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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/11640/2021

AARP/255/2025 du 07.07.2025 sur JTDP/128/2025 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : INFRACTIONS CONTRE LE PATRIMOINE;BRIGANDAGE;ESCROQUERIE;INFRACTION PAR MÉTIER;PRINCIPE DE LA CÉLÉRITÉ;FIXATION DE LA PEINE;PARTIE CIVILE;INDEMNITÉ(EN GÉNÉRAL)
Normes : CP.140.al1; CP.146; CP.53; CPP.5; Cst; CP.47; CPP.122.al1

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

P/11640/2021 AARP/255/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 7 juillet 2025

 

Entre

A______, domicilié ______ [VD], comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/128/2025 rendu le 3 février 2025 par le Tribunal de police,

 

et

C______, partie plaignante, comparant par Me D______, avocate,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Saisine de la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR)

a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/128/2025 du 3 février 2025, par lequel le Tribunal de police (TP), notamment, l'a reconnu coupable de brigandage, d'escroquerie par métier, d'infraction à la Loi fédérale sur la circulation routière [LCR], condamné à une peine privative de liberté de huit mois, assortie du sursis, et à verser à C______, à titre de réparation du tort moral, CHF 8'000.-.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à l'acquittement de brigandage, au classement partiel des faits d'escroquerie par métier et à l'exemption de peine de ce chef, au prononcé d'une peine pécuniaire n'excédant pas 15 unités à CHF 20.- et au rejet de l'action civile.

b.a. Selon l'acte d'accusation du 10 septembre 2024, il est en substance reproché ce qui suit à A______ : il a, le 27 mai 2021, de concert avec quatre individus au moins (coactivité), participé à une expédition punitive à l'encontre de C______, en lui assénant des coups le blessant et en lui soustrayant ses effets personnels.

b.b. Il était en outre reproché ce qui suit à A______ :

"1.2. […] À Genève et ailleurs en Suisse, pendant la période allant du début de l'année 2021 jusqu'au 6 juin 2021, A______ a, dans le dessein de s'enrichir illégitimement, fait paraître des annonces sur des sites internet tels que E______ et sur la plateforme F______, en utilisant notamment les pseudonymes "G______" et "H______", proposant à de nombreuses personnes, la vente [d'écouteurs sans fil] I______ falsifiés, dont la boîte d'emballage indiquait précisément qu'il s'agissait de I______ de la marque J______.

Le prévenu a également indiqué aux acheteurs qu'il s'agissait d'originaux, les trompant ainsi en leur dissimulant le fait qu'il s'agissait de faux. Afin de les conforter dans leur erreur, A______ a notamment déclaré aux acheteurs qu'il procédait à cette vente, car il avait reçu cette paire d'écouteurs en cadeau et qu'il n'en avait pas l'utilité puisqu'il avait déjà des I______.

Le prévenu a ainsi astucieusement déterminé à tout le moins vingt personnes à procéder à cet achat en versant le montant du prix de vente convenu par K______ ou en espèces, alors qu'il savait qu'il s'agissait [d'écouteurs sans fil] I______ falsifiés. Il a ainsi conservé indûment l'argent reçu des acheteurs, afin de se procurer un enrichissement illégitime.

A______ a ainsi commis plusieurs escroqueries de ce type au préjudice des personnes suivantes :

1.2.1. L______ qui, répondant à une annonce postée par le prévenu sur la plateforme F______ de FACEBOOK au moyen de son pseudo G______ et croyant acquérir de véritables écouteurs I______, a versé, le 18 mai 2021, par le biais de l'application K______, la somme de CHF 110.- au prévenu, étant précisé que L______ a déposé plainte pénale en raison de ces faits le 24 juin 2021.

1.2.2. M______ qui, répondant à une annonce postée par le prévenu sur la plateforme F______ de FACEBOOK et croyant acquérir de véritables écouteurs I______, a versé, le 20 mai 2021, la somme de CHF 100.- au prévenu, étant précisé que M______ a déposé plainte pénale en raison de ces faits le 11 août 2021.

1.2.3. N______ qui, répondant à une annonce postée par le prévenu sur la plateforme F______ de FACEBOOK et croyant acquérir de véritables écouteurs I______, a versé, le 3 juin 2021, la somme de CHF 170.- au prévenu, étant précisé que N______ a déposé plainte pénale en raison de ces faits le 18 juin 2021.

1.2.4. O______ qui, répondant à une annonce postée par le prévenu sur la plateforme F______ de FACEBOOK au moyen de son pseudo G______ et croyant acquérir de véritables écouteurs I______, a versé, le 5 juin 2021, la somme de CHF 100.- au prévenu, étant précisé que O______ a déposé plainte pénale en raison de ces faits le 5 juin 2021.

1.2.5. P______ qui a acheté, à une date indéterminée durant la période pénale précitée, des écouteurs I______ vendus par le prévenu pour un montant indéterminé.

1.2.6. Q______ qui a acheté, à une date indéterminée durant la période pénale précitée, des écouteurs I______ vendus par le prévenu pour un montant indéterminé.

***

En agissant comme décrit sous chiffre 1.2, le prévenu s'est rendu coupable d'escroquerie par métier au sens de l'art. 146 al. 1 et 2 CP, étant précisé que l'aggravante du métier absorbe l'infraction d'importance mineure.

A______ a agi avec la circonstance aggravante du métier dès lors qu'il a agi à de nombreuses reprises entre le début de l'année 2021 et juin 2021, faisant preuve d'organisation et d'une systématique dans son activité délictueuse qui lui a procuré des revenus réguliers et qui représentaient sa principale source de revenus, étant souligné qu'il aurait pu se procurer des revenus supplémentaires s'il n'avait pas fait l'objet de plaintes pénales. En effet, le prévenu n'avait pas d'activité lucrative au moment des faits et a tiré un revenu de son activité délictueuse pour assurer son train de vie."

