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Décisions | Tribunal pénal

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P/15442/2021

JTDP/1570/2021 du 14.12.2021 ( PENAL ) , JUGE

Normes : CP.140
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL DE POLICE

Chambre 7


14 décembre 2021

 

MINISTÈRE PUBLIC

Monsieur A______, partie plaignante

contre

Monsieur X______, né le ______1990, actuellement détenu à la Prison de Champ-Dollon, prévenu, assisté de Me H______


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Par acte d'accusation du 16 novembre 2021, le Ministère public conclut à un verdict de culpabilité de X______ de brigandage (art. 140 ch. 1 CP). Il requiert le prononcé d'une peine privative de liberté de 7 mois, avec sursis durant 4 ans. Il conclut à l'expulsion de Suisse du prévenu pour une durée de 5 ans, avec inscription au SIS. Il demande que l'argent figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n°31779920210809 soit compensé à due concurrence avec la créance de l'Etat envers le prévenu portant sur les frais de la procédure et propose la restitution au prévenu du téléphone figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n°31779920210809. Enfin, il conclut à la condamnation du prévenu aux frais de la procédure.

A______, partie plaignante, conclut à la culpabilité du prévenu de brigandage et demande que celui-ci soit condamné à lui verser la somme de CHF 38'000.- à titre de réparation du dommage matériel.

X______, par la voix de son conseil, conclut à son acquittement, à la condamnation de l'Etat de Genève à lui verser la somme de CHF 25'400.- à titre de détention injustifiée et à la mise à la charge de l'Etat des frais de la procédure.

EN FAIT

A. Par acte d'accusation du 16 novembre 2021, il est reproché à X______ d'avoir, le 9 août 2021, aux alentours de 14h08, dans la montée d'escaliers de l'immeuble sis rue I______ n°1______, à Genève, de concert avec B______, volé la montre de A______ portée au poignet en ayant usé de violence à son égard, soit en lui saisissant les poignet et bras gauches puis en lui arrachant de force la montre de marque PATEK PHILIPPE, lui causant de la sorte des griffures sur la main gauche, avant de fuir en courant, dans le but de se l'approprier sans droit et, ainsi, se procurer ou procurer à son comparse un enrichissement illégitime,

faits qualifiés de brigandage, au sens de l'art. 140 ch. 1 CP.

B. Il ressort de la procédure les faits pertinents suivants:

a) X______ est de nationalité marocaine et vit à Barcelone avec sa femme et ses enfants. Il est titulaire d'un titre de séjour espagnol.

B______ est de nationalité marocaine et vit à Barcelone.

Il ressort de l'analyse du téléphone de X______, effectuée sur la période courant du 27 mars au 9 août 2021, que le précité fait partie d'un groupe de personnes qui se livre à des vols et à du recel de montres de luxe.

Le 10 juin 2021, X______ a écrit à son interlocuteur au sujet de montres convoitées "Là je suis à côté de lui, il m'a regardé un peu. Si j'avais … je la lui aurais prise parce qu'il est gentil et facile", le 17 juillet 2021, "Ici, il y en a une belle, chère et tranquille, chez des saoudiens" ou, le 25 juin 2021, après avoir envoyé une vidéo d'une montre PATEK PHILIPPE, et en réponse à la question "Alors tu l'as eue?", il a répondu "oui".

Dans une conversation du 27 juillet 2021, X______ et B______ ont un échange de messages au sujet d'une montre PATEK PHILIPPE. B______ a demandé à X______ de lui envoyer une photographie de la montre car il avait un acheteur potentiel au Maroc. X______ lui a répondu qu'il s'agissait d'une montre très chère et qu'il en demandait EUR 21'000.-, ayant préalablement refusé de la vendre à EUR 17'000.-. Il a précisé qu'il aurait pu en demander EUR 35'000.- à 37'000.- si la montre n'avait pas eu la boucle cassée.

b) Les 6 et 7 août 2021, X______ a discuté avec B______ d'un voyage à destination d'Annemasse.

