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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/11148/2020

AARP/325/2024 du 12.09.2024 sur JTCO/135/2022 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : DÉCISION DE RENVOI
Normes : CP.428
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/11148/2020 AARP/325/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 12 septembre 2024

 

Entre

A______, domicilié c/o A______, ______ [GE], comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTCO/135/2022 rendu le 12 octobre 2022 par le Tribunal correctionnel,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

C______, partie plaignante,

intimés.

 

statuant ensuite de l'arrêt du 2 juillet 2024 du Tribunal fédéral en la cause 6B_1160/2023 (l'arrêt de renvoi)


EN FAIT :

A. a. Par jugement du 12 octobre 2022, le Tribunal correctionnel (TCO) a, notamment, reconnu A______ coupable de brigandage (art. 140 ch. 1 du code pénal [CP]), contrainte (art. 181 CP), violation de domicile (art. 186 CP) et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes, [art. 19a ch. 1 LStup]). Il l'a condamné à une peine privative de liberté de 36 mois, sous déduction de 75 jours de détention avant jugement, avec sursis partiel (peine privative de liberté ferme : six mois ferme ; délai d'épreuve : trois ans), ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, a levé les mesures de substitution ordonnées le 8 mars 2021 par le Tribunal des mesures de contrainte (TMC) et a ordonné la libération des sûretés de CHF 10'000.-, versées par l'Étude du conseil du prévenu, en faveur de ce dernier.

Les premiers juges ont en outre condamné A______, conjointement et solidairement avec ses deux co-prévenus D______ et E______, à payer à C______ CHF 7'000.-, avec intérêts à 5% dès le 22 juin 2020 (tort moral), limitant cependant la part à sa charge à CHF 5'000.- et l'ont astreint au paiement des frais de la procédure préliminaire et de première instance à concurrence de 25%, dits frais ascendant à CHF 16'477.50, abstraction faite de ceux liés à l'expertise psychiatrique de D______.

b. Les trois prévenus ont appelé de ce jugement, alors que le Ministère public (MP) et la partie plaignante ont présenté appel joint.

b.a. Selon sa déclaration d'appel, A______ concluait à son acquittement, contestait [ndr : implicitement, dans la mesure où ce n'était pas précisé] la quotité de la peine, plaidant le bénéfice des circonstances atténuantes de l'art. 48 let. a ch. 4 et let. e CP. Il sollicitait l'octroi d'une indemnité de CHF 14'200.- pour 75 jours de détention injustifiée avant jugement, la couverture, "réduite" à CHF 30'000.-, de ses frais de défense occasionnés par la procédure préliminaire et de première instance, outre celle de ses honoraires et frais d'avocat pour la procédure d'appel. Il requérait enfin que les frais de la procédure de première instance, déduction faite des frais d'expertise psychiatrique sus-évoqués, ne fussent mis à sa charge qu'à concurrence de 10% et ceux de la procédure d'appel laissés à celle de l'État. Au chapitre des points contestés du jugement, mais non dans ses conclusions, il se plaignait en outre de ce que les premiers juges n'avaient pas répercuté les mesures de substitution auxquelles il avait été astreint au titre de déduction sur la peine.

Lors des débats d'appel, il s'est opposé aux appels joints, tout en réduisant partiellement ses propres conclusions, pour admettre le principe de sa culpabilité, mais au bénéfice de la qualification juridique de lésions corporelles simples.

Son conseil a notamment plaidé, en toute hypothèse, le bénéfice des circonstances atténuantes de l'art. 48 let. a ch. 3 ou 4 ainsi que let. d CP.

Il n'a pas évoqué la question du sort des sûretés.

b.b. Aux termes des déclarations d'appel joint, le MP a requis, en ce qui concerne ce prévenu, un verdict de culpabilité du chef de brigandage aggravé au sens de l'art. 140 ch. 1 et 3 CP.

