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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/18621/2023

AARP/246/2025 du 01.07.2025 sur JTDP/1314/2024 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : FIXATION DE LA PEINE
Normes : LEI.115.al1.letb; LEI.119; CP.286; CP.47; CP.41; CP.49
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/18621/2023 AARP/246/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 1er juillet 2025

 

Entre

A______, actuellement détenu à la Prison de Champ-Dollon, comparant par Me B______, avocate,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1314/2024 rendu le 7 novembre 2024 par le Tribunal de police,

et

 

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/1314/2024 du 7 novembre 2024, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]), de non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer (art. 119 al. 1 LEI) et d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 du Code pénal [CP]), et l'a condamné à une peine privative de liberté de 30 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, ainsi qu'à une peine pécuniaire de dix jours-amende à CHF 10.- l'unité. Ces peines ont été déclarées complémentaires à celles prononcées le 26 septembre 2023 par le TP. Ce dernier a renoncé à révoquer le sursis octroyé le 10 janvier 2022 par la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR), a ordonné la restitution à A______ du téléphone portable figurant à l'inventaire et mis les frais de la procédure en CHF 1'586.-, émolument de jugement complémentaire compris, à sa charge.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à ce qu'une peine pécuniaire soit prononcée en lieu et place d'une peine privative de liberté pour les infractions à la LEI. Il sollicite que cette peine, complémentaire, soit de quotité nulle sinon, subsidiairement, clémente, avec un jour-amende fixé à CHF 10.-, et assortie du sursis.

b. Selon l'ordonnance pénale du 3 novembre 2023, il était reproché à A______ d'avoir, à Genève, le 26 août 2023 :

-     pénétré sur le territoire suisse, alors qu'il était démuni des autorisations nécessaires ainsi que d'un document d'identité valable et reconnu ;

-     omis volontairement de se conformer à une mesure d'interdiction de pénétrer dans le canton prise à son encontre et valable à partir du 31 mars 2023 pour une durée de 24 mois, décision qui lui avait été notifiée à la date précitée ;

-     pris la fuite en courant à la vue d'un policier qui souhaitait procéder au contrôle de son identité, avant d'être interpellé à l'issue d'une course poursuite, rendant de la sorte plus difficile l'accomplissement de cet acte par la police.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______ est un ressortissant guinéen né le ______ 2000 à C______, en Guinée.

Il a fait l'objet d'une interdiction de pénétrer dans le canton de Genève durant deux ans, décision qui lui a été notifiée le 31 mars 2023.

b. Selon le rapport d'arrestation du 27 août 2023, A______ a été aperçu par la police la veille, vers 22h00, sur la plaine de Plainpalais, lieu connu pour le trafic de stupéfiants. Lorsque les policiers avaient voulu procéder à son contrôle, il avait pris la fuite en courant à travers la plaine et plusieurs rues avant d'être rattrapé par un agent. Il n'avait pas de papier d'identité sur lui.

Auditionné dans la foulée, il a déclaré qu'en voyant la police arriver en courant, il avait pris la fuite "instinctivement". Il n'avait pas entendu les sommations. Il attendait des amis pour aller en boîte de nuit, au "D______", et n'était pas sur place pour vendre de la drogue, même s'il déclarait en consommer occasionnellement. Il avait oublié qu'il faisait l'objet d'une interdiction de pénétrer sur le territoire genevois. Son passeport se trouvait à son domicile en France, à E______, d'où il était venu en voiture. Il n'avait jamais élu domicile en Suisse, mais reconnaissait être entré dans le pays sans les autorisations nécessaires.

Il a été libéré le lendemain de son interpellation. Par ordonnance pénale du même jour, il a été déclaré coupable des infractions susvisées et condamné à une peine privative de liberté de 60 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, ainsi qu'à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 30.-. Il a formé opposition contre ladite ordonnance.

c. Entendu devant le Ministère public (MP), A______ a reconnu les faits reprochés, de même que leur qualification juridique, tout en contestant le prononcé d'une peine privative de liberté, complémentaire à celle infligée précédemment à son encontre par le TP (cf. jugement JTDP/1241/2023 du 26 septembre 2023).

