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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2972/2018

ATAS/333/2019 du 15.04.2019 ( AVS ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2972/2018 ATAS/333/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 15 avril 2019

6ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à Chêne-Bourg, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Guerric CANONICA

 

 

recourant

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION, sise rue des Gares 12, Case postale 2595, GENEVE

et Monsieur B______, domicilié à BERNEX

 

intimée

 

appelé en cause

 


EN FAIT

1.        La société C______ SA, créée en octobre 2007, devenue D______ SA (ci-après : la société) le 21 avril 2010, avait pour but social le génie civil, la réalisation d’aménagements extérieurs, les transports et l’exploitation de gravières. Son personnel était affilié auprès de la Caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : la caisse ou l’intimée). À teneur de l’extrait du registre du commerce y relatif, Monsieur A______ (ci-après : l’administrateur ou le recourant) en était l’administrateur du 5 octobre 2010 au 19 août 2013. Le 30 août 2013, Monsieur B______ lui a succédé dans cette fonction.

2.        À partir d’octobre 2010, la société n’a honoré qu’irrégulièrement les factures de cotisations sociales et les retards de paiements se sont accumulés. Ainsi, ce n’est qu’après s’être vu adresser, le 4 août 2011, une sommation de payer CHF 11'762.- au titre de cotisations dues pour l’année 2010 que la société s’en est acquittée
le 16 août 2011, sans pour autant solder les cotisations dues pour 2010.

3.        Au cours des années 2011 à 2013, la société a accusé d’autres retards dans le paiement des cotisations sociales, sans parvenir à s’acquitter d’arriérés relatifs aux années 2011, plus particulièrement 2012 et 2013.

4.        Par jugement du 15 décembre 2014, le Tribunal de première instance a prononcé la faillite de la société.

5.        Par jugement du 16 septembre 2015, ce même Tribunal a suspendu la liquidation de la société faute d’actifs, laissant la caisse avec un découvert de CHF 267'683.- à cette date, dont CHF 223'628.25.- à titre de cotisations sociales impayées, frais et intérêts moratoires compris pour les années 2010 à 2013 (soit CHF 1'130.55 pour 2010, CHF 2'548.85 pour 2011, CHF 92'982.25 pour 2012 et CHF 126'966.60 pour 2013).

6.        Le 24 septembre 2015, cette suspension de la procédure de faillite faute d’actifs a fait l’objet d’une publication dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC).

7.        Le 4 janvier 2016, la société en liquidation a été radiée d’office du registre du commerce.

8.        Par décision du 24 août 2016, la caisse a réclamé à l’administrateur le paiement de CHF 167'652.70 sous trente jours, précisant qu’il s’agissait de la somme de montants dus et exigibles lorsqu’il avait pris ses fonctions et échus au cours de son mandat (soit CHF 1'130.55 pour 2010, CHF 2'548.85 pour 2011, CHF 92'982.25 pour 2012 et CHF 70'991.05 pour 2013), et qu’il en était solidairement responsable avec son successeur.

9.        Le 10 septembre 2016, l’administrateur a formé opposition à cette décision. Il avait effectivement été administrateur de la société en 2010 et 2013 (recte : de 2010 à 2013). Cependant, le non-paiement des factures n’était pas dû à une malversation de sa part car il avait toujours mis en place des directives pour que les dettes sociales et fiscales soient payées en priorité. Avant son départ en 2013, il avait mis en place des ordres de paiement bancaires et avait même obtenu la garantie écrite de son successeur que tout avait été soldé car la société avait encaissé des montants importants. Sur un autre plan, il souhaitait porter à la connaissance de la caisse le fait qu’actuellement, « la justice » instruisait une procédure en reconnaissance de responsabilité à l’encontre du propriétaire de la société et compte tenu de ces éléments, il souhaitait s’entretenir avec la caisse au sujet du dossier car il n’avait pas été fautif dans cette affaire, les non paiements ayant existé « à mon total insu ». Il avait été entendu comme témoin (recte : en tant que personne appelée à donner des renseignements) par le Ministère public dans le cadre de la faillite de la société et avait repris contact avec le Procureur en charge du dossier pour être à nouveau entendu car des éléments corroboraient le fait que la société était gérée non pas par les administrateurs en titre mais par les propriétaires de la société.

10.    Le 26 janvier 2017, la caisse s’est référée à l’opposition formée par l’administrateur en invitant celui-ci à indiquer, pièces justificatives à l’appui, quelles étaient les personnes responsables de la gestion de la société.

