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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/8795/2023

AARP/6/2025 du 08.01.2025 sur JTDP/549/2024 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : MENDICITÉ
Normes : LTV.57; LPG11A1; LTV; Loi fédérale sur le transport des voyageurs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/8795/2023 AARP/6/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 8 janvier 2025

 

Entre

A______, domiciliée ______, Roumanie, comparant par Me Dina BAZARBACHI, avocate, BAZARBACHI LALHOU & ARCHINARD, rue Micheli-du-Crest 4, 1205 Genève,

appelante,

 

contre le jugement JTDP/549/2024 rendu le 13 mai 2024 par le Tribunal de police,

et

SERVICE DES CONTRAVENTIONS, chemin de la Gravière 5, case postale 104,
1211 Genève 8,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/549/2024 du 13 mai 2024, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnue coupable d'infraction à l'art. 57 al. 3 de la loi fédérale sur le transport de voyageurs (LTV) et d'infractions à l'art. 11A al. 1 let. c de la loi pénale genevoise (LPG), et l'a condamnée à une amende de CHF 330.-, assortie d'une peine privative de liberté de substitution de trois jours.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant au classement des faits prescrits (faits du 24 novembre "2020" [sic] et faits à l'origine des ordonnances pénales du 7 février "2020" [sic]), ainsi qu'à son acquittement concernant les faits de mendicité.

b. Selon les ordonnances pénales du 7 février 2023, il est reproché à A______ d'avoir mendié aux abords immédiats d'un magasin à Genève :

-        le 1er octobre 2022, à la rue 1______ n° ______ (ordonnance pénale n° 2______) ;

-        le 8 octobre 2022, à la rue 1______ n° ______ (ordonnance pénale n° 3______) ;

-        le 15 octobre 2022, à la rue 4______ n° ______ (ordonnance pénale n° 5______) ;

-        le 17 décembre 2022, à la rue 1______ n° ______ (ordonnance pénale n° 6______).

Il lui est également reproché d'avoir, à Genève, le 24 novembre 2022, à 7h34, voyagé sans titre de transport valable ou sans y être autrement autorisé dans un véhicule des Transports Publics Genevois (ci-après : TPG), soit le tram 15 en direction des Palettes (ordonnance pénale n° 7______ du 7 février 2023).

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.a. À teneur du rapport de contravention de la police du 14 octobre 2022, le 1er octobre précédent, à 16h15, A______ s'adonnait à la mendicité à la rue 1______ n° ______, [au quartier de] B______, à moins de 10 mètres d'un commerce, tenant un gobelet à la main. Elle a été priée de ne plus s'adonner à cette pratique interdite et déclarée en contravention sur-le-champ.

a.b. Par ordonnance pénale n° 2______ du 7 février 2023, elle a été condamnée pour mendicité à une amende de CHF 100.-, ainsi qu'à un émolument de CHF 60.-.

b.a. Selon le rapport de contravention du 15 octobre 2022, le 8 octobre précédent, à 11h45, A______ s'adonnait à la mendicité à la rue 1______ n° ______, à B______, aux abords immédiats de l'entrée d'un centre commercial. Elle a tenté de justifier son acte en montrant aux policiers une carte de musicien de rue, ainsi que son harmonica. Elle n'a cependant pas été en mesure de jouer de cet instrument. Elle a été déclarée en contravention sur-le-champ.

b.b. Par ordonnance pénale n° 3______ du 7 février 2023, elle a été condamnée pour mendicité à une amende de CHF 100.-, ainsi qu'à un émolument de CHF 60.-.

c.a. Selon le rapport de contravention du 27 octobre 2022, le 15 octobre 2022, à 11h10, A______ s'adonnait à la mendicité à la rue 4______ n° ______, à B______, devant un magasin d'alimentation. Elle a été déclarée en contravention sur-le-champ.

c.b. Par ordonnance pénale n° 5______ du 7 février 2023, elle a été condamnée pour mendicité à une amende de CHF 100.-, ainsi qu'à un émolument de CHF 60.-.

d.a. Aux termes du rapport de contravention du 17 décembre 2022, le jour même, à 11h09, A______ s'adonnait à la mendicité au même emplacement que le 8 octobre précédent. Elle a été déclarée en contravention sur-le-champ.

d.b. Par ordonnance pénale n° 6______ du 7 février 2023, elle a été condamnée pour mendicité à une amende de CHF 100.-, ainsi qu'à un émolument de CHF 60.-.

e.a. Selon le constat n° 8______ établi par un agent des TPG, le 24 novembre 2022, à 7h34, A______ empruntait le tram 15 en direction de Palettes, sans titre de transport valable. Une surtaxe de CHF 140.- lui a été signifiée sur-le-champ, portée à CHF 210.- par courrier du 6 décembre 2022 en raison de ses nombreuses récidives (sept constats en moins de deux ans). Les TPG ont déposé plainte le 23 décembre 2022 à son encontre.

e.b. Par ordonnance pénale n° 7______ du 7 février 2023, elle a été condamnée pour infraction à l'art. 57 LTV à une amende de CHF 160.-, ainsi qu'à un émolument de CHF 80.-.

f. En première instance, son conseil ne s'est pas opposé à un verdict de culpabilité du chef de l'art. 57 al. 3 LTV, mais a sollicité le prononcé d'une peine clémente à cet égard.

g. Le jugement entrepris indique à trois reprises la date du 24 novembre "2020" s'agissant des faits à l'origine de l'ordonnance pénale n° 7______ (consid. A.a.b, B.e.a et 2.2) et à cinq reprises la date du 7 février "2020" comme date des ordonnances pénales rendues à l'encontre de l'appelante (consid. B.a.b, B.b.b, B.c.b, B.d.b, B.e.c).


