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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/2262/2019

AARP/155/2024 du 08.05.2024 sur JTDP/1123/2023 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : VIOLENCE DOMESTIQUE
Normes : CP.123; CP.126

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

P/2262/2019 AARP/155/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 8 mai 2024

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me B______, avocat,

appelant,

intimé sur appel joint,

 


contre le jugement JTDP/1123/2023 rendu le 1er septembre 2023 par le Tribunal de police,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

appelant sur appel joint,

intimé sur appel principal,


EN FAIT :

A.           Saisine de la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR)

a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/1123/2023 du 1er septembre 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) a classé la procédure pour les faits du 28 août 2017, qualifiés de voies de fait (prescription), l'a acquitté pour les faits de mars 2016, l'a reconnu coupable de lésions corporelles simples qualifiées pour les faits de juillet 2016 et du 21 février 2018, l'a condamné à une peine pécuniaire de 45 jours-amende, à CHF 60.- l'unité, complémentaire à celle prononcée le 23 janvier 2019, l'a mis au bénéfice du sursis, délai d'épreuve de trois ans, l'a condamné aux 2/3 des frais de la procédure et a rejeté ses conclusions en indemnisation.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à l'acquittement des chefs d'accusation qui demeurent (faits de juillet 2016 et du 21 février 2018) et à l'octroi d'une indemnité pour ses frais de première instance et d'appel.

b. Le Ministère public (MP), appelant joint, entreprend partiellement ce jugement, concluant à la condamnation de A______ du chef de lésions corporelles simples qualifiées pour les faits du 28 août 2017 également, au prononcé d'une peine pécuniaire de 60 jours-amende, d'une amende à titre de sanction immédiate de CHF 720.- et au déboutement de toutes autres conclusions.

c. Selon l'ordonnance pénale du 1er novembre 2022, valant acte d'accusation, il est reproché ce qui suit à A______ : il a, de janvier 2016 à février 2018, durant son mariage avec C______, plus particulièrement en mars 2016, juillet 2016, le 28 août 2017 et le 21 février 2018, frappé celle-ci à de réitérées reprises, lui causant de la sorte des lésions.

B.            Faits résultant du dossier de première instance

a. Le 3 février 2019, C______ a déposé plainte pénale, à la police, contre son époux, A______.

Ils s'étaient mariés en janvier 2016. Dès le lendemain de leur union, il n'avait pas cessé de la frapper. Il était psychologiquement instable. Les deux premières années, elle avait reçu des coups environ une fois par mois. Dès avril 2017, bien qu'elle fût enceinte, il avait continué de la frapper. Elle vivait cela depuis trois ans. Elle en avait marre. Elle avait été blessée, eu de nombreux hématomes. En mars 2016, elle avait été frappée au bras avec un tuyau de douche – A______ était ensuite allé chercher un couteau pour menacer de la tuer. En juillet 2016, son tympan avait été perforé par une gifle. Elle s'était rendue plusieurs fois à l'hôpital pour faire constater ses lésions – elle était en mesure de transmettre des certificats médicaux. Elle avait pris des photographies après avoir essuyé des coups. Elle n'était pas allée à la police suite à ces disputes et violences car elle avait peur de lui. Il menaçait de lui faire perdre son permis B et la faisait culpabiliser. Pensant que c'était de sa propre faute, elle avait donc patienté.

C______ a relaté des faits relevant de viol, contrainte sexuelle, tentatives de meurtre – sur sa personne et celle de leur fils – et menaces.

b. À teneur du rapport de renseignements du même jour, une recherche d'antécédents avait été faite sur une durée de 36 mois. Le couple était connu des services de police pour des faits datés du 3 mars 2018 (main courante – pas de plainte).

c.a. À l'appui de sa plainte, C______ a produit sept photographies (non datées) montrant des rougeurs au visage et au bras.

c.b. Elle a en outre produit :

·         Un "CONSTAT" du Dr. D______, rue 1______ no. ______ à Genève, daté du 30 août 2017, à teneur duquel, examinée le jour même, elle "déclare avoir [eu] une altercation verbale le 28.08.2017 vers 22,30 heures [avec] son époux M A______. L'agresseur lui aurait donné : des coups de pied aux genoux en suite il lui aurait attrapé avec ces mains les deux bras et il l'aurait attrapé les deux poignets. À l'examen clinique on constate : Ecchymoses de 3cm à droit et de 1 cm à gauche sur les deux deltoïdes, une ecchymose de 1cm au pli du coude droit, deux ecchymoses de 0,5 cm sus rotuliens droit. Deux dermabrasions linières parallèles de 3 cm sur la face postérieure de la partie distale de l'avant-bras droit et une petite dermabrasion linière de 1cm sur la face antérieure du poignet gauche. Les lésions sont d'origine traumatique et peuvent avoir été causées par les sévices qu'il dit voir subis" ;

