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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/833/2023

ACPR/758/2023 du 02.10.2023 sur JTPM/618/2023 ( TPM ) , REJETE

Descripteurs : LIBÉRATION CONDITIONNELLE;RISQUE DE RÉCIDIVE;PRONOSTIC
Normes : CP.86

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/833/2023 ACPR/758/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 2 octobre 2023

 

Entre

A______ (alias AA______), actuellement détenu à l'Établissement [pénitentiaire] B______, ______, représenté par Me C______, avocate,

recourant,

 

contre le jugement rendu le 11 septembre 2023 par le Tribunal d'application des peines et des mesures,

 

et

LE TRIBUNAL D'APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève – case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy – case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 18 septembre 2023, A______ recourt contre le jugement du 11 précédent, notifié le lendemain, par lequel le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après: TAPEM) a refusé sa libération conditionnelle.

Le recourant conclut, avec suite de frais et dépens chiffrés, préalablement, à la tenue d'une audience, et principalement, à l'annulation du jugement précité et à sa libération immédiate.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______, né le ______ 1998, de nationalité algérienne, exécute actuellement une peine privative de liberté de 27 mois, sous déduction de 258 jours de détention avant jugement, prononcée par le Tribunal correctionnel le 24 novembre 2022, pour brigandage en bande, tentative de vol en bande, empêchement d'accomplir un acte officiel, entrée illégale et infraction à l'art. 19a ch. 1 LStup.

L'expulsion de A______ du territoire suisse au sens de l'art. 66a CP a également été prononcée pour une durée de 5ans, avec signalement dans le système d'information Schengen (SIS).

Il a d'abord été incarcéré à la prison de D______ du 16 mars 2022 au 21 février 2023, date à laquelle il a été transféré à l'Établissement fermé B______ où il se trouve actuellement.

b. Les deux tiers de la peine que A______ exécute actuellement sont intervenus le 10 septembre 2023, tandis que la fin de peine est fixée au 11 juin 2024.

c. À teneur du casier judiciaire suisse (situation au 8 août 2023), A______ a également été condamné, le 23 décembre 2021, par la Jugendanwaltschaft See/Oberland à une peine privative de liberté d'un jour pour entrée illégale et séjour illégal au sens de la LEI.

En outre, il ressort du jugement précité (cf. let. B. a. supra), que, selon l'extrait de son casier judiciaire espagnol, le prénommé a également été condamné, en 2021, à cinq reprises:

- le 16 juin 2021, par le Juge d'instruction de H______ [Espagne], à une peine de prison de 3 mois et 10 jours avec sursis pendant 2 ans pour tentative de vol;

- le 17 juin 2021, par le Juge d'instruction de H______, à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à EUR 6.- pour tentative de vol;

- le 6 octobre 2021, par le Tribunal provincial de H______, à une peine pécuniaire de 3 mois de jours-amende à EUR 2.- pour violation de domicile;

- le 28 avril 2022, par le Tribunal pénal de H______, à une peine de prison d'un an et demi pour tentative de vol avec violence ou intimidation.

L'intéressé a contesté ce dernier antécédent, au motif qu'il se trouvait en prison en Suisse. Il a expliqué qu'il n'avait jamais été incarcéré en Espagne.

