Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3429/2021

ATA/1085/2022 du 01.11.2022 sur JTAPI/641/2022 ( PE ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 12.12.2022, rendu le 30.03.2023, IRRECEVABLE, 2C_1024/2022
Descripteurs : AVANCE DE FRAIS;DÉFAUT DE PAIEMENT;DÉCISION D'IRRECEVABILITÉ;NOUVEAU MOYEN DE PREUVE
Normes : LPA.16; LPA.68; LPA.86; LPA.87
Résumé : Recours contre un jugement du Tribunal administratif de première instance déclarant irrecevable le recours déposé devant lui pour défaut du paiement de l’avance de frais. La recourante se prévaut devant la chambre administrative d’un nouveau moyen de preuve en produisant pour la première fois le récépissé de son paiement de l’avance de frais à la Poste. Ce nouveau moyen de preuve est recevable et il en découle que le recours déposé devant le TAPI était recevable. La cause est renvoyée au TAPI. La recourante, qui n’a pas respecté ses obligations de collaboration, doit toutefois supporter les frais de la procédure de première instance, l’émolument ayant été fixé à CHF 350.-.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3429/2021-PE ATA/1085/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er novembre 2022

 

dans la cause

 

Madame A______, agissant pour elle-même et pour sa fille mineure B______
représentées par Me Agrippino Renda, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 juin 2022 (JTAPI/641/2022)


EN FAIT

1) Par décision du 2 septembre 2021, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a refusé de faire droit à la demande de régularisation des conditions de séjour déposée le 17 mai 2019 en faveur de Monsieur C______, né le ______ 1984, son épouse Madame A______, née le ______ 1985, et leur enfant B______, née le ______ 2012, ressortissants brésiliens, et a prononcé leur renvoi de Suisse.

2) Par acte du 6 octobre 2021, Mme A______ a interjeté recours à l’encontre de cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) pour elle-même et sa fille.

3) Par courrier recommandé du 11 octobre 2021, le TAPI a imparti à l’intéressée un délai échéant le 10 novembre 2021 pour procéder au paiement d’une avance de frais de CHF 500.-, sous peine d’irrecevabilité de son recours.

4) Par courrier du 26 octobre 2021, Mme A______ a sollicité une prolongation de délai pour le versement de cette avance de frais au 10 décembre 2021, ce que le TAPI a refusé par pli du 28 octobre 2021.

5) Le 9 novembre 2021, ayant été informé du fait que Mme A______ avait sollicité l’assistance juridique (AC/2921/2021), le TAPI a suspendu le délai pour le paiement de l’avance de frais jusqu’à droit connu dans la procédure d’octroi de celle-ci.

6) Par courrier recommandé du 1er décembre 2021, le TAPI, prenant acte de la décision de refus de l’assistance juridique du 24 novembre 2021, a imparti à l’intéressée un délai au 3 janvier 2022 pour procéder au paiement de l’avance de frais, sous peine d’irrecevabilité de son recours.

7) Le 7 janvier 2022, ayant été informé du fait que Mme A______ avait déposé un recours contre la décision de l’assistance juridique du 24 novembre 2021, le TAPI a suspendu le délai pour le paiement de l’avance de frais jusqu’à droit connu dans cette procédure.

8) Par arrêt DAAJ/33/2022 du 7 avril 2022, le président de la Cour civile de la Cour de justice a rejeté le recours déposé par Mme A______ contre la décision de refus de l’assistance juridique du 24 novembre 2021.

9) Par courrier recommandé du 20 avril 2022, le TAPI a imparti à Mme A______ un délai au 20 mai 2022 pour procéder au paiement de l’avance de frais, sous peine d’irrecevabilité de son recours. L’attention de celle-ci était attirée sur le fait que le délai pour le versement de l’avance de frais était réputé observé si, avant son échéance, la somme due était versée à la Poste suisse ou débitée en Suisse d’un compte postal ou bancaire en faveur du TAPI, un ordre de paiement envoyé par courrier postal ou par voie électronique le dernier jour du délai ne permettant en général pas de faire débiter le compte avant l’échéance de celui-ci.

Selon le système du suivi des envois (« Track & Trace ») mis en place par la Poste, cette lettre recommandée a été distribuée à l’intéressée le 28 avril 2022.

10) Le 23 mai 2022, le montant de l’avance de frais a été crédité sur le compte du Pouvoir judiciaire.

