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Décisions | Chambre civile

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C/8417/2020

ACJC/1605/2022 du 06.12.2022 sur JTPI/8368/2021 ( OO ) , JUGE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8417/2020 ACJC/1605/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 6 DECEMBRE 2022

 

Entre

LA A______, c/o C______, ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 23 juin 2021, comparant par Me Pascal PETROZ, avocat, Perréard de Boccard SA, rue du Mont-Blanc 3, case postale, 1211 Genève 1, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

D______, c/o E______ SA, ______, ______ [GE], intimée, comparant par Me Andreas FABJAN, avocat, Muller & Fabjan, rue Ferdinand-Hodler 13, 1207 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/8368/2021 du 23 juin 2021, reçu le 2 juillet 2021 par la A______, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a, statuant par voie de procédure ordinaire sur demande en paiement, débouté la A______ des fins de sa demande (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 2'200 fr. et compensé ceux-ci à due concurrence avec l'avance de frais effectuée par la A______, ordonné aux Services financiers du Pouvoir judiciaire de restituer le solde d'avance de 1'000 fr. à la A______ (ch. 2), condamné la A______ à verser 3'000 fr. à D______ à titre de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

B. a. Par acte expédié le 1er septembre 2021 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), la A______ a appelé de ce jugement dont elle a sollicité l'annulation, avec suite de frais judiciaires et dépens d'appel. Cela fait, elle a conclu à ce que la Cour, préalablement, déclare recevable sa demande du 6 novembre 2020, admette "la légitimation active" des copropriétaires de la A______, à savoir la [caisse de prévoyance] F______, G______, H______ SA, la PPE chemin 1______no.______, soit pour [les époux] I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, [les époux] Q______, R______, S______, [les époux] T______, U______, V______, W______, X______, [les époux] Y______, [les époux] Z______, [les époux] AA_____, [les époux] AB_____, AC_____, AD_____, AE_____, [les époux] AF_____, AG_____, AH_____, [les époux] AI_____, [les époux] AJ_____, AK_____, AL_____, AM_____, AN_____, AO_____, AP_____, AQ_____, ainsi que la PPE route 2______no.______, soit pour elle AR_____, AS_____, AT_____ et AU_____, et rectifie en tant que de besoin sa désignation. Principalement, l'appelante a conclu à ce que D______ soit condamnée à lui payer le montant de 40'563 fr. 65 plus intérêts à 5% l'an dès le 3 juillet 2019, soit condamnée en tous les frais judiciaires et dépens, puis déboutée de toutes autres conclusions. Subsidiairement, l'appelante a conclu à ce que la cause soit renvoyée au juge de première instance pour nouvelle décision.

b. Dans sa réponse du 15 octobre 2021, D______ a conclu au rejet de l'appel, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Elle a allégué un fait nouveau, à savoir que la "F______, H______ SA, G______, la PPE chemin 1______no.______, ainsi que la PPE route 2______no.______" avaient déposé le 16 juillet 2021 au Tribunal une requête en conciliation contre D______, portant sur le même objet que la demande à l'origine de la présente procédure.

Elle a offert en preuve à l'appui de cet allégué nouveau une pièce nouvelle, soit une copie de la requête en question.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué les 8 et 30 novembre 2021, persistant dans leurs conclusions.

d. Le greffe de la Cour a informé les parties par avis du 1er décembre 2021 que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. La F______ est propriétaire des immeubles nos 3______ et 4______ de la commune de AV_____, situés chemin 5______no.______, au AW_____.

G______ est propriétaire de l'immeuble n° 6______ de la commune de AV_____, situé chemin 7______no.______, au AW_____.

H______ SA est propriétaire de l'immeuble n° 8______ de la commune de AV_____, situé chemin 9______no.______, au AW_____.

I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, Q______, R______, S______, T______, U______, V______, W______, X______, Y______, Z______, AA_____, AB_____, AC_____, AD_____, AE_____, AF_____, AG_____, AH_____, AI_____, AJ_____, AK_____, AL_____, AM_____, AN_____, AO_____, AP_____ et AQ_____ sont copropriétaires en PPE de l'immeuble n° 10______ de la commune de AV_____, situé chemin 1______no.______, au AW_____.