d. À teneur de l'évaluation criminologique du 11 avril 2023 rendue par le Service de probation et d'insertion (ci-après: SPI), A______ présente un risque de récidive violente intramuros faible à modéré et, un risque de récidive "violente et générale", modéré, dans un contexte de libération conditionnelle. Si le prénommé ne présentait aucun problème majeur dans le milieu cadré et protégé qu'était l'Établissement de détention B______, une interrogation se posait lorsqu'il serait livré à lui-même, soit plus précisément sur l'évolution des facteurs de risque dynamiques et sur l'évolution de l'impact des facteurs de protection, ceux-ci étant faibles dans le cadre d'une libération conditionnelle. Le risque de récidive dépendait, notamment, du fait de savoir si l'intéressé persisterait à résider illégalement sur le territoire où il ne pouvait s'établir, tant socialement que professionnellement, et où il serait confronté à la même conjoncture que celle connue lors de la commission de son infraction. Ainsi, A______ devait prendre conscience de sa situation administrative et de l'importance de la mise en place d'un projet concret et réalisable dans un lieu où il était autorisé à séjourner afin de ne pas se retrouver dans une situation similaire à celle dans laquelle il se trouvait lors de la commission des faits pour lesquels il avait été condamné. En effet, il souhaitait retrouver sa famille dans des pays d'Europe. Il était important qu'il adopte un cadre de vie sur le long terme au sein d'un réseau pro-social. Il était également important qu'il maintienne son abstinence aux toxiques, étant précisé qu'il bénéficiait d'un suivi psychiatrique régulier en détention, en lien avec la prise d'un traitement de substitution, et qu'il souhaitait maintenir son abstinence.

Il ressort également du rapport que lors des entretiens, A______ avait déclaré être né à E______, en Libye. Enfant, il s'était rendu en Algérie et, après avoir perdu ses parents "aux frontières", il avait été recueilli par une famille algérienne. Après avoir appris que sa famille se trouverait en Allemagne et aux Pays-Bas, il avait rejoint l'Espagne. Lors du contrôle de son identité, les autorités espagnoles l'avaient enregistré sous le nom de A______, après avoir trouvé, dans la veste qu'il portait par hasard, des documents d'identité à ce nom.

e. Dans le formulaire qu'il a rempli en vue de sa libération conditionnelle, A______ indique être originaire d'Algérie, mais être libyen, célibataire et sans enfant, démuni de papiers d'identité, ne pas être autorisé à séjourner en Suisse et y faire l'objet d'une interdiction d'entrée. À sa libération, il comptait se rendre en Allemagne pour retrouver sa famille, afin d'être entouré et épaulé, et chercher un travail en boulangerie-pâtisserie, domaine dans lequel il était diplômé. Il y disposerait d'un logement chez son oncle à F______ [Allemagne]. Il rembourserait le dommage causé et les frais de justice par mensualités. Il regrettait ses actes et avait pris conscience de leur impact et de ce qui était réellement important.

f. Le plan d'exécution de la sanction (ci-après: PES), validé par le Service de l'application des peines et mesures (ci-après: SAPEM) le 2 mai 2023, prévoit une unique phase en milieu fermé, puis l'éventuelle libération conditionnelle dès le 10 septembre 2023.

Il y est fait mention de quatre sanctions à l'encontre de A______, lors de son incarcération à la prison de D______, pour troubles à l'ordre de l'établissement et attitude incorrecte envers des tiers. Hormis ces incidents, il n'avait posé aucun problème, participait activement à l'ambiance et à la bonne tenue de sa cellule, occupée par quatre autres détenus. La cohabitation avec ses co-détenus se passait sans problème et il entretenait des rapports adéquats avec le personnel.

Lors de son séjour à l'Établissement B______, il respectait le règlement interne et ne posait pas de problème particulier. Au sein de l'atelier, il appliquait les consignes données et effectuait avec soin et intérêt les tâches confiées. Il était poli et serviable et l'entretien de sa cellule ainsi que son hygiène corporelle étaient réguliers et appropriés.

Il ne disposait d'aucune économie et n'effectuait pas de versements en lien avec les frais de justice. Auparavant, il vivait dans la rue et était logé de temps à autre par des connaissances.

g. Selon les renseignements donnés par l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM), le 1er juin 2023, l'expulsion judiciaire pour une durée de 5 ans, prononcée par le Tribunal correctionnel le 24 novembre 2022 contre A______, était entrée en force, de sorte qu'il n'était pas autorisé à séjourner sur le territoire suisse. Le prénommé étant démuni de documents d'identité, le Secrétariat d'État aux migrations (ci-après: SEM) avait saisi les autorités algériennes d'une demande d'identification et de reconnaissance de l'intéressé. Le 31 mars 2023, l'Algérie ne l'avait pas reconnu sous l'identité de A______, né le ______ 1998. Le SEM entendait transmettre une nouvelle demande aux autorités algériennes sous le nom de "A______". L'intéressé ne collaborait pas avec les autorités, dans la mesure où il essayait de dissimuler son identité sous des alias. Faute d'identification, l'exécution de son refoulement n'était pas envisageable.