11) Par courrier recommandé du 25 mai 2022, envoyé également par pli simple, le TAPI a imparti à la recourante un délai au 7 juin 2022 pour lui transmettre tout justificatif démontrant la date à laquelle elle s’était acquittée du paiement de l’avance de frais (avis de débit, extrait de compte, récépissé postal), sous peine d’irrecevabilité de son recours.

12) Par courrier du 31 mai 2022, le conseil de Mme A______ a indiqué au TAPI ne pas être parvenu à joindre sa cliente et a sollicité une prolongation de délai au 30 juin 2022 pour transmettre le justificatif requis, délai que le TAPI n’a que partiellement accordé, repoussant le terme au 13 juin 2022.

13) Par courrier du vendredi 10 juin 2022, le conseil de Mme A______, pour le même motif que celui indiqué dans son courrier du 31 mai 2022, a sollicité un délai supplémentaire au 30 juin 2022 pour fournir le justificatif requis, précisant que le document demeurait introuvable en l’état.

14) Par pli du lundi 13 juin 2022, posté à 18h57, le conseil de Mme A______ a informé le TAPI que le justificatif du paiement de l’avance de frais demeurait en l’état introuvable. Il était vraisemblable que celui-ci ait été égaré par sa cliente ou déplacé/subtilisé par un tiers avec d’autres documents appartenant à cette dernière. Sa cliente persistait dès lors intégralement dans sa requête initiale du 31 mai 2022 et sollicitait un délai supplémentaire pour verser au dossier le justificatif en question, ou alors en cas d’impossibilité un duplicata de celui-ci, au 30 juin 2022. « En effet, Mme A______ entreprendra, dès cette semaine, des démarches afin d’obtenir une copie de la quittance postale du 20 mai 2022 auprès de la Poste Suisse SA ». Il appartenait toutefois au TAPI de solliciter de l’organisme bancaire ou postal compétent la communication de la date du paiement de l’avance de frais réclamé par la justice.

15) Par pli du 14 juin 2022, faisant référence à la lettre du 10 juin 2022, le TAPI a refusé d’accorder une prolongation et informé les parties que la cause était gardée à juger.

16) Par jugement du 16 juin 2022, notifié le 24 juin 2022, le TAPI a déclaré le recours irrecevable (ch. 1), mis à la charge de l’intéressée un émolument de CHF 350.- (ch. 2) et a ordonné la restitution en faveur de cette dernière du solde de l’avance de frais de CHF 150.- (ch. 3).

La demande de paiement de l’avance de frais avait été correctement acheminée, par courrier recommandé du 20 avril 2022, à l’adresse du conseil de Mme A______. Elle avait été été reçue le 28 avril 2022 par ce dernier, comme cela ressortait du relevé « Track & Trace ». L’avance de frais avait été versée le 23 mai 2022, soit en dehors du délai imparti. Dûment interpellée par le TAPI le 25 mai 2022, l’intéressée n’avait pas été en mesure d’apporter la preuve, dans le délai fixé au 7 juin 2022, que le paiement de l’avance de frais avait été effectué dans le délai échéant le 20 mai 2022.

Mme A______, à qui incombait le fardeau de la preuve, avait obtenu une prolongation du délai au 13 juin 2022 pour transmettre le justificatif requis et avait donc le temps d’entreprendre les démarches nécessaires auprès de l’organisme bancaire ou postal compétent pour obtenir, cas échéant, un duplicata dudit justificatif. La demande d'un second délai pour entreprendre ces démarches auprès de la Poste Suisse, telle que formulée par l’intéressée le 13 juin 2022, sans prouver d'aucune manière qu'elle aurait été empêchée d'initier ces démarches plus tôt, ne se justifiait pas. L’avance de frais n’avait pas été effectuée dans le délai imparti. Pour le surplus, rien ne permettait de retenir que l’intéressée aurait été victime d’un empêchement non fautif d’agir en temps utile.

17) a. Par acte du 24 août 2022, Mme A______ a interjeté recours contre ledit jugement devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Elle a conclu à son annulation. Cela fait, le recours devant le TAPI devait être déclaré recevable, et il devait être ordonné à celui-ci d’instruire le dossier. Préalablement, Mme A______ devait être autorisée à compléter son recours et une comparution personnelle des parties devait être fixée.

Elle avait précisé, dans son courrier du 13 juin 2022, que le document recherché était une quittance postale, ce qui impliquait que le versement de l’avance de frais avait été effectué personnellement au guichet de la Poste Suisse SA et non par virement bancaire ou postal. Cet élément de fait, crucial, n’avait pas été retenu par le juge de première instance. Or, à la suite de ses recherches, elle avait retrouvé la preuve dudit paiement, effectué au guichet postal le 20 mai 2022.