·         Un "CONSTAT MEDICAL" des HUG daté du 21 février 2018, qui relève : "Vers 00h30 le 21 février 2018, [C______] aurait été agressée par son conjoint. Après une discussion avec cette dernière, il se serait énervé, aurait pris un couteau et l'aurait menacée de mort. Elle se serait réfugiée dans sa chambre, mais son conjoint aurait forcé la porte. À ce moment, il lui aurait donné un coup de tête au niveau frontal gauche, puis l'aurait poussée contre une armoire avant de lui donner un dernier coup au niveau de la mandibule droite. Plaintes et symptômes : La patiente décrit actuellement surtout des douleurs au niveau frontal gauche. Pas d'autres plaintes somatiques. L'examen médical met en évidence : Hématome frontal gauche, douloureux à la palpation. Erythème en regard de l'angle mandibulaire inférieur à droite. Nous ne mettons pas en évidence d'autre lésion au moment de l'examen. Sur le plan psychique on relève : La patiente est angoissée et se sent esseulée vis-à-vis de la situation. Examens complémentaires : Nihil. Soins prodigués, traitement : Surveillance neurologique 4 heures. Antalgie simple par paracétamol" ;

Sont joints au constat des photographies de l'"Erythème mandibulaire" et de l'"Hématome frontal gauche" prises par les HUG.

d.a. Au MP, C______ a déclaré qu'en juillet 2016, elle avait été victime d'une perforation du tympan, dans leur appartement à E______ [France] – ils y avaient vécu de janvier à août 2016. Elle devait alors remplir un formulaire de demande de permis B, qu'elle ne comprenait pas. Elle avait demandé à son époux de l'aider mais il n'avait pas voulu. Elle lui avait donc "balancé" la feuille et il s'était fâché. Elle ne savait plus dans quel ordre ça s'était passé mais il avait couru dans la salle de bain et récupéré un tuyau de douche, qu'il avait lancé dans sa direction et qu'elle avait évité. Il l'avait ensuite frappée avec ce tuyau, à une reprise. Pour se protéger, elle avait "mis le bras". Elle avait donc eu la marque du tuyau sur celui-ci. Sur l'une des photographies produites, on voyait la marque en question. Après avoir reçu ce coup de tuyau, elle s'était réfugiée dans la salle de bain et avait fermé la porte à clef. Là, elle avait pris des photos – celles qu'elle avait produites. Après qu'elle avait rouvert la porte, A______ était entré calmement dans la pièce et lui avait "foutu" une gifle – elle ne s'y attendait pas –, avant de partir. Elle avait alors remarqué qu'elle n'entendait plus – c'était l'oreille gauche. Elle ne s'était confiée à personne au sujet de cette perforation de tympan. Elle avait consulté un médecin en France.

Après la naissance de leur fils en décembre 2017, A______ l'avait frappée, en février 2018 sauf erreur. Il lui avait donné un "coup de boule". Cela n'était arrivé qu'une fois – ça s'était passé dans la chambre. Elle s'était rendue aux HUG – il y avait un certificat médical. Elle ne s'était confiée à personne au sujet de ces violences. Il n'y avait plus eu d'autre épisode après celui de février 2018.

A______ l'avait menacée deux fois avec un couteau – les deux fois en 2016, en France. Référence faite au contenu du certificat médical du 21 février 2018, elle pouvait dire qu'après qu'elle s'était réfugiée dans la chambre, A______ était allé à la cuisine. Elle ne savait pas s'il y avait pris un couteau ; elle n'en avait pas vu. Mais comme les deux fois, en 2016, il s'était rendu à la cuisine pour prendre un couteau, elle avait pensé qu'il en avait fait de même cette fois-ci. Elle avait fait part de cette déduction au médecin.

Elle n'avait pas peur de A______. Il n'était pas du tout de nature violente. Il s'agissait d'une personne très gentille, très polie et très respectueuse, quand tout se passait bien. Il fallait vraiment qu'elle le pousse à bout et l'insulte pour qu'il s'énerve. Il était calme alors qu'elle ne l'était pas. C'était elle qui "commençait" et des fois ça finissait mal. Dire de A______ qu'il la frappait "régulièrement" lui posait problème : il ne l'avait frappée que les fois où elle avait obtenu des rapports médicaux. Plusieurs fois, cependant, elle n'avait pas fait établir de rapport médical, par exemple lorsqu'il la poussait, la pinçait ou lui lançait un sac – "des petites choses comme ça".

d.b. C______ a produit, au MP, un "CERTIFICAT" du Centre Hospitalier F______ / Dre G______, à teneur duquel, demeurant rue 2______ no. ______ à E______, elle "[disait] avoir été victime d'un traumatisme au niveau de l'oreille le 19/07/2016. À l'examen, on met en évidence une perforation antérieure d'allure traumatique au niveau du tympan gauche. Le tympan droit est sans particularité. Nous avons réalisé une audiométrie qui met en évidence une petite surdité de transmission à gauche, en rapport avec cette perforation. La patiente sera revue en consultation de contrôle dans un mois. ITT de 8 jours".

e.a. Entendu à la police le 3 février 2019, A______ a déclaré qu'il vivait une relation compliquée avec sa femme depuis trois ans, soit depuis qu'ils étaient mariés. Elle était fragile psychologiquement. En 2017, tandis qu'elle attendait leur enfant, il s'était dit que l'arrivée de celui-ci ferait du bien à leur couple et que les choses s'arrangeraient. Mais ils avaient continué de se disputer, bien trop souvent. À cinq ou six reprises, il était parti quelques semaines pour faire un break, chez ses parents ou chez sa sœur. Il avait toutefois toujours regagné le domicile conjugal, pensant que ça irait mieux. Ce que C______ soutenait, soit qu'elle était régulièrement victime de violences de sa part, n'était pas vrai. Si ce qu'elle avançait était exact, pourquoi n'avait-elle jamais fait appel à la police ou lancé de procédure ? Elle mentait. Il avait certes des disputes avec sa femme presque tous les jours, mais cela restait verbal. Il ne lui était arrivé qu'une seule fois d'être violent envers elle : il lui avait "mis" une claque après qu'elle avait souhaité que sa mère ne se relevât pas de son opération – c'était la seule fois qu'il l'avait frappée.