Par nouvelle ordonnance pénale du 3 novembre 2023, il a été reconnu coupable des infractions en cause et condamné à une peine privative de liberté de 30 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, à une peine pécuniaire de dix jours-amende à CHF 10.- le jour, ces peines étant complémentaires à celles prononcées le 26 septembre 2023 par le TP, sans révocation d'un précédent sursis accordé le 10 janvier 2022 par la CPAR (cf. arrêt AARP/3/2022 du 10 janvier 2022). Il a, à nouveau, formé opposition contre cette ordonnance.

d. Devant le premier juge, il a déclaré ne plus vouloir revenir à Genève dès lors qu'il savait faire l'objet d'une interdiction d'y pénétrer. Par la voix de son conseil, il a pris les mêmes conclusions que celles qu'il forme en appel.

C. a. La CPAR a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite.

b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions.

La peine privative de liberté était disproportionnée. Les infractions reprochées étaient de peu de gravité, mineures et ne portaient pas atteinte à la vie ou à la sécurité publique, contrairement aux infractions précédentes, notamment celles de vente de stupéfiants ayant fait l'objet du jugement du 26 septembre 2023. Dans la présente affaire, une peine privative de liberté de 30 jours apparaissait trop lourde pour des infractions à la LEI, étant relevé qu'il avait déjà été condamné à 90 jours de détention qu'il avait purgés. Si les infractions retenues dans le jugement attaqué et celles jugées le 26 septembre 2023 l'avaient été conjointement, les infractions à la LEI de moindre gravité de la présente procédure n'auraient pu aboutir qu'à une peine complémentaire de quotité nulle, en raison de leur faible gravité.

Le prononcé d'une peine disproportionnée compromettait par ailleurs sa réinsertion, puisqu'il avait rompu tout lien avec la petite et moyenne délinquance. Il avait tiré la leçon du fait d'avoir exécuté sa peine privative de liberté de 90 jours et aspirait à présent à une vie plus stable. La peine déjà subie devait être prise en compte. Il n'avait d'ailleurs pas récidivé depuis sa dernière condamnation.

Sa prise de conscience était entamée, de sorte qu'il était impossible de conclure à un pronostic défavorable.

Il percevait un salaire mensuel d'environ EUR 500.- en travaillant dans la restauration "entre E______ et F______ [France]" et bénéficiait d'aides financières ponctuelles de la part d'associations. Sa situation économique, bien qu'elle soit précaire, lui permettait néanmoins d'exécuter une peine pécuniaire.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel, considérant que la peine prononcée était proportionnée à la faute et à la situation personnelle de A______. Ce dernier n'avait pas su tirer d'enseignement de ses précédentes arrestations des 17 août 2020 et 10 janvier 2022, puisqu'il persistait à pénétrer sur le territoire suisse sans les autorisations nécessaires et à s'opposer aux actes de la police. Le prononcé d'une peine privative de liberté était nécessaire pour des motifs de prévention spéciale.

En outre, sa situation financière difficile laissait pressentir qu'il ne serait certainement pas en mesure de s'acquitter d'une peine pécuniaire, étant relevé que ses revenus et l'aide allégués n'étaient pas établis. Ainsi, seule une peine privative de liberté ferme était envisageable.

Enfin, si les faits avaient été jugés en même temps, tel que le soutenait l'appelant, une peine privative de liberté de 120 jours ainsi qu'une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 10.- auraient certainement été prononcées par le TP. Il importait peu que le prévenu ait désormais purgé la peine privative de liberté de 90 jours infligée le 26 septembre 2023.

d. Le TP se réfère intégralement au jugement rendu.

D. A______ est célibataire et sans enfant ni famille. Il indique vivre à E______, en France. Il travaille dans ce pays dans le bâtiment et la restauration, sans être déclaré, et dit percevoir à ce titre un revenu mensuel de EUR 500.-, parfois un peu plus. Il bénéficie aussi de l'aide d'associations. Il n'a ni dette ni fortune.