Le TAPI avait violé l’art. 86 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), ainsi que les principes de la légalité, de l’interdiction de l’arbitraire et de la proportionnalité. Il avait refusé sans droit de lui accorder le court délai sollicité au 30 juin 2022, pour rechercher et produire sa quittance postale ou, subsidiairement, un duplicata de celle-ci, attestant du paiement de l’avance de frais dans le délai imparti. Il avait par ailleurs déclaré irrecevable, à tort, le recours. Elle avait sollicité une prolongation du délai avant l’échéance de celui-ci, notamment par courriers des 31 mai, 10 juin et 13 juin 2022. En lui refusant cette possibilité de se justifier, sans motif juridiquement valable, le TAPI avait agi arbitrairement. Il avait par ailleurs violé le principe de la proportionnalité en ne procédant pas à une pesée des intérêts en présence, soit d’une part « celui de la justice à accéder à la requête de la recourante visant à obtenir un court délai supplémentaire pour produire le document requis et, d’autre part, celui de la justice à patienter quelque peu avant de le recevoir ». Le TAPI avait fait application, par analogie, de la jurisprudence pertinente en matière pénale, laquelle trouvait application lorsque les paiements de l’avance ou des sûretés étaient effectuées par virement bancaire. Il était aisé pour l’autorité judiciaire de procéder à la vérification de la date exacte du paiement, puisque la quittance postale en question avait été également adressée, en copie, au créancier titulaire du compte crédité.

b. Était jointe la copie d’un récépissé, au nom de l’intéressée, à l’adresse de son conseil, en faveur du Pouvoir judiciaire, d’un montant de CHF 500.- muni du timbre humide de la poste de Plainpalais attestant du paiement du montant le 20 mai 2022 à 18h.

18) L’OCPM n’a pas souhaité se déterminer s’agissant d’un problème de recevabilité en lien avec le paiement de l’avance de frais.

19) Après que le TAPI a transmis son dossier, les parties ont été informées, le 27 septembre 2022, que la cause était gardée à juger.

20) Devant la chambre de céans, le délai pour acquitter l’avance de frais de CHF 400.-, fixé par lettre du 25 août 2022 au 24 septembre 2022, a fait l’objet d’une demande de prolongation le 19 septembre 2022, laquelle a été refusée par pli du 20 septembre 2022.

Le 23 septembre 2022, ayant été informé du fait que Mme A______ avait déposé une demande d’assistance juridique, la demande d’avance de frais a été annulée.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2) Le litige porte sur le bien-fondé du jugement du TAPI déclarant le recours irrecevable en l’absence de la preuve, par la recourante, dans le délai qui lui avait été imparti, après prolongation, au 13 juin 2022, du paiement de l’avance de frais dans le délai échéant le 20 mai 2022.

3) a. L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non-paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1262/2017 du 5 septembre 2017 consid. 2a et les références citées).

En vertu de l'art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l'avance n'est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).

À rigueur de texte, l'art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l'avance de frais n'intervienne pas dans le délai imparti (ATA/1043/2021 du 5 octobre 2021 consid. 3b ; ATA/184/2019 du 26 février 2019 consid. 3c).

b. De manière générale, la sanction du non-respect d'un délai de procédure n'est pas constitutive de formalisme excessif, une stricte application des règles relatives aux délais étant justifiée par des motifs d'égalité de traitement et par un intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit (ATF 142 V 152 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_6/2016 du 1er juin 2017 consid. 3.2).

c. En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante n’a pas produit dans le délai initialement fixé au 7 juin, repoussé au 13 juin 2022 à sa demande, la preuve qu’elle s’était acquittée de l’avance de frais dans le délai que lui avait fixé le TAPI.

C’est en conséquence à bon droit, en application de l’art. 86 al. 2 LPA, que le TAPI a déclaré le recours irrecevable.

4) La recourante conteste le bien-fondé du refus de la prolongation sollicitée le 13 juin 2022 par courrier posté à 18h57. Elle invoque des violations des principes de la légalité, de la proportionnalité et considère le refus comme arbitraire.

a. Aux termes de l’art. 16 LPA, un délai fixé par la loi ne peut être prolongé ; les cas de force majeure sont réservés (al. 1) ; le délai imparti par l’autorité peut être prolongé pour des motifs fondés si la partie en fait la demande avant son expiration (al. 2) ; la restitution pour inobservation d’un délai imparti par l’autorité peut être accordée si le requérant ou son mandataire a été empêché sans sa faute d’agir dans le délai fixé ; la demande motivée doit être présentée dans les dix jours à compter de celui où l’empêchement a cessé (al. 3).