h. Le 7 juin 2023, la direction de l'Établissement B______ a préavisé favorablement la libération conditionnelle de A______. Il n'avait fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire. Les conditions générales posées par le PES étaient partiellement respectées. A______ faisait preuve d'un comportement exempt de tout reproche et adoptait une attitude positive au sein des différents ateliers. Il n'avait néanmoins pas encore débuté le remboursement des frais auxquels il était astreint. Les tests toxicologiques effectués en date du 30 mai 2023 s'étaient avérés positifs aux benzodiazépines; cependant, le service médical avait confirmé que le résultat était en lien avec le traitement actuel.

Il disposait de CHF 210.50 sur son compte libre, de CHF 320.80 sur son compte réservé et de CHF 240.60 sur son compte bloqué.

i. Aux termes du rapport socio-judiciaire en vue de libération conditionnelle du 7 juin 2023, le SPI a relevé que A______ s'était montré poli et collaborant lors des entretiens. Au niveau familial, il n'avait plus de contact avec ses proches et se disait activement à la recherche de sa famille qui se trouverait sur le territoire européen. Son père serait en Allemagne et sa mère et ses sœurs en Hollande. À sa sortie, il souhaitait se rendre en Allemagne, disposant de l'adresse d'un oncle là-bas, pour ensuite retrouver ses parents. Au niveau financier, il devait prochainement commencer à verser CHF 50.- par mois afin de régler ses dettes. Il n'avait pas élaboré de projet concret de réinsertion. Il souhaitait trouver un emploi en boulangerie, domaine dans lequel il indiquait être au bénéfice d'un diplôme, obtenu en Algérie. Ce projet était considéré comme peu aisé à concrétiser, dans la mesure où l'intéressé ne disposait pas d'autorisation de séjour sur le territoire européen.

j. Le préavis du SAPEM, du 15 août 2023, est défavorable, considérant la libération conditionnelle prématurée.

En effet, bien que A______ avait fait preuve d'un bon comportement depuis son arrivée au sein B______, tant en atelier qu'au carcéral, il n'en était pas de même lors de son incarcération à la prison de D______. Les sanctions disciplinaires dont il avait fait l'objet démontraient une attitude réfractaire au règlement interne de l'établissement et un comportement déplacé envers l'un de ses co-détenus.

En outre, les conditions du PES n'étaient pas toutes remplies, A______ ne collaborant pas avec les autorités en vue de son expulsion judiciaire et n'ayant pas encore commencé à payer les frais de justice. Il devait ainsi collaborer avec les autorités afin, dans un premier temps, de se faire identifier, et, dans un second temps, de préparer un projet socioprofessionnel cohérent avec sa situation administrative. Actuellement, il souhaitait se rendre en Allemagne, pays dans lequel il ne possèdait pas d'autorisation de résidence, de sorte qu'il se trouverait dans une situation similaire à la précédente.

Au vu de son pronostic défavorable, le SAPEM n'a pas saisi la Commission d'évaluation de la dangerosité.

k. Le 22 suivant, le Ministère public a fait siens le préavis et les conclusions du SAPEM.

l. La procédure devant le TAPEM a eu lieu par écrit, avec l'accord de l'avocat d'office de A______, qui a conclu à la libération conditionnelle du cité. Depuis fin mai 2023, le prénommé avait débuté les paiements réguliers, à hauteur de CHF 50.-, pour le remboursement des frais de justice. Il était abstinent aux toxiques depuis plus d'un an et demi et avait accepté la mise en place d'un suivi psychiatrique régulier pour son abstinence. Il collaborait avec les autorités afin de déterminer ses origines. Ses explications, à cet égard, avaient toujours été identiques, à savoir qu'il se nommait AA______ et était né le ______ 1998 à E______, en Lybie. Son oncle, G______, domicilié en Allemagne, pourrait l'héberger à sa sortie. Il souhaitait conserver un bon comportement, ne plus consommer de drogues et éviter les mauvaises fréquentations.

