Aller au contenu principal

Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

1 resultats
P/17490/2022

AARP/181/2024 du 22.05.2024 sur JTDP/1374/2023 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : INFRACTIONS CONTRE LE DOMAINE SECRET;ILLICÉITÉ;ERREUR SUR LES FAITS(DROIT PÉNAL);ATTÉNUATION DE LA PEINE
Normes : CP.179ter; CP.13; CP.14; CP.48.letd; CP.48.lete; CP.52
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/17490/2022 AARP/181/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 22 mai 2024

Entre

A______, domiciliée ______ [GE], comparant par Me Pascal JUNOD, avocat, rue de la Rôtisserie 6, case postale 3763, 1211 Genève 3,

appelante,

contre le jugement JTDP/1374/2023 rendu le 27 octobre 2023 par le Tribunal de police,

 

et

 

B______, partie plaignante,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 27 octobre 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnue coupable d'enregistrement non autorisé de conversations (art. 179ter al. 1 du Code pénal suisse [CP]) et condamnée à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 50.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve : deux ans). Les frais de la procédure ont été mis à sa charge.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement.

b. Selon l'ordonnance pénale du 21 décembre 2022, il est reproché à A______ d'avoir, à Genève, le 15 août 2022, enregistré à son insu B______, conseillère en personnel auprès de [l'établissement] C______, lors d'un entretien que les deux femmes avaient ensemble.

B. Les faits de la cause ne sont pas contestés et peuvent être résumés comme suit, étant pour le surplus renvoyé au jugement de première instance (art. 82 al. 4 du Code de procédure pénale [CPP]).

a. A______ s'est inscrite le 5 août 2022 auprès de C______. Elle a été convoquée le 15 août suivant pour un premier entretien de conseil avec B______ dans les locaux de C______. A______ a enregistré cet entretien au moyen du dictaphone de son téléphone portable, sans en informer la conseillère, partant sans son consentement.

b. À la sortie de cet entretien, A______ a publié sur son canal D______ [réseau social] ("A______ – canal info officiel") les cinq premières minutes de cet enregistrement. Elle a intitulé sa publication : "Premier entretien au chômage : on fait connaissance … et surtout on lâche rien".

Elle a supprimé la publication le lendemain de sa diffusion après avoir consulté son avocat, lequel l'avait mise en garde contre l'illégalité d'un tel acte. Elle avait pris conseil auprès de lui suite à un commentaire l'interpellant quant au droit d'enregistrer une personne.

c. [L'établissement] C______ a eu connaissance de la publication de cet enregistrement le 18 août 2022.

B______ a déposé plainte pénale pour ces faits le 19 août 2022. Elle avait été informée de l'enregistrement par la direction de C______. Elle avait été gênée d'avoir été enregistrée à son insu, puis que la conversation ait été diffusée sur les réseaux sociaux.

d. Le 26 août 2022, A______ a présenté des excuses à B______ par courriel.

e. Au cours de la procédure, A______ a expliqué avoir publié cet extrait "à des fins journalistiques". Elle considérait avoir été victime d'arbitraire et licenciée abusivement par le E______ et l'État de Genève de son poste de ______ du fait qu'elle militait pour les droits humains et était une journaliste amateure. En agissant de la sorte, elle avait voulu faire un état des lieux de la manière dont était perçu son licenciement et de l'application des mesures sanitaires au sein de l'État, ainsi que montrer son cheminement suite à ce licenciement. Elle a précisé en première instance avoir enregistré l'entretien "par sécurité au vu des disfonctionnements dans le cadre de [sa] procédure de licenciement".

À la police, elle a précisé avoir pris soin que le lieu et la personne qu'elle enregistrait ne soient pas identifiables. Elle ne savait pas qu'il était illégal d'enregistrer quelqu'un sans son consentement.

f. A______ a produit une copie de sa carte de presse délivrée par [l'institution] F______.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions. Subsidiairement, elle sollicite qu'il soit renoncé à toute peine, à tout le moins que celle-ci soit atténuée, frais à la charge de l'État.

c. B______ conclut à la confirmation du jugement entrepris.

d. Le MP conclut au rejet de l'appel.

e. Les arguments plaidés seront discutés, dans la mesure de leur pertinence, au fil des considérants qui suivent.