B.            Faits résultant de la procédure préliminaire et de première instance

Demeurent pertinents au stade de l'appel les faits suivants :

a.a. Le 27 mai 2021, C______, étudiant âgé de 16 ans, a déposé plainte contre inconnu. Le jour même, vers 16h45, tandis qu'il quittait le R______ [établissement de secondaire II] où il était scolarisé, il avait été encerclé par cinq à six jeunes hommes portant des masques, dont il ignorait l'identité. "[Son] agresseur", qui était coiffé d'un casque, l'avait contraint à le suivre par une prise d'étranglement, dans une impasse, avant de lui demander d'enlever ses vêtements (veste, pantalon, chaussures) et de le frapper (coups de poing), ce qui l'avait "sonné". L'agresseur lui avait ordonné de se mettre à genoux et de dire qu'il était "une petite salope", tout en le filmant, avant de lui asséner d'autres coups de poing, pied, genou et de le saisir par les cheveux en le secouant – il était couché au sol en position du fœtus, pour se protéger. Son [smartphone de marque] S______ et ses [écouteurs] I______ étaient tombés par terre et les amis de l'agresseur s'en étaient saisis. Lorsque ceux-ci étaient partis, l'un des amis de l'agresseur, resté sur place, était venu lui dire : "tu as eu ce que tu méritais, on aurait pu faire pire !" ; en ajoutant que c'était une revanche "sur les mecs de T______" car son frère n'avait pas mérité autant d'acharnement. Cette personne faisait allusion à une agression ayant eu lieu à T______ [GE] en avril, dont il avait connaissance car tout le monde en parlait.

a.b. Le 31 mai 2021, C______ a identifié A______ sur planche photographique. Également scolarisé au R______, ce dernier était présent lors de l'agression mais n'avait rien fait. C'était lui qui était venu le voir, à la fin, pour lui dire : "c'est ça d'avoir touché à mon petit frère !", en faisant référence à U______, qui avait été agressé par des jeunes de T______ – agression à laquelle il n'était pas mêlé.

C______ a produit un constat médical (hématome à l'œil gauche / dermabrasion au menton / érythèmes au cuir chevelu / dent cassée), des photographies (dont celle d'une touffe de cheveux arrachés), un certificat d'arrêt de travail (du 27 mai au 30 juin 2021) et un rapport de consultation en cardiologie pédiatrique datant de 2019.

b. Selon les rapports de police des 28 mai et 2 juin 2021, A______ et V______, mineur portant des vêtements correspondant au signalement du brigand, avaient été arrêtés. La perquisition de la chambre du premier n'avait révélé aucun élément pertinent en lien avec l'affaire et la fouille de son téléphone n'avait rien apporté d'utile à l'enquête. Aucun élément concret ne permettait de relier A______ aux préparatifs de l'expédition punitive conduite contre C______ le 27 mai 2021. Quant au second, il niait sa participation au brigandage ["Cette histoire ne me dit rien !"] sans être en mesure de fournir un emploi du temps précis de cette journée.

C______ n'était pas à même d'identifier d'autres auteurs.

Plusieurs enquêtes avaient été menées depuis le 4 avril 2021, date à laquelle V______ avait déposé plainte des suites d'une agression, du vol et de l'incendie de son scooter, à T______.

c. U______ a déclaré que, le 2 avril 2021, il y avait eu une descente organisée contre des jeunes, à T______, lors de laquelle il avait été agressé.

Le 27 mai 2021, vers 17h00, son frère A______ l'avait rejoint aux W______ et lui avait dit : "je crois qu'on a attrapé C______ !". A______ avait précisé qu'un jeune s'en était pris à celui-ci en le frappant, en le filmant et en le déshabillant.

d. A______ a déclaré, à la police, qu'en sortant du R______, le 27 mai 2021, vers 16h45, il avait aperçu quatre à cinq jeunes habillés de noir, masqués et pour certains casqués, s'approcher de C______ – il savait qu'il se prénommait C______ car le soir même son frère U______ l'en avait informé. L'un des jeunes avait saisi et escorté C______ à l'abri des regards. Pour sa part, il avait suivi ce groupe par curiosité, mais aussi car C______ avait un lien avec l'agression de U______, laquelle avait eu lieu en avril à T______. Ayant un sentiment de haine envers ce jeune de T______, il s'était dit au début qu'il allait potentiellement participer. Pour lui – c'était clair – ces jeunes allaient le passer à tabac et c'était ce qu'il méritait. Une fois dans l'impasse, il n'avait rien fait ; il avait assisté au brigandage. Il n'y avait eu qu'un seul agresseur, qui avait sorti son téléphone et filmé. Celui-ci avait ordonné à C______ d'enlever ses habits et de les lui remettre, avant de lui donner trois ou quatre claques et un coup de pied – sans certitude pour le coup de pied. Pour sa part, il n'avait pas vu tomber C______. Les quatre autres individus n'avaient rien fait, se contentant d'encercler ce dernier – il s'agissait de simples observateurs, un peu comme lui. Un ami de C______ était venu le supplier d'arrêter, pendant l'agression, car C______ souffrait d'un problème cardiaque. Il s'était donc approché du groupe de jeunes, dont le comportement était lâche – la victime lui faisait pitié –, et leur avait demandé d'arrêter. L'agresseur ne cessant pas, il s'était interposé physiquement en le saisissant par le bras et en lui disant d'arrêter. L'agresseur avait alors cessé et le groupe était parti. Pour sa part, il était resté sur place. Il avait dit à C______ qu'il était désolé et que ce n'était que le revers de la médaille car il faisait partie du groupe de T______ qui avait agressé son petit-frère. Puis il avait laissé C______, en sous-vêtements, et son ami sur place.

Les affaires subtilisées avaient été remises à l'agresseur principal.

Il devait s'agir de jeunes des W______, qu'il devait connaître mais n'avait pu identifier, compte tenu de leur habillement et parce qu'ils étaient masqués. Bien qu'il eût assisté au brigandage, ces derniers ne lui avaient rien fait. Il en déduisait qu'ils l'avaient reconnu. En effet, ancien jeune des W______ – il avait déménagé à X______ en janvier 2021 –, il continuait de "traîner" dans ce quartier avec "les plus âgés".

