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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/23051/2024

ACPR/710/2025 du 04.09.2025 sur OMP/27091/2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : DÉFENSE D'OFFICE;COMPLEXITÉ DE LA PROCÉDURE
Normes : CPP.132

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/23051/2024 ACPR/710/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 4 septembre 2025

 

Entre

A______ représenté par Me C______, avocat,

recourant,

 

contre l'ordonnance de refus de nomination d'avocat d'office rendue le 11 décembre 2024 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


Vu:

-       le rapport de renseignements du 10 septembre 2024 selon lequel, le 8 mai 2024 à 21h16, à la route de Jussy, le conducteur du véhicule immatriculé 1______/France, au nom de A______, avait dépassé la vitesse autorisée de 42 km/h (marge de sécurité déduite), l'infraction ayant été constatée par un radar;

-       le pli à la police du 1er juillet 2024, à teneur duquel A______ a contesté "fermement" avoir commis un excès de vitesse et annoncé faire élection de domicile chez son conseil;

-       la lettre de A______ du 9 août 2024 par laquelle il a persisté à contester les faits, soutenant n'avoir "jamais roulé à une vitesse aussi élevée";

-       l'ordonnance pénale rendue le 20 novembre 2024, par laquelle le Ministère public a condamné A______ à une peine pécuniaire de 120 jours-amende, à CHF 30.- le jour, avec sursis durant trois ans, ainsi qu'à une amende immédiate de CHF 720.-, pour violation grave des règles de la circulation routière (art. 19 al. 2 LCR);

-       l'opposition formée par A______, sous la plume de son conseil, le 4 décembre 2024, contre cette ordonnance, sollicitant la désignation de Me C______ en qualité de défenseur d'office;

- l'ordonnance de refus de nomination d'avocat d'office rendue par le Ministère public, le 11 décembre 2024, notifiée le 19 suivant;

- le recours formé par A______, le 30 décembre 2024, contre cette décision.

Attendu que :

- dans la décision querellée, le Ministère public retient que l'intéressé a reconnu être l'auteur de l'excès de vitesse reproché. La cause ne présentait pas de difficultés juridiques ou de faits particulières que le prévenu ne serait pas en mesure de résoudre seul. Elle était, en outre, de peu de gravité, vu la peine avec sursis à laquelle l'intéressé avait été condamné par ordonnance pénale, contre laquelle il avait formé opposition;

- à l'appui de son recours, A______ expose être indigent. Il bénéficiait de l'allocation française d'aide au retour à l'emploi et avait obtenu un diplôme d'auxiliaire de santé délivré le 27 septembre 2024 par l'école B______. Contrairement à ce qui était retenu, il n'avait pas reconnu l'infraction reprochée, puisqu'il l'avait contestée dans ses courriers des 1er juillet et 9 août 2024. La cause n'était pas de peu de gravité. En cas de condamnation, il s'exposerait à une interdiction d'utiliser son permis de conduire français en Suisse pour une durée de trois mois, ce qui serait "synonyme d'impossibilité de chercher un emploi, voire de se rendre à son emploi, une fois celui-ci trouvé". Les conséquences administratives "à venir" de la procédure pénale auraient ainsi des répercussions "terribles" sur lui. L'intervention d'un avocat était nécessaire pour faire valoir ses réquisitions de preuve, notamment en vue de démontrer "la défectuosité du radar et, donc a fortiori, [son] innocence";

- le recours a été gardé à juger sans demande d'observations, ni débats.

Considérant en droit que :

- le recours est recevable pour avoir été déposé dans le délai et la forme prescrits (art. 396 al. 1 et 385 al. 1 CPP), concerner une décision sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP), pour les motifs prévus par la loi (art. 393 al. 2 let. a CPP), et émaner du prévenu, qui a qualité pour agir (art. 104 al. 1 let. a CPP) et un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou la modification de l'ordonnance entreprise (382 al. 1 CPP);

- la Chambre de céans peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 CPP a contrario), ce qui est le cas en l'occurence;

- en dehors des cas de défense obligatoire, qui ne concernent pas le cas d'espèce (ce que le recourant ne conteste pas), l'art. 132 al. 1 let. b CPP soumet le droit à l'assistance d'un défenseur à deux conditions : le prévenu doit être indigent et la sauvegarde de ses intérêts doit justifier une telle assistance, cette seconde condition devant s'interpréter à l'aune des critères mentionnés à l'art. 132 al. 2 et 3 CPP;