D. a. A______, née en 1974, est de nationalité suisse. Elle est divorcée et n'a pas d'enfant. En 2022, elle a été licenciée par le E______ où elle exerçait en qualité de ______. Elle perçoit des indemnités du chômage. Son loyer s'élève à CHF 1'575.-, charges comprises, et son assurance maladie à CHF 351.- par mois. Elle n'a ni dettes, ni fortune.

b. A______ est sans antécédent à teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse.

 

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. 2.1. L'art. 179ter CP prévoit qu'est punissable quiconque, sans le consentement des autres interlocuteurs, enregistre sur un porteur de son une conversation non publique à laquelle il prend part, quiconque conserve un enregistrement qu'il sait ou doit présumer avoir été réalisé au moyen d'une infraction visée à l'al. 1, en tire profit, ou le rend accessible à un tiers.

Pour déterminer si une conversation est "non publique" au sens de l'art. 179ter CP, il faut examiner, au regard de l'ensemble des circonstances, dans quelle mesure elle pouvait et devait être entendue par des tiers. La conversation n'est pas publique lorsque ses participants s'entretiennent dans l'attente légitime que leurs propos ne soient pas accessibles à tout un chacun. La nature de la conversation peut constituer un indice à cet égard, mais n'est pas seule décisive. Cette solution permet ainsi de protéger l'individu contre la diffusion de ses propos en-dehors du cercle des personnes avec lequel il a choisi de partager ses opinions, peu importe en quelle qualité il s'est exprimé (ATF 146 IV 126 consid. 3.6).

Il est ainsi sans importance qu'une personne ait agi dans le cadre de ses devoirs de fonction, cette circonstance ne permettant pas de lui dénier le droit de pouvoir s'exprimer librement sans craindre que ses propos ne soient enregistrés à son insu (ATF 146 IV 126 consid. 3.7).

L'infraction est intentionnelle. Le dol éventuel suffit.

2.2. Aux termes de l'art. 13 al. 1 CP, quiconque agit sous l'influence d'une appréciation erronée des faits est jugé d'après cette appréciation si elle lui est favorable. Agit sous l'emprise d'une erreur sur les faits celui qui n'a pas connaissance ou qui se base sur une appréciation erronée d'un élément constitutif d'une infraction pénale. L'intention délictueuse fait défaut (ATF 129 IV 238 consid. 3.1).

L'erreur peut cependant aussi porter sur un fait justificatif, tel le cas de l'état de nécessité ou de la légitime défense putatifs ou encore sur un autre élément qui peut avoir pour effet d'atténuer ou d'exclure la peine (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1 ;
129 IV 6).

2.3. L'art. 14 CP dispose que quiconque agit comme la loi l'ordonne ou l'autorise se comporte de manière licite, même si l'acte est punissable en vertu du code pénal ou d'une autre loi. La licéité de l'acte est, en tous les cas, subordonnée à la condition qu'il soit proportionné à son but (ATF 107 IV 84 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_960/2017 du 2 mai 2018 consid. 3.2 ; 6B_507/2017 du 8 septembre 2017 consid. 3.4).

2.4. En l'espèce, l'appelante a enregistré, puis diffusé une partie de l'entretien ayant eu lieu avec l'intimée. Conformément à la jurisprudence récente du Tribunal fédéral, les propos tenus à cette occasion constituent une conversation non publique protégée par l'art. 179ter CP. L'entretien a eu lieu dans un espace clos. Il n'était pas destiné à être entendu par des tiers. La conseillère était dans l'attente légitime que la teneur de l'entretien ne soit pas accessible à tout un chacun. Peu importe que celle-ci ait agi dans sa fonction de conseillère de C______. Elle était en droit de pouvoir s'exprimer librement sans craindre que ses propos ne soient enregistrés à son insu.