e.b. Au MP, A______ a déclaré que, depuis leur mariage, soit dès le départ, ça n'allait pas. Ils ne s'entendaient pas. Il contestait cependant les faits. Il n'était pas l'auteur de ce que l'on voyait sur les photographies – il ne savait pas en quoi "consistaient" ces images. Il ne s'était pas inquiété de voir sa femme avec des "hématomes" au visage. Il n'avait pas vu de marque. Il rappelait qu'après chaque dispute il quittait la maison : soit il sortait pour se calmer, soit il quittait provisoirement leur domicile, ce qui pouvait durer plusieurs jours, voire plusieurs semaines – le 3 février 2019 il en avait eu marre et avait quitté définitivement le domicile conjugal. Les déclarations de C______, au sujet des coups reçus, n'étaient que pur mensonge. Il n'était pas quelqu'un de violent ou d'agressif et ne savait pas d'où venaient les accusations de celle-ci. Elle avait toujours dit que s'il divorçait, elle lui créerait des problèmes et ferait de fausses déclarations pour lui pourrir la vie. Quant aux certificats médicaux, il ne savait pas de quoi il s'agissait, car il n'avait jamais vu les lésions qui y étaient mentionnées.

f. Par courrier du 7 avril 2019 adressé au MP, C______ a retiré sa plainte pénale "car [elle regrettait] d'avoir accusé [son] mari ce jour-là pour plusieurs choses. [Elle était] vraiment en colère contre lui car il avait refusé de s'occuper de [leur] fils".

g. Le 16 février 2021, C______ a saisi le Tribunal de première instance d'une demande unilatérale de divorce.

h. À l'appui de son ordonnance de classement (partiel) du 1er novembre 2022, le MP a résumé les faits dénoncés par C______ et statué à leur sujet. Il a rappelé les charges : 1) en mars 2015, dans l'appartement sis rue 3______ no. ______ à H______ [GE], A______ avait déshabillé de force C______, avant de la contraindre à une pénétration vaginale avec les doigts et le pénis, tandis qu'elle marquait son refus physiquement et lui disait qu'elle ne voulait pas ; 2) en avril 2017, au domicile conjugal sis rue 4______ no. ______ à I______ [GE], A______ avait étranglé C______ sur le canapé, après l'y avoir jetée, avant de la lâcher, constatant qu'il pouvait la tuer ; 3) de janvier 2016 à février 2019, A______ avait effrayé C______ par des menaces graves, soit celle de s'en prendre à sa vie et à son intégrité corporelle, ainsi qu'à celles de leur fils ; à une occasion, il l'avait mise au sol, un couteau sous la gorge, en lui intimant l'ordre de prononcer un dernier mot ; 4) durant la même période, à de réitérées reprises, il avait frappé C______, y compris durant sa grossesse ; 5) le 3 février 2019, au domicile conjugal sis rue 5______ no. ______ à H______, après avoir constaté que leur fils, J______, alors âgé de 13 mois, ne cessait de pleurer, A______ l'avait pris dans les bras et violemment secoué en disant qu'il allait le tuer, en s'accommodant d'une issue fatale pour le cas où elle surviendrait et 6) le même jour, il avait poussé C______ contre un mur et menacé celle-ci de s'en prendre à sa vie ainsi qu'à celle de ses proches, soit son père et ses frères.

À teneur de l'ordonnance de classement, C______ était toutefois revenue sur ses déclarations. Elle avait indiqué que A______ ne l'avait pas violée, ni contrainte sexuellement. La relation sexuelle avait été consentie et "bien". Lors du dépôt de plainte, elle était fatiguée et le policier lui avait fait dire des choses pour lesquelles elle n'était pas venue. S'agissant de la strangulation, A______ l'avait bien étranglée, mais il lui avait tenu le cou avec une seule main sans qu'elle n'ait le souffle coupé, avant de la lâcher. Les menaces proférées par A______ ne lui avaient pas fait peur car elle savait qu'il n'avait pas l'intention de les mettre à exécution. Contrairement à ce qu'elle avait déclaré précédemment, elle n'avait pas vu A______ secouer leur fils, car elle se trouvait à la cuisine – elle avait dit, initialement, avoir vu A______ secouer très fort J______ – et elle ne savait plus si elle l'avait entendu dire qu'il allait le tuer – elle avait couru dans la chambre et vu J______ dans les bras de son père.