Le 7 août 2021, il a pris l'avion de Barcelone à Lyon, où il a rejoint B______. Tous deux ont pris le train et se sont rendus à Annemasse, plus précisément à l'hôtel ______ où ils ont pris une chambre d'hôtel. La chambre a été réservée et payée en espèces par X______ pour deux nuits, soit du 7 au 9 août 2021. Le duo devait repartir, en Espagne, le 10 août 2021.

c) Le 8 août 2021, ils se sont rendus ensemble à Genève et se sont pris en photographies avec le jet d'eau de Genève.

d.a) Le 9 août 2021, A______ a déjeuné au restaurant ______ situé sur la place du Bourg de Four. Il en est ressorti aux alentours de 14h00.

Il portait une chemise, dont les manches étaient remontées, laissant apparaître à son poignet gauche une montre de marque PATEK PHILLIPPE, sur bracelet cuir, achetée au prix de CHF 38'000.- le 22 octobre 2019, mais qui a pris de la valeur depuis.

Il a remonté la rue des Chaudronniers pour se rendre à son Etude d'avocats située rue I______ no 1______.

Alors qu'il se trouvait sur les marches d'escaliers menant à l'étude, étant précisé que lesdites marches étaient recouvertes d'échafaudages en raison de travaux sur la façade de l'immeuble, B______ lui a arraché la montre qu'il portait au poignait avant de prendre la fuite.

A______ a appelé la police. Arrivée à la place Charles-STRUM, la police a été hélée par C______, qui l'a informée que l'un des auteurs s'était dirigé à pied en direction du boulevard des Tranchées. Il est monté dans la voiture de police et a reconnu X______ vers le passage piétons sur le boulevard en question. Le précité a été arrêté et présenté à A______ qui a confirmé qu'il s'agissait d'un des auteurs du vol de sa montre.

A______ a subi des griffures / entailles sur le dos de la main lors de l'arrachage de la montre.

B______ a regagné l'hôtel ______ et a quitté l'établissement aux alentours de 16h00-16h30.

d.b) Il ressort des images de vidéosurveillance ce qui suit:

X______ et B______ étaient vêtus d'un short en jeans et de baskets. X______ revêtait un T-shirt noir avec un motif doré, une casquette blanche et portait une barbe. B______ portait un T-shirt rouge et une casquette noire.

A______ a été suivi par X______ et B______ dès la rue des Chaudronniers à tout le moins.

A la hauteur de l'école St Antoine, B______ a enfilé une veste de survêtement de couleur violette avec des bandes oranges (note: le survêtement de l'équipe de football de Barcelone).

X______ et B______ ont suivi A______ sur les deux ponts Charles-Galland.

A la hauteur du la rue Charles-Bonnet, B______ était seul et courait. Il avait ôté sa veste de survêtement et arborait son T-shirt rouge.

e.a) Le jour même A______ est allé déposer plainte à la police. Il a déclaré que, peu avant de passer sous les échafaudages, avant l'entrée de l'Etude, il avait senti des gens derrière lui et ses collègues (note: D______ et E______). Il avait vu, à un mètre derrière lui, deux jeunes gens en short en jeans, lesquels avaient l'air de touristes. Il s'était engagé dans les escaliers menant à la porte de l'Etude. Après avoir monté deux marches, une personne lui avait agrippé le poignet gauche et le haut de son bras gauche. L'une des mains recouvrait sa montre et l'autre tirait sur le bracelet au niveau du boitier. A______ avait crié et ses deux collègues s'étaient retournés. Il avait vu deux personnes partir en courant en direction de la rue J______. Ses collègues avaient couru après les auteurs. A l'angle de la rue I______ et J______, ils avaient alerté deux jeunes gens (note: C______ et F______) qui avaient poursuivi les auteurs.