 

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions et sollicite que les jugements du TP des 18 août et 23 décembre 2020, versés à la procédure par le premier juge, soient écartés et, subsidiairement, qu'elle soit exemptée de toute peine. Invitée à déposer ses éventuelles prétentions en indemnisation au sens des art. 429 et 436 CPP, elle n'a pris aucune conclusion en ce sens.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel.

d. Le SDC conclut à la confirmation du jugement entrepris.

e. Les arguments plaidés seront discutés, dans la mesure de leur pertinence, au fil des considérants qui suivent.

D. a. A______ est née en 1968 en Roumanie, son pays d'origine. Elle est issue de la communauté rom et veuve. Aux termes du mémoire d'appel, elle serait analphabète, sans formation, sans emploi et sans revenu. Elle n'a aucune inscription à son casier judiciaire suisse.

b. Le TP, à l'appui des deux jugements susvisés des 18 août et 23 décembre 2020, a reconnu A______ coupable de mendicité au sens de l'art. 11A al. 1 aLPG, selon son ancienne teneur.

EN DROIT :

1. 1.1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

1.2. En matière contraventionnelle, l'appel ne peut être formé que pour le grief selon lequel le jugement est juridiquement erroné ou l'état de fait établi de manière manifestement inexacte ou en violation du droit. Aucune nouvelle allégation ou preuve ne peut être produite (art. 398 al. 4 CPP).

Le pouvoir d'examen de l'autorité d'appel est ainsi limité dans l'appréciation des faits à ce qui a été établi de manière arbitraire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_362/2012 du 29 octobre 2012 consid. 5.2). Il s'agit là d'une exception au principe du plein pouvoir de cognition de l'autorité de deuxième instance qui conduit à qualifier d'appel "restreint" cette voie de droit (arrêt du Tribunal fédéral 1B_768/2012 du 15 janvier 2013 consid. 2.1).

Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable ; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 145 IV 154 consid. 1 ; 143 IV 241 consid. 2.3.1 ; sur la notion d'arbitraire en matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il est renvoyé à l'ATF 143 IV 500 consid. 1.1).

1.3. Conformément à l'art. 129 al. 4 de la Loi sur l'organisation judiciaire (LOJ), lorsque des contraventions font seules l'objet du prononcé attaqué et que l'appel ne vise pas une déclaration de culpabilité pour un crime ou un délit, le magistrat exerçant la direction de la procédure de la juridiction d'appel est compétent pour statuer.

2. 2.1.1. Les dates indiquées dans le jugement entrepris (cf. supra B.g.) résultent manifestement d'une erreur de plume. Ce sont celles du 24 novembre 2022 (infraction à la LTV) et du 7 février 2023 (dates des ordonnances pénales) qui auraient dû figurer en lieu et place.

2.1.2. Le premier juge, en versant les deux décisions du TP de 2020 à la procédure (cf. supra consid. D.b), a fait une application conforme de l'art. 194 al. 1 CPP, celles-ci étant nécessaire à l'établissement des faits, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'écarter ces pièces (cf. infra consid. 2.9 pour leur appréciation).

2.2.1. À la suite de la condamnation de la Suisse par la CourEDH en lien avec l'interdiction générale de la mendicité prévue par l'art. 11A aLPG (arrêt n° 14065/15 du 19 avril 2021 Lacatus c. Suisse), cette disposition a été modifiée le 12 février 2022 et dresse désormais une liste de situations dans lesquelles la mendicité est punissable.

L'art. 11A al. 1 let. c ch. 2 LPG punit ainsi quiconque aura mendié aux abords immédiats des entrées et sorties de tout établissement à vocation commerciale, notamment les magasins, hôtels, cafés, restaurants, bars et discothèques.

Cette disposition vise la mendicité passive, soit l'acte par lequel le mendiant s'installe sur le domaine public et tend la main ou le gobelet sans interpeller les passants (par opposition à la mendicité active où le mendiant s'approche des passants et les sollicite avec insistance, dont la répression est prévue à l'art. 11A al. 1 let. b LPG ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_443/2017 consid. 4.3 ; ACST/12/2022 du 28 juillet 2022 consid. 8b).

2.2.2. L'art. 11A LPG a fait l'objet d'un contrôle abstrait de constitutionnalité par la Cour constitutionnelle de la Cour de justice (CSTCJ), qui a conclu que la disposition incriminée était conforme au droit supérieur (ACST/12/2022 du 28 juillet 2022). Il n'appartient dès lors pas à la CPAR de procéder à un second contrôle abstrait de celle-ci.

2.3. L'appelante, qui ne conteste pas la matérialité des faits reprochés, tels que retenus par le premier juge, allègue toutefois que leur punissabilité viole ses droits fondamentaux, soit le principe de la légalité (exigence de précision), sa liberté personnelle, sa liberté d'expression et procéderait d'un traitement discriminatoire en raison de sa situation sociale.