- ainsi, les intérêts du prévenu justifient une défense d'office lorsque la cause n'est pas de peu de gravité et qu'elle présente, sur le plan des faits ou du droit, des difficultés que le prévenu seul ne pourrait pas surmonter (art. 132 al. 2 CPP), ces deux conditions devant être réunies cumulativement (arrêts du Tribunal fédéral 1B_138/2015 du 1er juillet 2015 consid. 2.1 et 1B_477/2011 du 4 janvier 2012 consid. 2.2.);

- en tout état de cause, une affaire n'est pas de peu de gravité lorsque le prévenu est passible d'une peine privative de liberté de plus de quatre mois ou d'une peine pécuniaire de plus de 120 jours-amende (art. 132 al. 3 CPP);

- pour évaluer si l'affaire présente des difficultés que le prévenu ne pourrait pas surmonter sans l'aide d'un avocat, il y a lieu d'apprécier l'ensemble des circonstances concrètes. En particulier, il convient de s'attacher à la peine concrètement encourue et non à la seule peine menace prévue par la loi (ATF 143 I 164 consid. 2.4.3 et 3; L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Petit Commentaire du CPP, 2e éd., 2016, n. 30 ad art. 132);

- pour apprécier la difficulté subjective d'une cause, il faut tenir compte des capacités du prévenu, notamment de son âge, de sa formation, de sa plus ou moins grande familiarité avec la pratique judiciaire, de sa maîtrise de la langue de la procédure (ATF 128 I 225 consid. 2.5.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_203/2014 du 2 octobre 2014 consid. 2.1; 1B_257/2013 du 28 octobre 2013 consid. 2.1 = SJ 2014 I 273), ainsi que des mesures qui paraissent nécessaires, dans le cas particulier, pour assurer sa défense, notamment en ce qui concerne les preuves qu'il devra offrir (ATF 115 Ia 103 consid. 4; arrêts du Tribunal fédéral 7B_611/2023 du 20 décembre 2023 consid. 3.2.1; 7B_124/2023 précité; 1B_93/2018 du 29 mai 2018 consid. 3.1; 1B_66/2017 du 31 mars 2017 consid. 2.1);

- si les deux conditions mentionnées à l'art. 132 al. 2 CPP doivent être réunies cumulativement, il n'est pas exclu que l'intervention d'un défenseur soit justifiée par d'autres motifs, en particulier dans les cas où cette mesure est nécessaire pour garantir l'égalité des armes ou parce que l'issue de la procédure pénale a une importance particulière pour le prévenu (arrêts du Tribunal fédéral 1B_12/2020 du 24 janvier 2020 consid. 3.1; 1B_494/2019 du 20 décembre 2019 consid. 3.1);

- en l'espèce, l'indigence du recourant n'a pas été examinée, mais cette question peut rester ouverte, vu ce qui suit;

- il s’est vu infliger, par ordonnance pénale à laquelle il a formé opposition, une peine pécuniaire de 120 jours-amende et une amende immédiate de CHF 720.-, soit une peine n'excédant pas celle au-delà de laquelle on peut considérer que l'affaire n'est pas de peu de gravité selon l'art. 132 al. 3 CPP, étant à cet égard rappelé que les peines abstraitement encourues ne sont pas déterminantes dans l'examen de la gravité de la cause;

- à cela s'ajoute que l'examen des circonstances permet de retenir que la cause ne présente pas de difficultés particulières, du point de vue de l'établissement des faits ou des questions juridiques soulevées, qu'il ne serait pas en mesure de résoudre seul. Les faits et dispositions applicables sont clairement circonscrits. Le recourant a annoncé, à deux reprises, sans l'aide de son conseil, qu'il contestait les faits, en faisant valoir que la vitesse à laquelle il roulait ne serait pas celle mesurée par le radar. Il a ainsi parfaitement compris ce qui lui était reproché. On ne voit pas non plus quelles difficultés particulières auraient nécessité l'assistance d'un conseil pour ses réquisitions de preuve [les relevés sollicités étant généralement requis d'office par le Ministère public en cas de contestation de la mesure effectuée par le radar];

- l'argument selon lequel son éventuelle condamnation aurait pour conséquence de lui interdire de conduire en Suisse durant trois mois n'est pas pertinent ici, s'agissant d'une problématique future incertaine;

- il s’ensuit que c'est à juste titre que la défense d'office a été refusée par le Ministère public;

- le recours sera, dès lors, rejeté et l'ordonnance querellée confirmée;

- le recours ne donne pas lieu à la perception de frais (art. 428 al. 1 CPP et art. 20 RAJ).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant (soit pour lui son conseil) et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Mesdames Valérie LAUBER et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).