AR_____, AS_____, AT_____ et AU_____ sont copropriétaires en PPE de l'immeuble n° 11_____ de la commune de AV_____, situé route de route 2______no.______ au AW_____.

D______ (ci-après : D______) est propriétaire de l'immeuble n° 12_____ de la commune de AV_____, situé route 13______no.______, au AW_____.

b. Il dépend des immeubles nos 12_____, 4______, 6______, 8______, 10______, 11_____ de la commune de AV_____ (fonds dominants) un droit de copropriété sur l'immeuble n° 14_____ de la commune de AV_____, situé route de route 2______no.______ au AW_____ (fonds servant).

c. Les immeubles précités sont construits de plusieurs ensembles de bâtiments désignés "chemin 1______no.______", "route 2______no.______", "route 13______no.______", "chemin 9______no.______", " chemin 7______no.______" et "chemin 5______no.______", regroupés sous la dénomination commune "B______", faisant l'objet d'une "gérance centrale" confiée à la C______ (ci-après : C______ [acronyme]).

d. Sur le fonds servant n° 14_____ se situe une installation de chauffage (chaufferie et citerne) commune à l'ensemble des bâtiments érigés sur les fonds dominants nos 12_____, 4______, 6______, 8______, 10______, 11_____.

Un acte notarié du 14 mars 1991 intitulé "Mise en propriété par étage / constitution de servitudes" règle notamment les rapports entre ces immeubles et la parcelle n° 14_____ en fixant une clé de répartition en millièmes des droits de copropriété des parcelles précitées sur la parcelle n° 14_____. Il instaure également sur cette parcelle une servitude d'usage de l'installation de chauffage au profit des parcelles nos 12_____, 4______, 6______, 8______, 10______, 11_____.

e. Par décision du 4 juillet 2014, le Service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants a imparti un délai au 31 octobre 2017 à la C______ pour procéder à l'assainissement de l'installation de chauffage sise route de route 2______no.______.

f. Le 23 mai 2018, l'"Assemblée générale ______ «B______»", regroupant l'ensemble des propriétaires et copropriétaires des parcelles nos 12_____, 4______, 6______, 8______, 10______, 11_____ a donné son accord en faveur de l'assainissement de l'installation commune de chauffage et de production de l'eau chaude sanitaire.

g. Selon un procès-verbal de l'"Assemblée générale ______ «B______»" tenue le 27 novembre 2019, les participants ont été informés que D______ refusait de participer à l'appel de fonds pour la réfection de la chaufferie et contestait la clé de répartition des frais d'entretien.

h. Lors de cette même assemblée, il a été décidé de confier à un avocat le mandat d'introduire une demande en paiement à l'encontre d'D______.

i. Par requête déposée le 17 août 2020 au Tribunal en vue de conciliation, déclarée non conciliée à l'audience du 31 août 2020, puis par demande introduite le 6 novembre 2020 au Tribunal, la "A______" a notamment conclu à la condamnation de D______ à lui payer 40'563 fr. 65 plus intérêts à 5% l'an dès le 3 juillet 2019.

La demande ne mentionne pas, ni sur la page de garde, ni dans les allégués de faits, le nom des membres de la A______.

j. D______ a répondu le 15 février 2021 en concluant préalablement à ce que la demande soit déclarée irrecevable faute de capacité d'être partie de la demanderesse qui n'était pas un sujet de droit.

k. Le Tribunal a convoqué le 15 mars 2021 une audience de débats d'instruction, ouverture des débats principaux et premières plaidoiries.

l. La A______ a déposé le 1er mars 2021 une réplique spontanée comportant sa détermination sur les allégués de faits de D______, un allégué complémentaire détaillant les propriétaires et copropriétaires des parcelles nos 12_____, 4______, 6______, 8______, 10______, 11_____, à l'exception de D______, et des conclusions tendant notamment à ce que la demande du 6 novembre 2020 soit déclarée recevable, que la légitimation active de A______, à savoir la F______, G______, H______ SA, la PPE chemin 1______no.______,, soit pour elle I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, Q______, R______, S______, T______, U______, V______, W______, X______, Y______, Z______, AA_____, AB_____, AC_____, AD_____, AE_____, AF_____, AG_____, AH_____, AI_____, AJ_____, AK_____, AL_____, AM_____, AN_____, AO_____, AP_____, AQ_____, ainsi que la PPE route de route 2______no.______, soit pour elle AR_____, AS_____, AT_____ et AU_____, soit admise.