A______ a reconnu sur les images de vidéosurveillance X______ et B______ comme étant les deux individus qui avaient pris la fuite après l'arrachage de sa montre.

e.b) Entendu par la police et le Ministère public, X______ a déclaré être venu à Genève avec B______ faire du tourisme. Il n'avait pas participé au vol de la montre. Arrivé en vieille ville de Genève, il s'était séparé de son ami B______, lequel devait rencontrer un ami à lui, trente minutes avant d'être interpellé par la police.

e.c) F______ a déclaré qu'il cheminait avec C______ sur la rue I______ et avoir vu deux jeunes hommes en train de courir en direction de la rue J______. Deux femmes couraient derrière eux. Arrivés à leur hauteur, elles leur avaient expliqué s'être fait voler. Il avait couru après un des individus, mais l'avait perdu de vue. Son ami avait couru derrière l'autre voleur.

e.d) C______ a indiqué à la police avoir vu deux personnes partir en courant, dans des directions opposées, à l'intersection de la rue I______ et de la rue K______. L'une d'entre elle portait un T-shirt noir, un short en jeans et portait une barbe ou un masque chirurgical. Elle était partie rue I______, en direction de la rue K______ puis avait tourné à droite en direction de la rue François-Le-Fort. C______ était parti à la recherche de ce dernier individu. Il avait vu une personne pouvant lui correspondre rue Charles-Galland à la hauteur du consulat d'Italie. Celle-ci trottinait et semblait essoufflée. Cette personne avait tourné sur la rue du Mont-de-Sion en direction de la rue Rodolphe-Tœpffer puis avait obliqué à gauche sur la rue François-Le-Fort en direction de la rue Charles-Sturm. Arrivé sur cette dernière rue, il avait perdu de vue l'individu, mais il l'avait revu au bout de la rue, à proximité du boulevard des Tranchées. C______ avait aperçu une voiture de police, qui l'avait pris à bord. Il avait repéré le fuyard à l'intersection entre la rue Ferdinand-Hodler et le boulevard des Tranchées. Celui-ci avait été arrêté. Il s'agissait bien de la personne derrière laquelle il avait couru.

Devant le Ministère public, il a confirmé ses déclarations et reconnu X______ comme étant la personne qu'il avait poursuivie.

f.a) En audience de confrontation devant le Ministère public, A______ a confirmé que deux personnes se trouvaient sous l'échafaudage devant l'Etude. En se retournant, il avait vu X______, qui portait un haut bordeaux foncé, et son comparse; tous deux étaient côte-à-côte, très proche l'un de l'autre. Sur la deuxième marche, il avait senti une personne lui saisir le bras et le bloquer contre son corps en mettant sa main gauche sur sa montre. Avec sa main droite, il avait tiré sur le bracelet. La deuxième personne lui tenait l'avant-bras gauche; il avait eu une marque bleue constatée le soir en se douchant. La tige de la montre arrachée lui avait causé des griffures sur la main.

f.b) X______ a relevé qu'il ne portait pas de haut bordeaux foncé et n'avait pas couru. Il a répété être étranger au vol de la montre.

C. a) Lors de l'audience de ce jour, le Tribunal a procédé à l'audition du prévenu, de la partie plaignante et de l'épouse du prévenu.

a.a) X______ a persisté dans ses précédentes déclarations. Il n'était pas présent au moment de l'arrachage de la montre. Il a reconnu faire l'intermédiaire entre les vendeurs de montres volées et des acheteurs potentiels.

a.b) A______ a confirmé que deux personnes, dont le prévenu qu'il reconnaissait formellement, étaient présentes lors de l'arrachage de la montre. Une main avait été posée sur la montre, une autre tirait sur le bracelet et une troisième lui avait saisi l'avant-bras. L'arrachage de la montre avait duré deux secondes.

a.c) G______ a loué les qualités d'époux et de père de X______.

b) Le prévenu et la partie plaignante ont plaidé et pris les conclusions figurant en tête du présent jugement.