De son côté, retenait le MP, A______ contestait l'ensemble des faits qui lui étaient reprochés. Il fallait donc constater qu'aucun soupçon justifiant une mise en accusation n'était établi pour les infractions de contrainte sexuelle (art. 189 CP), viol (art. 190 CP) et tentative de meurtre sur la personne de C______ (art. 111 cum art. 22 al. 1 CP). S'agissant des menaces (art. 180 al. 1 et 2 CP), les versions des époux étaient contradictoires, tout comme celles relatives aux voies de fait (art. 126 al. 1 et 2 CP). Quant aux faits susceptibles d'être qualifiés de tentative de meurtre par dol éventuel sur l'enfant J______ (art. 111 cum art. 22 al. 1 CP), C______ était revenue sur l'ensemble de ses déclarations ; et le dossier médical de l'enfant (HUG) ne montrait aucun signe de traumatisme, de fracture, de saignement intracrânien, d'hémorragie rétinienne, de lésion cutanée ou d'atteinte neurologique – l'IRM était normale. Aucun soupçon justifiant une mise en accusation n'était donc retenu, pour ces faits également. Dans ces circonstances, le classement de la procédure pénale devait être ordonné à l'égard du prévenu, pour l'ensemble de ces infractions.

i. Au Tribunal, A______ a contesté les faits. Jamais il n'avait utilisé de tuyau de douche pour frapper sa femme. Elle avait inventé cet épisode. Il n'avait pas remarqué que sa femme avait mal à l'oreille ou qu'elle n'entendait pas bien. Il n'avait pas pris son épouse par les bras et les poignets et ne lui avait pas donné de coup de pied. Il n'avait pas connaissance des certificats médicaux avant qu'elle ne les produise. Il ne savait pas d'où venaient ces lésions. S'il les avait commises, il les assumerait. Il rappelait que la seule chose qu'il avait faite, c'était de lui avoir donné une gifle en 2018 en lien avec sa mère qui s'était fait opérée, ce geste ne figurant pas dans l'acte d'accusation. Pour le surplus, jamais il ne l'avait touchée, même pour la bousculer, la pousser ou la tenir. Elle avait toujours dit que s'il la quittait, elle lui ferait vivre un enfer et c'était ce qui se produisait.

C.           Procédure d'appel

a. Aux débats, A______ a maintenu sa position. Il était innocent. Référence faite aux certificats médicaux, ils vivaient sous le même toit et il n'avait jamais rien remarqué, d'hématome en particulier, en toute sincérité. La seule chose qu'il regrettait, c'était – comme il l'avait déjà dit – la gifle de 2018.

b. Par la voix de son conseil, A______, tout comme le MP, ont persisté dans leurs conclusions. Leurs arguments seront examinés ci-après.

D.           Situation personnelle antécédent(s)

a. A______, âgé de 37 ans, de nationalités suisse et turque, est père d'un enfant de six ans. Travaillant comme agent immobilier pour sa propre société, il réalise un revenu mensuel de CHF 4'500.-. Son loyer s'élève à CHF 1'650.-, sa prime d'assurance-maladie à CHF 500.-, sa charge fiscale (annuelle) à CHF 6'000.- et il verse CHF 500.- au titre de contribution à l'entretien de son fils.

b. A______ a été condamné le 23 janvier 2019 par le MP à une peine pécuniaire de 20 jours-amende, à CHF 60.- l'unité, assortie du sursis, délai d'épreuve de trois ans pour infraction à la loi fédérale sur les étrangers (art. 116 al. 1 let. a LEI).

EN DROIT :

1.             L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décision illégale ou inéquitable (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions (art. 391 al. 1 CPP).

2.             2.1. Le code pénal suisse [CP] est applicable à quiconque commet un crime ou un délit en Suisse (art. 3 al. 1 CP).  Le CP est également applicable à quiconque commet un crime ou un délit à l’étranger (sans que soient réalisées les conditions prévues aux art. 4, 5 ou 6 CP) si l’acte est aussi réprimé dans l’État où il a été commis ou que le lieu de commission de l’acte ne relève d’aucune juridiction pénale, si l’auteur se trouve en Suisse ou qu’il est remis à la Suisse en raison de cet acte et si, selon le droit suisse, l’acte peut donner lieu à l’extradition, mais que l’auteur n’est pas extradé (art. 7 al. 1 CP).

Sous l'angle de la double punissabilité, si les faits sont prescrits selon la loi en vigueur au lieu de commission, la poursuite ne peut pas avoir lieu en Suisse. En d'autres termes, si la prescription est intervenue selon l'un des droits nationaux en cause, toute condamnation est exclue. En droit français, l'ancien délai de prescription de l'action publique était de trois ans pour les délits à compter du jour où l'infraction avait été commise. La loi n° 2017-242 du 27 février 2017, entrée en vigueur le 1er mars 2017, a fait passer ce délai à six ans. Ce nouveau délai s'applique aux faits non prescrits à la date d'entrée en vigueur de la nouvelle, le 1er mars 2017. L'interruption de la prescription peut résulter des actes de poursuites ou d'instruction accomplis par les autorités étrangères. En cas d'interruption, un nouveau délai recommence à courir à compter de la date de l'acte interruptif (arrêt du Tribunal fédéral 6B_343/2021 du 9 décembre 2021, consid. 4.1 et 4.3). 

2.2. La procédure tend à démontrer que les faits de juillet 2016, visés par l'acte d'accusation, ont été commis à E______, les parties y ayant vécu de janvier à août 2016. Le CP s'applique néanmoins à ces faits, les conditions d'application de l'art. 7 al. 1 CP étant réalisées, ce que la défense ne conteste pas. Les différents actes d'enquête pénale accomplis en Suisse, dont le dépôt de la plainte pénale, le 3 février 2019, ont régulièrement interrompu la prescription, de sorte que l'action publique n'est pas prescrite en France, ce que la défense ne conteste pas non plus.