Le MP avait également pris des conclusions sur appel joint à l'encontre des deux autres prévenus, requérant une peine plus lourde pour D______ (six ans au lieu de cinq) ainsi que la qualification juridique de brigandage aggravé (art. 140 ch. 1 et 3 CP) pour les faits retenus à l'encontre de E______, sans en tirer de conséquences sur la peine.

b.c. La partie plaignante a demandé l'augmentation de l'indemnité pour tort moral, à la charge des trois intimés sur appels-joint, conjointement et solidairement, à CHF 25'000.- en capital.

c. Par arrêt du 18 août 2023, la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) a notamment admis les appels joints, rejeté l'appel de A______, annulé le jugement du TCO et déclaré ce prévenu coupable de brigandage aggravé, de contrainte, de violation de domicile et de contravention à la LStup, lui infligeant la même peine qu'en première instance, dont elle a cependant également déduit 106 jours au titre de l'imputation des mesures de substitution, a porté le montant de l'indemnité pour tort moral due à la victime à CHF 10'000.-, somme mise à la charge des trois prévenus solidairement mais limitée à CHF 8'000.- plus intérêts s'agissant de A______, et a confirmé le prononcé de la libération de la caution dont elle a ordonné l'affectation au paiement de l'amende et des frais de la procédure mis à sa charge.

S'attelant à la question de la répartition des frais de la procédure d'appel, elle a jugé ainsi :

"8.1. L'appelant D______ obtient gain de cause en appel sur l'expulsion et E______ partiellement sur la peine. L'appel de A______ est rejeté. L'appel joint du plaignant est admis. L'appel joint du MP est admis partiellement sur la réalisation par le prévenu A______ de la circonstance aggravante de l'art. 140 ch. 3 CP.

Les frais de la procédure d'appel, qui comprennent un émolument de décision de CHF 6'000.-, seront répartis comme suit :

-        20% à la charge de D______ ;

-        25% à celle de E______ ;

-        30% à celle de A______.

Le solde (25%) sera laissé à la charge de l'État."

d. Au terme de l'arrêt de renvoi, le Tribunal fédéral (TF) a rejeté le recours en matière pénale interjeté par A______ en ce qu'il persistait à requérir son acquittement de tous les chefs de culpabilité hormis celui de violation de domicile, critiquait le refus des circonstances atténuantes de l'art. 48 let. a ch. 4 et let. d CP ainsi que la quotité de l'indemnité pour tort moral et la condamnation solidaire à la payer (dans la limite de CHF 8'000.- hors intérêts).

En revanche, la Haute cour a admis ledit recours sur deux points :

-          les sûretés avaient été fournies par le défunt père de A______ de sorte qu'elles eussent dû être libérées en faveur de la succession d'icelui, non du prévenu. Cela étant, l'interdiction de la reformatio in pejus ne permettait pas de revenir sur le prononcé disposant leur libération en faveur du condamné et, dans la mesure où il demeurait qu'elles avaient été fournies par un tiers, elles ne pouvaient être affectées au paiement des amende et frais de la procédure incombant à celui-là ;

-          contrairement à ce qu'avait retenu la CPAR, A______ n'avait pas intégralement succombé en appel, dès lors que 106 jours de détention supplémentaires avaient été portés en déduction de la peine, en compensation des mesures de substitution subies. Or, l'arrêt cantonal ne contenait "pas les motifs pour lesquels la cour cantonale a[vait], nonobstant cette admission partielle, intégralement rejeté l'appel du recourant et ses conclusions en indemnisation. Aucune analyse des dispositions topiques en la matière, notamment des art. 428 et 436 CPP, ne ressort[ait] de l'arrêt querellé. Il s'ensui[vai]t que le raisonnement suivi par la cour cantonale s'avèr[érait] lacunaire. Il conv[enait] dès lors d'annuler l'arrêt entrepris et de renvoyer la cause à la cour cantonale pour qu'elle complète son raisonnement, dans une mesure permettant au Tribunal fédéral de contrôler l'application du droit. Dans ce cadre, elle tiendra[it] également compte de l'admission du grief concernant la libération des sûretés ".

e.a. Invité à se déterminer suite à l'arrêt de renvoi, A______ conclut à ce qu'il soit constaté que son appel avait été partiellement admis, à la confirmation du prononcé de la libération des sûretés en sa faveur, à ce que seuls 10% des frais de la première procédure d'appel soient mis à sa charge et à la couverture de ses frais de défense y relatifs à concurrence de CHF 20'000.-, enfin à la couverture de ceux exposés dans le cade de la procédure après renvoi par CHF 3'220.85, frais de ladite seconde procédure à la charge de l'État.