La A______ admet qu'elle n'a pas la capacité d'être partie, mais qu'il convient de rectifier ses qualités en mentionnant qu'elle est composée des copropriétaires susmentionnés.

m. Par ordonnance du 4 mars 2021, le Tribunal a annulé l'audience fixée le 15 mars 2021, déclaré irrecevable la réplique spontanée du 1er mars 2021, limité la procédure à la question de la légitimation active de la A______, fixé un délai au 15 avril 2021 à la A______ pour se déterminer par écrit sur la question de sa légitimation active et convoqué une audience de plaidoiries finales sur cet objet le 28 avril 2021.

n. La A______ s'est déterminée le 15 avril 2021 en reprenant la teneur de sa réplique spontanée du 12 mars 2021.

o. La cause a été gardée à juger par le Tribunal le 28 avril 2021 à l'issue de l'audience de plaidoirie.

D. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a rejeté la demande pour défaut de légitimation active de la demanderesse. Il a refusé de rectifier les qualités de cette dernière, ce procédé n'ayant pas pour but de substituer une partie qui ne jouit pas de la qualité pour agir par une autre qui en dispose.

EN DROIT

1. 1.1 Interjeté contre une décision finale de première instance (art. 308 al. 1
let. a CPC), auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (art. 91 al. 1, 92 al. 1, 308 al. 2 CPC), dans le délai de trente jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 142 al. 1, 145 al. 1 let. b, 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC) dans la limite des griefs qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5; 5A_89/2014 du 15 avril 2014 consid. 5.3.2).

2. Les fait et pièce nouveaux produits par l'intimée en appel – le dépôt d'une nouvelle requête en conciliation par les copropriétaires de la parcelle n° 14_____ le 16 juillet 2021 – sont recevables puisqu'ils sont postérieurs au jugement entrepris et ont été invoqués sans retard dans la réponse à l'appel (art. 317 al. 1 CPC).

3. L'appelante fait grief au premier juge d'avoir violé son droit à la réplique spontanée en déclarant irrecevable son écriture du 1er mars 2021c ce qui impliquerait que le jugement entrepris soit annulé.

3.1 Le droit d'être entendu garantit notamment le droit pour une partie à un procès de prendre connaissance de toute pièce du dossier ainsi que de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à leur propos, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit (parmi plusieurs : ATF 142 III 48 consid. 4.1.1; 138 I 484 consid. 2.1; 137 I 195 consid. 2.3.1; 133 I 100 consid. 4.3 et les références aux arrêts de la CourEDH; arrêt du Tribunal fédéral 5A_925/2015 du 4 mars 2016 consid. 2.3.3.1 n. p. in ATF 142 III 195). Le droit à la réplique peut notamment être invoqué lorsque le tribunal communique le mémoire de réponse au demandeur sans ordonner de second échange d'écritures en application de l'art. 225 CPC (arrêt du Tribunal fédéral 5A_779/2010 du 1er avril 2011 consid. 2.2; Tappy, Commentaire Romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 9 ad art. 225 CPC).

Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de nature formelle, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond. Ce droit n'est cependant pas une fin en soi. Il constitue un moyen d'éviter qu'une procédure judiciaire ne débouche sur un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure. Ainsi, lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (parmi d'autres ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1; 141 V 495 consid. 2.2; 127 V 431 consid. 3d/aa; arrêts du Tribunal fédéral 1C_229/2020 du 27 août 2020 consid. 2.1; 4A_153/2009 du 1er mai 2009 consid. 4.1; 2P.20/2005 du 13 avril 2005 consid. 3.2).

