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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/27921/2023

ACPR/199/2024 du 18.03.2024 sur OTMC/504/2024 ( TMC ) , REFUS

Recours TF déposé le 19.04.2024, 7B_451/2024
Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU;RISQUE DE FUITE;ACTE DE RECOURS;CHANCES DE SUCCÈS;MOTIVATION;DUPLIQUE
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/27921/2023 ACPR/199/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 18 mars 2024

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me C______, avocat,

recourant,

contre l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire rendue le 19 février 2024 par le Tribunal des mesures de contrainte,

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


Vu :

-          l'ordonnance du 22 décembre 2023 par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a prononcé la mise en détention provisoire de A______ jusqu'au 20 février 2024;

-          le recours formé le 8 janvier 2024 par le précité contre cette ordonnance;

-          l'arrêt de la Chambre de céans du 26 janvier 2024, rejetant ledit recours (ACPR/65/2024);

-          le recours au Tribunal fédéral interjeté contre cet arrêt par l'intéressé;

-          la demande de mise en liberté formée préalablement par A______, le 18 janvier 2024;

-          l'ordonnance du TMC du 23 janvier 2024 refusant sa mise en liberté;

-          le recours interjeté le 5 février 2024 par A______ contre cette décision;

-          l'arrêt de la Chambre de céans du 16 février 2024 rejetant ledit recours (ACPR/120/2024);

-          l'ordonnance du TMC du 19 février 2024, notifiée le 21 suivant, prolongeant la détention provisoire de A______ jusqu'au 20 mars 2024;

-          le recours formé le 4 mars 2024 par l'intéressé contre cette décision;

-          les observations du TMC et du Ministère public du 6 mars, respectivement 8 mars 2024;

-          la réplique du recourant du 14 mars 2024.

Attendu que :

-          le 21 décembre 2023, A______ a été prévenu de vol, (art. 139 CP), violence et menace à l'encontre des autorités et des fonctionnaires (art. 285 CP) et rupture de ban (art. 291 CP) pour avoir, à Genève, le 20 décembre 2023 :

·         dérobé deux parfums pour un montant total de CHF 360.- au préjudice du commerce D______, dans le but de se les approprier et de s'enrichir illégitimement à concurrence de cette valeur, étant précisé que la marchandise a pu être restituée au magasin;

·         à la suite de son interpellation, refusé d'entrer en cellule, contraignant un agent de police à faire usage de la force pour l'y conduire, et lui avoir dit : "je vais te tuer", l'effrayant de la sorte;

·         pénétré sur le territoire genevois au mépris de trois mesures d'expulsion judiciaire de Suisse, entrées en force et ayant été prononcées à son encontre les 9 juin et 30 novembre 2022 par le Tribunal de police de Genève, valables pour une durée de 5 ans, ainsi que le 27 juin 2023 par le Tribunal de police de Genève, valable pour une durée de 20 ans;

-          à l'audience du 2 février 2024 devant le Ministère public, il a été prévenu complémentairement d'injure (art. 177 CP), de discrimination raciale (art. 261bis CP), de lésions corporelles simples commises avec un objet dangereux (art. 123 ch. 1 et 2 CP) et de tentative de cette infraction (art. 22 cum 123 ch. 1 et 2 CP) pour avoir, à Genève, à l'établissement fermé de E______ (ci-après : E______) :

·         le 12 septembre 2023, à l'atelier Poterie, insulté et tenu publiquement des propos discriminatoires en traitant F______ de "nègre" et de "sale esclave";

·         cela fait, effrayé le prénommé en lui montrant le couteau qu'il avait dans sa poche et menaçant d'en faire usage contre lui;

·         le 14 septembre 2023, dans l'atelier Poterie, lancé à deux reprises en direction du précité des objets contondants et dangereux se trouvant dans l'atelier dans le but de le blesser, étant précisé que l'un d'eux avait atteint la victime à la tête et lui avait causé une plaie lacéro-contuse temporale gauche d'environ 1,5 x 2 cm;

-          à cette occasion, F______ a confirmé sa plainte pénale du 3 novembre 2023. A______ a contesté l'avoir insulté mais admettait lui avoir lancé des tasses encore non cuites au four, en réponse à ses provocations, ce que corroboraient au demeurant les images de vidéosurveillance de la prison (cf. rapport de renseignements du 6 décembre 2023, pp C-8, et rapport d'incident de E______ du 9 février 2024, pp C-37ss);

-          le 12 février 2024, le Ministère public a rendu un avis de prochaine clôture, annonçant la rédaction d'un acte d'accusation contre le prévenu et impartissant aux parties un délai pour leurs éventuelles réquisitions de preuve;

-          par pli du 23 février 2024, A______ a sollicité plusieurs réquisitions de preuve;

-          dans son ordonnance querellée, le TMC considère que les charges étaient suffisantes au vu des constatations policières, des images de vidéosurveillance tant s'agissant des faits survenus à D______ que ceux en lien avec E______, le certificat médical et les photographies produites par le plaignant, le rapport de l'établissement de détention et les aveux partiels du prévenu. L'instruction arrivait désormais à son terme avec l'avis de prochaine clôture. Les risques de fuite et de récidive demeuraient élevés et aucune mesure de substitution, en particulier l'obligation pour le prévenu de poursuivre son suivi médical aux HUG ou de rester en contact avec son conseil, n'étaient aptes à les réduire. Le principe de la proportionnalité était largement respecté;

-          dans son recours, A______ conclut, sous suite de prise en charge de ses honoraires d'avocat par l'assistance judiciaire, à l'annulation de l'ordonnance querellée et à sa mise en liberté immédiate, le cas échéant sous mesures de substitution, ainsi qu'à l'allocation d'une indemnité pour réparation du tort moral de CHF 200.- par jour de détention depuis le 20 novembre 2023;