À l'appui, il produit une écriture de sept pages (hors conclusions), soutenant qu'il avait obtenu gain de cause sur un point essentiel de son appel, dès lors que la CPAR avait admis son grief relatif à l'absence d'imputation sur la peine au titre des mesures de substitution. Il estimait qu'il fallait également, à l'heure de répartir les frais de la première procédure d'appel, tenir compte de ce que le TF avait jugé que les sûretés ne pouvaient être affectées au règlement de ses dettes envers l'État. Le montant facturé par son défenseur privé selon les deux notes d'honoraires déposées à l'issue de la première procédure d'appel était de CHF 27'725.75 (TVA comprise), d'où sa demande d'octroi d'une indemnité réduite de CHF 20'000.-.

e.b. Selon lesdites note d'honoraires, l'avocat de A______ avait appliqué un taux horaire de CHF 500.- pour ses propres prestations (32 heures et 10 minutes) et de CHF 400.- pour celles de sa collaboratrice (22 heures 10).

e.c. La note d'honoraires pour les prestations déployées après le prononcé de l'arrêt du TF décrit six heures et 25 minutes d'activité au taux de CHF 450.-/heure (patron) pour 55 minutes d'"examen de l'arrêt du Tribunal fédéral", 15 minutes de correspondance avec le client et cinq heures et 15 minutes de travail lié à la rédaction des conclusions motivées. Sont également facturés des frais forfaitaires de CHF 86.63 [ndr : soit 3%] et des débours postaux par CHF 5.80.

f. Le MP n'a pas pris de conclusions, pas davantage qu'il n'a répliqué.

EN DROIT :

1. 1.1. Un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral lie l'autorité cantonale à laquelle la cause est renvoyée, laquelle voit sa cognition limitée par les motifs dudit arrêt, en ce sens qu'elle est liée par ce qui a déjà été définitivement tranché par le Tribunal fédéral (ATF 148 I 127 consid. 3.1 ; 143 IV 214 consid. 5.2.3 et 5.3.3) et par les constatations de fait qui n'ont pas été attaquées devant lui ou l'ont été sans succès (ATF 150 III 123 consid. 3 ; 131 III 91 consid. 5.2). Il n'est pas possible de remettre en cause ce qui a été admis, même implicitement, par ce dernier. L'examen juridique se limite donc aux questions laissées ouvertes par l'arrêt de renvoi, ainsi qu'aux conséquences qui en découlent ou aux problèmes qui leur sont liés (ATF 135 III 334 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_588/2012 du 11 février 2013 consid. 3.1 ; 6B_534/2011 du 5 janvier 2012 consid. 1.2). La motivation de l'arrêt de renvoi détermine dans quelle mesure la cour cantonale est liée à la première décision, décision de renvoi qui fixe aussi bien le cadre du nouvel état de fait que celui de la nouvelle motivation juridique (ATF 135 III 334 consid. 2).

1.2.1. En l'espèce, il résulte clairement du considérant topique de l'arrêt de renvoi que les sûretés dont la CPAR avait confirmé le prononcé de la libération en faveur de l'appelant ne peuvent être compensées avec sa dette en paiement de l'amende qui lui a été infligée et des frais de la procédure mis à sa charge. Le dispositif de l'arrêt du 18 août 2023 doit être modifié en conséquence.