3.2 En l'espèce, le premier juge a refusé l'écriture déposée le 1er mars 2021 par l'appelante au motif que les conditions d'une réplique spontanée sous la forme écrite n'étaient pas réalisées à ce stade de la procédure. Il a en revanche fixé un délai à l'appelante pour se déterminer sur l'irrecevabilité de la demande soulevée par l'intimée. L'appelante a déposé des déterminations au contenu similaire à sa réplique spontanée. Elle n'a par conséquent subi aucune atteinte à son droit d'être entendue qui impliquerait une annulation du jugement entrepris pour ce motif.

Le premier grief de l'appelante est ainsi infondé et il n'est pas nécessaire d'examiner si le premier juge a écarté à tort la réplique spontanée.

4. L'appelante reproche en second lieu au premier juge d'avoir rejeté sa demande en méconnaissant les notions de "qualité pour agir", de "légitimation passive" et de "désignation inexacte d'une partie". Sa demande aurait dû être déclarée recevable après rectification de ses qualités en application du principe de la bonne foi en procédure fondé sur les art. 52 CPC et 2 CC car il n'existait aucun risque de confusion sur la personne de la partie demanderesse.

4.1.1 En application de l'art. 59 al. 1 et al. 2 let. c CPC, le tribunal n'entre en matière que sur les demandes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l'action, au nombre desquelles figure la capacité d'être partie (art. 66 CPC) et d'ester en justice (art. 67 CPC). Le juge examine d'office si les conditions de recevabilité sont remplies (art. 60 CPC).

Aux termes de l'art. 66 CPC, la capacité d'être partie est subordonnée soit à la jouissance des droits civils, soit à la qualité de partie en vertu du droit fédéral.

Une demande déposée par – ou contre – une partie qui n'a pas la capacité d'être partie – en d'autres termes qui n'existe pas – doit ainsi être déclarée irrecevable, faute d’instance valable (Bohnet, Commentaire Romand, CPC, 2019, n° 71 art. 59 CPC).

4.1.2 La communauté des copropriétaires dans la copropriété ordinaire
(art. 646 et ss CC) n'a aucune existence juridique et, contrairement à celle de la PPE (art. 712l CC), n’assume aucune obligation ni ne dispose de la capacité d'exercer des droits en son nom; elle ne peut pas actionner ni être actionnée en justice. Même l'adoption d'un règlement d'administration et d'utilisation de la chose (art. 647 al. 1 CC), assimilable à un contrat de société, ne confère aucune personnalité morale ni aucune capacité d'être partie à la communauté des copropriétaires (ATF 103 Ib 76 consid. 1 = JdT 1977 I 339; Steinauer, Les droits réels I, 2020, n° 1823; Perruchoud, Commentaire Romand, Code civil II, 2016, n° 13 ad art. 649 CC; Jeandin, Commentaire Romand, CPC, 2019, n° 6 ad art. 66 CPC).

4.1.3 L’inexistence d’une partie doit être distinguée de sa désignation inexacte, qui se rattache au vice de forme. Si certaines situations sont claires, par exemple la demande déposée au nom d’un mort (ATF 129 I 302, JdT 2005 I 214), d’un animal ou d’une mission diplomatique (arrêt de la Cour publié in SJ 1985 p. 169 consid. 2), cas d’inexistence, ou, à l’inverse, l’oubli de la mention du prénom du demandeur, cas de désignation inexacte, d’autres peuvent prêter à confusion. Le principe veut qu’une rectification n’est admise qu’en cas d’erreur rédactionnelle (ATF 131 I 57 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_560/2015 du 20 mai 2016 consid. 4.2; arrêt du Tribunal fédéral publié in SJ 1987 p. 22 consid. 3c; voir également ATF 120 III 11 consid. 1b et les réf. en matière de poursuites). Si l’erreur s’avère aisément décelable et rectifiable tant pour la partie adverse que pour le juge, le risque de confusion n’existe pas et la rectification est possible. En d’autres termes, la rectification peut avoir lieu uniquement lorsqu’il n’existe dans l’esprit du juge et des parties aucun doute raisonnable sur l’identité de cette partie. Dans le cas inverse, il convient de ne pas entrer en matière (ATF 131 I 57 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_560/2015 du 20 mai 2016 consid. 4.2; voir également ATF 114 II 335 consid. 3 = JdT 1989 I 337) (Bohnet, op. cit., n° 74 et 76 ad art. 59 CPC).