C. Dans sa décision querellée, le TAPEM retient que le pronostic se présente sous un jour défavorable, vu les antécédents de A______, sa situation personnelle et financière précaire. Le risque de récidive était accru par les consommations de toxiques et rien ne permettait de retenir que A______ saurait conserver son abstinence actuelle après sa libération, confronté aux difficultés du retour à la vie libre. Qu'il demeure en Suisse ou en Allemagne, faute de document permettant d'établir son identité et son pays d'origine, il serait en situation personnelle illégale, laquelle l'avait, par le passé, mené à ses dernières condamnations. À ce jour, il n'avait présenté aucun projet viable. En outre, ce n'était que très récemment qu'il avait commencé le remboursement des frais de justice.

D. a. Dans son recours, A______ rappelle que la condition temporelle à l'octroi de sa libération conditionnelle était remplie.

Par ailleurs, il relève que son comportement durant l'exécution de sa peine était considéré comme exemplaire par l'établissement dans lequel il était détenu depuis plus de sept mois. Les incidents qui s'étaient produits précédemment à la prison de D______ n'étaient pas révélateurs de sa personnalité et de son comportement quotidien. En outre, dès sa première rémunération, il avait effectué un versement pour le remboursement des frais de justice. Son abstinence, depuis un an et demi, n'était pas une situation temporaire. Il serait ainsi manifestement capable de ne pas consommer à nouveau de toxiques à sa libération, ce d'autant qu'il avait prévu de poursuivre son traitement. Lors de leur évaluation, les criminologues n'avaient pas été en mesure de confirmer la crainte de nouveaux crimes ou délits, soit d'établir un pronostic défavorable. De plus, ses antécédents étaient relativement bénins et ne lui avaient jamais valu d'incarcération.

Partant, l'appréciation de sa personnalité devait se fonder sur les éléments positifs observés à long terme par les divers intervenants, à savoir qu'il était considéré comme une personne désireuse de rechercher des solutions pour apaiser des conflits, qu'il conservait sa bonne humeur, sa motivation et se montrait assidu dans son travail au quotidien. S'agissant de ses origines, il avait fourni toutes les informations "disponibles" à savoir qu'il était libyen et, qu'en raison de l'état de son pays d'origine, un retour n'était pas possible.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours au sens de l'art. 393 CPP est la voie de droit ouverte contre les prononcés rendus en matière de libération conditionnelle par le TAPEM (art. 42 al. 1 let. b LaCP cum ATF 141 IV 187 consid. 1.1), dont le jugement constitue une "autre décision ultérieure" indépendante au sens de l'art. 363 al. 3 CPP (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1136/2015 du 18 juillet 2016 consid. 4.3 et 6B_158/2013 du 25 avril 2013 consid. 2.1; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 30 ad art. 363).

1.2. La procédure devant la Chambre de céans est régie par le CPP, applicable au titre de droit cantonal supplétif (art. 42 al. 2 LaCP).

1.3. En l'occurrence, le recours est recevable, pour avoir été déposé selon la forme (art. 384 let. b, 385 al. 1, 390 al. 1 et 396 al. 1 CPP) et dans le délai (art. 396 al. 1 CPP) prescrits, par le condamné, qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).

Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant estime que les conditions d'octroi à sa libération conditionnelle sont remplies.