1.2.2. Le TF a également annulé ledit arrêt dans la mesure où il mettait à la charge de cet appelant 30% de la totalité des frais de la cause en seconde instance. La Haute cour a relevé que l'appel de ce condamné ne pouvait être tenu pour avoir été intégralement rejeté, dès lors que son grief relatif à l'absence de déduction sur la peine au titre des mesures de substitution avait été accueilli par la juridiction d'appel, mais n'a pas donné d'instructions sur les conséquences qu'il fallait en tirer, vu l'absence de motivation de l'arrêt entrepris sur ce point, ajoutant uniquement qu'il fallait également tenir compte de l'admission du recours en matière pénale sur la question de l'affectation des sûretés. Il incombe partant à la CPAR de prendre acte de ce que le grief de l'appelant a, en effet, été admis par elle et de définir lesdites conséquences sur la répartition des frais de la procédure et ses prétentions en indemnisation fondées sur les art. 429 al. 1 let. a et 436 du code de procédure pénale (CPP).

2. 2.1. Selon l'art. 428 al. 1, première phrase, CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. L'art. 428 al. 2 CPP régit les cas dans lesquels les frais de la procédure peuvent être mis à la charge de la partie recourante qui obtient une décision qui lui est plus favorable. Selon l'al. 3, si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure. Pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêts du Tribunal fédéral 6B_182/2022 du 25 janvier 2023 consid. 5.1 et 6B_369/2018 du 7 février 2019 consid. 4.1 non publié aux ATF 145 IV 90).

L'art. 428 al. 2 CPP introduit des exceptions à cette règle générale en donnant la possibilité à l'autorité compétente de condamner une partie recourante, qui obtient une décision qui lui est favorable, au paiement des frais de la procédure si les conditions qui lui ont permis d'obtenir gain de cause n'ont été réalisées que dans la procédure de recours (let. a) ou si la modification de la décision est de peu d'importance (let. b). Cet alinéa revêt le caractère d'une norme potestative (Kann-Vorschrift), dont l'application ne s'impose pas au juge mais relève de son appréciation. Celui-ci peut donc statuer, le cas échéant, selon le principe de l'équité (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale (CPP) du 21 décembre 2005, FF 2006 1057 ss, spéc. 1312 ; A. DONATSCH / T. HANSJAKOB / V. LIEBER [éds], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung [StPO], 2e éd., Zurich 2014, n. 9 ad art. 428 ; N. SCHMID, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxiskommentar, 2e éd., Zurich 2013, n. 8 ad art. 428). La question de savoir si la modification de la décision est de peu d'importance s'apprécie selon les circonstances concrètes du cas d'espèce (arrêt du Tribunal fédéral 1B_575/2011 du 29 février 2012 consid. 2.1 ; M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, Schweizerische Strafprozessordnung / Schweizerische Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, Bâle 2014, 2e éd., n. 21 ad art. 428).

La modification sera par exemple de peu d'importance si la partie attaquant le jugement dans son ensemble n'obtient gain de cause que sur un point accessoire ou si la décision est uniquement modifiée dans le cadre du pouvoir d'appréciation du juge (arrêt du Tribunal fédéral 6B_44/2020 du 16 septembre 2020 consid. 11.1.1).

2.2.1. Bien qu'il soit difficile de reconstituer a posteriori un raisonnement en effet succinct, il faut retenir du considérant 8.1. reproduit supra (point c) que la juridiction d'appel a estimé que la part des frais de la procédure afférente aux conclusions prises par et contre les trois appelants était d'un tiers pour chacun d'eux. La partie plaignante n'ayant pas intégralement obtenu gain de cause, il fallait ramener cette part à 30%, puis la réduire encore de 10% pour l'appelant D______ et 5% pour l'appelant E______, qui avaient obtenu gain de cause sur le principe de l'expulsion et la non augmentation de la peine s'agissant du premier, sur la quotité de la peine ainsi que le rejet de l'aggravante en ce qui concernait le second.

L'appelant n'a pas critiqué devant le TF la répartition par tiers, ramenée à 30% par prévenu avant ultérieure réduction, et ne le fait du reste toujours pas après renvoi. Elle est donc acquise.