À teneur de l'extrait de son casier judiciaire, il a été condamné :

-        le 17 août 2020, par le TP à une peine pécuniaire de dix jours-amende à CHF 10.- , sous déduction d'un jour de détention correspondant à un jour-amende, avec sursis pendant deux ans, pour entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI) ;

-        le 10 janvier 2022, par la CPAR à une peine privative de liberté de 150 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, pour séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et délit contre la loi sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 let. c LStup) ;

-        le 26 septembre 2023, par le TP à une peine privative de liberté de 90 jours et à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à CHF 10.-, pour délit contre la loi sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 let. c et d LStup) commis à deux reprises, empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 CP) et entrée et séjour illégaux (art. 115 al. 1 let. a et b LEI) ;

-        le 5 juin 2025, par le TP à une peine privative de liberté d'ensemble, après révocation du sursis accordé le 10 janvier 2022, de neuf mois, sous déduction de 86 jours de détention avant jugement, pour infractions à la LStup (art. 19 al. 1 let. d LStup), séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI) ; cette peine a été déclarée partiellement complémentaire à celle prononcée le 26 septembre 2023 par le TP (ndr : ce jugement, même s'il n'est pas encore inscrit au casier judiciaire, est en force depuis le 26 juin 2025).

E. MB______, nommée en qualité de défenseure d'office de A______ pour la procédure d'appel, dépose un état de frais, facturant, sous des libellés divers, six heures d'activité (une heure pour la cheffe d'étude et cinq heures pour l'avocate-stagiaire), dont quatre heures et 30 minutes pour la rédaction du mémoire d'appel par cette dernière.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. 2.1.1. L'infraction de non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI) est passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire, celle d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI) d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire. L'empêchement d'accomplir un acte officiel est puni par une peine pécuniaire de 30 jours-amende au plus (art. 286 al. 1 CP).

2.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

Bien que la récidive ne constitue plus un motif d'aggravation obligatoire de la peine (art. 67 aCP), les antécédents continuent de jouer un rôle très important dans la fixation de celle-ci (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1202/2014 du 14 avril 2016 consid. 3.5). Le fait qu'une infraction a été commise intentionnellement ou par négligence influe sur la culpabilité. De même, une série d'infractions semblables pèse plus lourd que des actes de nature différente. Les condamnations passées perdent de leur importance avec l'écoulement du temps (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI, Petit commentaire du Code pénal, 2ème éd., 2017, n. 4 ad art. 47).

2.1.3. Selon l'art. 41 al. 1 CP, le juge peut prononcer une peine privative de liberté à la place d'une peine pécuniaire si une peine privative de liberté paraît justifiée pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (let. a) ou s'il y a lieu de craindre qu'une peine pécuniaire ne puisse pas être exécutée (let. b). Il doit motiver le choix de la peine privative de liberté de manière circonstanciée (al. 2).

La peine pécuniaire constitue la sanction principale dans le domaine de la petite et moyenne criminalité, les peines privatives de liberté ne devant être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Lorsque tant une peine pécuniaire qu'une peine privative de liberté entrent en considération et que toutes deux apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute commise, il y a en règle générale lieu, conformément au principe de la proportionnalité, d'accorder la priorité à la première, qui porte atteinte au patrimoine de l'intéressé et constitue donc une sanction plus clémente qu'une peine privative de liberté, qui l'atteint dans sa liberté personnelle. Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention. La faute de l'auteur n'est en revanche pas déterminante (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1 ; 137 II 297 consid. 2.3.4 p. 301 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_420/2017 du 15 novembre 2017 consid. 2.1), pas plus que sa situation économique ou le fait que son insolvabilité apparaisse prévisible (ATF 134 IV 97 consid. 5.2.3 p. 104).

Lorsque différents types de peines peuvent être prononcés par le juge pénal, le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de la culpabilité de l'auteur, de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 147 IV 241 consid. 3.2). Il y a lieu d'admettre qu'une peine pécuniaire ne peut être prononcée lorsque le condamné ne s'acquittera vraisemblablement pas des jours-amende, en présence d'un risque de fuite, par manque de moyens suffisants ou encore en raison d'une mesure d'éloignement prononcée par une autorité administrative (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI, op. cit., n. 3 ad art. 41).