3.1.  Aux termes de l'art. 86 al. 1 CP, l'autorité compétente libère conditionnellement le détenu qui a subi les deux tiers de sa peine, mais au moins trois mois de détention, si son comportement durant l'exécution de la peine ne s'y oppose pas et s'il n'y a pas lieu de craindre qu'il ne commette de nouveaux crimes ou de nouveaux délits. La libération conditionnelle constitue la dernière étape de l'exécution de la sanction pénale. Elle est la règle et son refus l'exception, dans la mesure où il n'est plus exigé qu'il soit à prévoir que le condamné se conduira bien en liberté (cf. art. 38 ch. 1 al. 1 aCP), mais seulement qu'il ne soit pas à craindre qu'il commette de nouveaux crimes ou délits. Autrement dit, il n'est plus nécessaire pour l'octroi de la libération conditionnelle qu'un pronostic favorable puisse être posé. Il suffit que le pronostic ne soit pas défavorable (ATF 133 IV 201 consid. 2.2). Le pronostic à émettre doit être posé sur la base d'une appréciation globale, prenant en considération les antécédents de l'intéressé, sa personnalité, son comportement en général et dans le cadre des délits qui sont à l'origine de sa condamnation, le degré de son éventuel amendement, ainsi que les conditions dans lesquelles il est à prévoir qu'il vivra (ATF 133 IV 201 consid. 2.3 et les références citées). Par sa nature même, le pronostic ne saurait être tout à fait sûr; force est de se contenter d'une certaine probabilité; un risque de récidive est inhérent à toute libération, conditionnelle ou définitive (ATF 119 IV 5 consid. 1b).

Pour déterminer si l'on peut courir le risque de récidive, il faut non seulement prendre en considération le degré de probabilité qu'une nouvelle infraction soit commise, mais également l'importance du bien qui serait alors menacé. Ainsi, le risque de récidive que l'on peut admettre est moindre si l'auteur s'en est pris à la vie ou à l'intégrité corporelle de ses victimes que s'il a commis, par exemple, des infractions contre le patrimoine (ATF 133 IV 201 consid. 2.3 et les références citées).

Dans l'émission du pronostic, les autorités cantonales disposent d'un large pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_420/2022 du 6 juillet 2022 consid. 2.1).

3.2.  En l'espèce, le recourant a subi les deux tiers de sa peine le 10 septembre 2023, de sorte que la condition objective de l'art. 86 al. 1 CP est réalisée.

Cela étant, le pronostic se présente sous un jour défavorable. Si l'Établissement fermé B______ émet un préavis positif, celui-ci n'est cependant pas, à lui seul, déterminant en terme de risque de récidive. D'ailleurs, si le comportement relevé par ledit établissement peut être qualifié d'exempt de tout reproche, il doit toutefois être tempéré avec les quatre sanctions dont le recourant a fait l'objet, alors qu'il séjournait à la prison de D______.

En outre, le recourant a été condamné, à deux reprises, en Suisse, notamment pour infractions au patrimoine y compris avec violence, à la LEI et à la LStup. Il a également été jugé, au moins à trois occasions, en Espagne pour tentatives d'infractions au patrimoine et pour violation de domicile, et pour des peines qui ne sont pas insignifiantes. Il démontre ainsi un ancrage certain dans la délinquance.

Par ailleurs, malgré l'entrée en force de son expulsion, celle-ci ne peut être exécutée dès lors que le recourant ne dispose d'aucun document d'identité permettant son renvoi. En effet, jusqu'à présent, les tentatives des autorités suisses pour établir son identité ont été vaines. Partant, à sa libération, il se retrouverait, en Suisse, dans les mêmes conditions que lors de sa dernière interpellation, soit à séjourner illégalement et sans revenu régulier, ce qui est de nature à créer un risque de récidive, comprenant la commission d'infractions contre le patrimoine, voire contre les personnes, pour subvenir à ses besoins. On observe, à cet égard, une gradation dans les infractions et l'usage de la violence pour se procurer des valeurs/revenus, le recourant ayant été en dernier lieu, condamné pour brigandage.