Dans cette mesure, les griefs de l'appelante seront examinés uniquement au regard de l'état de fait qui lui est concrètement reproché.

2.3.1. Le fait de mendier doit être considéré comme une liberté élémentaire, faisant partie de la liberté personnelle garantie par l'art. 10 al. 2 de la Constitution fédérale (Cst.) ou du droit au respect de la vie privée au sens de l'art. 8 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) (ATF
149 I 248 consid. 4.3 ; CourEDH Lacatus c. Suisse du 19 janvier 2021 §59).

À l'instar de tout autre droit fondamental, la liberté personnelle n'est pas absolue et sa restriction est admissible si elle repose sur une base légale, si elle est justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui et si elle respecte le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 1 à 3 Cst.).

Ces conditions sont similaires à celles figurant à l'art. 8 § 2 CEDH. Dite disposition admet l'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit pour autant qu'elle soit prévue par la loi et constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

2.3.2. L'appelante ne nie pas que l'interdiction de mendier qu'elle conteste figure dans une loi au sens formel. Elle estime toutefois que le libellé de l'interdiction contrevient au principe de la légalité.

Ce principe est consacré par l'art. 1 du Code pénal (CP), qui prévoit qu'une peine ou une mesure ne peuvent être prononcées qu'en raison d'un acte expressément réprimé par la loi. La norme pénale doit être formulée de manière suffisamment précise pour que les citoyens puissent s'y conformer et identifier les conséquences d'un comportement donné avec un degré de certitude correspondant aux circonstances (ATF 144 I 242 consid. 3.1.2 ; 141 IV 179 consid. 1.3.3 ; 138 IV 13 consid. 4.1).

L'exigence de précision de la base légale ne doit cependant pas être comprise d'une manière absolue et dépend entre autres de la complexité de la matière réglementée et de la peine encourue. Le législateur ne peut pas renoncer à utiliser des définitions générales ou plus ou moins vagues, dont l'interprétation et l'application sont laissées à la pratique. Le degré de précision requis ne peut pas être déterminé de manière abstraite. Il dépend, entre autres, de la multiplicité des situations à régler, de la complexité ou de la prévisibilité de la décision à prendre dans le cas particulier, du destinataire de la norme, ou de la gravité de l'atteinte aux droits constitutionnels. Il dépend aussi de l'appréciation que l'on peut faire, objectivement, lorsque se présente un cas concret d'application (ATF 149 I 248 consid. 4.6.1 ; 147 IV 274 consid. 2.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_315/2022 du 29 septembre 2022 consid. 1.1).

Ce principe est violé lorsqu'une personne est poursuivie pénalement en raison d'un comportement qui n'est pas incriminé par une loi valable, ou lorsque l'application du droit pénal à un acte déterminé procède d'une interprétation de la norme pénale excédant ce qui est admissible au regard des principes généraux du droit pénal (ATF 144 I 242 consid. 3.1.2).

2.3.3. Alors qu'à Bâle-Ville, la loi réglementant la mendicité, adoptée en juin 2021, fixe à cinq mètres des lieux listés le périmètre dans lequel il est interdit de mendier, le législateur genevois a renoncé à une distance métrique au profit des termes "aux abords immédiats de", notion susceptible d'évoluer selon le type d'installations visé (cf. rapport du 16 novembre 2021 de la Commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le projet de loi PL 12862-A, pp. 24 et 25).

Amenée à trancher la question de la constitutionnalité de la norme, la CSTCJ a écarté le grief du manque de clarté en considérant que l'expression "abords immédiats", certes générale et abstraite, était néanmoins compréhensible par elle-même et que sa concrétisation relèverait de la pratique, qui préciserait, au gré des circonstances particulières, la volonté du législateur (ACTS/12/2022 du 28 juillet 2022 consid. 8b).

La CPAR a, elle aussi, jugé que cette expression se comprenait par elle-même, l'utilisation de l'adjectif "immédiat" – défini par les dictionnaires Robert et Larousse comme "qui précède ou suit sans intermédiaire, notamment dans une relation spatiale" – suffisant à réaliser l'exigence de précision. Les termes "abords immédiats" délimitaient ainsi de façon intelligible les secteurs où la mendicité était interdite et permettaient une marge d'appréciation en fonction de la configuration de l'endroit (par exemple une application plus stricte dans des lieux manquant de dégagement ou de visibilité ; AARP/88/2024 du 6 mars 2024 consid. 2.4.2.5).

2.3.4. En l'espèce, l'appelante soutient que la formulation de l'art. 11A al. 1 let. c LPG est si vague qu'elle ne lui permettrait pas de déterminer où et comment pratiquer la mendicité licitement et que la marge d'interprétation laissée à l'autorité conduirait à des inégalités de traitement.

Ce faisant, l'appelante ne prétend pas, quand bien même elle est d'origine étrangère et illettrée, ne pas avoir effectivement compris qu'interdiction lui était faite de mendier devant ou à proximité de l'entrée d'un magasin. Elle ne soutient pas non plus avoir mésestimé la distance prohibée.