D. Appréciation des faits

X______ conteste avoir été présent lors de l'arrachage de la montre. Il soutient s'être séparé de son ami B______ avant les faits.

Ces déclarations ne sont nullement crédibles et démenties par tous les éléments du dossier.

Les images de vidéosurveillance permettent de démontrer que X______ cheminait aux côtés de B______, à distance de A______, sur les deux ponts Charles-Galland, juste avant de tourner sur la rue I______. Il était aux côtés de son comparse lorsque celui-ci a mis sa veste de survêtement, à l'évidence pour pouvoir changer d'apparence une fois le forfait commis. Les faits ont été commis sur la rue I______ à une centaine de mètres de la dernière image de vidéosurveillance.

Le lésé a formellement identifié X______ comme étant une des deux personnes qui le suivait de près juste avant les marches menant à la porte de l'Etude.

C______ a poursuivi X______ après l'arrachage de la montre. S'il a perdu le visuel durant quelques secondes, il a pu reconnaître aisément l'individu qu'il poursuivait.

L'analyse du téléphone de X______ et le mode opératoire de l'arrachage de la montre permettent d'établir les mobiles de la venue en Suisse du précité et de son comparse, alors que X______ et B______ sont restés ensemble durant tout leur séjour dans la région genevoise.

E. S'agissant de sa situation personnelle, X______ est né le ______1990 au Maroc, pays dont il a la nationalité. Il s'est marié en 2014 au Maroc. Deux enfants nés en 2016 et en 2020 sont issus de cette union. Il s'est installé avec son épouse et ses enfants à Barcelone en 2016. Il bénéficie d'un titre de séjour espagnol.

Le loyer de son appartement est de EUR 500.-.

Il a travaillé comme coiffeur. En 2021, les époux n'ont pas travaillé et leur seule source de revenus licites consiste en des aides étatiques de EUR 451.- par mois.

Il a acheté un appartement sur plans au Maroc au prix de EUR 30'000.-.

X______ n'a pas d'antécédents judiciaires en Suisse.

EN DROIT

1.             1.1.1. Selon l'art. 140 al. 1 CP, le brigandage est l'acte de celui qui aura commis un vol en usant de violence à l'égard d'une personne, en la menaçant d'un danger imminent pour la vie ou l'intégrité corporelle ou en la mettant hors d'état de résister.

Le brigandage n'est consommé que si le vol a été commis. Il s'agit d'une forme aggravée du vol qui se caractérise par les moyens que l'auteur a employés (ATF 124 IV 102 consid. 2). Ainsi, à la différence du voleur, qui agit clandestinement ou par surprise, l'auteur recourt à la contrainte pour soustraire la chose d'autrui. Le brigandage n'est donc pas exclusivement une infraction contre le patrimoine, mais aussi contre la liberté, ce qui explique qu'elle soit plus sévèrement réprimée. La violence est toute action physique immédiate sur le corps de la personne qui doit défendre la possession de la chose.

Sur le plan subjectif, l'intention doit porter sur tous les éléments constitutifs de l'infraction et donc notamment sur le moyen de contrainte utilisé, soit la violence ou la menace d'un danger imminent pour la vie ou l'intégrité corporelle à l'égard d'une personne ou le fait de la mettre hors d'état de résister. L'auteur doit également avoir le dessein de s'approprier la chose et de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime (CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I, Berne 2010, nos 1 à 10 ad art. 140 CP).