Il n'était pas l'instigateur de ce brigandage mais cela ne lui avait pas déplu finalement. Il n'avait rien à voir avec les faits et n'avait rien dérobé à la victime. Selon lui, il s'agissait d'un acte préparé car ces jeunes connaissaient l'emploi du temps de celle-ci et s'étaient équipés en conséquence.

e.a. Selon le rapport de police du 28 septembre 2021, le jeune Y______, ami de C______ et témoin du brigandage en bande, avait été entendu. Compte tenu de ses déclarations et de celles de la victime, il fallait présumer que A______ était bien l'instigateur du brigandage et qu'il minimisait son implication. Il était difficile de croire que sa présence au moment des faits fût fortuite et qu'il ne fût pas averti à tout le moins des plans de la bande d'agresseurs, voire qu'il n'en fût pas à l'origine.

e.b. Y______ a déclaré, à la police, que le 27 mai 2021, à la sortie des cours, tandis qu'il accompagnait son ami C______ au parking des deux-roues, un groupe de quatre à six jeunes hommes, dont certains portaient des casques, les avait fixés du regard avec insistance. L'un d'eux avait saisi C______ à l'épaule et l'avait contraint à le suivre dans une impasse, à l'abri des regards. Pour sa part, il les avait suivis à distance. Les agresseurs avaient mis des coups de pied et de genou à C______, avant de le déshabiller et de le filmer. L'agresseur principal avait ordonné à C______ de dire qu'il était une "petite salope" et, énervé face à son refus, lui avait encore donné plus de coups – il l'avait même tiré par les cheveux. Le premier avait dérobé les affaires personnelles du second, en particulier ses S______ et I______. Sous l'effet des coups, C______ était tombé à genoux puis s'était complètement effondré au sol. Se trouvant à 50 mètres de l'agression, il avait quasiment tout vu, quant à lui.

Dans le groupe d'agresseurs, il y avait un jeune prénommé A______. Celui-ci n'avait toutefois rien fait : ni frappé C______ ni subtilisé ses affaires. Par contre, A______ avait été présent durant tout le brigandage et n'avait rien fait pour dissuader ou empêcher ses amis de commettre cette agression. Pour sa part, plusieurs fois il avait tenté d'approcher, en leur demandant d'arrêter ; de plus, il avait informé A______ que C______ souffrait d'un problème cardiaque et que, s'ils continuaient de le frapper de la sorte, ils pourraient le tuer. Tout le monde avait quitté les lieux à la fin de l'agression, sauf A______, qui avait fait la morale à C______, en lui disant qu'il avait eu ce qu'il méritait car son frère avait été violemment agressé par des jeunes de T______.

C______ était une victime collatérale des règlements de compte entre la bande des W______ et celle de T______. Pour lui, A______ avait voulu venger son frère U______ en montrant que les "mecs" des W______ [GE] ne se laissaient pas "marcher dessus" par ceux de T______.

Sur planche photographique, il reconnaissait A______ et l'agresseur principal, "V______" [surnom].

f.a. Au MP, C______ a persisté dans ses déclarations. L'agresseur principal lui avait dit d'enlever sa jaquette, son pantalon – pour ce faire il avait dû enlever ses chaussures – et son pull. Les jeunes qui étaient "derrière" lui avaient pris toutes ses affaires et avaient ramassé, en partant, tout ce qu'il avait fait tomber. Il ne pouvait dire combien de coups de pied et de poing il avait reçus. Seule une personne l'avait frappé. V______ portait un casque et un masque chirurgical et A______ une capuche et un masque chirurgical. Il ne connaissait pas le premier et ne savait pas pourquoi il lui en voulait ; ça devait être – il l'avait compris après coup – parce qu'il était de T______. A______ était le dernier qui était resté sur place. Celui-ci lui avait dit "C'est ça d'avoir touché à mon petit frère !" – il ne connaissait pas U______ – et qu'ils auraient pu le "gazer" ou le "schlasser".

C______ a produit :

·         Une attestation de la Dresse Z______, psychiatre-psychothérapeute FMH, du 4 novembre 2021 ("[…] Mon patient a reçu beaucoup de coups […] Il explique qu'il a eu très peur de mourir sous les coups. Pour finir, les agresseurs sont partis en lui volant ses habits et son téléphone. Comme conséquence, C______ a eu de nombreux hématomes et des douleurs importantes surtout au visage. Il a mis plusieurs jours à pouvoir à nouveau manger et a dû bénéficier de soins dentaires (dent cassée et dents fissurées). Il n'a pas pu retourner à l'école et n'a pas pu finir son année scolaire. Depuis la rentrée, il vit dans la peur […] Par ailleurs, il présente souvent des images de l'agression à l'endormissement (réminiscences) et des cauchemars fréquents. Il reste très marqué […]").

·         Un rapport de consultation des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG / UIMPV) du 11 octobre 2021 ("[…] Sur le plan psychique, nous avons constaté une réaction aigüe à un facteur de stress (F43.0) avec évolution vers un état de stress post-traumatique (F43.1) […]").

f.b. A______ a confirmé ses précédentes déclarations. Il était présent lors du brigandage mais n'y avait pas participé.

Il était sur le point de démarrer son scooter lorsqu'il avait vu des jeunes masqués et habillés de noir, méconnaissables, aller chercher C______, qu'il connaissait de vue. Il avait trouvé cela bizarre et fait l'erreur de les suivre. Un certain Y______ avait fait de même. Il ne savait pas, au moment où ces jeunes s'en étaient pris à C______, que celui-ci aurait été l'un des auteurs de l'agression de son frère ("Je ne le savais pas à ce moment-là") ; lorsqu'il marchait derrière ce groupe, l'idée n'était donc pas de suivre l'individu qui avait agressé son frère ("Je n'ai pas [dans] l'idée de suivre celui qui avait agressé mon frère") ; cette idée lui était venue plus tard, plus précisément quand l'agresseur principal avait insulté C______ en lui reprochant de venir de T______, "quartier des salopes", ce qui impliquait forcément que C______ faisait partie de la bande de T______ et qu'il avait agressé son frère.