Le fait que, après avoir été interpellée une première fois à la hauteur du n° ______, rue 1______, à moins de 10 mètres de l'entrée d'un commerce, et informée de l'interdiction d'y mendier, elle ait récidivé une semaine plus tard à nouveau à la rue 1______, à proximité de l'entrée d'un centre commercial, témoigne du fait que l'ignorance de la règlementation ou un doute sur son interprétation n'ont joué aucun rôle dans la commission des infractions qui lui sont reprochées.

Dans ces conditions, l'argument tiré d'un prétendu manque de précision de la loi doit être rejeté.

2.4.1. L'interdiction de la mendicité doit ensuite être justifiée par un intérêt public suffisant ou par la protection des droits fondamentaux de tiers (art. 36 al. 2 Cst.).

La CourEDH n'a pas exclu que l'interdiction totale de la mendicité poursuit a priori des buts légitimes, soit, d'une part, la protection de l'ordre public et l'assurance de la sécurité et de la tranquillité publiques, afin de ne pas porter atteinte aux passants, aux résidents et aux commerçants, et, d'autre part, la lutte contre l'exploitation des mineurs. Elle a laissé ouverte la question de savoir si d'autres buts légitimes sont également poursuivis par l'interdiction de la mendicité. La motivation de rendre la pauvreté moins visible dans une ville et d'attirer les investissements n'est toutefois pas légitime au regard des droits de l'homme (CourEDH Lacatus c. Suisse du 19 janvier 2021 § 96, 97 et 113).

Le Tribunal fédéral a confirmé l'existence d'un intérêt public à la protection de l'ordre, de la tranquillité et de la sécurité publics en cas de réglementation de la mendicité à proximité immédiate des points de paiement et des distributeurs automatiques de billets, à l'entrée des magasins, dans les gares ou dans d'autres bâtiments publics (ATF 149 I 248 consid. 4.6.2 et 5.3.2).

2.4.2. Les considérations de l'appelante, qui reproche au TP de ne pas avoir cherché à vérifier si les réseaux criminels évoqués par les arrêts de la CJCST et du Tribunal fédéral existaient bel et bien, tombent à faux. Cet aspect de la mendicité est en effet visé par la let. a de l'art. 11A al. 1 LPG et non par la disposition présentement querellée, de sorte que c'est à bon droit que le premier juge n'a pas abordé cette problématique.

En ce qui concerne l'art. 11A al. 1 let. c LPG, les représentants des commerçants, incluant tant ceux de la grande distribution que ceux du commerce de détail, ont été interrogés par la Commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le projet de la LPG et ont décrit de manière unanime un impact négatif sur la clientèle résultant de la présence de mendiants statiques devant les magasins, perçue par certains comme une atteinte à leur sécurité et leur confort (cf. rapport p. 23).

En se plaçant devant l'entrée d'un commerce pour mendier, de telle sorte que la clientèle n'ait d'autre alternative que de passer devant elle, l'appelante a pris le risque de gêner les personnes souhaitant fréquenter les magasins ou de susciter chez elles un sentiment d'insécurité, cela sans l'accord des intéressées, dont les droits méritent eux aussi protection.

Contrairement à ce qu'elle soutient, la gêne occasionnée par la mendicité passive ne saurait être comparée à celle générée par les collectes caritatives dans la rue. Celles-ci doivent en effet faire l'objet d'une autorisation étatique pour l'utilisation accrue du domaine public qu'elles comportent, autorisation octroyée pour un temps et un lieu déterminés, voire contre le paiement d'un émolument. Lorsqu'une telle collecte est organisée "aux abords immédiats" d'un commerce, elle recueille en outre en principe l'accord de l'exploitant, ce qui n'est à l'évidence pas le cas de l'appelante.

Au vu de ce qui précède, l'interdiction partielle de mendier aux abords immédiats d'un magasin ou de l'entrée d'un centre commercial poursuit un intérêt public reconnu.

2.5.1. L'interdiction de la mendicité doit enfin être proportionnée (art. 36 al. 3 Cst.) ou s'avérer nécessaire dans une société démocratique (art. 8 § 2 CEDH). Il faut qu'elle soit apte à atteindre le but visé, que ce dernier ne puisse être atteint par une mesure moins incisive et qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de la mesure sur la situation de la personne visée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public. Il faut tenir compte du fait que les personnes mendiantes sont généralement particulièrement nécessiteuses et vulnérables et qu'elles dépendent de la mendicité comme moyen de subsistance (ATF 149 I 248 consid. 4.6.3).

Dans son examen de la constitutionnalité de la loi bâloise, laquelle, à l'instar de la loi genevoise, punit quiconque mendie dans divers lieux du territoire cantonal abstraitement énumérés, le Tribunal fédéral a rejeté l'argument des recourants selon lequel cette règlementation était trop restrictive et ne ménageait pas assez d'espaces où la mendicité était permise. Il a rappelé à cette occasion que la réglementation adoptée protégeait l'accessibilité des bâtiments et installations publics et privés, de même que la sphère privée de celles et ceux qui les fréquentaient à des fins pécuniaires ou personnelles. Elle laissait néanmoins subsister des possibilités suffisantes de pratiquer la mendicité sur le territoire cantonal, y compris dans le centre-ville (ATF 149 I 248 consid. 5.3.1 et 5.3.2).