Le Tribunal fédéral est entré en matière sur un recours de droit administratif déposé "au nom des membres de la communauté des propriétaires du quartier de X à M. dont les noms n'ont pas été indiqués, représentés par le président G et le vice-président L, ( ), membres de la communauté" car la LOJ en vigueur à l'époque ne subordonnait pas la validité d'un tel recours à l'indication formelle du nom des recourants et que le recours en question pouvait être déposé par chacun des copropriétaires indépendamment des autres. Le recours était ainsi "recevable dans la mesure où il avait été formé par G. et L en leur qualité de copropriétaires" (ATF 103 Ib 76 précité).

Selon la jurisprudence du Tribunal cantonal neuchâtelois, il y a simple désignation inexacte lorsqu’une demande est déposée par ou contre une société simple, dépourvue de la capacité d’être partie, mais que l’on peut sans hésitation déterminer les membres de celle-là sur la base des allégués de la demande (arrêt du Tribunal cantonal de Neuchâtel RJN 1990 72 cité par Bohnet in Commentaire Romand, CPC, 2019, n° 76 ad art. 59 CPC).

4.1.4 Le code de procédure civile ne consacre pas le principe de l'immutabilité du litige, mais il limite les possibilités d'en modifier les contours en cours d'instance (principe de mutabilité restreinte). L'objet du litige peut être modifié aux conditions des art. 227 et 230 CPC dans une mesure définie par le degré d'avancement de la procédure. Les parties à la procédure ne peuvent être modifiées qu'aux conditions fixées par les art. 73 ss CPC : intervention, dénonciation de litige, appel en cause, substitution de partie (Schweizer, Commentaire Romand, CPC, n° 1 et ss ad art. 227 CPC).

4.1.5 L’entité juridique dont l’existence juridique ou la capacité d’être partie est remise en cause demeure formellement partie au procès portant sur ces questions (Jeandin, op. cit., n° 11 ad art. 66 CPC et les références citées, notamment l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_194/2011 du 30 mai 2011 consid. 3.2).

4.2.1 En l'espèce, l'appelante, communauté de copropriétaires ordinaires sur la parcelle n° 14_____, s'est désignée, tant dans la requête en conciliation du 17 août 2020 que dans la demande en paiement du 6 novembre 2020 comme agissant en tant que la A______. Ces actes ne mentionnent pas le nom des copropriétaires membres de la communauté. Ils émanent explicitement d'une entité qui ne dispose pas de la capacité d'être partie et sont donc en principe irrecevables.

4.2.2 Après que l'intimée a soulevé l'irrecevabilité de la demande, l'appelante, dans sa réplique spontanée du 1er mars 2021, puis dans ses déterminations du 15 avril 2021, a désigné ses membres, demandant que ses qualités soient rectifiées. L'ampleur de la correction sollicitée dépasse la rectification d'une erreur rédactionnelle telle que définie plus haut. En réalité, les conclusions de l'appelante visent la substitution, en qualité de partie, d'une entité inexistante aux contours incertains, par les copropriétaires de la parcelle n° 14_____. En effet, elle a expressément agi en tant que communauté supposément dotée de la qualité d'être partie puisqu'elle n'a pas mentionné ses membres. Elle n'a ainsi pas permis au Tribunal et à la partie adverse de comprendre que ces derniers seraient en réalité les demandeurs. En l'occurrence, le nombre de parties demanderesses qui auraient dû être mentionnées dans la demande est important; ni le Tribunal, ni la partie adverse ne pouvaient de bonne foi comprendre de qui il s'agissait et il ne pouvait être exigé d'eux de procéder à un exercice de reconstitution sur la base de la demande qui ne mentionnait pas la liste des copropriétaires. L'exercice ne semble d'ailleurs pas évident puisque l'appelante n'a pas désigné son adverse partie de la même manière dans ses conclusions en rectification dans la présente procédure d'une part et, d'autre part, dans sa nouvelle requête en conciliation du 16 juillet 2021. Ainsi, ni le juge, ni la partie adverse n'avaient à retenir, en application du principe de la bonne foi en procédure, que la partie assignée étaient les copropriétaires de la parcelle n° 14_____ et non pas la communauté mentionnée sur la page d'en-tête de la demande.