3.             3.1.1.1. La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 de la Constitution fédérale [Cst.], 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales [CEDH], ainsi que son corollaire, le principe "in dubio pro reo", concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 148 IV 409 consid. 2.2).

3.1.1.2. Selon la systématique du CPP, c'est en premier lieu au MP qu'il incombe d'administrer les preuves nécessaires. Il lui appartient, en effet, dans le cas d'une mise en accusation, de fournir au tribunal les éléments essentiels lui permettant de juger de la culpabilité du prévenu et de fixer la peine. Le MP porte ainsi la responsabilité principale de l'établissement des faits (art. 308 al. 1 et 3 CPP ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_24/2015 du 2 décembre 2015 consid. 2.1). Un dossier peu solide doit conduire à l'acquittement (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 1 ad art. 351 CPP).

3.1.1.3. Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve. Le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, les apprécier librement (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1283/2019 du 21 janvier 2020 consid. 1.2 ; 6B_1283/2018 du 14 février 2019 consid. 1.3), sous réserve des cas particuliers où une expertise de la crédibilité des déclarations de la victime s'impose (ATF 129 IV 179 consid. 2.4). Les cas de "déclarations contre déclarations", dans lesquels les déclarations de la victime en tant que principal élément à charge et les déclarations contradictoires de la personne accusée s'opposent, ne doivent pas nécessairement, sur la base du principe "in dubio pro reo", conduire à un acquittement. L'appréciation définitive des déclarations des participants incombe au tribunal du fond (ATF 137 IV 122 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_717/2020 du 26 novembre 2020 consid. 2.1). 

3.1.2. L'art. 123 ch. 1 CP, dans sa teneur jusqu'au 30 juin 2023, dispose que celui qui, intentionnellement, aura fait subir à une personne une (autre) atteinte à l’intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire. Dans les cas de peu de gravité, le juge pourra atténuer la peine (art. 48a). L’auteur est poursuivi d’office s’il est le conjoint de la victime et que l’atteinte est commise durant le mariage ou dans l’année qui suit le divorce (ch. 2 al. 3).

3.1.3. À teneur de l'art. 126 al. 1 CP, quiconque se livre sur une personne à des voies de fait qui ne causent ni lésion corporelle ni atteinte à la santé est, sur plainte, puni d’une amende. La poursuite a lieu d’office si l’auteur agit à réitérées reprises contre son conjoint durant le mariage ou dans l’année qui suit le divorce (al. 2 let. b).

3.1.4. L'art. 123 CP protège l'intégrité corporelle et la santé tant physique que psychique. Elle implique une atteinte importante aux biens juridiques ainsi protégés. À titre d'exemples, la jurisprudence cite l'administration d'injections, la tonsure totale et tout acte qui provoque un état maladif, l'aggrave ou en retarde la guérison, comme les blessures, les meurtrissures, les écorchures ou les griffures, sauf si ces lésions n'ont pas d'autres conséquences qu'un trouble passager et sans importance du sentiment de bien-être. Les voies de fait, réprimées par l'art. 126 CP, se définissent comme des atteintes physiques qui excèdent ce qui est socialement toléré et qui ne causent ni lésions corporelles, ni dommage à la santé. Une telle atteinte peut exister même si elle n'a causé aucune douleur physique (ATF 134 IV 189 consid. 1.1 et 1.2). La distinction entre lésions corporelles et voies de fait peut s'avérer délicate, notamment lorsque l'atteinte s'est limitée à des meurtrissures, des écorchures, des griffures ou des contusions. La question peut parfois être résolue de manière satisfaisante par l'application de l'art. 123 ch. 1 al. 2 CP, qui permet une atténuation libre de la peine dans les cas de peu de gravité. Dans les cas limites, il faut tenir compte de l'importance de la douleur provoquée, afin de déterminer s'il s'agit de lésions corporelles simples ou de voies de fait. Comme les notions de voies de fait et d'atteinte à l'intégrité corporelle, qui sont décisives pour l'application des art. 123 et 126 CP, sont des notions juridiques indéterminées, la jurisprudence reconnaît, dans ces cas, une certaine marge d'appréciation au juge du fait car l'établissement des faits et l'interprétation de la notion juridique indéterminée sont étroitement liés (ATF 134 IV 189 consid. 1.3).

Une rupture de vaisseaux sanguins avec épanchement sous-cutané constitue une lésion du corps humain, même si celle-ci est superficielle et de peu d'importance. Un hématome, résultant de la rupture de vaisseaux sanguins, qui laisse normalement des traces pendant plusieurs jours, doit donc être qualifié de lésion corporelle (ATF 119 IV 25 consid. 2a).

3.2.1. Les versions de C______ et A______ sont contradictoires. Il n'y a pas de témoin (direct) des faits et C______ ne s'est ouverte à personne, si l'on excepte ses médecins, au sujet des violences avancées, à ses proches en particulier.

Elle produit toutefois trois certificats médicaux.

Il convient de déterminer si ces certificats emportent conviction ou si, comme le soutient la défense, ils doivent être écartés, au motif que, si C______ s'est montrée capable de mentir au MP au sujet d'infractions graves, elle a assurément pu mentir à ses médecins également.