2.5.2. La règlementation genevoise ne diffère guère, en la matière, des dispositions bâloises, en ce qu'elle dresse une liste des lieux où il existe un intérêt public à la prohibition de la mendicité.

L'appelante ne suggère en outre pas de mesure précise moins incisive apte à atteindre le but recherché.

Par ailleurs, contrairement à ce qu'elle soutient, cette liste n'aboutit pas à une interdiction de facto de toute mendicité. Quand bien même il n'appartient pas à la Cour de céans d'énumérer les lieux où elle pourrait pratiquer cette activité, le territoire cantonal est vaste et, même en ville de Genève ou dans les communes périurbaines, nombreux sont les lieux qui ne sont pas concernés par les interdictions prévues à l'art. 11A al. 1 LPG.

Il suffisait en l'occurrence à l'appelante de s'éloigner davantage de l'accès des commerces pour pratiquer, à un autre endroit dans le quartier, son activité de manière licite.

L'existence d'un état de nécessité de nature à rendre licite son comportement (art. 17 CP) doit dès lors être niée, le respect du principe de la proportionnalité de la limitation du droit de mendier figurant à l'art. 11A al. 1 LPG devant être confirmé.

2.6.1. Tant l'art. 16 al. 2 Cst. que l'art. 10 § 1 de la CEDH protègent le droit de toute personne de former, d'exprimer et de répandre librement son opinion ou des idées, sans qu'il puisse y avoir d'ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière.

L'art. 10 § 1, 1ère phrase CEDH dispose que toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière.

L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire (art. 10 § 2 CEDH).

2.6.2. Le Tribunal fédéral refuse de juger une interdiction de la mendicité comme étant également constitutive d'une atteinte à la liberté d'expression (ATF 149 I 248 consid. 4.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_443/2017 du 29 août 2018 consid. 6 et 6B_530/2014 du 10 septembre 2014 consid. 2).

Le but de la mendicité n'est pas d'exprimer un besoin, mais plutôt d'en obtenir la satisfaction par le biais d'un don très généralement sous la forme d'une prestation en argent. Le simple fait de se poster sur la voie publique pour se faire remettre de l'argent peut être interprété de diverses manières, mais on peut avant tout y voir un geste dépourvu de tout message et simplement destiné à améliorer la situation matérielle de son auteur (arrêt du Tribunal fédéral 1C_443/2017 du 29 août 2018 consid. 6.2). Le comportement consistant à demander de l'argent aux passants en leur tendant la main ne comporte aucune dimension symbolique, ni aucun message, par exemple sur la situation des personnes démunies, mais se limite à la seule expression de son dénuement personnel et de son besoin d'aide. Il s'agit ainsi d'une problématique exclusivement privée, la communication du dénuement apparaissant d'emblée comme un élément secondaire, bien que nécessaire, de l'activité de mendicité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_530/2014 du 10 septembre 2014 consid. 2.7).

Dans son arrêt Lacatus c. Suisse (cf. §120), la CourEDH a estimé que le grief fondé sur la liberté d'expression ne soulevait pas de "question distincte essentielle" et elle n'est pas entrée en matière sur ce point. Seule une opinion minoritaire a regretté que la CourEDH ne reconnût pas, en référence à un arrêt de la Cour constitutionnelle autrichienne du 30 juin 2012 (G155/10-9) ainsi qu'à un arrêt de la High Court d'Irlande du 4 décembre 2007 (Dillon v. Director of Public Prosecutions [2008], 11R 383), une ingérence dans l'exercice de ce droit (cf. pp. 39 et ss).

À l'instar du Tribunal fédéral, la CSTCJ a retenu que, même si l'acte de mendier impliquait l'expression préalable de sa précarité et de son besoin d'aide, cette information n'était qu'un élément secondaire par rapport à la satisfaction dudit besoin (ACST/12/2022 du 28 juillet 2022 consid. 12).

Dans un arrêt plus récent, après avoir rappelé les opinions divergentes exprimées par certains juges de la CourEDH et auteurs de doctrine, le Tribunal fédéral a estimé qu'il n'y avait pas lieu, en l'état, de revenir sur cette jurisprudence, les recourants n'expliquant pas suffisamment en quoi la reconnaissance d'une atteinte à la sphère de protection de la liberté d'expression leur conférerait un meilleur statut juridique, dont l'effet protecteur irait au-delà de celui de la liberté personnelle (ATF 149 I 248 consid. 4.4).

2.6.3. Dans le cas présent, au vu de ce qui précède, il n'y pas lieu d'adopter une position différente. Il est ainsi retenu que la mendicité n'entre pas dans le champ d'application de la protection accordée par la liberté d'expression. La manifestation de la précarité ou sa communication même tacite dans ce contexte est inhérente au but d'obtention d'une aide pécuniaire ou en nature, mais reste secondaire à celui-ci. L'appelante ne prétend en effet pas qu'en mendiant, elle aurait exprimé autre chose que son besoin personnel d'aide, par exemple qu'elle aurait agi pour sensibiliser sur la situation sociale des pauvres ou des membres de sa communauté. Elle n'explique pas non plus en quoi la liberté d'expression lui conférerait une protection plus étendue que la liberté personnelle, étant rappelé qu'il lui est reproché, non pas d'avoir mendié, mais de l'avoir fait dans un périmètre que l'art. 11A al. 1 let. c LPG interdit.