D’une manière générale, l’administré, lorsqu’il doit s’attendre à recevoir une décision, doit prendre des dispositions pour faire en sorte d’être atteint. Tel n’est pas le cas de celui qui, dans cette situation, part en vacances sans prendre de dispositions pour avertir l’autorité de son absence, ou pour faire réceptionner son courrier de façon à être averti de l’arrivée, pendant cette période, d’une décision le concernant (ATF 134 V 49 consid. 4).

b. En l’espèce, si la demande a été faite dans les délais, puisqu’elle a été formulée le 13 juin 2022, dernier jour du délai fixé par le TAPI pour produire la preuve du paiement, le TAPI a toutefois considéré qu’elle n’était pas fondée.

Le refus du TAPI repose sur la base légale précitée (art. 16 al. 2 LPA), respectant ainsi le principe de la légalité (art. 5 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101).

Le refus répond à des intérêts publics d'égalité de traitement, de bonne administration de la justice et de sécurité du droit.

Le refus est proportionné. En effet, conformément à la jurisprudence précitée, l’administré, lorsqu’il doit s’attendre à recevoir une décision, doit prendre des dispositions pour faire en sorte d’être atteint. En l’espèce, la recourante savait depuis le courrier recommandé du 11 octobre 2021 qu’elle devrait s’acquitter d’une avance de frais de CHF 500.-, initialement jusqu’au 10 novembre 2021. Le délai ayant été prolongé, elle ne s’en est acquitté qu’à la dernière heure du dernier jour, soit le 20 mai 2022 à 18h selon le récépissé. Si cela remplit les exigences légales, l’intéressée prenait le risque de devoir justifier que son paiement avait été effectué dans le délai fixé. Or, elle n’a pas dûment conservé la preuve de son paiement et n’a pas été en mesure de la produire en temps utile. De surcroît, son conseil avait indiqué, par courrier du 31 mai 2022, ne pas parvenir à la joindre utilement et sollicité une prolongation du délai au 30 juin, témoignant ainsi du fait que sa mandante n’avait pas pris les dispositions pour faire en sorte d’être atteinte comme l’exige la jurisprudence. Par pli du 10 juin 2022, le conseil de la recourante avait renouvelé sa demande « pour les mêmes motifs ». Il précisait toutefois que le justificatif demeurait introuvable. Enfin, par pli du 13 juin 2022, il confirmait que le justificatif du paiement de l’avance de frais demeurait introuvable et précisait notamment « Mme A______ entreprendra, dès cette semaine, des démarches afin d’obtenir une copie de la quittance postale du 20 mai 2022 auprès de la Poste Suisse SA ». Ainsi, dès le deuxième courrier, soit deux semaines après la demande du TAPI, il était mentionné que le justificatif était introuvable, preuve que des contacts avaient quand même eu lieu entre le conseil et sa mandante. Dans son courrier du 13 juin 2022, le conseil mentionnait surtout que sa cliente entreprendrait les démarches auprès de la Poste, signifiant ainsi qu’elle n’avait rien fait dans ce sens jusqu’alors. Le TAPI pouvait dès lors considérer que la demande de prolongation n’était pas fondée, l’intéressée n’ayant pas mis à profit les délais précédemment octroyés et ayant manqué à son devoir de diligence et de collaboration, prévu par l’art. 22 LPA, selon lequel les parties sont tenues de collaborer à la constatation des faits notamment dans les procédures qu’elles introduisent elles-mêmes. Le refus de prolonger était nécessaire pour respecter l’intérêt public à une application correcte et égalitaire des règles de procédure, apte à atteindre lesdits buts et proportionnée au sens étroit au vu du non-respect par la recourante de ses obligations de collaboration, celle-ci n’ayant pas diligemment conservé son récépissé, pas été joignable à tout le moins jusqu’au 31 mai 2022 et pas entrepris les démarches nécessaires.

Le refus était en conséquence fondé, en application de l’art. 16 al. 2 LPA étant rappelé qu’en sollicitant une prolongation le dernier jour d’un délai, le justiciable prend le risque de se la voir refuser.