Enfin, son projet de partir en Allemagne n'est nullement étayé, hormis la seule communication d'une adresse, qui selon lui, serait celle de son oncle, prêt à l'héberger. Il n'a, en particulier, pas prouvé un quelconque moyen de subvenir à ses besoins dans le pays en question. D'ailleurs, en tout état, une telle intention n'est pas réaliste ni réalisable puisqu'il ne dispose d'aucune autorisation de séjour dans ce pays, ni dans l'Union européenne, qu'il n'a fait aucune démarche dans ce sens, en particulier pour obtenir des documents attestant de son identité, et que son expulsion de Suisse est inscrite dans le système d'information Schengen. Ainsi, à suivre son souhait, il se retrouverait également dans la même situation – illégale – qu'auparavant, soit celle dans laquelle il avait commis les faits ayant entrainé ses condamnations. Le risque de récidive d'infractions contre le patrimoine d'une certaine gravité demeure donc, même à l'étranger, élevé.

Au vu de ce qui précède, le pronostic est, en l'état, défavorable – comme l'ont retenu à juste titre le SAPEM, le Ministère public et le TAPEM –.

En conclusion, les autres conditions posées par l'art. 86 al. 1 CP ne sont pas réalisées.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5.             Le détenu, qui succombe (art. 428 al. 1 CPP), supportera les frais envers l'État, fixés à CHF 600.- en totalité, émolument de décision inclus (art. 3 cum art. 13 al. 1 Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP]; E 4 10 03).

6.             La procédure étant ici close (art. 135 al. 2 CPP), des dépens seront alloués à l'avocat d'office, qui les a chiffrés et détaillés.

6.1. À teneur de l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. À Genève, le tarif est édicté à l'art. 16 RAJ (E 2 05 04); il prévoit une indemnisation sur la base d'un tarif horaire de CHF 200.- pour un chef d'étude (art. 16 al. 1 let. c RAJ). Seules les heures nécessaires sont retenues; elles sont appréciées en fonction, notamment, de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (art. 16 al. 2 RAJ).

6.2. En l'occurrence, le conseil juridique du recourant a produit son état de frais, totalisant une activité de 13h30 pour un chef d'étude. Le décompte inclut 4h00 de conférences avec le client – dont 2h30 concernant "(examen de la libération conditionnelle)" et 1h30 au "(recours)"– et 9h30 de procédure [soit 1h00 d'"étude du dossier (examen de la libération conditionnelle)", 4h00 de déterminations au TAPEM et préparation du bordereau de pièces "(examen libération conditionnelle)" et 4h30 de rédaction du recours et préparation du bordereau de pièces "(recours)"].

L'examen et la fixation de l'indemnisation d'activités concernant les déterminations au TAPEM n'appartiennent pas à la Chambre de céans mais au TAPEM, auprès de qui le défenseur d'office devait faire valoir ses prétentions (art. 135 al. 2 CPP).

Seule l'activité déployée auprès de l'instance de recours sera donc indemnisée ici. Or, les 6h00 réclamées paraissent excessives, compte tenu du mémoire de recours (vingt et une pages, page de garde incluse), lequel reprend dans les grandes lignes les déterminations au TAPEM. L'indemnité sera dès lors réduite à 4h00, au tarif horaire de CHF 200.- pour un chef d'étude.

L'indemnité due pour l'instance de recours sera ainsi fixée à CHF 800.-, l'étude n'étant pas soumise à la TVA.

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Met à la charge de A______ (alias AA______) les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 600.-.

Alloue à Me C______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 800.- pour la procédure de recours.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, au TAPEM et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

 

Par ailleurs, le Tribunal pénal fédéral connaît des recours du défenseur d'office contre les décisions de l'autorité cantonale de recours en matière d'indemnisation (art. 135 al. 3 let. a CPP et 37 al. 1 LOAP). Le recours doit être adressé dans les 10 jours, par écrit, au Tribunal pénal fédéral, case postale 2720, 6501 Bellinzone.


 

PM/833/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

515.00

Total

CHF

600.00