Ce grief doit dès lors être rejeté.

2.7. L'appelante considère enfin que l'interdiction de mendier consacre un traitement discriminatoire, puisque la norme vise à sanctionner des personnes uniquement en raison de leur pauvreté.

2.7.1. D'après l'art. 8 al. 2 Cst., nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue, de sa situation sociale, de son mode de vie, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques ni du fait d'une déficience corporelle, mentale ou psychique.

On est en présence d'une discrimination selon l'art. 8 al. 2 Cst. lorsqu'une personne est traitée différemment en raison de son appartenance à un groupe particulier qui, historiquement ou dans la réalité sociale actuelle, souffre d'exclusion ou de dépréciation. Il y a discrimination indirecte lorsqu'une réglementation qui ne désavantage pas directement un groupe déterminé défavorise tout particulièrement, par ses effets et sans justification objective, les personnes appartenant à ce groupe. L'effet discriminatoire doit atteindre une importance significative car la protection contre la discrimination indirecte ne peut servir qu'à corriger les effets négatifs les plus évidents d'une réglementation étatique (ATF 149 I 248 consid. 7.2 ; 142 V 316 consid. 6.1.2 ; 138 I 265 consid. 4.2.2 et 5.5 ; 138 I 205 consid. 5.5).

Selon la jurisprudence relative à l'art. 14 CEDH (qui stipule que la jouissance des droits et libertés reconnus par la CEDH doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation, et n'a, d'après le Tribunal fédéral, pas de portée indépendante [arrêt du Tribunal fédéral 2C_1079/2019 du 23 décembre 2021 consid. 8.1]), toute différence de traitement n'emporte pas automatiquement violation de cet article. Il faut démontrer que des personnes placées dans des situations analogues ou comparables jouissent d'un traitement préférentiel, et que cette distinction est discriminatoire. Tel est le cas si la différence de traitement manque de justification objective et raisonnable, soit si elle ne poursuit pas un but légitime, ou s'il est clairement établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé (arrêt du Tribunal fédéral 2C_121/2022 du 24 novembre 2022 consid. 5.2).

2.7.2. Le Tribunal fédéral a nié l'existence d'une discrimination dans l'interdiction de la mendicité, considérant notamment que la seule importance du nombre de condamnations concernant des personnes appartenant à la communauté rom ne signifiait pas pour autant l'existence d'une impunité d'autres mendiants (ATF 149 I 248 consid. 7.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_88/2012 du 17 août 2012 consid. 3.4).

2.7.3. La CSTCJ a, pour sa part, rejeté le grief d'un traitement discriminatoire sur la base de la pauvreté au motif que le fait d'être pauvre ne donnait pas d'emblée droit à la protection de l'art. 8 al. 2 Cst. Même dans une telle hypothèse, la loi pouvait au demeurant sanctionner la mendicité afin de protéger l'ordre public et lutter contre l'exploitation humaine et non pour dévaloriser ou exclure. Par ailleurs, le système juridique suisse répondait à la détresse des personnes par l'octroi de l'aide sociale au sens de l'art. 12 Cst., de manière à leur éviter de devoir mendier pour satisfaire leurs besoins élémentaires (ACST/12/2022 du 28 juillet 2022 consid. 11c).

2.7.4. En l'espèce, l'appelante ne présente pas d'arguments nouveaux par rapport à ceux examinés par le Tribunal fédéral et la CSTCJ, de sorte que la conclusion adoptée par ces instances ne peut qu'être reprise par la Cour de céans. Il est en effet douteux que le dénuement de l'appelante soit apte à constituer un critère de discrimination. Cet élément n'est pas de nature à circonscrire un groupe ou une minorité qui soit identifié par des caractéristiques particulières que l'on ne choisisse pas librement ou auxquelles on ne puisse pas renoncer librement, de sorte que ce groupe aurait besoin d'une protection particulière en droit constitutionnel. Le dénuement doit plutôt être considéré comme une circonstance temporaire dont les inconvénients disparaissent avec l'accès à une activité lucrative autonome.

Le grief lié à l'interdiction d'un traitement discriminatoire sera dès lors rejeté.

2.8. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que l'appelante a été reconnue coupable de mendicité au sens de l'art. 11A al. 1 let. c LPG.

Sa condamnation de ce chef doit donc être confirmée, en tant qu'elle ne constitue pas, in casu, une ingérence injustifiée dans ses droits fondamentaux.

2.9.1. La législation genevoise prévoit exclusivement l'amende comme sanction de l'interdiction de la mendicité passive en certains lieux (cf. art. 11A al. 1 LPG), à l'exclusion de tout mécanisme graduel de sanction préalable.