2.2.2. Le TF a invité la CPAR à tenir compte, au moment de procéder à la répartition des frais de la première procédure d'appel, de l'admission du grief concernant la libération des sûretés. Après réexamen de la procédure, il s'avère que ce point n'a pas été un enjeu des débats d'appel : aucune partie n'avait recouru contre le prononcé (en définitive erroné mais confirmé par le TF au bénéfice de l'interdiction de la reformatio in pejus) de la libération des sûretés en faveur de l'appelant, de sorte que la question n'a pas été plaidée sous cet angle ; le sort de la caution n'était pas pour autant totalement réglé, dans la mesure où la juridiction d'appel eût dû envisager d'en refuser la libération si elle avait augmenté la peine de l'appelant, mais celui-ci ne l'a pas discuté dans sa plaidoirie. Cela étant, vu l'instruction donnée par le TF, il sera retenu que la part des frais de la première procédure d'appel mise à la charge de l'appelant doit être réduite de 1 % pour tenir compte de l'admission du recours en matière pénale, étant rappelé que le TF l'a lui-même déjà pris en considération dans la répartition des frais et dépens devant lui.

Reste la question de l'imputation au titre de la compensation des contraintes subies du fait des mesures de substitution. On ne saurait retenir qu'il s'agissait d'un point essentiel des contestations de l'appelant. Si celui-ci n'a pas hiérarchisé ses conclusions, il demeure qu'elles tendaient principalement au prononcé de son acquittement de tous les chefs d'accusation retenus à son encontre, avec les conséquences qui en eussent découlé sur les prétentions civiles ainsi que ses propres prétentions en indemnisation, et subsidiairement à une réduction de la peine dès lors qu'il plaidait alternativement deux, puis encore une troisième, circonstances atténuantes, enfin à la prise en compte des mesures de substitution, laquelle n'était du reste pas même formellement évoquée dans lesdites conclusions. Or, il a succombé sur tous les points sauf le dernier et également succombé sur appels joints, la qualification juridique plus grave de brigandage aggravé ayant été retenue et le montant de l'indemnité pour tort moral augmenté, même si dans une mesure moindre que celle souhaitée par la partie plaignante, ce qui est déjà pris en considération du fait que seuls 90% des frais de la procédure ont été répartis entre les trois condamnés. Eu égard aux enjeux de la procédure d'appel, la prise en compte des contraintes liées aux mesures de substitution était donc un grief de moindre importance, sans pour autant relever de l'accessoire, l'imputation de 106 jours sur la peine n'étant pas négligeable. Ce point était en tout cas moins important que ceux sur lesquels les co-condamnés de l'appelant ont obtenu gain de cause (peine confirmée et renonciation à l'expulsion pour l'un ; aggravante de l'art. 140 ch. 3 CP écartée et réduction de la peine pour l'autre). La moindre importance de cette aspect s'est du reste certainement traduite par un travail de la défense de l'intéressé bien inférieur à celui nécessaire pour développer les autres questions soulevées et, en conséquence, une part limitée du total de l'activité facturée. Il est partant retenu que le succès de l'appelant sur un point subsidiaire emporte une réduction des frais de la procédure de 3%.

Aussi, le dispositif du précédent arrêt doit être modifié en ce sens que 26% (30% ./. [1% + 3%] des frais de la procédure sont mis à sa charge.

3. 3.1. La décision sur le sort des frais de la procédure préjuge de celle sur les indemnités de procédure au sens des art. 429, 433 et 436 CPP (ATF 147 IV consid. 4.1 et 137 IV 352 consid. 2.4.2).

Vu ce qui vient d'être retenu, l'appelant peut prétendre à la couverture des dépenses nécessaires exposées dans le cadre de la première procédure d'appel à concurrence de 7.3% (les 3,3% correspondant au tiers des 10% d'emblée laissés à la charge de l'État + les 4% supplémentaires découlant de la modification de la répartition des frais).

