne peut pas non plus tirer de droit de l’art. 8 CEDH. Ainsi que l’a retenu le TAPI, et sans que ce point n’ait été contesté devant la chambre de céans, la recourante n’a pas démontré qu’elle se trouverait dans un rapport de dépendance particulier à l’égard de ses fils et la nièce. Il n’est en particulier pas établi que son état de santé nécessiterait une prise en charge permanente que seuls ses deux fils, voire sa nièce, seraient en mesure d’assumer.

Partant, au vu des éléments qui précèdent, l’OCPM n’a ni violé la loi ni abusé de son pouvoir d’appréciation en refusant de préaviser positivement auprès du SEM l’octroi d’une autorisation de séjour en faveur de la recourante.

3.             Reste à examiner si la recourante a droit à une autorisation de séjour au titre de regroupement familial avec son fils, B______, ressortissant français.

3.1 Selon l'art. 3 par. 1 annexe I ALCP, en relation avec l'art. 7 let. d ALCP, les membres de la famille d'une personne ressortissant d'une partie contractante ayant un droit de séjour ont le droit de s'installer avec elle, à condition que celle-ci dispose d'un logement approprié. Sont notamment considérés comme membres de la famille, quelle que soit leur nationalité, les ascendants de cette personne ou ceux de son conjoint qui sont à sa charge (art. 3 par. 2 let. b annexe I ALCP).  

La qualité de membre de la famille « à charge » résulte du soutien du membre de la famille tel qu'assuré matériellement par le ressortissant UE/AELE bénéficiant du droit de séjour en Suisse (ATF 135 II 369 consid. 3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_771/2021 du 15 septembre 2022 consid. 4.2 ; 2C_184/2021 du 26 août 2021 consid. 3.2). Ce qui importe, c'est de savoir si, compte tenu de sa situation économique et sociale, le parent ascendant est en mesure de subvenir lui‑même à ses besoins essentiels, ou s'il est tributaire de moyens financiers supplémentaires apportés par le titulaire du droit de séjour (ATF 135 II 369 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_771/2021 précité consid. 4.3 ; 2C_184/2021 précité consid. 3.2 et les arrêts cités). S'agissant des ascendants qui ne résident pas déjà en Suisse ou qui n'y séjournent qu'en tant que touristes au moment de la demande, c'est la nécessité du soutien matériel apporté dans leur pays d'origine ou de provenance par le ressortissant UE/AELE séjournant en Suisse au moment du dépôt de la demande qui est déterminant (ATF 135 II 369 consid. 3.1 et 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_433/2021 du 21 octobre 2021 consid. 5.1 ; 2C_757/2019 du 21 avril 2020 consid. 4.2). En d'autres termes, le regroupement familial d'un ascendant provenant de l'étranger présuppose un soutien matériel par le regroupant existant au préalable dans le pays d'origine ou de provenance (cf. Martina CARONI et al., Migrationsrecht, 5e éd. 2022, n° 1015 p. 409; Peter UEBERSAX et al., Migrationsrecht in a nutshell, 2021, p. 119). Ce n'est que si l'ascendant séjourne légalement en Suisse depuis plusieurs années déjà qu'il convient de se baser sur le soutien matériel qu'il reçoit effectivement dans ce pays (ATF 135 II 369 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_771/2021 précité consid. 4.3 ; 2C_757/2019 précité consid. 4.2 et les arrêts cités).  

Seul l'aspect matériel de l'entretien de l'ascendant entre en ligne de compte et non les besoins sociaux (arrêt du Tribunal fédéral 2C_771/2021 précité consid. 4.4 et les arrêts cités). L'entretien matériel peut également être fourni par des prestations en nature (ATF 135 II 369 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_757/2019 précité consid. 4.4). L'existence d'un lien de dépendance effectif doit être prouvée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_771/2021 précité consid. 4.4 et les arrêts cités). 

