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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/17680/2023

ACPR/744/2023 du 26.09.2023 sur OMP/15607/2023 ( MP ) , REJETE

Recours TF déposé le 31.10.2023, rendu le 26.03.2024, ADMIS, 7B_839/23
Descripteurs : ASSISTANCE JUDICIAIRE;VALEUR LIMITE(EN GÉNÉRAL);COMPLEXITÉ DE LA PROCÉDURE
Normes : CPP.132

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/17680/2023 ACPR/744/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 26 septembre 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, représenté par Me B______, avocate,

recourant,

contre l'ordonnance de refus de nomination d'avocat d'office rendue le 23 août 2023 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 5 septembre 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 23 août 2023, communiquée sous pli simple et reçue selon lui le 28 suivant, par laquelle le Ministère public a refusé d'ordonner une défense d'office en sa faveur.

Le recourant conclut, sous suite de dépens, à l'annulation de cette décision et à ce qu'il soit mis au bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par ordonnance pénale du 13 août 2023, le Ministère public a reconnu A______ coupable de vol (art. 139 ch. 1 CP), d'utilisation frauduleuse d'un ordinateur (art. 147 al. 1 CP), d'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI et d'infraction à l'art. 19a ch. 1 LStup. Il l'a condamné à une peine privative de liberté de 120 jours, sous déduction de 2 jours correspondant à 2 jours de détention avant jugement, ainsi qu'à une amende de CHF 500.-.

En substance, il lui était reproché d'avoir :

- le 29 juin 2023, à Genève, plus particulièrement à la piscine des C______, dérobé le sac à dos appartenant à D______, qui contenait notamment son permis de conduire, une vapoteuse, son porte-monnaie ainsi qu’un abonnement aux C______ et deux cartes bancaires émises par les banques E______ et F______, dans le but de s'approprier ces objets et leur valeur et de s'en enrichir de manière illégitime ainsi que d'avoir, à Genève, le 12 août 2023, effectué divers achats frauduleux au moyen de la carte bancaire F______ précitée, pour un préjudice total de CHF 400.60;

- entre le 11 novembre 2022, soit le lendemain de sa précédente condamnation non entrée en force, et le 12 août 2023, date de son interpellation, persisté à séjourner en Suisse, plus particulièrement à Genève, alors qu'il n'était pas au bénéfice des autorisations nécessaires et qu'il n'était pas en possession d'un document d'identité valable indiquant sa nationalité;

- consommé, en moyenne, depuis une période de six mois, 3 grammes de cocaïne par semaine.

b. Entendu par la police le 12 août 2023, le prévenu, qui avait renoncé à la présence de son conseil, a en substance expliqué ne pas se souvenir des évènements car il avait consommé de la cocaïne. Il a admis consommer cette substance à hauteur d'environ 3 grammes par semaine. Enfin, il était présent en Suisse depuis 2018 environ et n’avait jamais quitté le territoire.

S'agissant de sa situation personnelle, il était de nationalité algérienne, célibataire, sans attache en Suisse et se déclarait comédien sans aucun revenu.

c. Le 14 août 2023, par l'intermédiaire de son conseil, il a formé opposition à l'ordonnance pénale, demandant simultanément à être mis au bénéfice de l'assistance juridique.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public a laissé ouverte la question de l'indigence, puisque la cause ne présentait pas de difficultés particulières juridiques ou de fait et que le prévenu était donc à même de se défendre efficacement seul. La cause était, en outre, de peu de gravité et n'exigeait pas la désignation d'un défenseur d'office, dès lors que l'intéressé n'était passible que d'une peine privative de liberté maximale de 4 mois ou d'une peine pécuniaire maximale de 120 jours-amende.

D. a. Dans son recours, A______ soutient que son indigence est établie. L'affaire n'était pas de peu de gravité compte tenu du seuil de la peine prononcée (120 jours-amende). La cause présentait également certaines difficultés. Il était sous l'effet de la cocaïne au moment des faits. Des questions "de responsabilité pénale et de l'opportunité d'une expertise se pos[aient] ainsi". Il se voyait en outre reprocher "quatre infractions, dont l'utilisation frauduleuse d'un ordinateur, infraction complexe, qui peut nécessiter une fouille de matériel électronique". Il avait également subi deux jours de détention à la suite de son interpellation. Enfin, il était de nationalité étrangère, n'avait aucune famille ou soutien administratif en Suisse et n'était pas familiarisé avec l'ordre juridique suisse.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) – les formalités de notification (art. 85 al. 2 CPP) n'ayant pas été observées –, concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             2.1. À teneur de l'art. 132 al. 1 let. b CPP, la direction de la procédure ordonne une défense d'office si le prévenu ne dispose pas des moyens nécessaires et que l'assistance d'un défenseur est justifiée pour sauvegarder ses intérêts.