L'appelante invoque l'ATF 103 Ib 76 précité dans lequel le Tribunal fédéral a admis la rectification des qualités d'une communauté de copropriétaires ayant recouru sous cette dénomination. Cet arrêt a toutefois été rendu dans des circonstances très spécifiques, qui ne se retrouvent pas en l'espèce (procédure administrative qui n'impose pas la désignation des parties mais uniquement la signature d'un recourant ayant la qualité pour agir; validité du recours déposé par un seul des copropriétaires chacun d'eux disposant de la qualité pour agir indépendamment des autres); en outre, le Tribunal fédéral n'a procédé qu'à une rectification partielle en admettant comme parties à la procédure uniquement les président et vice-président de la communauté des copropriétaires, eux-mêmes copropriétaires, nommément cités et signataires de l'acte de recours; en revanche, il n'a pas admis en qualité de parties les autres membres de la communauté, non mentionnés dans l'acte de recours.

Il découle de ce qui précède que les conditions d'une rectification des qualités de l'appelante ne sont pas réunies et celle-ci ne peut remédier par cette voie à l'irrecevabilité de sa demande, laquelle sera constatée par la Cour.

4.2.3 Les conditions de la substitution de partie prévue à l'art. 83 CPC ne sont pas non plus remplies puisque l'on ne se trouve pas en situation d'aliénation de l'objet du litige (art. 83 al. 1 CPC) ni d'accord des parties en vue de la substitution (art. 83 al. 4 CPC). La substitution de partie présupposerait en tout état que les parties concernées existent, ce qui n'est pas le cas de l'appelante en l'occurrence.

4.2.4 C'est à tort que le premier juge a rejeté la demande sur le fond pour défaut de légitimation active. Quand bien même la Cour n'est pas saisie de conclusions de l'intimée visant à l'irrecevabilité de la demande, elle la prononcera d'office en application de l'art. 60 CPC. Le jugement sera donc annulé et il sera statué à nouveau (art. 318 al. 1 let. b et c a contrario CPC).

En tout état, un jugement qui condamne une personne inexistante – respectivement qui la déboute au fond, ce qui implique que sa capacité d'être partie est admise et qu'elle est condamnée aux frais – est un jugement nul qui ne peut être exécuté (arrêt de la Cour de justice de Genève in SJ 1985 p. 169, consid. 2; Bohnet, op. cit., n° 77 ad art. 59 CPC), ce que la Cour aurait dû constater si elle ne l'avait annulé pour les motifs ci-dessus.

5. 5.1 A teneur de l'art. 318 al. 3 CPC, si l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance.

En l'occurrence, il n'y a pas lieu de revenir sur la décision du premier juge sur la répartition des frais, l'appelante demeurant la partie succombante au sens de l'art. 106 al. 1 CPC, que sa demande soit rejetée ou déclarée irrecevable.

La quotité des frais de première instance n'est pas contestée et conforme au tarif cantonal (art. 96 CPC; art. 17, 84 ss RTFMC).

5.2 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 2'700 fr. (art. 96 CPC; art. 17 et 35 RTFMC), mis à la charge de l'appelante qui succombe (art. 106 al. 1 CPC) et compensé avec l'avance de frais de même montant qu'elle a versée, laquelle est acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al 1 CPC).

Les dépens d'appel arrêtés à 2'500 fr. seront mis à la charge de l'appelante vu l'issue du litige et l'activité déployée par le conseil de l'intimée (art. 106 CPC; 84 et ss RTFMC).