11.    Par pli du 14 février 2017, l’administrateur a fait savoir à la caisse que de nombreux éléments attestaient de la forte implication de plusieurs personnes dans la faillite de la société. Il s’agissait de Monsieur E______ et de son fils, Monsieur F______ E______, propriétaires de la société, ainsi que d’un employé de celle-ci, Monsieur G______, qui en était le comptable. Lorsqu’il avait donné sa démission en tant qu’administrateur, la société n’avait pas de liquidités mais devait encaisser des paiements consécutifs à des chantiers « réalisés et non contestés ». M. G______ avait d’ailleurs préparé un planning à l’attention du réviseur, témoignant que la situation pouvait se remettre en équilibre. L’administrateur avait expliqué tout cela à M. B______, lequel avait eu de longues discussions avec M. G______ et les propriétaires de la société. M. B______ était convaincu que les choses allaient s’arranger sous deux à trois mois, contrairement à lui, son prédécesseur, qui était d’avis que des mesures devaient être mise en place de suite. Il réalisait aujourd’hui que « tout ce qu’il avait mis en place » avait été balayé, après son départ, par la famille E______, M. G______, voire M. B______. Une implication de ce dernier lui paraissait toutefois peu vraisemblable. Au vu de sa longue expérience dans le domaine du placement, M. B______ était très bien informé et surtout très conscient des obligations en matière sociale et fiscale. De plus, M. B______ avait déposé une demande de sursis concordataire, acceptée par la justice civile, car il y avait beaucoup de chantiers en cours mais manifestement, ce concordat, qui devait permettre d’apurer en grande partie les dettes, n’avait servi, dans les faits, qu’à favoriser d’autres détournements. Pour sa part, l’administrateur reconnaissait ses torts. Comme il avait confiance en M. E______, il avait laissé faire les choses à son « total insu ». Lorsqu’il s’en était aperçu, il avait essayé de mettre en place des mesures correctives mais il s’était rendu compte qu’en habitant loin à l’époque, il n’y arriverait pas. Aussi avait-il pris la décision de démissionner. Pour étayer ces propos, l’administrateur a produit notamment :

-          un courrier manuscrit rédigé de sa propre main, dont M. B______ avait accusé réception le 23 août 2013. L’administrateur y attirait l’attention de son successeur « sur les charges sociales non payées malgré les promesses des deux gérants ».

-          un courriel daté du 8 octobre 2014 que M. B______, avait adressé à un avocat constitué dans « l’affaire [de la société] » et que ce dernier avait déposé au Tribunal de première instance le 4 novembre 2014. Il en ressortait que
M. B______ était dans l’impossibilité d’établir une gestion comptable de la société car son directeur, sans rien dire, encaissait directement auprès des clients, en liquide, les sommes revenant à la société. Ce faisant, M. F______ se rémunérait à titre personnel au passage sans tenir compte des charges à payer ;

-          un courrier du 8 juin 2015 de M. B______ à l’office des faillites, énumérant plusieurs sociétés anonymes qui auraient autrefois appartenu à la famille E______ avant de faire faillite les unes après les autres. Une chose était certaine selon
M. B______ : à chaque faillite, on parlait de « plusieurs millions de pertes en TVA, assurances sociales et autres ». En revanche, le personnel, le matériel, les factures des clients suivaient et se transféraient d’une société à l’autre. C’étaient « les mêmes personnes, au même endroit, dans les mêmes locaux, avec les mêmes partenaires et les mêmes camions et machines » ;

-          le procès-verbal d’audience, établi par le Ministère public le 26 juin 2015 dans le cadre de l’audition de M. B______, prévenu notamment de détournement de retenues sur les salaires : M. B______ y déclarait qu’il connaissait son prédécesseur immédiat, l’ancien administrateur, qui lui avait demandé de reprendre sa place car il souhaitait quitter la société car c’était un « panier de crabes », les charges n’étaient pas payées. L’ancien administrateur lui avait dit également que son mandat ne devait durer que trois mois environ car il fallait s’attendre à une fin prochaine de la société au vu de sa situation délicate.

12.    Le 28 février 2017, la caisse a demandé à l’administrateur s’il avait déposé plainte pénale à l’encontre de la « famille E______ » et/ou MM. B______ et G______.

13.    Par pli du 4 avril 2017 à la caisse, l’administrateur, représenté par un avocat, a complété ses observations précédentes en soulignant qu’il ressortait des différentes auditions diligentées par le Ministère public que la famille E______ était en charge de la gestion effective de la société et que Messieurs H______ et F______ en étaient les administrateurs de fait. Compte tenu de la procédure pendante devant
le Ministère public, le dépôt d’une plainte pénale, notamment à l’encontre de
M. F______, apparaissait manifestement inutile.

14.    Par décision du 2 août 2018, la caisse a rejeté l’opposition formée le 10 septembre 2016 et confirmé sa décision du 24 août 2016. L’administrateur ne remettait pas en cause sa qualité d’organe de la société puisqu’il en avait été l’administrateur du
5 octobre 2010 au 19 août 2013, durée qui couvrait donc les dettes demeurées impayées pour les périodes de cotisation 2010 à 2013. En négligeant de s’occuper du paiement des cotisations sociales et par conséquent des dettes envers la caisse, l’administrateur avait commis une faute grave et engagé sa responsabilité pour l’intégralité du dommage qu’il avait ainsi causé à la caisse. Les arguments avancés par l’administrateur, à savoir le fait que des procédures civiles ou pénales étaient actuellement en cours contre d’autres personnes ayant joué un rôle au sein de la société n’avaient, à l’heure actuelle, aucune influence sur la responsabilité première de l’intéressé qui pouvait, cas échéant, ouvrir une action récursoire contre d’autres organes de la société.