L'agresseur avait frappé et filmé C______. Pour sa part, il s'était tenu derrière au début, avant d'avancer. Puis, à l'arrivée de Y______, il s'était éloigné du groupe et s'était rendu vers celui-ci, qui lui avait alors dit que C______ avait un problème au cœur. Il s'était donc empressé d'aller vers l'agresseur pour lui demander d'arrêter de le frapper.

Il était vrai que les choses s'étaient déroulées comme C______ les décrivait. Il était donc exact qu'il n'y avait pas eu que deux ou trois coups de poing, comme il l'avait déclaré à la police.

Une fois l'agresseur et les autres partis, il avait demandé à C______ si ça allait. Il lui avait dit que son frère U______ s'était fait frapper à T______ et que, s'il était impliqué, il était normal que la roue tourne – il ne savait plus quels termes il avait utilisés exactement.

Il ne pouvait dire si V______ était l'agresseur principal. Il le connaissait comme un ami de son frère U______.

Il avait effectivement rejoint U______ juste après les faits.

Il contestait avoir tout organisé. La police le lui avait reproché et cela l'avait "choqué".

f.c. V______ a nié toute implication. Il travaillait au commerce de son père à l'heure dite.

f.d. Y______ a persisté dans ses explications. Ils portaient tous des casques et des masques chirurgicaux. A______ n'avait rien fait pour que "V______" arrête de frapper C______, qui était "coincé", dos au grillage. Les autres personnes présentes se trouvaient autour de C______, tout comme A______, mais parfois ce dernier venait le [Y______] voir. À la fin de l'agression, "V______" avait dit à C______ : "T'es le premier mais t'es pas le dernier !". C______ s'était senti très mal : il avait des douleurs aux mâchoire, dents, tête, cheveux, torse et corps ; il pleurait et avait peur. A______ avait discuté un peu avec celui-ci – il ne se souvenait plus de ce que A______ avait dit à C______. A______ n'était pas énervé et "essayait de s'excuser un peu".

A______ n'avait rien volé à C______.

g.a. Au Tribunal, C______, dispensé de comparution personnelle, a produit un certificat de la Dresse Z______ daté du 8 novembre 2024 ("[…] Le suivi a été régulier jusqu'à l'été 2023. Au printemps 2024, à l'approche de la date de son agression, Mr C______ est revenu me consulter en raison d'un état dépressif avec des symptômes de stress post-traumatique (troubles du sommeil, flashback, évitement du quartier de son agresseur, hyper-vigilances) toujours présents bien que moins fréquents et intenses que durant l'année ayant suivi l'agression. Mr C______ est encore suivi à ma consultation actuellement […]".

g.b. A______ a maintenu sa position et contesté les faits.

C. a. L'appelant ne conteste pas les faits de la cause s'agissant de l'escroquerie qualifiée, lesquels correspondent à la description qui en est faite dans l’acte d’accusation (cf. A.b.b supra), étant renvoyé au jugement de première instance pour le surplus (art. 82 al. 4 du Code de procédure pénale [CPP]).

b. Quatre plaintes pénales ont été déposées de ce chef à l'encontre de A______ (cf. chiffres 1.2.1 à 1.2.4 de l'acte d'accusation).

c. S'y ajoute une cinquième : celle déposée par AA_____ le 10 juin 2021 pour des faits similaires, retirée par l'intéressée le 30 juin 2022 suite au remboursement (CHF 190.-) effectué par A______.

Par ordonnance du 10 septembre 2024, le MP a donc classé la procédure pour ces faits, après avoir "[constaté] qu'il existe un motif de renoncer à toute poursuite pénale, en vertu de l'art. 53 CP".

d. Le 4 juillet 2024, A______ a écrit aux plaignants (cf. chiffres 1.2.1 à 1.2.4 et 1.2.6) : il était disposé à les rembourser du prix de vente des faux I______.

e. Le 30 janvier 2025, A______ a versé CHF 100.- (K______) à L______ (cf. chiffre 1.2.1), qui a retiré sa plainte.

f. Le 30 juin 2025, M______ (cf. chiffre 1.2.2) a également retiré sa plainte car A______ l'avait remboursée.

D. Procédure d'appel

a. Aux débats, A______ a campé sur sa position. En aucun cas il n'avait participé de près ou de loin au brigandage.

Il n'était pas du tout au courant de ce qui allait se passer à la sortie de l'école. Il n'en avait pas été averti. Il se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment – c'était une coïncidence. Justice devait être rendue mais il n'était pas la bonne personne – il n'avait rien fait, rien volé.

Dans son esprit, il était clair qu'il y aurait une confrontation mais pas qu'on volerait C______. Il songeait alors à une altercation verbale – une confrontation n'impliquait pas forcément le recours à la force physique ; il rappelait qu'il était (actuellement) médiateur et qu'il avait l'habitude de résoudre les conflits par la parole.

Il devait être vêtu de bleu et portait un masque COVID – on était en période COVID et le port du masque était obligatoire à l'école. Il était possible que sa capuche fût relevée – il n'avait pas son casque sur la tête. Il était donc loisible à C______ de le reconnaître. Quant au groupe d'agresseurs, ils étaient "tout en noir" et portaient des "masques cagoules" – non des masques COVID.

La veille des débats d'appel, il avait demandé à son frère U______ d'intercéder auprès de V______ pour que celui-ci rédige une lettre dans laquelle il assumerait, tout en assurant qu'il n'avait, quant à lui, rien à voir avec cette histoire ; ce que V______ avait fait – il produisait cette lettre.

Il reconnaissait ses torts s'agissant de l'escroquerie – il était jeune, n'avait que 18 ans. Il avait fait son possible pour assumer ses erreurs et approché chacune des parties plaignantes pour les rembourser.

b. La "Déclaration sur l'honneur" de V______ a la teneur suivante : "[…] Le 27 mai 2021, je me suis rendu de ma propre initiative au R______, avec l'intention de confronter C______, en raison d'un différend personnel antérieur. Cette décision a été prise de manière autonome, sans que Monsieur A______ n'ait été informé, impliqué ou associé de quelque manière que ce soit à cette démarche […]".

c.a. A______ persiste dans ses conclusions.

c.b. C______ et le MP concluent au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement.

c.c. Les arguments des parties seront repris ci-après dans la mesure de leur pertinence.