2.1.4. D'après l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion, mais pas au-delà de la moitié en sus du maximum de la peine prévue pour cette infraction et pas au-delà du maximum légal du genre de peine.

Pour satisfaire à cette règle, le juge, dans un premier temps, fixera donc la peine pour l'infraction abstraitement la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes ou une éventuelle diminution de la responsabilité pénale. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner les autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 121 IV 101 consid. 2b ;
116 IV 300 consid. 2c/dd).

2.1.5. Selon l'art. 49 al. 2 CP, si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement.

Le juge doit ainsi fixer une peine complémentaire à la peine de base en tenant compte du principe de l'aggravation découlant de l'art. 49 al. 1 CP (ATF 145 IV 1 consid. 1.3). Concrètement, le juge se demande d'abord quelle peine d'ensemble aurait été prononcée si toutes les infractions avaient été jugées simultanément. La peine complémentaire est constituée de la différence entre cette peine d'ensemble et la peine de base, à savoir celle prononcée précédemment (ATF 141 IV 61 consid. 6.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_623/2016 du 25 avril 2017 consid. 1.1 et 1.4). Il doit s'agir de peines de même genre (ATF 142 IV 265 consid. 2.3.2 in JdT 2017 IV 129).

Bien que le deuxième tribunal doive fixer la peine globale, il ne peut pas revoir la peine de base, à savoir celle du premier jugement, même s'il estime que les premiers faits justifiaient une peine plus sévère ou moins sévère. Dans le cas contraire, il enfreindrait l'autorité de chose jugée de la première décision (ATF 142 IV 265 consid. 2.3 et 2.4 in JdT 2017 IV 129).

Si la peine de base contient l'infraction la plus grave, il faut alors l'augmenter au regard des faits nouveaux. Pour obtenir la peine complémentaire, le juge doit ainsi déduire la peine de base de la peine globale (ATF 142 IV 265 consid. 2.4.4 in JdT 2017 IV 129).

2.2.1. En l'espèce, la faute de l'appelant n'est pas négligeable. Il a délibérément choisi de s'affranchir des normes relatives à l'entrée sur le territoire suisse, alors qu'il savait faire l'objet d'une interdiction de pénétrer dans le canton de Genève depuis près de cinq mois, soit depuis le 31 mars 2023.

Comme déjà retenu par la CPAR (cf. AARP/3/2022 du 10 janvier 2022 consid. 3.2), il ne faut pas sous-estimer le préjudice pour la collectivité du séjour illégal, y compris au plan matériel, puisque cela mobilise constamment les nombreux acteurs appelés à le réprimer.

La situation personnelle, administrative et financière de l'appelant n'est, en outre, pas claire. Il déclare travailler dans la restauration, gagner un salaire mensuel de EUR 500.- et recevoir parfois le soutien financier d'associations caritatives, mais il n'a pas produit le moindre justificatif et n'est pas au bénéfice d'un contrat. Il en résulte qu'il éprouvera certainement de grandes difficultés à s'acquitter d'une peine pécuniaire. À cela s'ajoute un risque de fuite, étant souligné que le domicile de l'appelant est indéterminé, celui-ci vivant en France, "à E______", sans que l'on sache où. Son absence totale de liens avec la Suisse rend encore moins compréhensible son entêtement à pénétrer en toute illégalité dans le pays. Ces éléments justifient, comme l'a retenu à bon droit le premier juge, le prononcé d'une peine privative de liberté au titre de l'art. 41 al. 1 let. a CP pour les infractions à la LEI.

La collaboration de l'appelant est bonne puisqu'il a admis les faits. Sa prise de conscience évolue dans le bon sens, sans toutefois être achevée. Bien qu'il ait manifesté sa volonté de s'écarter de la petite et moyenne délinquance, une telle volonté ne saurait non plus justifier le prononcé d'une peine pécuniaire seule. En effet, l'appelant a des antécédents. Il persiste dans ses comportements illicites puisque ses condamnations précédentes et ses interpellations n'ont eu aucun effet dissuasif. Il a déjà fait l'objet de trois condamnations pour des infractions spécifiques. Au casier s'ajoute désormais la condamnation récente du 5 juin dernier pour des faits postérieurs à ceux présentement jugés.