15.    Le 3 septembre 2018, l’assuré a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre cette décision, concluant à son annulation et, préalablement, à la confirmation de l’effet suspensif du recours, le tout sous suite de frais et dépens. À l’appui de ses conclusions, le recourant a fait valoir en substance qu’il avait occupé, tout au long de son mandat, la place d’homme de paille et qu’il s’était trouvé bien malgré lui à l’écart des décisions importantes et courantes qui étaient prises par MM. H______ et F______ dont la mauvaise gestion avait entraîné un manque de liquidités important. En outre, le recourant a soutenu qu’il n’avait pas de raisons objectives de croire, dans un premier temps, que la gestion de la société était à ce point catastrophique et la situation de cette dernière à ce point défavorable. Il ressortait en effet du procès-verbal d’audience du Ministère public du 21 septembre 2016 qu’il se souvenait avoir écrit à M. B______ pour lui rappeler qu’il était capital de s’acquitter à tout le moins de la « part pénale » des cotisations sociales. Il le lui avait rappelé et ce dernier avait accusé réception de ce rappel le 23 août 2013. En outre, dans un courrier du 25 mai 2011, relatif au contrôle portant sur l’exercice 2010 de la société, l’organe de révision I______ SA avait annoncé à cette dernière n’avoir pas rencontré d’élément lui permettant de conclure que les comptes annuels, qui présentaient un bénéfice de CHF 51'442.83, ainsi que la proposition concernant l’emploi du bénéfice, n’étaient pas conformes à la loi et aux statuts.

Le recourant s’est également fondé sur un courriel qu’il avait adressé le 30 mars 2012 au nouvel organe de révision, la fiduciaire J______ SA, soit pour elle Monsieur K______, dans lequel il déclarait que ce n’était qu’à partir de l’année 2012 qu’il avait commencé à nourrir de sérieux doutes au sujet des propos rapportés par la famille E______ et M. G______. Il y indiquait en effet que la société recevait des commandements de payer mais que lors des réunions, il s’entendait dire que tout était en ordre, raison pour laquelle invitait M. K______ à lui dire s’il avait des remarques à formuler dans le cadre de ses travaux de révision, tout en ajoutant qu’il fallait « suivre ce dossier à la lettre et ne pas [s’en] tenir à ce que [leur disaient] l’actionnaire et le comptable ».

C’était à la suite de ce courriel du 30 mars 2012 et d’un entretien avec
M. K______ que le recourant avait découvert, d’une part, que contrairement à ce que lui avaient affirmé la famille E______ et M. G______, aucun document n’avait été remis à M. K______ et, d’autre part, que la société ne s’était pas acquittée de nombreuses dettes, notamment des charges sociales du personnel. Le recourant en voulait pour preuve un courriel du 5 avril 2012 qu’il avait adressé conjointement à M. F______ et M. G______. Le recourant y reprochait notamment à ceux-ci de ne pas remettre à M. K______ les dossiers de débiteurs en recouvrement comme cela avait été convenu. Et le recourant d’ajouter, dans le même courriel du
5 avril 2012, qu’il avait découvert, suite au « début d’audit » de M. K______, que contrairement à ce que MM. E______ et M. G______ lui avaient affirmé, la société croulait sous les dettes sociales avec une TVA restée impayée depuis un an et des salaires qui n’étaient versés que par tranches aux employés.

Le recourant a en outre produit un courrier – sans les annexes – que la société lui avait adressé le 29 mai 2012, l’invitant à transmettre à l’office des poursuites les justificatifs de paiement destinés à la caisse. Il a également versé au dossier le procès-verbal de l’assemblée générale extraordinaire de la société du 12 novembre 2012 dans lequel étaient évoquées les dettes de la société. Ce document précisait d’une part que des sommes importantes restaient dues à l’assureur Swisslife, ainsi qu’à la TVA et, d’autre part, que le recourant émettait « tout de même des doutes quant à l’exactitude des chiffres ». Sur quoi, MM. E______ et G______ s’étaient accordés, lors de la même assemblée, pour assurer le recourant de la réalité et de l’exactitude des comptes présentés et tenus tout au long de l’année, en ajoutant que toutes les créances étaient réelles et reconnues par les débiteurs.

Enfin, le recourant a allégué que ce n’était que par la suite, après de nombreuses tentatives infructueuses d’assainissement de la société, qu’il avait pris la décision de démissionner avec effet au 19 août 2013, non sans avoir conseillé à son successeur, M. B______, par courrier du 30 août 2013, « de faire les versements pour les cotisations sociales car il y a de l’argent sur la société comme tu me l’as dit puisque vous avez reçu CHF 60'000.- ». Dans ce même courrier, le recourant indiquait également avoir demandé à M. G______ si le planning était suivi, ajoutant que ce dernier l’avait toujours assuré que oui mais que « dans les faits, [il s’était aperçu que M. G______ ne payait] personne ». Ce courrier avait été annoté et contresigné en ces termes par M. B______ : « Merci L______, MM. E______ et G______ m’ont assuré que tout était payé [signature de M. B______] ».

À la lumière de ces éléments, le recourant a fait valoir que sa responsabilité envers la caisse n’était pas engagée dans la mesure où le comportement abusif adopté par la famille E______ et G______, consistant à dissimuler de manière astucieuse la situation financière de la société, ne permettait pas dans un premier temps de douter de la bonne gestion de cette dernière. Même si la structure organisationnelle de la société avait limité grandement les possibilités du recourant de faire entendre sa voix, en particulier sur le plan interne, il ne s’était pas satisfait des informations lacunaires qui lui avaient été communiquées et dès qu’il avait eu des raisons objectives de douter de la parole de la famille E______ et de M. G______, il n’avait eu de cesse de solliciter des renseignements et documents afin de s’assurer du paiement des charges sociales, allant jusqu’à s’entretenir directement avec l’organe de révision et convoquer une assemblée générale extraordinaire le 12 novembre 2012 au cours de laquelle il avait exigé des explications ainsi qu’un rétablissement rapide de la situation. Enfin, après son départ de la société, le recourant avait informé M. B______ des irrégularités commises par la famille E______ et M. G______. Ce faisant, il avait mis en œuvre tous les moyens qui pouvaient raisonnablement être exigés afin de s’assurer du paiement des charges sociales par la société.