Il est vrai que la plaignante a sans doute menti au MP, s'agissant des nombreux crimes mis en avant, en particulier sur l'épisode concernant l'enfant J______ (bébé secoué) – l'IRM le prouve. Dût-on en douter qu'il faudrait retenir qu'elle a à tout le moins forcé le trait à ces sujets, puisqu'elle les a minimisés ensuite et s'est même rétractée. Elle a en outre retiré sa plainte, sans justifier ce retrait, disant "[regretter] d'avoir accusé son mari". Et elle a renoncé à user des droits qui sont les siens (art. 120 al. 1 CPP). Autant d'éléments qui interpellent et mettent à mal la crédibilité de la plaignante, capable d'accabler son mari à tort. Ses déclarations doivent donc être appréhendées avec la plus grande circonspection.

Cela étant, C______ s'est montrée constante sur les faits encore poursuivis, à savoir qu'elle essuyait des coups de la part de l'appelant. Les certificats médicaux se réfèrent à des épisodes précis, situés dans le temps. Surtout, ils objectivent des blessures d'origine traumatique, celles-là mêmes que la plaignante a mises en avant lors de ses auditions. Deux photographies ont été prises par les HUG, lesquelles permettent d'observer l'hématome frontal et l'érythème mandibulaire, dont on peut raisonnablement retenir qu'ils proviennent des "coup de boule" et autre coup dénoncés. La perforation du tympan, constatée médicalement, est compatible, elle aussi, avec les explications de la plaignante. Celle-ci attribue ces lésions à l'appelant.

À cet égard, le fait que la plaignante a pu se montrer imprécise en émettant une hypothèse (présence ou non d'un couteau) lors de l'anamnèse médicale, le 21 février 2018, n'affaiblit nullement la force probante des certificats, celui-là en particulier.

L'appelant n'a au demeurant jamais demandé l'audition des médecins.

À ces certificats s'ajoutent les propos de l'appelant. Certes, celui-ci s'est montré constant dans ses dénégations, contestant l'accusation. Mais il a admis la mésentente, les querelles incessantes, quasi-quotidiennes du couple, au point que des départs, temporaires mais réguliers, du domicile conjugal s'imposaient. Une main-courante a été déposée à la police. Il y a là un terreau propice aux violences conjugales, ce qui appuie l'accusation. Et on sait, bien que le prévenu ne fasse état que de disputes verbales, qu'il est capable de lever la main sur son épouse – il l'a admis, à une occasion.

Compte tenu de la vie commune que menait le couple, il n'est guère concevable que l'appelant n'ait jamais observé la moindre marque sur le visage et le corps de son épouse, ni n'ait remarqué la surdité dont elle était affectée. Des traces rouges sont visibles sur les photographies produites. Même si la plaignante se les était auto-infligées ou fait infliger par un tiers, comme le sous-entend l'appelant, il aurait néanmoins dû les voir, s'en inquiéter et questionner son épouse à ce sujet. Cet élément met à mal la crédibilité du prévenu et affaiblit sa position.

Son argument tiré de la vengeance de la plaignante pour le cas où il la quitterait ne tient pas. Certes, il est bien parti du domicile conjugal le 3 février 2019. Mais c'est elle qui a demandé que leur mariage soit dissout par le divorce.

Le fait que la plaignante a d'abord dit de son époux qu'elle en avait peur, avant de prétendre le contraire, en admettant qu'il était un homme bon, surprend, mais n'apparait pas décisif sous l'angle des lésions corporelles alléguées, celle-ci concédant qu'il ne l'était – poli, gentil et respectueux – que "quand tout se passait bien".

Le fait que C______ a déposé plainte pénale "tardivement", soit près de trois ans après les premiers faits, n'est pas déterminant pour le surplus. Il ne faut pas perdre de vue qu'elle revêt le statut de victime (art. 116 al. 1 CPP). Or le fait d'attendre longtemps avant de déposer plainte pénale correspond à un phénomène courant chez celles-ci (ATF 147 IV 409 consid. 5.4.1). Que la plaignante ait réuni et conservé des constats médicaux pour n'en faire état qu'en temps opportun, à l'appui de sa plainte, une fois la séparation définitive du couple actée en l'occurrence, n'apparait donc guère insolite.

En conclusion, l'hypothèse selon laquelle les lésions trouveraient leur origine dans d'autres faits que ceux avancés par la plaignante et seraient imputées à tort au prévenu, pour lui nuire, doit être écartée.

Le MP fournit la preuve des faits poursuivis.

3.2.2. Une réserve doit être apportée. Le MP ne s'est pas intéressé aux faits du 28 août 2017. La plaignante ne s'est même jamais exprimée à ce sujet ; aucune allégation de sa part ne figure au dossier – la transcription du Dr. D______ exceptée. Cet état de fait doit donc être tenu pour non établi et le prévenu acquitté (cf. supra consid. 3.1.1.2) – indépendamment de sa qualification juridique.

Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

3.2.3. De par ses comportements dangereux, soit une gifle assénée en juillet 2016 et des coups (dont un de tête) portés le 21 février 2018, l'appelant a blessé C______, dont il a dégradé le corps. Il lui a causé une perforation antérieure du tympan, source de surdité (temporaire), respectivement un hématome frontal et un érythème mandibulaire. La première a nécessité un suivi en consultation et une incapacité temporaire de travail (huit jours), les seconds une surveillance neurologique et une antalgie simple. Ces atteintes sont constitutives, objectivement, de lésions corporelles simples au sens de l'art. 123 ch. 1 CP. La défense, qui plaide l'acquittement, n'en discute au demeurant pas la nature. L'élément subjectif est réalisé ; l'appelant a agi intentionnellement.