3.2.1. Le Tribunal fédéral considère, avec la doctrine majoritaire, que l'indemnité visée par l'art. 429 al. 1 let. a CPP (ancien comme nouveau) doit correspondre au tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule et englober la totalité des coûts de défense (ATF 142 IV 163 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_392/2013 du 4 novembre 2013 consid. 2.3). En effet, l'indemnisation prévue à l'art. 429 al. 1 let. a CPP tend à ce que l'État répare la totalité du dommage en relation avec la procédure pénale (Message, p. 1313). Bien que le canton de Genève ne connaisse pas de tarif officiel des avocats, il n'en a pas moins posé, à l'art. 34 de la loi sur la profession d'avocat du 26 avril 2002 (LPAv ; RS E 6 10), les principes généraux devant présider à la fixation des honoraires, qui doivent en particulier être arrêtés compte tenu du travail effectué, de la complexité et de l'importance de l'affaire, de la responsabilité assumée, du résultat obtenu et de la situation du client.

Sur cette base, le Tribunal fédéral retient en principe qu'un tarif horaire de CHF 400.- pour un chef d'étude (ATF 135 III 259 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2010 du 31 octobre 2011 consid. 2.3 et 2C_25/2008 du 18 juin 2008 consid. 4.2.5) n'est pas arbitrairement bas pour le canton de Genève (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1078/2014 du 9 février 2016 consid. 4.3 et les références = SJ 2017 I 72).

La Cour de justice applique au chef d'étude un tarif horaire de CHF 450.- (arrêt du Tribunal fédéral 2C_725/2010 du 31 octobre 2011 = SJ 2012 I 172 ; ACPR/279/2014 du 27 mai 2014) ou de CHF 400.- (ACPR/282/2014 du 30 mai 2014), notamment si l'avocat concerné avait lui-même calculé sa prétention à ce taux-là (ACPR/377/2013 du 13 août 2013). Elle retient un taux horaire de CHF 350.- pour les collaborateurs (AARP/65/2017 du 23 février 2017) et de CHF 150.- pour les avocats stagiaires (ACPR/187/2017 du 22 mars 2017 consid 3.2 ; AARP/65/2017 du 23 février 2017).

3.2.2. Les démarches superflues, abusives ou excessives ne sont pas indemnisées (ATF 115 IV 156 consid. 2d ). Le juge dispose d'une marge d'appréciation à cet égard, mais ne devrait pas se montrer trop exigeant dans l'appréciation rétrospective qu'il porte sur les actes nécessaires à la défense du prévenu (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 3ème éd., Bâle 2023 n. 19 ad art. 429). S'il s'écarte notablement de la note d'honoraires présentée, il doit en motiver les raisons (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, op. cit., n. 18 ad art. 429).

À la lumière de ces principes, il y a lieu de retenir que l'autorité pénale amenée à fixer une indemnité sur le fondement de l'art. 429 al. 1 let. a CPP n'a pas à avaliser purement et simplement les notes d'honoraires d'avocats qui lui sont soumises : elle doit, au contraire, examiner, tout d'abord, si l'assistance d'un conseil était nécessaire, puis, dans l'affirmative, apprécier objectivement la pertinence et l'adéquation des activités facturées, par rapport à la complexité juridique et factuelle de l'affaire, et, enfin, dire si le montant des honoraires réclamés, même conformes au tarif pratiqué à Genève, est proportionné à la difficulté et à l'importance de la cause, c'est-à-dire raisonnable au sens de la loi (ACPR/140/2013 du 12 avril 2013).

3.2.3. S'agissant d'un cas de défense obligatoire, il n'est pas contestable que l'assistance d'un avocat était nécessaire.

Conformément aux principes qui précèdent, le taux horaire pratiqué par le défenseur privé dans ses notes produites dans le cadre de la première procédure d'appel sera ramené à CHF 450.- pour lui-même et CHF 350.- pour sa collaboratrice.

Le nombre total de 54 heures et 20 minutes, pourrait également être discuté, dans la mesure où il paraît bien important. L'enjeu était certes grand pour un jeune homme qui n'avait pas un parcours de délinquant et menait des études supérieures, se destinant sans doute à des professions nécessitant un casier judiciaire vierge, ce qui peut expliquer en partie l'ampleur de l'activité de sa défense, mais le dossier ne présentait que peu de difficulté en ce qui concerne les faits, aucune au plan juridique et le volume en était au plus moyen. En outre, le défenseur privé et sa collaboratrice le connaissaient bien, pour l'avoir suivi depuis le début. Cela étant, il convient de ne pas se montrer trop chicanier, vu la faible mesure dans laquelle cette activité devra être prise en charge.