1.1.2. Est un coauteur celui qui collabore, intentionnellement et de manière déterminante, avec d'autres personnes à la décision de commettre une infraction, à son organisation ou à son exécution, au point d'apparaître comme l'un des participants principaux; il faut que, d'après les circonstances du cas concret, la contribution du coauteur apparaisse essentielle à l'exécution de l'infraction. La seule volonté quant à l'acte ne suffit pas; il n'est toutefois pas nécessaire que le coauteur ait effectivement participé à l'exécution de l'acte ou qu'il ait pu l'influencer. La coactivité suppose une décision commune, qui ne doit cependant pas obligatoirement être expresse, mais peut aussi résulter d'actes concluants, le dol éventuel quant au résultat étant suffisant. Il n'est pas nécessaire que le coauteur participe à la conception du projet; il peut y adhérer ultérieurement. Il n'est pas non plus nécessaire que l'acte soit prémédité; le coauteur peut s'y associer en cours d'exécution. Ce qui est déterminant c'est que le coauteur se soit associé à la décision dont est issue l'infraction ou à la réalisation de cette dernière, dans des conditions ou dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal (ATF 130 IV 58 consid. 9.2.1 p. 66; 125 IV 134 consid. 3a p. 136).

Ce concept de coactivité montre qu'une personne peut être considérée comme auteur d'une infraction, même si elle n'en est pas l'auteur direct, c'est-à-dire si elle n'a pas accompli elle-même tous les actes décrits dans la disposition pénale; cela résulte naturellement du fait qu'une infraction, comme toute entreprise humaine, n'est pas nécessairement réalisée par une personne isolée, mais peut procéder d'une action commune avec une répartition des tâches (ATF 120 IV 17 consid. 2d p. 23 s.).

1.2. En l'occurrence, le prévenu et son comparse sont venus dans la région genevoise ensemble. Ils ont partagé une chambre à l'hôtel, chambre réservée et payée par le prévenu. Ils sont venus ensemble à Genève les 8 et 9 août 2021 et comptaient repartir ensemble de la région genevoise le 10 août 2021. Une fois leur victime repérée, ils l'ont suivie à distance. Sous les échafaudages menant à la porte d'entrée de l'Etude du lésé, B______ a posé sa main sur la montre de celui-ci et s'est servi de son autre main pour tirer sur le bracelet au niveau de l'attache du boitier. Quant au prévenu, il se trouvait à côté et a saisi l'avant-bras du lésé. Une fois la montre arrachée, les deux comparses ont pris la fuite dans des directions différentes.

Pour commettre le vol, la violence a été utilisée dans la mesure où le lésé a été immobilisé et a été blessé lors de la commission des faits.

Les auteurs ont agi en coactivité, chacun ayant un rôle précis, mais indissociable. Les images du prévenu et de son comparse marchant côte-à-côte étant révélatrices à cet égard.

Ces faits sont constitutifs de brigandage. Le prévenu sera reconnu coupable de ce chef d'infraction.

Les conclusions en indemnisation du prévenu sont partant rejetées.

2. 2.1.1. L'art. 47 CP prévoit que le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 consid. 2.1 p. 19 s.; 129 IV 6 consid. 6.1).

2.1.2. Selon l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits. L'art. 43 al. 1 CP prévoit que le juge peut suspendre partiellement l'exécution d'une peine privative de liberté d'un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l'auteur. Ces dispositions sont applicables en l'espèce sans égard à la modification entrée en vigueur le 1er janvier 2018, qui n'est pas plus favorable au recourant (cf. art. 2 al. 2 CP; arrêt 6B_388/2018 du 13 septembre 2018 consid. 4.1).

Lorsque la durée de la peine privative de liberté se situe, comme en l'espèce, entre un et deux ans, permettant donc le choix entre le sursis complet (art. 42 CP) et le sursis partiel (art. 43 CP), l'octroi du sursis au sens de l'art. 42 CP est la règle et le sursis partiel l'exception. Celui-ci ne doit être prononcé que si, sous l'angle de la prévention spéciale, l'octroi du sursis pour une partie de la peine ne peut se concevoir que moyennant l'exécution de l'autre partie. La situation est comparable à celle où il s'agit d'évaluer les perspectives d'amendement en cas de révocation du sursis. Lorsqu'il existe, notamment en raison de condamnations antérieures, de sérieux doutes sur les perspectives d'amendement de l'auteur, qui ne justifient cependant pas encore, à l'issue de l'appréciation de l'ensemble des circonstances, un pronostic concrètement défavorable, le tribunal peut accorder un sursis partiel au lieu du sursis total. On évite ainsi, dans les cas de pronostics très incertains, le dilemme du "tout ou rien". Un pronostic défavorable, en revanche, exclut tant le sursis partiel que le sursis total (ATF 144 IV 277 consid. 3.1.1 p. 280; 134 IV 1 consid. 5.3.1 p. 10).