La culpabilité est donc établie.

Au moment des lésions, l'auteur et la victime étaient mariés l'un à l'autre. Il s'agit donc d'un cas qualifié, poursuivi d'office.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ces points.

4. 4.1. Le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir. La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 CP).

4.2. Le TP ayant correctement tenu compte des critères de l'art. 47 CP, il peut être renvoyé à son exposé des motifs, que la CPAR fait siens (art. 82 al. 4 CPP ; ATF 141 IV 244 consid. 1.2.3). La peine, au demeurant non-discutée, sera par conséquent confirmée (art. 34 CP). Le sursis est acquis à l'appelant (art. 42 al. 1 CP) (art. 391 al. 2 CPP).

5. 5.1. L'art. 42 al. 4 CP permet au juge de prononcer, en plus d'une peine avec sursis, une amende conformément à l'art. 106 CP.

La combinaison prévue par l'art. 42 al. 4 CP se justifie lorsque le sursis peut être octroyé, mais qu'une sanction ferme accompagnant la sanction avec sursis paraît mieux à même d'amener l'auteur à s'amender, notamment pour des motifs de prévention spéciale. Elle doit contribuer, dans l'optique de la prévention tant générale que spéciale, à renforcer le potentiel coercitif de la peine avec sursis, en particulier dans les délits de masse (Massendelikte). Cette forme d'admonestation adressée au condamné doit attirer son attention sur le sérieux de la situation en le sensibilisant à ce qui l'attend s'il ne s'amende pas (ATF 146 IV 145 consid. 2.2 ; 134 IV 60 consid.  7.3.1). La combinaison prévue à l'art. 42 al. 4 CP constitue un "sursis qualitativement partiel" (ATF 134 IV 1 consid. 4.5.2). 

5.2. En dépit de la conclusion du MP, qui réclamait le prononcé d'une amende à titre de sanction immédiate, le TP n'a pas abordé cette question. Quoi qu'il en soit, une telle sanction ne s'impose pas sous l'angle de la prévention spéciale. Certes, la prise de conscience de l'appelant fait défaut. Mais il en est à sa "première condamnation", l'appelant ne devant pas être puni plus sévèrement que si les diverses infractions, dont celle déjà jugée le 23 janvier 2019, avaient fait l'objet d'un seul jugement (art. 49 al. 2 CP). Il n'a donc pas d'antécédent à proprement parler. Partant, une peine avec sursis, assortie d'un délai d'épreuve, est apte à le détourner de la récidive, un "sursis qualitativement partiel" ne s'imposant pas.

6. 6.1.1. L'art. 426 al. 1 dispose que le prévenu supporte les frais de procédure s’il est condamné. Lorsque la procédure fait l’objet d’une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s’il a, de manière illicite et fautive, provoqué l’ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 426 al. 2 CPP).

La répartition des frais de procédure de première instance repose sur le principe selon lequel celui qui a causé les frais doit les supporter. Ainsi, le prévenu doit supporter les frais en cas de condamnation car il a occasionné, par son comportement, l'ouverture et la mise en œuvre de l'enquête pénale (ATF 138 IV 248 consid. 4.4.1). Lorsque la condamnation n'est que partielle, les frais ne doivent être mis à sa charge que de manière proportionnelle, en considération des frais liés à l'instruction des infractions pour lesquelles un verdict de culpabilité a été prononcé. Comme il est difficile de déterminer avec exactitude les frais qui relèvent de chaque fait imputable ou non au condamné, une certaine marge d'appréciation doit être laissée à l'autorité cantonale (arrêt du Tribunal fédéral 6B_501/2020 du 15 décembre 2020 consid. 4.1.1).

6.1.2. Les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé (art. 428 al. 1 CPP). Si l’autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l’autorité inférieure (art. 428 al. 3 CPP).

6.1.3. À teneur de l'art. 429 al. 1 CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s’il bénéficie d’une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité fixée conformément au tarif des avocats, pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure (let. a) et à une réparation du tort moral subi en raison d’une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté (let. c). L’autorité pénale examine d’office les prétentions du prévenu. Elle peut enjoindre à celui-ci de les chiffrer et de les justifier (al. 2). L’autorité pénale peut réduire ou refuser l’indemnité ou la réparation du tort moral si le prévenu a provoqué illicitement et fautivement l’ouverture de la procédure ou a rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 430 al. 1 let. a CPP).

La question de l'indemnisation doit être tranchée après la question des frais. Dans cette mesure, la décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation. Il en résulte qu'en cas de condamnation aux frais, il n'y a pas lieu d'octroyer de dépens ou de réparer le tort moral (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2). Lorsque la condamnation aux frais n'est que partielle, la réduction de l'indemnité devrait s'opérer dans la même mesure (arrêts du Tribunal fédéral 6B_501/2020 du 15 décembre 2020 consid. 4.1.2 ; 6B_1238/2017 du 12 avril 2018 consid. 2). 

