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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/24171/2023

ACPR/67/2024 du 29.01.2024 sur OMP/21189/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : SUSPENSION DE LA PROCÉDURE;DÉNONCIATION CALOMNIEUSE
Normes : CPP.314

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/24171/2023 ACPR/67/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 29 janvier 2024

 

Entre

A______, domiciliée ______, agissant en personne,

recourante,

 

contre l'ordonnance de suspension de l'instruction rendue le 12 novembre 2023 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 23 novembre 2023 au Ministère public qui l'a transmis à la Chambre de céans, A______ recourt contre l'ordonnance du 13 précédent, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a suspendu l'instruction de la procédure pénale P/24171/2023 jusqu'à droit jugé dans la procédure P/1______/2023.

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 800.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.a. Dans la P/1______/2023, le Ministère public a condamné, par ordonnance pénale du 4 mai 2023, A______ pour lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP), injure (art. 177 al. 1 CP) et menaces (art. 180 al. 1 CP) à la suite de la plainte du 12 septembre 2022 déposée par B______.

La prévenue a formé opposition.

a.b. Lors de l'audience du 12 octobre 2023, le Procureur a prévenu A______ pour les faits reprochés dans la plainte de B______ ainsi que pour dénonciation calomnieuse (art. 303 CP), entrave à l'action pénale (art. 305 CP) et diffamation (art. 173 CP) à la suite de celle de C______ du 6 juillet 2023.

La prévenue a déclaré être la victime "dans cette histoire là".

a.c. Le 2 novembre 2023, le Procureur a adressé un avis de prochaine clôture de l'instruction aux parties. Il entendait prononcer un classement partiel des faits reprochés par C______, susceptibles d'être qualifiés de dénonciation calomnieuse, et une ordonnance pénale pour lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP), menaces (art. 180 al. 1 CP), injure (art. 177 al. 1 CP) et voies de fait (art. 126 CP).

b. Précédemment, par courriers des 14 et 17 octobre 2023, déposés au Ministère public à cette dernière date, A______ avait porté plainte contre B______ et C______ pour dénonciation calomnieuse, pour les faits énoncés dans leur plainte. Cette procédure est ouverte sous la référence P/24171/23.

C. Dans son ordonnance querellée, le Ministère public retient que la procédure P/24171/23, ouverte à la suite de la plainte de A______ contre B______ et C______ pour dénonciation calomnieuse, était en lien avec la procédure P/1______/2023 dans laquelle A______ était prévenue à la suite des plaintes des deux prénommés, et dont l'instruction était toujours en cours. Il se justifiait dès lors d'attendre la fin de l'instruction de la P/1______/2023.

D. a. Dans son recours, A______ considère qu'il y a un défaut d'appréciation ainsi qu'une constatation des faits erronée. Elle fait valoir que :"Les deux affaires étant en lien, [..], la suite de l'instruction de la procédure P/1______/2023, risque fort de porter préjudice quant à l'instruction de la procédure P/24171/2023, constituant un déni de justice à mon encontre. Il est manifeste que la procédure P/1______/2023 prévaut sur ma plainte, sans aucunes preuves ni témoins des faits. C'est moi qui suis la VICTIME."

b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et – les réquisits de l'art. 85 al. 2 CPP n’ayant pas été respectés – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             3.1. À teneur de l'art. 314 al. 1 let. b CPP, le ministère public peut suspendre une instruction, notamment, lorsque l'issue de la procédure pénale dépend d'un autre procès dont il paraît indiqué d'attendre la fin. Le ministère public dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour décider d'une éventuelle suspension, il doit examiner si le résultat de l'autre procédure peut véritablement jouer un rôle pour l'issue de la procédure pénale suspendue et s'il simplifiera de manière significative l'administration des preuves dans cette même procédure (arrêt du Tribunal fédéral 1B_406/2017 du 23 janvier 2018 consid. 2 et la référence citée).

La suspension d'une procédure pénale dans l'attente d'une autre procédure pénale peut notamment se justifier à la suite d'une contre-plainte du prévenu pour des infractions contre l'honneur (art. 173ss CP) ou en dénonciation calomnieuse (art. 303 CP). Il n'est en effet pas imaginable d'instruire ces infractions alors même que la dénonciation initiale est toujours en cours d'enquête, voire même en jugement (A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 14a ad art. 314).

3.2. La suspension ne doit pas avoir pour effet de retarder de manière injustifiée la procédure en cours (A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 13 ad art. 314).

Le principe de la célérité qui découle de l'art. 29 al. 1 Cst. et, en matière pénale, de l'art. 5 CPP, pose en effet des limites à la suspension d'une procédure. Ce principe est notamment violé lorsque l'autorité ordonne la suspension d'une procédure sans motifs objectifs. Pareille mesure dépend d'une pesée des intérêts en présence et ne doit être admise qu'avec retenue, en particulier s'il convient d'attendre le prononcé d'une autre autorité compétente qui permettrait de trancher une question décisive (arrêts du Tribunal fédéral 1B_406/2017 du 23 janvier 2018 consid. 2 ; 1B_163/2014 du 18 juillet 2014 consid. 2.2 ; 1B_421/2012 du 19 juin 2013 consid. 2.3). Dans les cas limites ou douteux, le principe de célérité prime (ATF 130 V 90 consid. 5 p. 95 ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_406/2017 du 23 janvier 2018 consid. 2 ; 1B_329/2017 du 11 septembre 2017 consid. 3).

3.3. En l'espèce, la recourante a porté plainte contre les mis en cause pour dénonciation calomnieuse à la suite de leur propre dépôt de plainte. Pour instruire la dénonciation calomnieuse reprochée, il convient que la procédure préalable, soit la P/1______/2023, soit terminée puisqu'une condamnation ou un acquittement dans le cadre de cette dernière est manifestement déterminant pour l'issue de la plainte de la recourante.

Partant, il est tout à fait indiqué d'attendre l'issue de cette procédure-là avant d'instruire la plainte de la recourante.

Le principe de la célérité est respecté puisque le Procureur a déjà rendu un avis de prochaine clôture dans la P/1______/23.

4. Le recours s'avère ainsi infondé et sera rejeté.

5. La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 800.-, émolument de décision compris. (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

P/24171/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

715.00

Total

CHF

800.00