Le montant des dépenses nécessaires est partant exceptionnellement admis à hauteur de CHF 14'475.- (32 heures et 10 minutes au taux horaire de CHF 450.-) + CHF 7'758.30.- (22 heures et 10 minutes à CHF 350.-/heure) + CHF 667.- (frais forfaitaires par 3%) + CHF 1'763.30 (TVA au taux de 7.7% applicable en 2022 et 2023) + les débours par CHF 48.55, soit CHF 24'712.15.

7.3% de ces dépenses doivent être couverts par l'État, conformément aux art. 429 al. 1 let. a et 436 CPP, soit CHF 1'804.-.

4. 4.1. Lorsque le Tribunal fédéral admet un recours et renvoie la cause à l'autorité précédente, en l'occurrence à la juridiction d'appel cantonale, pour nouvelle décision, il appartient à cette dernière de statuer sur les frais sur la base de l'art. 428 CPP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1367/2017 du 13 avril 2018 consid. 2.1).

Les frais de la procédure d'appel postérieurs à un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral doivent être laissés à la charge de l'État si l'autorité d'appel doit revoir favorablement sa décision à la suite de l'arrêt de renvoi (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1367/2017 du 13 avril 2018 consid. 2.1.).

4.2.1. En l'espèce, l'arrêt de renvoi enjoignait la CPAR de revoir sa décision en faveur du prévenu en ce qui concernait l'affectation des sûretés, pas nécessairement s'agissant de la répartition des frais de la procédure et, en prolongement, des prétentions de l'appelant fondées sur l'art. 429 al. 1 let. a CPP. Le TF a en effet ouvert la voie à une décision favorable, soulignant que l'appelant n'avait pas intégralement succombé à l'issue de la première procédure ; néanmoins, la Haute cour n'a pas tranché la question des conséquences de ce constat, laissant le soin à la juridiction d'appel de produire un raisonnement motivé. En définitive, la CPAR a réduit la part des frais de la première procédure d'appel à charge de l'appelant dans une modeste mesure (réduction de 30% à 26% au lieu des 10% plaidés) et lui a alloué une indemnité de CHF 1'804.- au lieu des CHF 20'000.- requis.

On admettra ainsi que l'appelant obtient gain de cause dans une mesure qui peut être estimée à 70% (30% sur la non affectation des sûretés, 30% sur le principe de ce qu'il n'a pas totalement succombé en appel et 10% pour la faible mesure dans laquelle ses conclusions sur la répartition des frais des deux procédures d'appel et la couverture de ses honoraires d'avocat a été admise).

4.2.3. L'appelant supportera partant 30% des frais de la procédure après renvoi, lesquels comprennent un émolument de CHF 1'000.- (art. 14 du règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP).

4.2.4. Les principes déjà rappelés s'appliquent aux honoraires facturés par son conseil. On retranchera de sa note 45 minutes sur les 55 consacrées à l'analyse de l'arrêt de renvoi, car seuls deux considérants, modestes, sur sept, avaient traits aux points sur lesquels le recours a été admis et justifiaient un examen pour ce qui restait à régler. La rédaction des conclusions motivées ne nécessitait pas, même à l'aune peu sévère de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, les plus de cinq heures de travail facturées. On admettra trois heures, ce qui est déjà beaucoup. Le montant des honoraires adéquat sera partant arrêté à CHF 1'753.65, soit trois heures et 30 minutes (arrondi à la hausse) au taux de CHF 450.-/heure (CHF 1'575.-), les frais forfaitaires de 3% (CHF 47.25), la TVA au taux de 8.1% (CHF 131.40) et les débours par CHF 5.80. Une indemnité correspondant à 70% de cette somme, soit CHF 1'227.60, sera allouée à l'appelant.