Les frais de défense doivent être pleinement indemnisés. Il appartient néanmoins au juge de vérifier concrètement que les frais engagés pour la défense du prévenu s'inscrivent dans le cadre de l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (FF 2006 1057 p. 1313 ; ATF 142 IV 163 consid. 3.1.2). L'indemnité visée par l'art. 429 al. 1 let. a CPP doit correspondre au tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule (ATF 142 IV 163 consid. 3.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1459/2021 du 24 novembre 2022 consid. 4.1). La Cour applique un tarif horaire maximal de CHF 450.- pour les chefs d'étude et CHF 150.- pour les avocats-stagiaires (AARP/96/2024 du 14 mars 2024 consid. 5.1.1).

6.2.1. Si le premier juge a, à juste titre, réduit les frais à la charge du prévenu compte tenu de son acquittement pour les faits de mars 2016, il ne pouvait refuser de faire de même pour les faits du 28 août 2017 après les avoir classés. Le Tribunal n'était pas en mesure, en effet, d'aborder, de trancher et de qualifier juridiquement ces derniers, faute pour le MP de les avoir instruits (cf. 3.2.2 supra). Ainsi, considérant que le prévenu a été libéré de deux infractions sur quatre, les frais de la procédure préliminaire et de première instance doivent être mis à sa charge à hauteur d'1/2.

Le jugement sera réformé sur ce point.

Partant, l'appelant peut prétendre à une juste indemnité fondée sur l'art. 429 al. 1 let. a CPP dans la même mesure (1/2). Il n'y avait pas lieu de la lui refuser, comme l'a fait le TP, qui s'est contenté d'énoncer l'art. 430 al. 1 let. a CPP sans justifier un tel refus.

6.2.2. En appel, tant l'appelant que l'appelant joint succombent sur la question de la culpabilité. En bénéficiant, en particulier, d'un acquittement pour les faits du 28 août 2017, l'appelant n'obtient pas gain de cause puisque le classement prononcé en première instance pour ces faits équivalait déjà à un acquittement (art. 320 al. 4 et 329 al. 4 CPP). Son appel ne porte d'ailleurs pas sur ce point. En revanche, il obtient très partiellement gain de cause sur la question des frais et indemnités de la procédure préliminaire et de première instance.

L'appelant sera donc condamné à 80% de sa part des frais (50%) de la procédure d'appel, qui comprennent un émolument de CHF 2'000.- (art. 14 al. 1 let. e RTFMP). Le solde, qui suit le sort de l'appel-joint du MP, sera laissé à la charge de l'Etat (art. 423 CPP). Partant, l'appelant peut prétendre, dans la même mesure (20%), à l'indemnisation de ses frais de défense (art. 436 al. 1 et 2 CPP).

La durée de l'activité à indemniser (du 2 novembre 2022 au 1er septembre 2023 inclus) s'élève à sept heures et cinq minutes au tarif horaire de CHF 450.- pour l'avocat chef d'étude et à deux heures au tarif horaire de CHF 150.- pour l'avocat-stagiaire (soit la moitié de 18 heures et 10 minutes), correspondant à un montant de CHF 3'456.10, TVA de 7.7% comprise (CHF 268.60), en lien avec la procédure préliminaire et de première instance.

La durée de l'activité à indemniser (du 4 septembre 2023 au 22 mars 2024) s'élève à 40 minutes (2023) respectivement à 54 minutes (2024) (soit 20% de trois heures et 20 minutes (2023) et de quatre heures et 30 minutes (2024)) au tarif horaire de CHF 450.- pour l'avocat chef d'étude, correspondant à un montant de CHF 760.90, TVA de 7.7% (CHF 23.10) respectivement de 8.1% (CHF 32.80) comprise, en lien avec la procédure d'appel.

6.2.3. Il est pris acte que l'appelant renonce à toute prétention fondée sur l'art. 429 al. 1 let. c CPP pour le surplus (cf. conclusions en indemnisation du 12 mars 2024).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1123/2023 rendu le 1er septembre 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/2262/2019.

Admet très partiellement l'appel de A______.

Rejette l'appel joint du Ministère public.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de lésions corporelles simples qualifiées pour les faits de juillet 2016 et du 21 février 2018 (art. 123 ch. 1 et 2 al. 4 CP).

Acquitte A______ du chef de lésions corporelles simples qualifiées pour les faits de mars 2016 et du 28 août 2017 (art. 123 ch. 1 et 2 al. 4 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 45 jours-amende, sous déduction d'un jour-amende correspondant à un jour de détention avant jugement.

Fixe le montant du jour-amende à CHF 60.-.

Dit que cette peine est complémentaire à celle prononcée le 23 janvier 2019 par le Ministère public de Genève.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans.

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine.

Condamne A______ à 40% des frais de la procédure d'appel, qui s'élèvent à CHF 2'175.-, y compris un émolument de jugement de CHF 2'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 14 al. 1 let. e RTFMP).

Condamne A______ à la moitié des frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 1'656.-, émolument complémentaire de CHF 600.- compris (art. 426 al. 1 et 428 al. 3 CPP).

Alloue à A______ CHF 760.90 au titre d'indemnisation de ses frais de défense pour la procédure d'appel (art. 429 al. 1 let. a et 436 al. 1 et 2 CPP).

Alloue à A______ CHF 3'456.10 au titre d'indemnisation de ses frais de défense pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 429 al. 1 let. a CPP).

Rejette pour le surplus les conclusions en indemnisation de A______.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

La greffière :

Lylia BERTSCHY

 

Le président :

Fabrice ROCH

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'656.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

60.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

40.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

2'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'175.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'831.00