E.            Situation personnelle et antécédents

a. A______ est âgé de 22 ans, de nationalité suisse, célibataire, sans enfant. Il travaille comme coursier pour un salaire mensuel de CHF 500.-.

b. Il n'a pas d'antécédent inscrit au casier judiciaire suisse.

F.            Assistance judiciaire

a. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel facturant, sous des libellés divers, trois heures d'activité de chef d'étude, hors débats d'appel lesquels ont duré une heure et 25 minutes.

b. Me D______, conseil juridique gratuit de C______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, huit heures et 50 minutes d'activité de cheffe d'étude, hors débats d'appel, dont 15 minutes de lecture de la déclarations d'appel.

EN DROIT :

1.             L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décision illégale ou inéquitable (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2.             2.1.1. La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU II (RS 0.103.2) et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe "in dubio pro reo", concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait (ATF 148 IV 409 consid. 2.2).

2.1.2. L'art. 140 ch. 1 al. 1 CP, dans sa teneur jusqu'au 30 juin 2023, réprime le comportement de celui qui aura commis un vol en usant de violence à l’égard d’une personne, en la menaçant d’un danger imminent pour la vie ou l’intégrité corporelle ou en la mettant hors d’état de résister.

2.1.3. Est un coauteur celui qui collabore, intentionnellement et de manière déterminante, avec d'autres personnes à la décision de commettre une infraction, à son organisation ou à son exécution, au point d'apparaître comme l'un des participants principaux ; il faut que, d'après les circonstances du cas concret, la contribution du coauteur apparaisse essentielle à l'exécution de l'infraction. La seule volonté quant à l'acte ne suffit pas ; il n'est toutefois pas nécessaire que le coauteur ait effectivement participé à l'exécution de l'acte ou qu'il ait pu l'influencer. La coactivité suppose une décision commune, qui ne doit cependant pas obligatoirement être expresse, mais peut aussi résulter d'actes concluants, le dol éventuel quant au résultat étant suffisant. Il n'est pas nécessaire que le coauteur participe à la conception du projet ; il peut y adhérer ultérieurement. Il n'est pas non plus nécessaire que l'acte soit prémédité ; le coauteur peut s'y associer en cours d'exécution. Ce qui est déterminant c'est que le coauteur se soit associé à la décision dont est issue l'infraction ou à la réalisation de cette dernière, dans des conditions ou dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal (ATF 130 IV 58 consid. 9.2.1 ; 125 IV 134 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_712/2021 du 16 février 2022 consid. 1.3).

Le plan commun que se donnent les différents protagonistes cimente leurs contributions respectives en une entreprise délictueuse. L'accord ainsi passé requiert que l'intention de tous les intéressés, à savoir la conscience et la volonté de chacun d'eux (art. 12 al. 2 CP), porte sur l'ensemble des éléments objectifs de l'infraction considérée. S'ils n'ont pas besoin de se connaître, les différents coauteurs doivent en revanche savoir qu'ils appartiennent à une équipe et que celle-ci opère sur le mode de la division du travail. Condition nécessaire mais non suffisante à l'admission de la coactivité, la volonté des différents participants doit s'accompagner de la fourniture par chacun d'eux d'une contribution essentielle à la commission de l'infraction considérée ; alors seulement les intéressés seront réputés avoir eu la maîtrise fonctionnelle des opérations. Une collaboration, si intense soit-elle, au seul stade de la prise de décision ne suffit jamais à fonder une coactivité ; une telle intervention constitue au mieux une instigation (art. 24 CP) ou une complicité psychique (art. 25 CP). Une coactivité postérieurement à la consommation de l'infraction n'est pas envisageable. Une contribution fournie entre le commencement d'exécution d'une infraction et la consommation de celle-ci, voire son achèvement, est toujours essentielle lorsque l'agent adopte tout ou partie du comportement incriminé, au sens de la conception objective formelle de la participation principale (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 85, 87, 94, 96, 104 et 105 ad Intro aux art. 24-27).

2.2. En l'occurrence, les effets personnels de C______, soit ses vêtements, chaussures, téléphone et I______ ont été soustraits. V______ et les jeunes qui étaient "derrière" s'en sont emparés, le premier en usant de violence. Les éléments constitutifs du brigandage sont réalisés.

Il convient de déterminer si l'appelant en est le coauteur.

Il est constant que l'appelant était présent au moment des faits. Il l'était avant – à la sortie des cours –, pendant – lors du brigandage à proprement parler – et après – lors de la discussion qui s'en est suivie.

Il est établi, si l'on en croit ses déclarations à la police, qu'il a d'emblée compris ce qui se jouait, à savoir qu'on allait s'en prendre à l'intimé, c'est-à-dire – c'était clair – "le passer à tabac", lequel avait un lien avec l'agression de son frère U______ survenue le mois précédent. Tout comme il est établi qu'il s'en est réjoui, au point de ne pas exclure d'y prendre part, car il nourrissait un sentiment de haine envers ce jeune de T______.

L'évolution de ses déclarations interroge et le dessert – finalement il ne s'attendait qu'à une (simple) confrontation verbale ; il ignorait que la victime était l'un des auteurs présumés de l'agression de U______ et ne l'avait compris que plus tard, en cours d'exécution. Tout comme sa minimisation des faits, s'agissant de la nature et du nombre de coups portés, interpelle – la victime n'avait reçu que quelques "claques" et n'était pas tombée.

Les paroles adressées à l'intimé immédiatement après les faits, enfin, lesquelles suggèrent qu'il méritait ce qui lui arrivait ("le revers de la médaille"), donnent à penser qu'il était partie prenante à ce qu'il venait de se passer ; sans compter qu'il s'est rendu aux W______ pour en informer son frère U______ ("Je crois qu'on a attrapé C______ !").

Autant d'éléments à charge.