2.9.2. Dans son arrêt Lacatus c. Suisse, la CourEDH n'a pas exclu en soi une sanction pénale à la mendicité, dans le sens que la gravité de ladite sanction doit être examinée dans le cadre d'une pesée des intérêts et à l'aune de solides motifs d'intérêt public. Elle a néanmoins relevé que, eu égard à la situation précaire et vulnérable des mendiants, la conversion de l'amende en peine privative de liberté de substitution était quasiment inévitable et constituait dès lors une sanction grave, laquelle devait être justifiée par de solides motifs d'intérêt public et être proportionnée aux buts poursuivis. En l'absence de mendicité intrusive ou agressive, ou de plainte pénale contre le mendiant, l'on pouvait douter d'un intérêt public concret de protection des droits des passants, résidents ou propriétaires des commerces, justifiant la sanction de l'amende. Il convenait ainsi que les tribunaux procèdent à un examen approfondi de la situation concrète et vérifient si des mesures moins sévères que la sanction pénale auraient pu aboutir au même résultat. Si ces conditions n'étaient pas remplies, la sanction de l'amende violait l'art. 8 CEDH (§ 108ss).

2.9.3. Le Tribunal fédéral a confirmé depuis lors qu'il n'était pas admissible, au regard de la Cst. et de la CEDH, de sanctionner d'emblée la mendicité passive pratiquée dans certains lieux par une amende qui, au vu du dénuement des personnes concernées, était presqu'automatiquement convertie en jours de détention. Une amende, même modique et n'excédant pas CHF 50.-, ne pouvait ainsi être envisagée qu'en dernier recours, après que d'autres mesures mieux adaptées aient échoué (ATF 149 I 248 consid. 5.4.6).

À cet égard, quand bien même il n'a pas donné de pistes, le Tribunal fédéral a indiqué que des mesures de droit administratif, échelonnées et successives, pouvaient être envisagées, par exemple une évacuation du contrevenant par la police hors de l'aire d'interdiction, avec enregistrement de son identité lors de la première infraction ; un avertissement administratif avec menace de l'amende la deuxième fois, et la troisième fois la sanction pénale, sous forme d'amende (ATF 149 I 248 consid. 5.4.7).

La CPAR a toutefois exclu que cette jurisprudence s'applique lorsqu'une personne déclarée coupable de mendicité avait déjà été interpellée pour de tels actes (dans le cas qui lui était soumis, plus de 30 interpellations pour des faits de mendicité sous l'ancien droit ; ACPR/46/2024 du 30 janvier 2024 consid. 2.4.4.5).

2.9.4. Dans le cas présent, l'appelante n'indique pas si elle avait connaissance ou non du changement de loi. Quelle qu'ait été la connaissance/ignorance dans laquelle se trouvait l'appelante (relative au changement de loi et son contenu ou à la condamnation de la Suisse par la CourEDH dans son arrêt du 19 avril 2021 susmentionné), elle ne pouvait ignorer, ayant été préalablement reconnue coupable de mendicité, qu'il était hautement probable que la question soit toujours réglementée. Partant, quand bien même elle est étrangère et illettrée, elle ne pouvait faire fi de se renseigner sur ce point. De même, précédemment condamnée à une amende pour de tels faits, elle devait partir du principe qu'elle encourrait une telle peine, sinon sa conversion en jours de détention, de sorte que l'on peut affirmer que des mesures administratives moins incisives en amont seraient restées vaines.

3. 3.1. Est puni quiconque, intentionnellement ou par négligence, fait usage d'un véhicule sans détenir de titre de transport valable ou sans y être autrement autorisé (art. 57 al. 3 LTV).

3.2. Outre l'erreur de plume constatée supra, l'appelante ne conteste pas les faits tels que décrits dans l'ordonnance pénale du 7 février 2023.

Partant, le verdict de culpabilité du chef de l'art. 57 al. 3 LTV sera confirmé.

4. 4.1. Les infractions de mendicité (art. 11A al. 1 let. c LPG) et celle à l'art. 57 al. 3 LTV sont passibles de l'amende.

4.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

4.3. Selon l'art. 106 al. 2 CP, le juge prononce, pour le cas où, de manière fautive, le condamné ne paie pas l'amende, une peine privative de liberté de substitution d'un jour au moins et de trois mois au plus. Le juge fixe l'amende et la peine privative de liberté de substitution en tenant compte de la situation de l'auteur afin que la peine corresponde à la faute commise. Ainsi, au moment de fixer la peine privative de liberté de substitution à une amende, le juge ne doit tenir compte que de la culpabilité de l'auteur, à l'exclusion des circonstances financières propres au condamné (ATF
134 IV 97 consid. 6.3.7.1 ; 134 IV 60 consid. 7.3.3).

4.4. Selon l'art. 52 CP, si la culpabilité de l'auteur et les conséquences de son acte – conditions cumulatives – sont peu importantes, l'autorité compétente renonce à lui infliger une peine. Si les conditions indiquées à l'art. 52 CP sont réunies, l'exemption par le juge est de nature impérative. Si elles ne sont réalisées qu'en instance de jugement, un verdict de culpabilité est rendu, mais dépourvu de sanction (ATF
135 IV 130 consid. 5.3.2).

L'exemption de peine suppose que l'infraction soit de peu d'importance, tant au regard de la culpabilité de l'auteur que du résultat de l'acte. L'importance de la culpabilité et celle du résultat dans le cas particulier doivent être évaluées par comparaison avec celle de la culpabilité et celle du résultat dans les cas typiques de faits punissables revêtant la même qualification ; il ne s'agit pas d'annuler, par une disposition générale, toutes les peines mineures prévues par la loi (Message concernant la modification du Code pénal suisse [dispositions générales, entrée en vigueur et application du Code pénal] et du Code pénal militaire ainsi qu'une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs du 21 septembre 1998, FF 1999 p. 1871). Pour apprécier la culpabilité, il faut tenir compte de tous les éléments pertinents pour la fixation de la peine, notamment des circonstances personnelles de l'auteur, tels que les antécédents, la situation personnelle ou le comportement de l'auteur après l'infraction (ATF
135 IV 130 consid. 5.4).