La prévenue a agi intentionnellement, à tout le moins s'est-elle doutée de l'illicéité de son comportement, dès lors qu'elle a pris le soin que ni le lieu, ni la personne enregistrée ne puissent être identifiés, précautions qu'elle n'aurait pas eu à prendre si elle avait été persuadée du contraire. Elle était ainsi consciente du caractère non public de la conversation, celle-ci ayant lieu dans un espace fermé, ainsi que de l'absence du consentement de la plaignante à l'enregistrement, ne l'ayant délibérément pas demandé, sachant qu'elle ne l'obtiendrait très vraisemblablement pas.

Partant, les éléments constitutifs de l'infraction à l'art. 179ter CP sont réalisés.

2.5. La défense invoque la réalisation d'un fait justificatif extra-légal, soit l'intérêt journalistique de la démarche (cf. art. 14 CP), et l'erreur sur les faits (art. 13 CP).

Dans le cas d'espèce, on ne voit pas en quoi consisterait l'intérêt journalistique, ni quel intérêt légitime entrerait en considération s'agissant de l'enregistrement d'un entretien de conseil avec C______. Il s'agissait d'un premier entretien, lequel poursuivait un objectif de mise en contact avec la conseillère qui avait été attribuée à l'appelante. Bien que celle-ci considère que son licenciement était entaché d'erreurs, elle n'avait à ce stade aucunement connaissance de quelconques disfonctionnements au sein de C______ qui auraient nécessité d'être portés à la connaissance du public. Au contraire, elle a agi dans son intérêt personnel, sans se préoccuper de l'intérêt personnel de la partie plaignante. Si, comme elle l'a soutenu dans la procédure, elle avait souhaité agir "par sécurité" pour éviter de nouveaux problèmes, il paraît évident qu'elle aurait dû demander l'accord de la conseillère, de sorte à ne pas elle-même être à l'origine d'un acte illégal, dans le contexte des reproches d'arbitraire qu'elle formulait à l'encontre de l'État. Vu les précautions prises, elle ne saurait être suivie lorsqu'elle soutient qu'elle pensait de bonne foi qu'il y avait un intérêt journalistique à enregistrer l'entretien à l'insu de la conseillère d'un service de l'État n'étant en rien concerné par ses démêlés avec le E______. Un tel acte atteint directement les droits d'autrui et n'est en conséquence pas négligeable, d'autant plus qu'il s'agissait bien plutôt uniquement d'un intérêt personnel de l'appelante. Ces éléments devaient la conduire, en tous les cas, à s'assurer préalablement de la totale légalité de son acte. Il lui était d'ailleurs aisé de le faire, étant d'ores et déjà assistée d'un avocat.

Partant, aucun fait justificatif n'entre en considération en l'espèce.

Une erreur sur les faits ne saurait entrer en considération ici dans la mesure où l'appelante, dans les circonstances déjà relevées, a réalisé avec conscience et volonté, à tout le moins par dol éventuel, l'ensemble des éléments constitutifs de l'infraction (conversation non publique, enregistrement sur un porteur de son, absence de consentement ; cf. supra consid. 2.4). Le verdict de culpabilité retenu par le premier juge sera confirmé.

3. 3.1. L'infraction à l'art. 179ter CP est réprimée d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire.

3.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

3.3.1. Le juge atténue la peine si l'auteur a manifesté par des actes un repentir sincère, notamment s'il a réparé le dommage autant qu'on pouvait l'attendre de lui (art. 48 let. d CP). Le repentir sincère n'est réalisé que si l'auteur a adopté un comportement particulier, désintéressé et méritoire. L'auteur doit avoir agi de son propre mouvement dans un esprit de repentir, dont il doit avoir fait la preuve en tentant, au prix de sacrifices, de réparer le tort qu'il a causé (ATF 107 IV 98 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_443/2020 du 11 juin 2020 consid. 1.2.2 et 6B_1368/2016 du 15 novembre 2017 consid. 5.1). La seule réparation du dommage ne témoigne pas nécessairement d'un repentir sincère ; un geste isolé ou dicté par l'approche du procès pénal ne suffit pas ; l'effort particulier exigé implique qu'il soit fourni librement et durablement (ATF 107 IV 98 consid. 1). De même, le fait qu'un délinquant ait passé des aveux ou manifesté des remords n'est pas non plus suffisant. Il n'est en effet pas rare que, confronté à des moyens de preuve ou constatant qu'il ne pourra échapper à une sanction, un accusé choisisse de dire la vérité ou d'exprimer des regrets ; un tel comportement n'est pas particulièrement méritoire
(ATF 117 IV 112 consid. 1 ; 116 IV 288 consid. 2a).