Pour formuler un pronostic sur l'amendement de l'auteur, le juge doit se livrer à une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Il doit tenir compte de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il ne peut accorder un poids particulier à certains critères et en négliger d'autres qui sont pertinents (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s.; 134 IV 1 consid. 4.2.1 p. 5; arrêt 6B_1040/2019 du 17 octobre 2019 consid. 2.1). Le défaut de prise de conscience de la faute peut justifier un pronostic défavorable, car seul celui qui se repent de son acte mérite la confiance que l'on doit pouvoir accorder au condamné bénéficiant du sursis (arrêt 6B_584/2019 du 15 août 2019 consid. 3.1 et les références citées).

2.2.1. La faute du prévenu est lourde. Le prévenu est venu en avion puis en train dans la région genevoise exclusivement pour se livrer à un arrachage de montres, l'analyse de son téléphone, ses sources de revenus et son professionnalisme lors des faits ne laissant aucun doute à cet égard. Il ne craint pas d'agir en pleine journée et en pleine ville. Il a suivi sa cible sur plusieurs centaines de mètres et s'est associé à son comparse pour commettre son forfait, ne laissant au lésé aucune chance. La manière d'agir et la rapidité à laquelle l'arrachage de montre a été commis, de même que l'objet convoité, démontre un professionnalisme certain. En quelques secondes, il a soustrait une montre de plusieurs dizaines de milliers de francs. Il n'a pas hésité à agir avec violence, blessant légèrement le lésé au passage, avant de prendre la fuite. Son arrestation et son identification n'ont été possibles que grâce à l'intervention de quidams.

Les mobiles du prévenu sont purement égoïstes, soit l'appât d'un gain facile au mépris du patrimoine et de l'intégrité physique et psychique d'autrui, ainsi que des lois en vigueur dans notre pays.

La collaboration à la procédure du prévenu est mauvaise, tout comme sa prise de conscience. Il réfute toute implication dans les faits commis, malgré les éléments à charge confondants. II ne donne aucun renseignement sur son comparse ou sur le butin. Il n'a manifesté aucun remord ou repentir.

Le prévenu est sans antécédent judiciaire, élément toutefois neutre dans le cas d'espèce (cf. ATF 136 IV 1 consid. 2.6.4.).

Il n'y a pas de circonstance atténuante.

La responsabilité du prévenu est entière.

La peine prévue pour l'infraction de brigandage est de six mois au minimum et de dix ans au maximum.

Au vu de ce qui précède, le prévenu sera condamné à une peine privative de liberté de 12 mois.

2.2.2. Lorsque la peine se situe, comme en l'espèce, entre un et deux ans, le sursis partiel reste l'exception.

En l'occurrence, certes le prévenu est sans antécédent judiciaire. Toutefois, vu les moyens déployés, la manière d'agir, la collaboration à la procédure du prévenu et sa prise de conscience, de sérieux doutes sur les perspectives d'amendement du prévenu sont émis, sans pour autant pouvoir poser un pronostic concrètement défavorable. Le pronostic quant au comportement futur du prévenu est, au mieux, mitigé.

En effet, le prévenu, bien qu'âgé de 30 ans, marié, père de deux enfants et bénéficiant d'une situation administrative stable en Espagne, est venu en Suisse, en prenant l'avion puis le train, après avoir payé en espèces deux nuits d'hôtel. Il a ainsi consacré d'importants moyens financiers, compte tenu de sa situation financière, pour commettre son forfait.