4.5.1. Dans le cas présent, la faute de l'appelante doit être qualifiée de faible à moyenne. Elle a mendié à quatre reprises en à peine deux mois et dans un périmètre restreint. Comme énoncé ci-dessus, même lors de la première occurrence, elle ne pouvait ignorer qu'elle agissait de manière contraire au droit pénal cantonal, ce qui lui a été rappelé expressément le 1er octobre 2022. Elle a ainsi fait fi de l'ordre juridique genevois, ainsi que de ses autorités qu'elle a mobilisées par quatre fois en quelques mois. De même, elle a voyagé dans un transport public sans s'acquitter du prix du billet, malgré les multiples contrôles et verbalisations administratives dont elle avait déjà fait l'objet (à sept reprises en deux ans selon les TPG). Cela dénote un manque de considération certain pour les règles en vigueur.

Sa situation personnelle, indéniablement précaire, explique ses agissements mais ne les justifie pas totalement, dans la mesure où, s'agissant des infractions commises pour améliorer sa condition financière, il existait d'autres lieux où elle pouvait s'adonner à la mendicité de manière licite.

Sa collaboration n'appelle pas de remarque particulière, puisqu'elle ne s'est pas directement exprimée durant la procédure.

Il y a concours d'infractions, facteur d'aggravation de la peine (art. 49 CP cum art. 104 CP).

Les différentes occurrences sont de gravité sensiblement équivalente.

Le montant de CHF 330.- arrêté par le premier juge dans le jugement du 13 mai 2024 apparaît un peu trop élevé au vu de la situation personnelle de l'appelante et de la jurisprudence de la CPAR en la matière (cf. AARP/417/2024 du 25 novembre 2024 ; AARP/449/2024 du 13 décembre 2024).

Ainsi, la peine de base sera fixée à CHF 60.- pour les faits du 1er octobre 2022. Seront ajoutés CHF 160.-, soit CHF 40.- pour chacun des trois autres actes de mendicité et l'infraction à l'art. 57 al. 3 LTV (peine hypothétique : CHF 60.- pour chacun d'eux). Une amende globale de CHF 220.- sera prononcée, assortie d'une peine privative de liberté de substitution de deux jours.

Le jugement entrepris sera réformé en ce sens.

4.5.2. L'appelante conclut, subsidiairement, en cas de condamnation, à une exemption de peine, relevant en particulier, pour l'infraction de mendicité, que dans un jugement du 22 août 2023, le TP avait fait application de l'art. 52 CP (JTDP/1074/2023).

En l'espèce, les infractions de mendicité sont certes de peu d'importance au regard d'autres infractions, ce dont il est tenu compte dans le type de sanction prévu par les art. 11A al. 1 LPG. L'appelante n'explique toutefois pas en quoi sa culpabilité serait peu importante par rapport à d'autres cas relevant de la même disposition. Elle ne peut à cet égard rien tirer du jugement du TP qu'elle cite, celui-ci n'étant pas motivé et ne permettant dès lors pas de conclure, le cas échéant, à une situation similaire.

La culpabilité de l'appelante n'est au demeurant pas anodine, dès lors qu'elle a agi à plusieurs reprises aux mêmes endroits, alors qu'elle ne pouvait ignorer que son comportement était illicite.

Les conditions de l'art. 52 CP ne sont pas réalisées, de sorte qu'une exemption de peine sur cette base n'entre pas en considération.

5. L'appelante, qui obtient très partiellement gain de cause (diminution de la peine), supportera les deux-tiers des frais de la procédure d'appel, y compris un émolument d'arrêt réduit de CHF 200.-, pour tenir compte de sa situation personnelle (art. 425 et 428 CPP). Le solde de ces frais sera laissé à la charge de l'État.

Les frais de la procédure préliminaire et de première instance ne seront pas revus, vu la confirmation des verdicts de culpabilité.

6. L'appelante n'a pas pris de conclusions en indemnisation, quand bien même elle est représentée par une avocate et avait été enjointe de chiffrer et justifier de telles conclusions. Elle est donc réputée y avoir renoncé (art. 429 al. 2 CPP).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/549/2024 rendu le 13 mai 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/8795/2023.

L'admet très partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable d'infraction à l'art. 57 al. 3 LTV et d'infractions à l'art. 11A al. 1 let. c LPG.

Condamne A______ à une amende de CHF 220.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de deux jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, fixés à CHF 350.- (art. 426 al. 1 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 315.-, y compris un émolument de jugement de CHF 200.-.

Met deux-tiers de ces frais, soit CHF 210.-, à la charge de A______ et laisse le solde à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police ainsi qu'à l'Office cantonal de la population et des migrations.

La greffière :

Sarah RYTER

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 


 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète
(art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.

 

 

 

 

 

 

 

 

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

350.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

40.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

État de frais

CHF

75.00

Émolument de décision

CHF

200.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

315.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

665.00