3.3.2. L'art. 48 let. e CP prescrit au juge de diminuer la peine si l'intérêt à punir a sensiblement diminué en raison du temps écoulé depuis l'infraction et que l'auteur s'est bien comporté dans l'intervalle.

L'atténuation de la peine en raison du temps écoulé depuis l'infraction procède de la même idée que la prescription. L'effet guérisseur du temps écoulé, qui rend moindre la nécessité de punir, doit aussi pouvoir être pris en considération lorsque la prescription n'est pas encore acquise, si l'infraction est ancienne et si le délinquant s'est bien comporté dans l'intervalle. Cela suppose qu'un temps relativement long se soit écoulé depuis le jour de l'infraction jusqu'à celui où les faits sont définitivement constatés et que la prescription de l'action pénale est près d'être acquise. Cette condition est en tout cas réalisée lorsque les deux tiers du délai de prescription de l'action pénale sont écoulés. Le juge peut toutefois réduire ce délai pour tenir compte de la nature et de la gravité de l'infraction. Il doit se référer à la date à laquelle les faits ont été souverainement établis, et non au jugement de première instance. Ainsi, lorsque le condamné a fait appel, il faut prendre en considération le moment où le jugement de seconde instance a été rendu dès lors que ce recours a un effet dévolutif (ATF 140 IV 145 consid. 3.1).

3.4. Selon l'art. 52 CP, si la culpabilité de l'auteur et les conséquences de son acte – conditions cumulatives – sont peu importantes, l'autorité compétente renonce à lui infliger une peine.

L'exemption de peine suppose que l'infraction soit de peu d'importance, tant au regard de la culpabilité de l'auteur que du résultat de l'acte. L'importance de la culpabilité et celle du résultat dans le cas particulier doivent être évaluées par comparaison avec celle de la culpabilité et celle du résultat dans les cas typiques de faits punissables revêtant la même qualification ; il ne s'agit pas d'annuler, par une disposition générale, toutes les peines mineures prévues par la loi (Message concernant la modification du code pénal suisse [dispositions générales, entrée en vigueur et application du code pénal] et du code pénal militaire ainsi qu'une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs du 21 septembre 1998,
FF 1999 p. 1871). Pour apprécier la culpabilité, il faut tenir compte de tous les éléments pertinents pour la fixation de la peine, notamment des circonstances personnelles de l'auteur, tels que les antécédents, la situation personnelle ou le comportement de l'auteur après l'infraction. Une violation du principe de célérité ou un long écoulement de temps depuis les faits peuvent également être pris en considération (ATF 135 IV 130 consid. 5.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_839/2015 du 26 août 2016 consid. 6.1).

Si, au regard de l'art. 47 al. 2 CP, la culpabilité est notamment déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, soit par la gravité objective du comportement, l'art. 52 CP impose d'apprécier séparément cet aspect et les autres éléments déterminant la culpabilité. Il n'y a donc pas de contradiction intrinsèque à retenir, d'une part, que la culpabilité doit être qualifiée de peu importante au sens de l'art. 52 CP et, de l'autre, que les conséquences de l'activité illicite ne le sont pas (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1233/2016 du 29 août 2017 consid. 3.2).

3.5. La défense sollicite une exemption de peine au sens de l'art. 52 CP, subsidiairement une atténuation de celle-ci sur la base de l'art. 48 let. d et e CP.