Cela étant, sous l'angle des éléments objectifs et subjectifs de la coactivité, soutenue par l'accusation, il faut relever que :

·         L'enquête de police, technique en particulier (perquisition du domicile, fouille du téléphone), n'a pas mis en évidence d'élément concret permettant de relier l'appelant aux préparatifs de l'expédition punitive. Au-delà du fait qu'il restait en contact avec "les plus âgés" des W______ (depuis son déménagement) et que son frère U______ était l'ami de V______, le lien direct avec ce dernier n'a pas pu être fait ; pas plus qu'il n'a pu l'être avec les autres participants à l'infraction, restés non-identifiés. L'existence d'une décision commune et/ou d'un plan commun relatifs à l'agression projetée ne sont donc pas établis. Il est possible, voire probable, comme le suggère la police judiciaire, que le prévenu, bien qu'il s'en défende, ait eu vent du projet incriminé, pour s'être "inopinément" trouvé sur les lieux à cet instant précis – encore qu'il était scolarisé à cet endroit – et pour avoir choisi de suivre, jusque dans une impasse, les différents intervenants. Mais de là à retenir qu'il aurait fomenté ce plan avec V______ et ses sbires et serait, partant, intervenu dans l'organisation de l'infraction, il y a un pas que l'on ne saurait franchir, le dossier ne le démontrant pas.

L'appelant est resté passif lors du passage à tabac. Il n'a pas porté de coup. Il n'a pas incité, encouragé. Il ne s'est pas davantage emparé des effets personnels de la partie plaignante, contrairement à l'auteur principal et aux jeunes "derrière". C______ le concède, le témoin également. Certes, bien qu'il soutienne le contraire, l'appelant n'a pas porté secours à la victime – en saisissant le bras du brigand ou en lui enjoignant de cesser. Le témoin s'est montré clair sur ce point. Mais il n'a pas contribué à la commission de l'infraction pour autant, encore moins de manière déterminante en adoptant tout ou partie du comportement incriminé (soustraction / emploi d'un moyen de contrainte). Peu importe que ce déferlement de violence ne lui ait pas déplu finalement, voire qu'il ait opiné, sur le moment, à ce qui se passait. La seule volonté quant à l'acte ne suffit pas à assoir la coactivité.

À supposer qu'il ait appartenu à l'équipe – on ne perd pas de vue que la victime et le témoin ont vu en lui un membre à part entière de celle-ci –, on comprend mal qu'il n'ait pas été vêtu de manière semblable aux autres participants (de noir et casqué, voire cagoulé), qu'il n'ait pas encerclé la victime au même titre que les autres (des éloignements de la scène et des échanges verbaux avec le témoin sont concédés par celui-ci) et qu'il n'ait pas fui avec eux une fois les actes accomplis (il est resté sur place). Ses actes se distinguent ainsi de ceux des membres du groupe. Par ailleurs – et surtout – on peine à comprendre qu'il n'ait pas fait en sorte, à l'instar des précités, de ne pas être reconnu, allant jusqu'à s'exposer en parlant à l'intimé et en évoquant son frère U______, ne manquant pas, ce faisant, de se faire identifier.

·         Le seul échange verbal avec la victime, postérieur à la consommation du brigandage, ne saurait fonder une coactivité.

·         Le crime profite à l'appelant, il est vrai : obtenir vengeance pour son frère. Mais il ne lui profite pas exclusivement. V______ y trouvait son intérêt également : laver l'affront subi lors de sa propre agression, à T______, un mois auparavant, lors de laquelle son scooter avait été volé et incendié ; ce qui pouvait motiver son passage à l'acte, indépendamment d'une éventuelle coactivité du prévenu.

La "déclaration sur l'honneur" de V______ reste un élément neutre pour le surplus.

Somme toute, on ne peut exclure que, vraisemblablement au fait de ce qui allait se passer à la sortie des cours, l'appelant s'en soit réjoui et ait voulu, sinon y prendre part, y assister, en "spectateur". Quoi qu'il en soit, le dossier ne montre pas qu'il se serait associé à la décision dont est issu le brigandage, à l'organisation ou à l'exécution de celui-ci, dans des conditions le faisant apparaître comme un participant principal.

Il subsiste un doute, qui lui profitera.

C'est le lieu de préciser que le comportement passif de l'appelant, qui n'a pas empêché la lésion des biens juridiques protégés (patrimoine et liberté) en s'interposant et/ou en intervenant activement en faveur de la victime, ne contrevient pas à la loi car il n'avait pas d'obligation d'agir à raison de sa situation juridique (position de garant) (art. 11 al. 1 et 2 CP).

A______ sera acquitté de brigandage. Le jugement sera réformé sur ce point.

3.1.1. Selon l'art. 146 CP, dans sa teneur jusqu'au 30 juin 2023, celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l’aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire (al. 1). Si l’auteur fait métier de l’escroquerie, la peine sera une peine privative de liberté de dix ans au plus ou une peine pécuniaire de 90 jours-amende au moins (al. 2).

3.1.2. Si l’acte ne vise qu’un élément patrimonial de faible valeur ou un dommage de moindre importance, l’auteur sera, sur plainte, puni d’une amende (art. 172ter al. 1 CP).

Un élément patrimonial est de faible valeur au sens de cette disposition s'il ne dépasse pas CHF 300.- (ATF 142 IV 129 consid. 3.1).

3.1.3. L'art. 172ter al. 1 CP n’est pas applicable au vol qualifié, au brigandage ainsi qu’à l’extorsion et au chantage (art. 172ter al. 2 CP).

D'autres exceptions découlent de l'interprétation de la loi. Est ainsi exclue du champ d'application de l'art. 172ter al. 1 CP la commission par métier de l'escroquerie (art. 146 al. 2 CP), au même titre que toutes les formes aggravées des infractions du Titre 2 lorsqu'elles reposent sur la notion de métier. En effet, le métier suppose que l'auteur cherche à obtenir des revenus relativement réguliers qui contribuent significativement au financement de ses besoins courants, ce qui n'est pas compatible avec un préjudice global de moindre importance (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 5 ad art. 172ter ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_463/2023 du 14 février 2024 consid. 3.3).