La cible n'a pas été choisie au hasard. Bien au contraire, l'analyse du téléphone du prévenu et les caractéristiques de la montre volée montrent que le prévenu est parfaitement au fait des montres de valeur et de leur revente possible.

La manière d'agir dénote un professionnalisme certain. Le prévenu s'est associé à un comparse pour agir avec une précision et une rapidité déconcertantes. La méthode est si bien rodée que le duo n'hésite pas à agir en plein jour au détriment d'un homme d'âge mur.

Une fois arrêté, le prévenu a campé sur ses positions et n'a donné aucun élément utile à l'enquête, notamment pour identifier son comparse ou retrouver la montre volée.

Il n'a manifesté aucun regret ou remord.

Ainsi, il existe de sérieux doutes sur le comportement futur du prévenu, qui justifient d'assortir la peine d'un suris partiel. La partie ferme de la peine sera fixée à 6 mois.

3. 3.1. Conformément à l'art. 66a al. 1 CP, le juge expulse un étranger du territoire suisse pour une durée de cinq à quinze ans s'il est reconnu coupable de l'une des infractions énumérées aux let. a à o, notamment en cas de condamnation pour brigandage (art. 140 CP). Conformément à l'al. 2 de cette disposition, le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse.

3.2. En l'occurrence, le prévenu n'a aucune attache avec la Suisse de sorte qu'il sera expulsé du territoire suisse pour une durée de 5 ans.

En revanche, compte tenu du fait que le prévenu vit en Espagne avec sa famille et qu'il est titulaire d'un titre de séjour espagnol, il ne se justifie pas de procéder à l'inscription de l'expulsion dans le système d'information Schengen de sorte qu'il y sera renoncé.

3.3. La partie plaignante peut faire valoir ses conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure (art. 122 al. 1 CPP). En vertu de l'article 126 CPP, le Tribunal statue également sur les conclusions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu (let. a).

Chacun est tenu de réparer le dommage qu'il cause à autrui d'une manière illicite, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence (art. 41 al. 1 CO). La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO).

3.4. En l'occurrence, la partie plaignante a demandé que le prévenu soit condamné à lui verser la somme de CHF 38'000.- correspondant à la valeur de la montre volée au moment de son achat.

Il se justifie de faire droit à ces prétentions.

4. Le téléphone du prévenu, dont il ressort qu'il sert à la commission d'infractions, soit le vol et le recel de montres volées, sera confisqué et détruit, conformément à l'art. 69 CP.

5. Les frais de la procédure seront mis à la charge du prévenu (art. 426 al. 1 CPP).

Les valeurs patrimoniales séquestrées seront confisquées et compensées avec les frais de la procédure, en application de l'art. 442 al. 4 CPP.

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DE POLICE

statuant contradictoirement :

Déclare X______ coupable de brigandage (art. 140 ch. 1 CP).

Condamne X______ à une peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de 128 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Dit que la peine est prononcée sans sursis à raison de 6 mois.

Met pour le surplus X______ au bénéfice du sursis partiel et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 43 et 44 CP).

Avertit X______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de X______ pour une durée de 5 ans (art. 66a al. 1 let. c CP).

Dit que l'exécution de la partie ferme de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Renonce à ordonner le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS; RS 362.0).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de X______ (art. 231 al. 1 CPP).

Condamne X______ à payer à A______ la somme de CHF 38'000.- à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Ordonne la confiscation du téléphone figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n°31779920210809 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de X______ (art. 429 CPP).

Condamne X______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 4'955.-, y compris un émolument de jugement de CHF 500.- (art. 426 al. 1 CPP).

Compense à due concurrence la créance de l'Etat portant sur les frais de la procédure avec les valeurs séquestrées figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n°31779920210809 (art. 442 al. 4 CPP).