16.    Le 4 septembre 2018, la chambre de céans a demandé à l’intimée de se déterminer, dans un premier temps, sur la demande de restitution de l’effet suspensif du recours.

17.    Le 17 septembre 2018, l’intimée a fait savoir qu’elle ne s’opposait pas à cette demande.

18.    Par réponse du 1er novembre 2018, l’intimée a conclu au rejet du recours, motif pris qu’un homme de paille qui ne faisait pas usage de ses droits de contrôle faisait preuve de négligence grave et qu’il lui incombait en sa qualité d'organe formel de la société de veiller personnellement à ce que les cotisations paritaires afférentes aux salaires versés fussent effectivement payées. En ayant conscience de ne pas pouvoir remplir consciencieusement son rôle d’administrateur, le recourant avait manqué à son devoir de diligence. En effet, celui-ci avait lui-même déclaré, lors de son audition par le Ministère public le 27 mai 2016 (pce 2 recourant, p. 8/11), qu’il habitait Zoug à l’époque et qu’à chaque fois qu’il se rendait auprès de la société, il y avait un événement qui empêchait la réunion fixée de se tenir. Il en découlait, selon l’intimée, que le recourant n’avait participé qu’à un nombre très restreint de réunions. Pour le surplus, il s’était limité à écrire trois courriels aux autres gestionnaires de la société dans lesquels il se préoccupait principalement des créances de la société à l’encontre de différents débiteurs. Quant aux éventuelles dettes de la société à l’encontre d’autres institutions, elles n’y étaient que vaguement évoquées. En définitive, le recourant n’avait entrepris aucune démarche pour essayer de s’acquitter des montants dus à l’intimée.

19.    Par réplique du 4 décembre 2018, le recourant a soutenu avoir exercé son devoir avec la diligence requise dès le début de son mandat et avoir fait usage de ses droits de contrôle dès l’instant où il avait éprouvé des doutes au sujet des agissements de la famille E______ et de M. G______. Or, jusqu’au début de l’année 2012, aucun élément ne permettait de remettre en cause la parole de ces personnes. Partant, une négligence grave ne pouvait être retenue à son encontre dès lors qu’il avait souhaité participer activement à la gestion de la société mais en avait été empêché par les administrateurs de fait de cette dernière qui l’avaient trompé et tenu à l’écart malgré lui. Nonobstant son adresse dans le canton de Zoug, le recourant s’était efforcé de mettre en place des réunions régulières et avait tenté d’instaurer un système de gestion des charges sociales. Ces démarches s’étaient néanmoins révélées vaines en raison de l’importante résistance opposée par la famille E______ et M. G______. En outre, le recourant avait pris ses dispositions pour se rendre régulièrement à Genève pour assister aux réunions qu’il avait lui-même organisées et qui avaient quasi systématiquement été annulées à la dernière minute par les administrateurs de fait. Dans ces circonstances, le fait d’avoir vécu dans le canton de Zoug n’avait une quelconque influence sur la gestion de la société et aucune violation de l’obligation de diligence ne pouvait être retenue à son encontre. On ne pouvait pas non plus lui reprocher de n’avoir écrit que trois courriels. En effet, il avait notamment exigé la tenue d’une assemblée générale extraordinaire le 12 novembre 2012 qui avait précisément pour but d’assainir les comptes de la société et de définitivement solder ses dettes. De plus, il avait d’ores et déjà chargé M. K______, à cette même époque, de la gestion des dettes de la société en sus de son mandat de révision des comptes. S’il est vrai que le recourant s’était intéressé à la santé financière et aux différents débiteurs d’une manière globale – conformément à ses devoirs d’administrateur –, il n’en demeurait pas moins que les dettes de la société envers les institutions avaient tenu une place centrale au sein de ses préoccupations d’administrateur. Dès lors qu’il avait reçu, à sa demande, par courrier du 29 mai 2012, la preuve du paiement des montants dus à l’intimée par la société, on ne pouvait lui reprocher de ne pas s’être adressé directement à l’intimé alors qu’il pensait de bonne foi que toutes les dettes avaient été réglées. On ne pouvait pas non plus lui tenir rigueur d’avoir attendu le mois de mars 2012 avant d’entreprendre des démarches, d’autant que le rapport de l’organe de révision de la société, du 25 mai 2011, n’avait relevé aucune irrégularité. Dans la mesure où il s’était retrouvé face à une société qu’il pensait, de bonne foi, financièrement saine et à des gérants qu’il pensait, de bonne foi, honnêtes, on ne pouvait lui faire grief d’avoir agi de manière tardive. Enfin, on ne pouvait lui faire le reproche de n’avoir pas démissionné plus tôt. En effet, c’était précisément pour sauvegarder les intérêts de la société et tenter d’assainir la situation financière de cette dernière qu’il avait retardé sa démission. Et ce n’était qu’après avoir constaté qu’il lui serait impossible d’avoir une quelconque influence sur les agissements des gérants de fait que le recourant avait pris la décision de mettre un terme à son mandat. En tout état, on ne pouvait lui reprocher d’avoir entrepris toutes les démarches qu’il pensait utiles avant de démissionner.