3.1.4. À teneur de l'art. 53 CP, lorsque l’auteur a réparé le dommage ou accompli tous les efforts que l’on pouvait raisonnablement attendre de lui pour compenser le tort qu’il a causé, l’autorité compétente renonce à le poursuivre, à le renvoyer devant le juge ou à lui infliger une peine a. s’il encourt une peine privative de liberté d’un an au plus avec sursis, une peine pécuniaire avec sursis ou une amende ; b. si l’intérêt public et l’intérêt du lésé à poursuivre l’auteur pénalement sont peu importants, et c. si l’auteur a admis les faits.

La renonciation à toute peine suppose donc, en premier lieu, que les conditions du sursis soient réalisées. En deuxième lieu, l'auteur doit avoir réparé le dommage ou accompli tous les efforts que l'on pouvait raisonnablement attendre de lui pour compenser le tort qu'il a causé. À cet égard, il doit démontrer par la réparation du dommage qu'il assume ses responsabilités et reconnaît notamment le caractère illicite ou du moins incorrect de son acte (ATF 136 IV 41 consid. 1.2.1). Par ailleurs, la réparation du dommage ne peut conduire à une exemption de peine que si l'intérêt public et celui du lésé à la poursuite pénale sont de peu d'importance. Lorsque l'infraction lèse des intérêts privés et plus particulièrement un lésé, qui a accepté la réparation de l'auteur, l'intérêt à la poursuite pénale fait alors la plupart du temps défaut. En cas d'infraction contre des intérêts publics, il faut examiner si la réparation suffit ou si l'équité et le besoin de prévention exigent d'autres réactions du droit pénal (ATF 135 IV 12 consid. 3.4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1350/2023 du 9 septembre 2023 consid. 1.1).

3.2. En l'espèce, les faits sont admis, tout comme leur qualification juridique, non-contestée à teneur de la déclaration d'appel, qui fixe de manière définitive l'objet de celui-ci (art. 399 al. 4 let. a CPP). En tant qu'ils sont constitutifs d'une infraction qualifiée (escroquerie par métier), ils sont poursuivis d'office – l'art. 172ter al. 1 CP ne trouve pas application. Les retraits (chiffres 1.2.1 et 1.2.2) et absences (chiffres 1.2.5 et 1.2.6) de plaintes sont donc sans incidence et ne commandent pas le classement plaidé par la défense.

Reste à déterminer si l'appelant peut prétendre à une exemption de peine.

Il a admis les faits, leur caractère illicite, et approché par écrit les plaignants dont il disposait des coordonnées pour leur proposer un dédommagement. Il a remboursé les lésées qui se sont manifestées. Il a donc entrepris les démarches que l'on pouvait raisonnablement attendre de lui pour réparer le tort causé. Sous cet angle, l'intérêt des lésés à le poursuivre apparait donc, désormais, peu important. En outre, le sursis lui est acquis (art. 391 al. 2 CPP).

Cependant, le prononcé d'une sanction dans le cadre d'une escroquerie par métier se justifie dans une optique de prévention générale. L'intérêt public à poursuivre l'auteur d'un crime qualifié n'est pas négligeable et exclut, en l'espèce, l'application de l'art. 53 CP. Il s'en suit que les conditions cumulatives de cette disposition, plaidée par la défense, ne sont pas réalisées.

Il sera néanmoins tenu compte des éléments favorables qui précédent dans le cadre de la fixation de la peine.

4.1.1. Le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

4.1.2. Les art. 5 CPP et 29 al. 1 Cst. garantissent à toute personne le droit à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable. Ces dispositions consacrent le principe de la célérité et prohibent le retard injustifié à statuer. L'autorité viole cette garantie lorsqu'elle ne rend pas une décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans le délai que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 143 IV 373 consid. 1.3.1). Comme on ne peut pas exiger de l'autorité pénale qu'elle s'occupe constamment d'une seule et unique affaire, il est inévitable qu'une procédure comporte quelques temps morts. Lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut ; des périodes d'activités intenses peuvent donc compenser le fait que le dossier a été laissé momentanément de côté en raison d'autres affaires. Le principe de la célérité peut être violé, même si les autorités pénales n'ont commis aucune faute ; elles ne sauraient exciper des insuffisances de l'organisation judiciaire (ATF 130 IV 54 consid. 3.3.3).  

Apparaissent comme des carences choquantes une inactivité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction ou encore un délai de dix ou onze mois pour que le dossier soit transmis à l'autorité de recours (ATF 130 IV 54 consid. 3.3.3 ; arrêts du tribunal fédéral 6B_434/2021 du 7 avril 2022 consid. 1.2 ; 6B_845/2020 du 5 novembre 2020 consid. 2.1). La violation du principe de la célérité peut avoir pour conséquence la diminution de la peine, parfois l'exemption de toute peine ou encore une ordonnance de classement en tant qu'ultima ratio dans les cas les plus extrêmes (ATF 143 IV 373 consid. 1.4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1345/2021 du 5 octobre 2022 consid. 2.1).

4.2.1. L'appelant déplore "près de deux ans de temps mort" avant son renvoi en jugement, ce qui contreviendrait au principe de la célérité.

Le grief tombe à faux.

Après avoir mené l'instruction consciencieusement, le MP a ordonné sa suspension le 9 juin 2022, dans l'attente de l'issue de la procédure diligentée par le Tribunal des mineurs (TMin) à l'encontre de V______. Le TMin a rendu son jugement le 26 septembre 2023 et le MP a avisé les parties de la reprise de l'instruction le 20 juin 2024, avant de dresser l'acte d'accusation le 10 septembre 2024.

C'est à bon droit que le MP a rendu une ordonnance de suspension le 9 juin 2022, laquelle indiquait les voies de droit, dont la défense n'a pas usé. Tout au plus un temps mort de neuf mois (26 septembre 2023 > 20 juin 2024) doit-il donc être déploré, ce qui ne contrevient pas (encore) au principe de la célérité. Prendre trois mois supplémentaires (20 juin 2024 > 10 septembre 2024) pour engager l'accusation devant le Tribunal de police (art. 324 CPP) ne souffre pas la critique pour le surplus.