5. La créance du précité en paiement des deux indemnités fondées sur l'art. 429 al. 1 let. a CPP est compensée, à due concurrence, avec sa dette afférente aux frais de procédure mis à sa charge (art. 442 al. 4 CPP), étant rappelé que l'art. 429 al. 3 CPP, entré en vigueur le 1er janvier 2024, n'est pas applicable à la présente cause, conformément à l'art. 453 al. 1 CPP.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Prend acte de l'arrêt du Tribunal fédéral du 2 juillet 2024 en la cause 6B_1160/2023 admettant partiellement le recours de A______, annulant l'arrêt AARP/291/2023 du 18 août 2023 et renvoyant la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision, le recours étant pour le surplus rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.

Reçoit partiellement l'appel formé par A______ contre le jugement JTCO/135/2022 rendu le 12 octobre 2022 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/11148/2020.

Annule ce jugement en ce qu'il concerne A______.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de brigandage aggravé (art. 140 ch. 1 et 3 CP), de contrainte (art. 181 CP), de violation de domicile (art. 186 CP) et de contravention à la LStup (art. 19a ch. 1 LStup).

Le condamne à une peine privative de liberté de 36 mois, sous déduction de 181 jours de détention avant jugement (dont 75 jours de détention et 106 jours au titre de l'imputation des mesures de substitution) (art. 40 et 51 CP).

Dit que la peine est prononcée sans sursis à raison de six mois.

Met pour le surplus A______ au bénéfice du sursis partiel et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 43 et 44 CP).

Avertit A______ de ce que, s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne A______ à une amende de CHF 200.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de deux jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Lève les mesures de substitution ordonnées le 8 mars 2021 par le Tribunal des mesures de contrainte.

Ordonne la libération des sûretés de CHF 10'000.- versées par Me F______, en faveur de A______ (art. 239 al. 1 et 240 al. 3 CPP).

Condamne A______ (conjointement et solidairement avec D______ et E______), à payer à C______ CHF 10'000.-, avec intérêts à 5% dès le 22 juin 2020, à titre de réparation du tort moral (art. 47/49 CO), la part à sa charge étant plafonnée à CHF 8'000.-, plus intérêts.

Renvoie C______ à agir par la voie civile s'agissant de ses conclusions civiles relatives au dommage matériel (art. 126 al. 2 CPP).

Ordonne la confiscation et la destruction de la drogue figurant sous chiffre 3 de l'inventaire n° 1______ (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à A______ [du téléphone portable] F______/2______ [marque/modèle] avec coque rouge code 3______ IMEIU 4______ figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 1______ et [du téléphone portable] F______/5______ [marque/modèle] rose pâle IMEI inconnu figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n° 1______ (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Condamne A______ à ¼ des frais de la procédure préliminaire et de première instance, lesquels s'élèvent à CHF 25'883.10 (art. 426 al. 1 CPP), sous déduction des frais liés à l'expertise (CHF 9'405.60, exclusivement mis à charge de D______).

Rappelle que les frais de la première procédure d'appel s'élèvent à CHF 6'575.-, comprenant un émolument de décision de CHF 6'000.-, et en met 26% à la charge de A______, soit CHF 1'709.50 (art. 428 CPP).

Arrête les frais de la seconde procédure d'appel à CHF 1'155.-, y compris un émolument de décision de CHF 1'000.-, et en met 30% à la charge de A______, soit CHF 346.50, le solde étant laissé à celle de l'État.

Alloue à A______, en couverture de ses dépenses nécessaires (art. 429 al. 1 let. a et 436 CPP), des indemnités de  :

-          CHF 1'804.- pour la première procédure d'appel ;

-          CHF 1'227.60 pour la seconde.

Compense, à due concurrence, les créances de A______ en paiement desdites indemnités avec celles de l'État afférentes à la part des frais de la procédure mise à la charge du condamné (442 al. 4 CPP).

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel.

 

La greffière :

Linda TAGHARIST

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision après renvoi :

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

80.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1000.00

Total des frais de la procédure d'appel après renvoi :

CHF

1'155.00