À cela s'ajoute que le ressortissant UE/AELE résidant en Suisse doit avoir des ressources financières suffisantes pour continuer à assurer l'entretien nécessaire des membres de sa famille ou de celle de son conjoint, une fois que ceux-ci l'ont rejoint. Enfin, il faut qu'une vie familiale (sociale) ait effectivement existé avant le regroupement familial (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_433/2021 précité consid. 5.1 et les arrêts cités).

3.2 En l’espèce, les justificatifs d’envois d’argent effectués par son fils en faveur de la recourante au Cameroun pour la période du 14 décembre 2009 au 15 février 2014 attestent de 32 transferts pour un montant total de CHF 5'024.87. La question de savoir si les montants perçus par la recourante lui permettaient de subvenir à ses besoins essentiels peut toutefois rester ouverte. La recourante n’a en effet pas démontré que son fils participait à son entretien de manière régulière et continue depuis son arrivée en Suisse en 2014. Ainsi que l’a relevé le TAPI, les éléments au dossier laissent plutôt penser que c’est sa nièce, F______, qui la prenait en charge. Pour ce motif déjà, elle ne peut pas se prévaloir d'un droit de séjour découlant de l'art. 3 annexe I ALCP. S’ajoute à cela qu’il ressort des pièces versées au dossier que son fils ne dispose pas des moyens financiers suffisants pour subvenir à son entretien en Suisse. Au mois de mai 2022, il faisait l’objet de poursuites actives pour un montant total de CHF 6'815.70, de cinq actes de défaut de biens pour un montant total de CHF 41'602.27 ainsi que d’une saisie sur salaire mise en place en août 2022. Devant la chambre de céans, la recourante ne conteste pas ces éléments, ni n’apporte de pièces justificatives démontrant que la situation financière de son fils se serait, depuis, assainie. La seule allégation, non étayée, selon laquelle il aurait trouvé un arrangement de paiement avec ses créanciers ne suffit pas. La chambre de céans relève au demeurant que la demande d’autorisation de séjour pour regroupement familial a été formée le 31 janvier 2019, soit cinq ans après son arrivée en Suisse et quelques semaines après le refus de lui octroyer une autorisation pour cas de rigueur. De plus, la recourante a indiqué n’avoir été hébergée chez son fils, B______, qu’à partir du 1er janvier 2019, étant relevé qu’elle a déclaré avoir emménagé dans son appartement sis rue D______, alors qu’à cette date, son fils était déjà domicilié à la rue E______. Dans ces conditions et ainsi que l’a relevé le TAPI, la démarche de la recourante apparaît répondre davantage à un motif de convenance personnelle qu’à permettre la vie commune des membres de la famille. À relever que la recourante a modifié sa requête en cours de procédure pour pouvoir vivre auprès de sa nièce, avant de revenir à sa requête initiale après avoir été informée par l’OCPM que les dispositions sur le regroupement familial ne s’appliquaient pas à une relation tante‑nièce.

Le jugement entrepris doit partant également être confirmé en tant qu’il nie le droit de la recourante à une autorisation de séjour fondé sur l’art. 3 par. 1 annexe I ALCP.

4.             Enfin, la recourante demande à être mise au bénéfice d'une admission provisoire.

4.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, toute personne étrangère dont l'autorisation est refusée, révoquée ou qui n'est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyée. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64 let. d al. 1 LEI).

Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui‑ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

S'agissant plus spécifiquement de l'exécution du renvoi des personnes en traitement médical en Suisse, celle-ci ne devient inexigible que dans la mesure où ces dernières ne pourraient plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. L'art. 83 al. 4 LEI, disposition exceptionnelle, ne saurait en revanche être interprété comme impliquant un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine ou de destination de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé qu'on trouve en Suisse (ATAF 2011/50 consid. 8.3). La gravité de l'état de santé, d'une part, et l'accès à des soins essentiels, d'autre part, sont déterminants. Ainsi, l'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF F-1602/2020 du 14 février 2022 consid. 5.3.4).