-          il conteste la gravité des charges, le vol chez D______ portant sur deux parfums dont la valeur selon lui n'excédait pas CHF 300.-. L'infraction à l'art. 285 CP n'était pas réalisée, voire n'atteignait pas le seuil de gravité requis pour une mise en détention, la prétendue menace prononcée à l'endroit d'un policier n'étant pas de nature à effrayer ce dernier. La rupture de ban reprochée étant par ailleurs excusable, vu les circonstances l'ayant amené à venir à Genève (gratuité des soins pour une brûlure à la main). Le TMC avait ignoré que le plaignant F______ se trouvait en détention pour avoir agressé un ressortissant algérien, étant relevé qu'il souffrait de troubles psychiques, ne retenant ainsi que des éléments exclusivement à charge contre lui (A______); une détention provisoire ne se justifiait pas non plus par l'instruction de cette plainte, pour laquelle il avait été libéré le 8 décembre 2023. Le risque de fuite faisait défaut, dès lors qu'il faisait déjà l'objet de plusieurs expulsions dont le but était précisément qu'il quitte la Suisse; alléguer un risque de disparition dans la clandestinité était par ailleurs déloyal, sachant que le jour de sa mise en liberté il serait simplement déposé devant la prison; l'engagement à rester en contact avec son conseil et à déférer aux convocations de la justice seraient des mesures de substitution suffisantes. Le risque de récidive faisait défaut également, compte tenu de la modification législative intervenue le 1er janvier 2024; un vol à l'étalage, des infractions à la LEI et une rupture de ban n'étaient pas suffisants sous cet angle. Enfin, la durée de sa détention provisoire était disproportionnée, vu les charges;

-          le Ministère public, dans ses observations, conclut au rejet du recours, sous suite de frais, se référant à la motivation des arrêts des 26 janvier et 16 février 2024, qui conservaient toute leur pertinence;

-          le TMC maintient les termes de son ordonnance;

-          dans sa réplique, le recourant persiste dans son recours, se plaignant au passage d'une violation de son droit d'être entendu "pour défaut de motivation" du Ministère public et du TMC dans leurs observations, ce qui le priverait de la possibilité de "dupliquer".

Considérant en droit que :

-          le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 90 al. 2, 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP);

-          tout d'abord, le grief de violation du droit d'être entendu pour défaut de motivation des observations du Ministère public et du TMC tombe à faux. Ce droit, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., impose à l'autorité l'obligation de motiver sa décision afin, d'une part, que son destinataire puisse l'attaquer utilement et, d'autre part, que la juridiction de recours soit en mesure d'exercer son contrôle (ATF 139 IV 179 consid. 2.2 ; 138 I 232 consid. 5.1). Les éventuelles observations des parties sur le recours ne sont à l'évidence pas des décisions;

-          force est ensuite de constater que le recourant reprend à l'appui de son recours les mêmes arguments et griefs que ceux soulevés dans ses deux précédents recours, en lien avec les faits pour lesquels il a été prévenu le 21 décembre 2023. Il peut ainsi être intégralement renvoyé à la motivation des arrêts des 26 janvier et 16 février 2024, s'agissant des charges et du risque de fuite – aucun élément nouveau pertinent y relatif n'étant survenu depuis lors;

-          dites charges ayant été considérées comme graves et suffisantes, il n'y a pas lieu de s'attarder sur les développements du recourant en lien avec la prévention complémentaire du 2 février 2024 et ses dénégations y relatives, étant rappelé qu'il n'appartient pas à la Chambre de céans d'établir les responsabilités des protagonistes;

-          à relever que l'obligation de déférer aux convocations de la justice ne saurait constituer un palliatif suffisant au risque de fuite, pour les mêmes raisons que celles invoquées dans l'arrêt du 26 janvier 2024;

-          à teneur des art. 197 al. 1 et 212 al. 3 CPP, les autorités pénales doivent respecter le principe de la proportionnalité lorsqu'elles appliquent des mesures de contrainte, afin que la détention provisoire ne dure pas plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible;

-          en l'espèce, la prolongation de la détention provisoire ordonnée jusqu'à l'échéance fixée respecte le principe susmentionné, eu égard aux charges suffisantes et graves retenues. Cette durée apparaît en outre nécessaire pour permettre au Ministère public de procéder aux éventuels actes d'instruction complémentaires requis et renvoyer le prévenu en jugement;

-          le recours, infondé, sera rejeté;

-          le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03), étant rappelé que l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4);

-          le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office;

-          selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1);

-          en l'occurrence, le recourant s'est limité ici à reprendre les mêmes arguments qu'il avait déjà soulevés dans ses deux précédents recours et qui ont été écartés dans les arrêts des 26 janvier et 16 février 2024. Il ne pouvait dès lors ignorer que son présent recours serait une nouvelle fois voué à l'échec devant la Chambre de céans. Qu'il ait interjeté un recours au Tribunal fédéral contre le premier arrêt n'y change donc rien. À cela s'ajoute que le nouveau grief soulevé dans sa réplique est clairement téméraire;

-          dès lors, la prise en charge des honoraires de son défenseur d'office sera refusée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1B_31/2022 du 11 février 2022 consid. 4.2).

* * * * *


-           

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Rejette l'assistance judiciaire pour le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 1'000.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, préalablement par courriel, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/27921/2023

ÉTAT DE FRAIS

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

30.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'000.00

 

-

CHF

 

 

Total

CHF

1'105.00