20.    Par duplique du 4 janvier 2019, l’intimé a relevé qu’il ressortait clairement de l’audition de M. B______ par le Ministère public le 26 juin 2015 que le recourant lui avait demandé de reprendre sa place d’administrateur car il souhaitait quitter la société car c’était un « panier de crabes », non sans ajouter que les charges n’étaient pas payées. Toujours selon M. B______, le recourant lui avait dit également que son mandat ne devait durer que trois mois environ car il fallait s’attendre à une fin prochaine de la société au vu de sa situation délicate. Au vu
de ces éléments, le recourant n’était pas digne de foi en tant qu’il affirmait que
la situation financière de la société lui avait été soigneusement et astucieusement cachée tout au long de son mandat d’administrateur. Au contraire, il était manifestement au courant, pendant une bonne partie de son mandat, des manquements de la société à l’égard de l’intimée et n’avait rien fait pour que
ceux-ci cessent réellement. De ce fait, son comportement était constitutif d’une négligence grave.

21.    Par entretien téléphonique du 21 janvier 2018, la chambre de céans a invité l’intimée à lui communiquer deux pièces ne figurant pas au dossier, à savoir la lettre d’opposition du recourant du 10 septembre 2016 et le courrier de l’intimée du 28 février 2017.

22.    Le 22 janvier 2019, l’intimée a transmis les pièces requises à la chambre de céans.

23.    Le 23 janvier 2019, une copie de cet envoi a été remise, pour information, au recourant.

24.    le 5 février 2019, en réponse à un courrier que la chambre de céans lui avait adressé le 4 février 2019, l’intimée a indiqué que M. B______ s’était vu notifier une décision de réparation du dommage le 24 août 2016, confirmée sur opposition
le 3 août 2018, par laquelle elle condamnait ce dernier à lui rembourser la somme de CHF 267'683.-. Ce montant, dont il répondait solidairement avec le recourant à concurrence de CHF 167'652.70, représentait les cotisations sociales impayées, frais et intérêts moratoires compris pour les années 2010 à 2014. Non contestée, la décision du 3 août 2018 était entrée en force.

25.    Par ordonnance du 25 février 2019, la chambre de céans a appelé en cause
M. B______.

26.    Par pli du 20 mars 2019, M. B______ a indiqué que lorsqu’il avait repris le mandat d’administrateur, il était clair que la société « n’irait pas bien loin sans remaniement ». Les paiements aux organismes sociaux, contrairement à ce qui était affirmé par la direction de la société, n’avaient jamais été réglés. Il n’avait jamais eu accès aux éléments comptables de la société, « M. F______ les séquestrant dans son bureau ». Il avait tenté d’assainir la situation en allégeant la structure, mais malgré tous ses efforts et la nomination d’un curateur par le Tribunal, les détournements de fonds commis par les dirigeants de la société s’étaient poursuivis, ce qui avait entraîné la faillite de cette dernière.

27.    Le 21 mars 2019, une copie de ce courrier a été remise, pour information, aux parties.

28.    Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        a. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie, le recours étant dirigé contre une décision rendue sur opposition fondée sur la LAVS.

b. Selon l’art. 52 al. 5 LAVS, en dérogation à l’art. 58 al. 1 LPGA, le tribunal des assurances du canton dans lequel l’employeur est domicilié est compétent pour traiter le recours. L’art. 52 al. 5 LAVS doit être compris en ce sens que les actions en réparation du dommage contre les personnes morales et leurs organes doivent être ouvertes au for du siège de la société, respectivement au for du siège qui était le sien avant la faillite, ceci indépendamment du domicile des organes recherchés (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 184/06 du 25 avril 2007 consid. 2.3).

Dès lors que la société avait son siège dans le canton de Genève avant sa faillite, la chambre de céans est également compétente ratione loci.

c. Le recours a été interjeté en temps utile (art. 60 LPGA), dans le respect des exigences de forme et de contenu prévues par la loi (art. 61 let. b LPGA ; cf. aussi art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA – E 5 10).

Touché par la décision attaquée et ayant un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification, le recourant a qualité pour recourir (art. 59 LPGA).

Son recours est donc recevable.

2.        a. À teneur de l’art. 1 al. 1 LAVS, les dispositions de la LPGA s’appliquent aux art. 1 à 97 LAVS, à moins que la loi n’y déroge expressément.

L’entrée en vigueur de la LPGA le 1er janvier 2003 a entraîné la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de l’AVS, notamment en ce qui concerne l’art. 52 LAVS. Désormais, la responsabilité de l’employeur y est réglée de manière plus détaillée qu’auparavant et les art. 81 et 82 du règlement sur l’assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101) ont été abrogés. Les principes dégagés par la jurisprudence sur les conditions de droit matériel de la responsabilité de l’employeur au sens de l’art. 52 LAVS dans sa teneur précédente restent valables sous l’empire des modifications introduites par la LPGA (ATF 129 V 11 consid. 3.5 et 3.6). Les modifications de la LAVS du 7 juin 2011, entrées en vigueur le 1er janvier 2012, ont également entraîné la modification de nombreuses dispositions légales, en particulier l’art. 52 al. 2 à 4 LAVS.

b. En l’espèce, au vu des faits pertinents, la responsabilité du recourant doit être examinée, sur le plan matériel, au regard des dispositions en vigueur depuis le
1er janvier 2012.