4.2.2. La faute du prévenu est de gravité moyenne. Il s'en est pris au patrimoine d'autrui. Vingt lésés sont à déplorer. Il a agi avec une circonstance aggravante : le métier. Le mobile relève de l'appât du gain ("business"). Sa situation personnelle n'explique pas ses agissements, si l'on excepte peut-être son (très) jeune âge au moment des faits. Sa collaboration a été bonne. Bien que l'enquête de police n'ait identifié que sept dupes, il s'est auto-incriminé pour le surplus. Il a souhaité réparer le dommage causé et entrepris des démarches à cette fin, lesquelles ont (en partie) porté. Il fait amende honorable, exprime des regrets. Il n'a pas d'antécédent judiciaire.

Au vu de l'ensemble des circonstances, une peine pécuniaire suffit à sanctionner adéquatement les agissements du prévenu, dont les unités seront limitées au plancher légal (90 jours-amende). Cette peine, de base, sera aggravée dans une juste proportion (art. 49 al. 1 CP) de 10 unités supplémentaires (peine hypothétique : 15 jours-amende) pour sanctionner l'apposition illicite, sur son scooter, d'une plaque d'immatriculation appartenant à un tiers ; ce qui conduit au prononcé d'une peine pécuniaire de 100 jours-amende (art. 34 al. 1 CP). Le montant du jour-amende sera fixé à CHF 30.- – il est en règle générale de CHF 30.- au moins (art. 34 al. 2 CP).

Le jugement sera réformé sur ce point.

Le sursis et le délai d'épreuve ne sont pas discutés (art. 42 al. 1 et 44 al. 1 CP).

5. 5.1. Aux termes de l'art. 122 al. 1 CPP, en qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale.

Lorsque l'autorité pénale abandonne un pan de l'accusation, le lésé ne peut pas prétendre à l'octroi de conclusions fondées sur les faits laissés de côté (arrêt du Tribunal fédéral 6B_987/2023 du 21 février 2024 consid. 1.2.1).

5.2. Vu l'acquittement de A______ de brigandage, C______ sera débouté des fins de son action civile. Étant précisé que ladite action avait abouti envers V______ par-devant le TMin.

Le jugement sera réformé sur ce point.

6.             L'appelant, qui obtient gain de cause sur l'essentiel, tout en succombant en partie, supportera ¼ des frais de la procédure d'appel envers l'État, qui comprennent un émolument de décision de CHF 2'500.- (art. 428 al. 1 CPP et 14 al. 1 let. e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP]), le solde étant laissé à la charge de l'État.

Vu l'issue de la cause, il convient de se prononcer également sur les frais fixés par l'autorité inférieure (art. 428 al. 3 CPP), lesquels seront mis à la charge du prévenu à hauteur de 1/3, le solde étant laissé à la charge de l'État (art. 423 et 426 al. 1 CPP).

7.             7.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office (ou le conseil juridique gratuit (art. 138 al. 1 CPP)) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique [RAJ] s'applique.

Cette disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire de CHF 200.- pour les chefs d'étude, débours de l'étude inclus. En cas d'assujettissement, l'équivalent de la TVA est versé en sus (al. 1). Seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (al. 2).

L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% lorsque l'état de frais porte sur moins de 30 heures, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2).

7.2.1. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me B______, défenseur d'office de A______, satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale. La durée effective des débats d'appel, soit une heure et 25 minutes sera indemnisée en sus, de même qu'une vacation à CHF 100.-.

Sa rémunération sera partant arrêtée à CHF 1'254.05, correspondant à quatre heures et 25 minutes d'activité de chef d'étude (CHF 883.35), plus la majoration forfaitaire de 20% (CHF 176.70), CHF 100.- de vacation et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1% en CHF 94.-.

7.2.2. L'état de frais de Me D______, conseil juridique gratuit de C______, doit être amputé des 15 minutes consacrées à la lecture de la déclaration d'appel, activité couverte par le forfait. La durée effective des débats d'appel, soit une heure et 25 minutes sera indemnisée en sus, de même qu'une vacation à CHF 100.-.

Sa rémunération sera partant arrêtée à CHF 2'702.50, correspondant à dix heures d'activité de cheffe d'étude (CHF 2'000.-), plus la majoration forfaitaire de 20% (CHF 400.-), CHF 100.- de vacation et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1% en CHF 202.50.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/128/2025 rendu le 3 février 2025 par le Tribunal de police dans la procédure P/11640/2021.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ de brigandage (art. 140 ch. 1 al. 1 aCP).

Classe la procédure des chefs de conduite d'un véhicule en état défectueux (art. 93 al. 2 let. a LCR) et de violation des dispositions régissant les courses d'apprentissage (art. 96 OCR cum 27 OCR) (art. 329 al. 4 et 5 CPP).

Déclare A______ coupable d'escroquerie qualifiée (art. 146 al. 1 et 2 aCP) et d'usage abusif de plaques (art. 97 al. 1 let. a LCR).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 100 jours-amende, sous déduction de deux jours-amende correspondant à deux jours de détention avant jugement (art. 34 al. 1 et 51 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.- (art. 34 al. 2 CP).

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 al. 1 et 44 al. 1 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffres 1 à 4 de l'inventaire n° 31126320210605, sous chiffre 1 de l'inventaire n° 31225020210618, sous chiffre 1 de l'inventaire n° 31259820210624 et sous chiffre 1 de l'inventaire n° 31305920210630 (art. 69 CP).

Déboute C______ de ses conclusions civiles.

Condamne A______ à 1/3 des frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 3'015.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- et un émolument complémentaire de CHF 600.- (art. 426 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______, a été fixée à CHF 5'607.95 pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 135 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que l'indemnité de procédure due à Me D______, conseil juridique gratuit de C______, a été fixée à CHF 2'454.95 pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 138 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 2'805.-.

Met ¼ de ces frais, soit CHF 701.25, à la charge de A______ et laisse le solde de à la charge de l'État.

Arrête à CHF 1'254.05, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Arrête à CHF 2'702.50, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me D______, conseil juridique gratuit de C______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

La greffière :

Linda TAGHARIST

 

Le président :

Fabrice ROCH

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète
(art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

3'015.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

160.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

70.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

2'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'805.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

5'820.00