La défense d'office aux fins de protéger les intérêts du prévenu se justifie notamment lorsque l'affaire n'est pas de peu de gravité et qu'elle présente, sur le plan des faits ou du droit, des difficultés que le prévenu seul ne pourrait pas surmonter (art. 132 al. 2 CPP), ces deux conditions étant cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 1B_229/2021 du 9 septembre 2021 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_194/2021 du 21 juin 2021 consid. 3.1). L'art. 132 al. 3 CPP prévoit qu'en tout état de cause, une affaire n'est pas de peu de gravité lorsque le prévenu est passible d'une peine privative de liberté de plus de quatre mois, d'une peine pécuniaire de plus de 120 jours-amende ou d'un travail d'intérêt général de plus de 480 heures.

2.2. Pour évaluer si l'affaire présente des difficultés que le prévenu ne pourrait pas surmonter sans l'aide d'un avocat, il y a lieu d'apprécier l'ensemble des circonstances concrètes. En particulier, il convient de s'attacher à la peine concrètement encourue et non à la seule peine menace prévue par la loi (ATF 143 I 164 consid. 2.4.3 et 3; L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Petit Commentaire du CPP, 2e éd., 2016, n. 30 ad art. 132). La nécessité de l'intervention d'un conseil juridique doit ainsi reposer sur des éléments objectifs, tenant principalement à la nature de la cause, et sur des éléments subjectifs, fondés sur l'aptitude concrète du requérant à mener seul la procédure. La jurisprudence impose de se demander si une personne raisonnable et de bonne foi – qui présenterait les mêmes caractéristiques que le requérant mais disposerait de ressources suffisantes – ferait ou non appel à un avocat.

Pour apprécier la difficulté subjective d'une cause, il faut aussi tenir compte des capacités du prévenu, notamment de son âge, de sa formation, de sa plus ou moins grande familiarité avec la pratique judiciaire, de sa maîtrise de la langue de la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 1B_257/2013 du 28 octobre 2013 consid. 2.1 publié in SJ 2014 I 273 et les références citées) et des mesures qui paraissent nécessaires, dans le cas particulier, pour assurer sa défense, notamment en ce qui concerne les preuves qu'il devra offrir (ATF 115 Ia 103 consid. 4).

2.3. En l'espèce, le recourant semble indigent. Cette question peut cependant rester ouverte, vu ce qui suit.

La peine concrètement encourue par le recourant s'élève à 120 jours-amende, de sorte que la cause ne dépasse pas le seuil de gravité de l'art. 132 al. 3 CPP.

Quand bien même, la deuxième condition, cumulative, prévue par l'art. 132 al. 2 CPP, n'est pas réalisée.

En effet, l'examen des circonstances du cas d'espèce permet de retenir que la cause ne présente pas de difficultés particulières, du point de vue de l'établissement des faits ou des questions juridiques soulevées, que le recourant ne serait pas en mesure de résoudre seul. Les faits et dispositions applicables sont clairement circonscrits et ne présentent aucune difficulté de compréhension ou d'application, même pour un ressortissant algérien, qui dit résider sur notre territoire depuis 2018 et maîtrise la langue française. Le recourant s'est du reste déjà exprimé à leur égard à la police, reconnaissant en partie les faits. Il a parfaitement compris ce qui lui était reproché. Qu'il n'ait aucune attache ou soutien en Suisse n'est ainsi pas relevant. En outre, on ne voit pas en quoi avoir subi deux jours de détention provisoire serait de nature à rendre la cause complexe. Quant à l'infraction reprochée portant sur divers achats frauduleux totalisant environ CHF 400.- au moyen de la carte bancaire dérobée, elle ne revêt non plus aucun caractère complexe quand bien même elle serait contestée et que des actes d'enquête supplémentaires s'avèreraient le cas échéant nécessaires. Enfin, il n'apparaît pas qu'une expertise psychiatrique soit envisagée à ce stade de l'instruction. Là encore, le recourant échoue à démontrer que la cause présenterait des difficultés particulières.

Partant, en l'absence de cette condition cumulative, la défense d'office ne se justifie pas, et rien ne permet de retenir que d'autres motifs que ceux prévus à l'art. 132 al. 2 CPP justifieraient une défense d'office.

3. Le recours doit ainsi être rejeté, ce que la Chambre de céans pouvait décider sans échange d'écritures ni débats (art. 390 al. 2 a contrario CPP).

4. Vu l'issue du recours, qui était voué à l'échec, il n'y pas lieu d'entrer en matière sur la demande d'assistance juridique pour la procédure de recours.

5. La procédure de recours contre le refus de l'octroi de l'assistance juridique ne donne pas lieu à la perception de frais (art. 20 RAJ).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance judiciaire pour l'instance de recours.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Oriana BRICENO LOPEZ, greffière.

 

La greffière :

Oriana BRICENO LOPEZ

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).