3.        Le litige porte sur la responsabilité du recourant pour le dommage causé à l’intimée du fait du défaut de paiement des cotisations sociales (AVS-AI-APG et AVS ainsi qu’AMat et AF) dues et exigibles à son entrée en fonction le 5 octobre 2010 et échues jusqu’au 19 août 2013, terme de son mandat. S’élevant à CHF 167'652.70, frais et intérêts moratoires compris, pour la durée de ce mandat, le montant du dommage n’est en tant que tel pas contesté.

4.        L’art. 14 al. 1 LAVS en corrélation avec les art. 34 et suivants RAVS, prescrit l’obligation pour l’employeur de déduire sur chaque salaire la cotisation du salarié et de verser celle-ci à la caisse de compensation avec sa propre cotisation. Les employeurs doivent envoyer aux caisses, périodiquement, les pièces comptables concernant les salaires versés à leurs salariés, de manière à ce que les cotisations paritaires puissent être calculées et faire l’objet de décisions. L’obligation de payer les cotisations et de fournir les décomptes est, pour l’employeur, une tâche de droit public prescrite par la loi. À cet égard, le Tribunal fédéral a déclaré, à réitérées reprises, que la responsabilité de l’employeur au sens de l’art. 52 LAVS est liée au statut de droit public. L’employeur qui ne s’acquitte pas de cette tâche commet une violation des prescriptions au sens de l’art. 52 LAVS, ce qui entraîne pour lui l’obligation de réparer entièrement le dommage ainsi occasionné (ATF 118 V 193 consid. 2a).

À teneur de l’art. 52 LAVS, l’employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n’observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à l’assurance, est tenu à réparation (al. 1). Si l’employeur est une personne morale, les membres de l’administration et toutes les personnes qui s’occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d’un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage (al. 2). Le droit à réparation est prescrit deux ans après que la caisse de compensation compétente a eu connaissance du dommage et, dans tous les cas, cinq ans après la survenance du dommage. Ces délais peuvent être interrompus. L’employeur peut renoncer à invoquer la prescription. Si le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est applicable (al. 3). La caisse de compensation fait valoir sa créance en réparation du dommage par voie de décision (al. 4).

5.        À titre liminaire, il convient d’examiner si la prétention de la caisse est prescrite.

a. Les délais prévus par l’art. 52 al. 3 LAVS doivent être qualifiés de délais de prescription, non de péremption, comme cela ressort du texte légal et des travaux préparatoires de la LPGA (SVR 2005 AHV n° 15 p. 49 consid. 5.1.2 ; FF 1994 V 964 ; FF 1999 p. 4422). Alors que le délai de prescription de deux ans commence à courir dès la connaissance du dommage, celui de cinq ans débute, en revanche, dès la survenance du dommage (ATF 129 V 193 consid. 2.2). Cela signifie qu'ils ne sont plus sauvegardés une fois pour toutes avec la décision relative aux dommages-intérêts ; le droit à la réparation du dommage au sens de l'art. 52 al. 1 LAVS peut donc aussi se prescrire durant la procédure d'opposition ou la procédure de recours qui s'ensuit (ATF 135 V 74 consid. 4.2).

Le dommage survient dès que l'on doit admettre que les cotisations dues ne peuvent plus être recouvrées, pour des motifs juridiques ou de fait (ATF 129 V 195 consid. 2.2 ; 126 V 444 consid. 3a ; 121 III 384 consid. 3bb). Tel sera le cas lorsque des cotisations sont frappées de péremption, ou en cas de faillite, en raison de l'impossibilité pour la caisse de récupérer les cotisations dans la procédure ordinaire de recouvrement. Le dommage subi par la caisse est réputé être survenu au moment de l'avènement de la péremption ou le jour de la faillite; ce jour marque également celui de la naissance de la créance en réparation et la date à partir de laquelle court le délai de 5 ans de l'ancien art. 82 al. 1 in fine RAVS (ATF 129 V 195 consid. 2.2 ; 123 V 16 consid. 5c).

Selon la jurisprudence rendue à propos de l'ancien art. 82 al. 1 RAVS, et valable sous l'empire de l'art. 52 al. 3 LAVS (arrêt du Tribunal fédéral H.18/06 du 8 mai 2006 consid. 4.2), il faut entendre par moment de la «connaissance du dommage», en règle générale, le moment où la caisse de compensation aurait dû se rendre compte, en faisant preuve de l'attention raisonnablement exigible, que les circonstances effectives ne permettaient plus d'exiger le paiement des cotisations, mais pouvaient entraîner l'obligation de réparer le dommage (ATF 129 V 193 consid. 2.1).

En cas de faillite, ce moment correspond en règle générale à celui du dépôt de l'état de collocation, ou celui de la publication de la suspension de la liquidation de la faillite faute d'actifs (ATF 129 V 193 consid. 2.3), la date de la publication de cette mesure dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC) étant déterminante (arrêt du Tribunal fédéral H.142/03 du 19 août 2003 consid. 4.3 ; ATF 129 V 193 consid. 2.3).