Seule une peine privative de liberté paraît de nature à remplir son rôle de prévention spéciale. Compte tenu d'actes commis à répétition, en particulier pour séjour illégal, il appert que l'appelant n'envisage pas vraiment de ne plus revenir en Suisse. Le pronostic quant à son comportement futur est donc clairement défavorable et la peine sera ferme.

Si la Cour avait eu à connaître des faits de la présente cause et de ceux passibles d'une peine privative de liberté jugés le 26 septembre 2023, elle aurait fixé la peine en retenant, pour l'infraction la plus grave, soit les délits à l'art. 19 al. 1 let. c et d LStup commis à deux reprises, une peine de 60 jours, augmentée de 30 jours (peine théorique de 60 jours) pour le séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), de 30 jours à nouveau (peine théorique de 60 jours) pour le deuxième, de 15 jours (peine théorique de 30 jours) pour l'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI) et de 45 jours (peine théorique de 90 jours) pour le non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer (art. 119 al. 1 LEI), soit une peine de 180 jours, dont à déduire la peine de base de 90 jours. La peine complémentaire aurait ainsi été fixée à 90 jours. Toutefois, en raison de l'interdiction de la reformatio in pejus (art. 391 al. 2 CPP), la peine sera maintenue à la quotité de celle arrêtée par le TP, soit 30 jours de peine privative de liberté, sous déduction de la détention avant jugement.

Quant à l'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 CP), la peine pécuniaire à fixer est également complémentaire à celle du 26 septembre 2023. Si la Cour avait eu à connaître de l'ensemble des faits, elle aurait fixé la quotité maximale prévue par la loi, soit 30 jours-amende, pour les sanctionner. Il convient d'en déduire la peine de base de 20 jours-amende, en force, et de confirmer la peine pécuniaire de dix jours-amende prononcée par le TP, étant précisé que la valeur du jour-amende – non remise en cause – est acquise à l'appelant.

Partant, l'appel sera rejeté et le jugement de première instance confirmé.

3. L'appelant, qui succombe, supportera les frais de la procédure envers l'État (art. 428 CPP).

Il n'y a pas motif à revoir les frais de la procédure préliminaire et de première instance lui incombant.

4. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me B______, défenseure d'office de A______, satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale, excepté le temps consacré à la rédaction du mémoire d'appel qui sera réduit à trois heures, durée suffisante pour huit pages de discussion juridique, exposant les conclusions et enjeux de l'appel. La procédure était d'ailleurs déjà bien connue du conseil de l'appelant qui l'a assisté devant le premier juge.

Sa rémunération sera partant arrêtée à CHF 758.85, correspondant à une heure d'activité au tarif de CHF 200.-/heure et trois heures et 30 minutes d'activité au tarif de CHF 110.-/heure, plus la majoration forfaitaire à 20% (CHF 117.-) et l'équivalent de la TVA au taux de 8,1% en CHF 56.85.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1314/2024 rendu le 7 novembre 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/18621/2023.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 1'135.-, lesquels comprennent un émolument de CHF 1'000.-.

Arrête à CHF 758.85, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseure d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Déclare A______ coupable d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI), de non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI) et d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 CP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 30 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement (art. 40 et 51 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 10 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 10.-.

Dit que la peine privative de liberté et la peine pécuniaire sont complémentaires à celle prononcée le 26 septembre 2023 par le Tribunal de police de Genève (art. 49 al. 2 CP).

(…)

Ordonne la restitution à A______ du téléphone portable figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 42616420230827 du 27 août 2023 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 986.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

(…)

Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.

Condamne A______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF 600.-."

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, à la Prison de Champ-Dollon, au Service de la réinsertion et du suivi pénal, au Tribunal de police, au Secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Linda TAGHARIST

 

La présidente :

Sara GARBARSKI

e.r. Vincent FOURNIER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'586.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

60.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'135.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

2'721.00