Fixe à CHF 6'133.70 l'indemnité de procédure due à Me H______, défenseur d'office de X______ (art. 135 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Office cantonal de la population et des migrations, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

Informe les parties que, dans l'hypothèse où elles forment un recours à l'encontre du présent jugement ou en demandent la motivation écrite dans les dix jours qui suivent la notification du dispositif (art. 82 al. 2 CPP), l'émolument de jugement fixé sera en principe triplé, conformément à l'art. 9 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03).

 

Le Greffier

Alain BANDOLLIER

La Présidente

Alexandra BANNA

 

Vu l'annonce d'appel formée par le prévenu, laquelle entraîne la motivation écrite du jugement (art. 82 al. 2 let. b CPP).

LE TRIBUNAL DE POLICE

 Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 1'000.-.

Condamne X______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF 1'000.-. 

Le Greffier

Alain BANDOLLIER

La Présidente

Alexandra BANNA

 

 


 

Voies de recours

Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

 

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

4'316.00

Convocations devant le Tribunal

CHF

75.00

Frais postaux (convocation)

CHF

14.00

Emolument de jugement

CHF

500.00

Etat de frais

CHF

50.00

Total

CHF

4'955.00

==========

Emolument de jugement complémentaire CHF 1'000.00

 


 

Indemnisation du défenseur d'office

Vu les art. 135 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

X______

Avocate :  

H______

Etat de frais reçu le :  

6 décembre 2021

 

Indemnité :

Fr.

4'350.85

Forfait 10 % :

Fr.

435.10

Déplacements :

Fr.

55.00

Sous-total :

Fr.

4'840.95

TVA :

Fr.

372.75

Débours :

Fr.

920.00

Total :

Fr.

6'133.70

Observations :

- intreprète Fr. 920.–

- 21h admises* à Fr. 150.00/h = Fr. 3'150.–.
- 10h55 admises* à Fr. 110.00/h = Fr. 1'200.85.

- Total : Fr. 4'350.85 + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art 16 al 2 RAJ) = Fr. 4'785.95

- 1 déplacement A/R à Fr. 55.– = Fr. 55.–

- TVA 7.7 % Fr. 372.75

Réductions poste "A. Conférences avec M. X______" :
10.08.2021 : 15 min (collaboratrice) car pas pris en compte (max 1h30 par mois + 1h30 si audience (4h30 admises pour le mois d'août 2021);
07.10.2021 : 30 min (stagiaire) car 1h30 admise;
05.11.2021 : 1h30 (stagiaire) car 2 car pas pris en compte (max 1h30 par mois + 1h30 si audience (3h00 admises pour le mois de novembre 2021);

Réductions du poste "B. Procédure".
10.08.2021 : 1h00 (collaboratrice) car excessif;
20.08.2021 : 40 min (collaboratrice) car début de consultation 09h10 / fin de consultation 09h30;
27.08.2021 : 1h00 (collaboratrice) car excessif;
15.09.2021 : 1h00 (collaboratrice) car excessif;
21.09.2021 : 35 min (stagiaire) car début de consultation 16h35 / fin de consultation 17h00;
22.09.2021 : 8h00 (collaboratrice) car excessif et dénué de chances de succès;
29.09.2021 : 30 min (collaboratrice) car inutile;

Ces réductions comprennent uniquement la période antérieure au mois de décembre 2021.

3h00 (stagiaire) et 1h30 (collaboratrice) retenues pour l'activité du 13 décembre 2021. Le surplus étant excessif au vu de l'absence de difficulté du dossier et des heures déjà indemnisées.

Pas de modification de l'activité des 8 et 10 décembre 2021.

Pas de modification pour le surplus.

Majoration de 2h30 (stagiaire) relative à l'audience de jugement + 1 déplacement.

Voie de recours si seule l'indemnisation est contestée

Le défenseur d'office peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours, devant la Chambre pénale de recours contre la décision fixant son indemnité (art. 135 al. 3 let. a et 396 al. 1 CPP; art. 128 al. 1 LOJ).