S’agissant des actes interruptifs de prescription, il sied de retenir ce qui suit. Tandis que le juge ne peut interrompre la prescription que par une ordonnance ou une décision, « chaque acte judiciaire des parties » suffit à produire cet effet (art. 138 al. 1 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse - CO, Code des obligations - RS 220). Cette notion d'acte judiciaire des parties doit être interprétée largement (ATF 106 II 35 consid. 4) tout en ayant égard à la ratio legis de la disposition citée, qui est de sanctionner l'inaction du créancier. Il faut donc considérer comme acte judiciaire d'une partie tout acte de procédure relatif au droit invoqué en justice et susceptible de faire progresser l'instance (cf. ATF 130 III 202 consid. 3.2). Par ailleurs, tant la décision que l’opposition interrompent le délai de prescription de deux ans et font courir un nouveau délai de même durée (ATF 135 V 74 consid. 4.2.2).

b. En l’espèce, le dommage s’est produit le 15 décembre 2014, soit au moment du prononcé de la faillite, et l’intimée est réputée avoir eu connaissance du dommage le 24 septembre 2015, lors de la publication dans la FOSC de la suspension de la faillite faute d’actifs.

Ainsi, le délai absolu de prescription de cinq ans courant dès le 15 décembre 2014 et le délai relatif de prescription de deux ans courant dès le 24 septembre 2015 ont été interrompus tant par la décision en réparation du dommage du 24 août 2016, que par la décision sur opposition du 2 août 2018, puis le recours du 3 septembre 2018.

6.        L’action en réparation du dommage n’étant pas prescrite, il convient à présent d’examiner si les autres conditions de la responsabilité de l’art. 52 LAVS sont réalisées, à savoir si le recourant peut être considéré comme étant « l’employeur » tenu de verser les cotisations à l’intimée, s’il a commis une faute ou une négligence grave et enfin s’il existe un lien de causalité adéquate entre son comportement et le dommage causé à l’intimée.

7.        a. La nouvelle teneur de l’art. 52 al. 2 LAVS, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, codifie la jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle, si l’employeur est une personne morale, la responsabilité peut s’étendre, à titre subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom (ATAS/610/2013 du 18 juin 2013 consid. 4a).

b. Le caractère subsidiaire de la responsabilité des organes d’une personne morale signifie que la caisse de compensation ne peut agir contre ces derniers que si le débiteur des cotisations (la personne morale) est devenu insolvable (ATF 123 V 12 consid. 5b).

L’art. 52 LAVS ne permet ainsi pas de déclarer l’organe d’une personne morale directement débiteur de cotisations d’assurances sociales. En revanche, il le rend responsable du dommage qu’il a causé aux différentes assurances sociales fédérales, intentionnellement ou par négligence grave, en ne veillant pas au paiement des cotisations sociales contrairement à ses obligations (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 96/05 du 5 décembre 2005 consid. 4.1).

c. La notion d’organe selon l’art. 52 LAVS est en principe identique à celle qui se dégage de l’art. 754 al. 1 CO (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 234/02 du 16 avril 2003 consid. 7.3 publié in REAS 2003 p. 251).

En matière de responsabilité des organes d’une société anonyme, l’art. 52 LAVS vise en première ligne les organes statutaires ou légaux de celle-ci, soit les administrateurs, l’organe de révision ou les liquidateurs (ATF 128 III 29 consid. 3a; ATF 117 II 432 consid. 2b ; ATF 117 II 570 consid. 3 ; ATF 107 II 349 consid. 5a ; Thomas NUSSAUMER, Les caisses de compensation en tant que parties à une procédure de réparation d’un dommage selon l’art. 52 LAVS, in RCC 1991 p. 403).

Au contraire des organes de fait, les organes formels répondent indépendamment de leur fonction ou de leur influence sur la marche des affaires de la société. Le fait qu’ils disposent d’un pouvoir de signature et les motifs de leur mandat sont également sans importance (cf. ATF 114 V 211 consid. 4). En présence d’un organe formel, il n’est pas nécessaire d’examiner s’il répond à la notion d’organe matériel (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 34/04 du 15 septembre 2004 consid. 5.3.2).

d. En l’occurrence, le recourant a été inscrit au registre du commerce en qualité d’administrateur le 5 octobre 2010 et son mandat a pris fin le 13 août 2013. Il faisait partie du conseil d’administration et revêtait donc la qualité d’organe formel, de sorte qu’il répond en principe du dommage subi par l’intimée.

8.        Il sied d’examiner si le recourant a violé intentionnellement ou par négligence grave les devoirs lui incombant et s’il existe un lien de causalité naturelle et adéquate entre le manquement qui lui est imputable et le préjudice subi.

9.        a. L’obligation légale de réparer le dommage ne doit être reconnue que dans les cas où le dommage est dû à une violation intentionnelle ou par négligence grave, par l’employeur, des prescriptions régissant l’assurance-vieillesse et survivants (RCC 1978 p. 259 ; RCC 1972 p. 687). Il faut donc un manquement d’une certaine gravité. Pour savoir si tel est le cas, il convient de tenir compte de toutes les circonstances du cas concret (ATF 121 V 243 consid. 4b).