4.2 Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (ci‑après : CourEDH), l'exécution du renvoi ou de l'expulsion d'un malade physique ou mental est exceptionnellement susceptible de soulever une question sous l'angle de l'art. 3 CEDH si la maladie atteint un certain degré de gravité et qu'il est suffisamment établi que, en cas de renvoi vers l'État d'origine, la personne malade court un risque sérieux et concret d'être soumise à un traitement interdit par cette disposition (ACEDH N. c. Royaume-Uni du 27 mai 2008, req. n° 26565/05, § 29 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_3/2021 du 14 avril 2021 consid. 4.2). C'est notamment le cas si sa vie est en danger et que l'État vers lequel elle doit être expulsée n'offre pas de soins médicaux suffisants et qu'aucun membre de sa famille ne peut subvenir à ses besoins vitaux les plus élémentaires (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité § 42; ATF 137 II 305 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_14/2018 du 13 août 2018 consid. 4.1; 2C_1130/2013 du 23 janvier 2015 consid. 3).

Le renvoi d'un étranger malade vers un pays où les moyens de traiter sa maladie sont inférieurs à ceux disponibles dans l'État contractant reste compatible avec l'art. 3 CEDH, sauf dans des cas très exceptionnels, en présence de considérations humanitaires impérieuses (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité § 42 ; Emre c. Suisse du 22 mai 2008, req. n° 42034/04, § 89). Dans un arrêt du 13 décembre 2016 (ACEDH Paposhvili c. Belgique, req. n° 41738/10, § 173 ss, not. 183), la Grande Chambre de la CourEDH a clarifié son approche en rapport avec l'éloignement de personnes gravement malades et a précisé qu'à côté des situations de décès imminent, il fallait entendre par « autres cas très exceptionnels » pouvant soulever un problème au regard de l'art. 3 CEDH les cas d'éloignement d'une personne gravement malade dans lesquels il y a des motifs sérieux de croire que cette personne, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou de défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie ; ces cas correspondent à un seuil élevé pour l'application de l'art. 3 CEDH dans les affaires relatives à l'éloignement des étrangers gravement malades. La CourEDH a aussi fixé diverses obligations procédurales dans ce cadre (ACEDH Savran c. Danemark du 7 décembre 2021, req. n° 57467/15, § 130).

4.3 En l'espèce, la recourante fait principalement valoir que le système de santé suisse est de meilleure qualité que le celui existant au Cameroun. Or, conformément à la jurisprudence, ce constat n'est pas suffisant pour admettre que son renvoi ne serait pas exigible. Dans le jugement entrepris, le TAPI a relevé que l’hôpital central de Yaoundé disposait d’un service de physio-kinésithérapie qui se chargeait, entre autres, de la rééducation fonctionnelle dans le domaine orthopédique. Le CHU à Yaoundé disposait quant à lui d’un IRM. Il ressortait par ailleurs de la jurisprudence du TAF que les traitements contre l’hypertension – affection courante au Cameroun – étaient aisément disponibles dans ce pays et que des soins en neurologie et en cardiologie étaient également disponibles dans les hôpitaux de Yaoundé ou à Douala (arrêts du TAF E-3050/2014 du 1er février 2018 consid. 7.8.2). Le dossier ne contient pas d'éléments probants à même de remettre en cause la possibilité de prise en charge médicale de la recourante, telle que mise en avant par l’instance précédente. Dès lors, dans la mesure où il existe des structures de soins suffisantes au Cameroun qui peuvent prendre en charge les soins nécessités par les troubles dont souffre la recourante, son renvoi ne l'expose pas à un risque réel d'être confronté à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant une mise en danger concrète de sa vie ou une atteinte sérieuse de son intégrité physique.

En conclusion, en l'absence d'éléments démontrant que le retour de la recourante au Cameroun la mettrait concrètement en danger compte tenu de sa situation médicale, il convient de retenir que l'exécution de son renvoi est raisonnablement exigible au sens de l’art. 83 LEI, de sorte que c’est à juste titre que le TAPI a considéré que l'OCPM n'avait pas à proposer son admission provisoire au SEM.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 avril 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 9 mars 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. de Lausanne 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Valérie LAUBER et Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. MAZZA

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.