Les conditions de l'art. 52 CP ne sont pas remplies en l'espèce. La culpabilité de la prévenue est importante. Elle a délibérément enregistré à son insu une fonctionnaire de C______ lors d'un entretien privé, consciente de ce que celle-ci refuserait si la question lui était posée, ce alors même qu'elle explique son geste par la volonté de s'assurer une procédure régulière. L'enregistrement, même s'il ne constitue qu'une partie de l'entretien, dure cinq minutes, ce qui n'est pas négligeable.

La circonstance atténuante du repentir sincère (art. 48 let. d CP) n'est pas réalisée. Le retrait de la publication, ainsi que les excuses, n'excèdent pas ce qui peut être attendu de tout prévenu dans le cadre d'une procédure pénale. De surcroît, l'appelante continue de contester le caractère illicite de son acte.

La faute de l'appelante n'est pas négligeable. Elle s'en est prise au droit de tout un chacun de ne pas être enregistré à son insu.

Elle a agi pour la défense de ses intérêts personnels, sans considération d'autrui et les dispositions pénales applicables, décidant volontairement de ne pas informer ni obtenir le consentement de l'intimée. Comme développé ci-dessus, aucun intérêt public n'est réalisé en l'espèce.

La collaboration de l'appelante est bonne. Elle a d'emblée reconnu les faits. Il n'en va pas de même de sa prise de conscience dès lors qu'elle persiste en appel à arguer que ses actes étaient motivés par la poursuite d'intérêts légitimes, étant cependant relevé qu'elle a limité d'elle-même les conséquences de cet enregistrement. Elle a de plus rapidement présenté des excuses à la plaignante.

Elle est sans antécédent, facteur neutre dans la fixation de la peine.

Les conditions de la circonstance atténuante en raison du temps écoulé ne sont pas non plus données (art. 48 let. e CP). L'appelante s'est rendue coupable d'un délit, pour lequel l'action pénale se prescrit dans un délai de sept ans (art. 97 al. 1 let. d CP), dont le tiers n'est pas encore atteint à ce jour et qui n'est dès lors de loin pas échu. Les faits n'étant pas négligeables, l'infraction en cause ne justifie pas de réduire drastiquement le seuil des deux tiers du délai de prescription prévu par la jurisprudence.

3.6. Ainsi, la quotité de la peine pécuniaire de 30 jours-amende sanctionne adéquatement l'infraction à l'art. 179ter CP. Il en va de même du montant du jour-amende, fixé à CHF 50.- par le premier juge. Partant, la peine sera entièrement confirmée.

Le sursis prononcé est acquis à la prévenue (art. 42 al. 1 CP et 391 al. 2 CPP). Le délai d'épreuve, arrêté à deux ans, n'est pas critiquable.

Au vu de ce qui précède, l'appel est rejeté et le jugement entrepris confirmé.

4. L'appelante, qui succombe, supportera les frais de la procédure envers l'État (art. 428 CPP), lesquels comprennent un émolument de décision de CHF 1'500.-. L'émolument complémentaire de jugement, arrêté à CHF 600.- par le TP, suivra le même sort.

Le verdict de culpabilité étant confirmé en appel, la répartition des frais de la procédure préliminaire et de première instance ne sera pas revue (cf. art. 428 al. 3 CPP).

5. Les conclusions de la prévenue en indemnisation pour ses frais de défense (art. 429 CPP) seront rejetées vu la confirmation du verdict de culpabilité.

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1374/2023 rendu le 27 octobre 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/17490/2022.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 1'715.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'500.-.

Met l’émolument complémentaire de jugement de première instance de CHF 600.- à la charge de A______.

 

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

" Déclare A______ coupable d'enregistrement non autorisé de conversations (art. 179ter al. 1 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 50.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à deux ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'008.- (art. 426 al. 1 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP) ".

Notifie le présent arrêt aux parties.

 

 

 

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

La greffière :

Anne-Sophie RICCI

 

Le président :

Pierre BUNGENER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'608.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

140.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'715.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'323.00