5.3 L'appelante n'existant pas, elle ne saurait être condamnée à verser des frais judiciaires et des dépens, une telle décision étant inexécutable. Il convient par conséquent de les mettre à la charge des copropriétaires solidairement, lesquels sont à l'origine de ces frais en raison de la mauvaise orientation de leur demande (art. 108 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 1er septembre 2021 par la A______ contre le jugement JTPI/8368/2021 rendu le 23 juin 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/8417/2020.

Au fond :

Annule le jugement JTPI/8368/2021 et, statuant à nouveau :

Déclare irrecevable la demande déposée le 6 novembre 2020 par la A______ contre D______.

Arrête les frais judiciaires de première instance à 2'200 fr., les compense à due concurrence avec l'avance effectuée laquelle est acquise à l'Etat de Genève.

Ordonne aux Services financiers du Pouvoir judiciaire de restituer 1'000 fr. à la A______, à savoir la F______, G______, H______ SA, la PPE chemin 1______no.______, soit pour elle I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, Q______, R______, S______, T______, U______, V______, W______, X______, Y______, Z______, AA_____, AB_____, AC_____, AD_____, AE_____, AF_____, AG_____, AH_____, AI_____, AJ_____, AK_____, AL_____, AM_____, AN_____, AO_____, AP_____, AQ_____, ainsi que la PPE route 2______no.______, soit pour elle AR_____, AS_____, AT_____ et AU_____.

Condamne la A______, à savoir la F______, G______, H______ SA, la PPE chemin 1______no.______, soit pour elle I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, Q______, R______, S______, T______, U______, V______, W______, X______, Y______, Z______, AA_____, AB_____, AC_____, AD_____, AE_____, AF_____, AG_____, AH_____, AI_____, AJ_____, AK_____, AL_____, AM_____, AN_____, AO_____, AP_____, AQ_____, ainsi que la PPE route 2______no.______, soit pour elle AR_____, AS_____, AT_____ et AU_____, solidairement, à verser 3'000 fr. à D______ à titre de dépens de première instance.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

 

 

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 2'700 fr., les met à la charge de la A______, à savoir la F______, G______, H______ SA, la PPE chemin 1______no.______, soit pour elle I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, Q______, R______, S______, T______, U______, V______, W______, X______, Y______, Z______, AA_____, AB_____, AC_____, AD_____, AE_____, AF_____, AG_____, AH_____, AI_____, AJ_____, AK_____, AL_____, AM_____, AN_____, AO_____, AP_____, AQ_____, ainsi que la PPE route 2______no.______, soit pour elle AR_____, AS_____, AT_____ et AU_____ et les compense avec l'avance de même montant versée, laquelle est acquise à l'Etat de Genève.

Condamne la A______, à savoir la F______, G______, H______ SA, la PPE chemin 1______no.______, soit pour elle I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, Q______, R______, S______, T______, U______, V______, W______, X______, Y______, Z______, AA_____, AB_____, AC_____, AD_____, AE_____, AF_____, AG_____, AH_____, AI_____, AJ_____, AK_____, AL_____, AM_____, AN_____, AO_____, AP_____, AQ_____, ainsi que la PPE route 2______no.______, soit pour elle AR_____, AS_____, AT_____ et AU_____, solidairement, à verser 2'500 fr. à D______ à titre de dépens d'appel.

Ordonne la notification du présent arrêt aux parties et à la A______, à savoir la F______, G______, H______ SA, la PPE chemin 1______no.______, soit pour elle I______, J______, K______, L______, M______, N______, O______, P______, Q______, R______, S______, T______, U______, V______, W______, X______, Y______, Z______, AA_____, AB_____, AC_____, AD_____, AE_____, AF_____, AG_____, AH_____, AI_____, AJ_____, AK_____, AL_____, AM_____, AN_____, AO_____, AP_____, AQ_____, ainsi que la PPE route 2______no.______, soit pour elle AR_____, AS_____, AT_____ et AU_____ c/o Me Pascal PETROZ.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.