5) La recourante se prévaut toutefois d’un moyen de preuve nouveau et produit, pour la première fois, en annexe à son recours devant la chambre de céans, le récépissé de son paiement à la Poste de l’avance de frais le 20 mai 2022 à 18h.

a. Sauf exception prévue par la loi, le recourant peut invoquer des motifs, des faits et des moyens de preuves nouveaux qui ne l’ont pas été dans les précédentes procédures (art. 68 LPA).

b. Le moment déterminant pour constater l'observation ou l'inobservation du délai est celui auquel la somme a été versée en faveur de l'autorité à la Poste suisse (que ce soit au guichet d'un bureau de poste ou lors d'un transfert depuis l'étranger) ou celui auquel l'ordre de paiement en faveur de l'autorité a été débité du compte postal ou bancaire du recourant ou de son mandataire (ATF 139 III 364 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_884/2017 du 22 février 2018
consid. 3.1.1 et les arrêts cités).

c. En l’espèce, conformément à l’art. 68 LPA, la recourante est autorisée à invoquer un moyen de preuve nouveau, lequel atteste que le paiement est intervenu dans le délai fixé par la juridiction inférieure échéant le 20 mai 2022.

Le recours devant le TAPI était dès lors recevable. Le ch. 1 du dispositif du jugement querellé sera annulé et la cause renvoyée au TAPI pour qu'il examine les autres conditions de recevabilité du recours et, le cas échéant, le fond de celui-ci.

6) Se pose la question de savoir si les ch. 2 et 3 du dispositif du jugement du TAPI mettant à la charge de l’intéressée un émolument de CHF 350.- (ch. 2) et ordonnant la restitution en faveur de cette dernière du solde de l’avance de frais de CHF 150.- (ch. 3) doivent être annulés.

a. La juridiction administrative qui rend la décision statue sur les frais de procédure et émoluments (art. 87 al. 1 LPA).

Les parties sont tenues de collaborer à la constatation des faits dans les procédures qu’elles introduisent elles-mêmes, dans celles où elles y prennent des conclusions indépendantes ainsi que dans les autres cas prévus par la loi (art. 22 LPA).

b. En l’espèce, le TAPI s’est fondé sur l’issue du litige pour mettre un émolument de CHF 350.- à la charge de la recourante.

Celle-ci n’a produit le justificatif du paiement que dans son recours devant la chambre de céans, le 24 août 2022, soit deux mois après l’échéance du délai litigieux. Elle n’explique pas les raisons pour lesquelles elle n’aurait pas été capable de produire plus rapidement ladite preuve. Elle ne donne aucune explication, sur les raisons pour lesquelles elle l’avait égaré ni n’indique à quel moment elle l’a retrouvé, se limitant à le produire devant la chambre de céans. Elle n’indique ni quand elle n’aurait pas été joignable ni les motifs pour lesquels elle ne l’était pas ni quand elle aurait entrepris quelles démarches, pas plus qu’elle ne produit ni n’allègue une quelconque demande de duplicata auprès de la Poste qui pourrait expliquer le délai mis à transmettre le document.

En conséquence, la recourante n’a ni respecté ses obligations de collaboration ni fourni d’explications dans le cadre de son recours. Ayant causé, de ce fait, le jugement d’irrecevabilité, elle supportera les frais de la procédure de première instance.

Le ch. 2 du dispositif du jugement querellé sera en conséquence confirmé.

c. Le ch. 3 du même dispositif, restituant à la recourante CHF 150.-, soit la différence entre le montant de l’avance de frais de CHF 500.- versé le 20 mai 2022 et les frais précités de CHF 350.- doit être annulé au vu du renvoi de la cause au TAPI pour la suite de la procédure, qui implique l’exigence d’une avance de frais.

7) Vu l’admission partielle du recours, il sera exceptionnellement renoncé à un émolument devant la chambre de céans (art. 87 al. 1 LPA). Le recours ayant été rendu nécessaire par la propre incurie de la recourante devant le TAPI, il n’y a pas lieu à l’allocation d’une indemnité de procédure devant la chambre de céans
(art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 août 2022 par Madame A______, agissant pour elle-même et sa fille mineure B______, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 juin 2022 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule les chiffres 1 et 3 du dispositif du jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 juin 2022 ;

le confirme pour le surplus ;

renvoie la cause au Tribunal administratif de première instance pour nouveau jugement au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Agrippino Renda, avocat des recourantes, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory,
Mme Lauber, M. Mascotto, juges.


 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.