La caisse de compensation qui constate qu’elle a subi un dommage par suite de la non-observation de prescriptions peut admettre que l’employeur a violé celles-ci intentionnellement ou du moins par négligence grave, dans la mesure où il n’existe pas d’indice faisant croire à la légitimité de son comportement ou à l’absence d’une faute (RCC 1983 p. 101).

b. Selon la jurisprudence constante, se rend coupable d'une négligence grave l'employeur qui manque de l'attention qu'un homme raisonnable aurait observée dans la même situation et dans les mêmes circonstances. La mesure de la diligence requise s'apprécie d'après le devoir de diligence que l'on peut et doit en général attendre, en matière de gestion, d'un employeur de la même catégorie que celle de l'intéressé. En présence d'une société anonyme, il y a en principe lieu de poser des exigences sévères en ce qui concerne l'attention qu'elle doit accorder au respect des prescriptions. Une différenciation semblable s'impose également lorsqu'il s'agit d'apprécier la responsabilité subsidiaire des organes de l'employeur (ATF 108 V 189). Les faits reprochés à une entreprise ne sont pas nécessairement imputables à chacun des organes de celle-ci. Il convient bien plutôt d'examiner si et dans quelle mesure ces faits peuvent être attribués à un organe déterminé, compte tenu de la situation juridique et de fait de ce dernier au sein de l'entreprise. Savoir si un organe a commis une faute dépend des responsabilités et des compétences qui lui ont été confiées par l'entreprise (ATF 108 V 199 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.2). La négligence grave mentionnée à l'art. 52 LAVS est admise très largement par la jurisprudence (ATF 132 III 523 consid. 4.6).

L’art. 716a al. 1 CO énumère les attributions intransmissibles et inaliénables des membres d’un conseil d’administration. En font partie l’exercice de la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, pour s’assurer notamment qu’elles observent la loi, les statuts, les règlements et les instructions données (ch. 5). Dans le cadre de l’exercice de cette haute surveillance, l’administrateur répond de la cura in custodiendo. C’est ainsi qu’il a non seulement le devoir d’assister aux séances du conseil d’administration, mais également l’obligation de se faire renseigner périodiquement sur la marche des affaires. Il est tenu de prendre les mesures appropriées lorsqu’il a connaissance ou aurait dû avoir connaissance d’irrégularités commises dans la gestion de la société. Ce devoir de surveillance incombe à tous les membres du conseil d’administration, nonobstant le mode de répartition interne des tâches au sein du conseil d’administration (ATF 114 V 219 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.3 et les références).

Celui qui appartient au conseil d’administration d’une société et qui ne veille pas au versement des cotisations courantes et à l’acquittement des cotisations arriérées est réputé manquer à ses devoirs (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 96/03 du 30 novembre 2004 consid. 7.3.1, in SJ 2005 I 272 consid. 7.3.1). Commettent ainsi une négligence grave au sens de l’art. 52 LAVS les administrateurs d’une société qui se trouve dans une situation financière désastreuse, qui parent au plus pressé, en réglant les dettes les plus urgentes à l’exception des dettes de cotisations sociales, dont l’existence et l’importance leur sont connues, sans qu’ils ne puissent guère espérer, au regard de la gravité de la situation, que la société puisse s’acquitter des cotisations en souffrance dans un délai raisonnable (ATF 108 V 183 consid. 2 ; SVR 1996 AHV n° 98 p. 299 consid. 3).

La négligence grave est également donnée lorsque l’administrateur n’assume pas son mandat dans les faits. Ce faisant, il n’exerce pas la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, attribution incessible et inaliénable du conseil d’administration conformément à l’art. 716a CO. Une personne qui se déclare prête à assumer ou à conserver un mandat d’administrateur tout en sachant qu’elle ne pourra pas le remplir consciencieusement viole son obligation de diligence (ATF 122 III 195 consid. 3b). Sa négligence peut être qualifiée de grave sous l’angle de l’art. 52 LAVS (ATF 112 V 1 consid. 5b). Un administrateur, dont la situation est à cet égard proche de celle de l’homme de paille, ne peut s’exonérer de ses responsabilités légales en invoquant son rôle passif au sein de la société (arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 87/04 du 22 juin 2005 consid. 5.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 234/00 du 27 avril 2001 consid. 5d). Que l’administrateur n’ait pas été en mesure d’exercer ses fonctions parce que la société était dirigée de fait par le directeur ou qu’il ait accepté son mandat à titre fiduciaire dans le seul but de permettre au conseil d’administration de satisfaire aux exigences de l’art. 708
al. 1 CO n’est pas un motif de suppression ou d’atténuation de la faute commise (arrêt du Tribunal fédéral des assurances 9C_344/2011 du 3 février 2012 consid. 4.2). Au contraire, l’administrateur qui, de facto, est exclu de la gestion doit s’efforcer de manière d’autant plus durable d’avoir accès aux livres de compte (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2011 du 8 juillet 2011 consid. 4.2).

Commet également une faute grave l’organe qui verse des salaires pour lesquels les créances de cotisations qui en découlent de par la loi ne sont pas couvertes (SVR 1995 AHV n° 70 p. 214 consid. 5 ; voir également l’arrêt du Tribunal fédéral 9C_338/2007 du 21 avril 2008 consid. 3.1) ou celui qui ne démissionne pas de ses fonctions alors qu’il se trouvait, en raison de l’attitude du tiers, dans l’incapacité de prendre les mesures qui s’imposaient s’agissant du paiement des cotisations ou qui se trouvait dans l’incapacité d’exercer son devoir de surveillance (cf. par exemple : arrêt du Tribunal fédéral 9C_344/2011 du 3 février 2012 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_351/2008 consid. 5.2 ou encore arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 224/06 du 10 décembre 2007 consid. 6).

c. La responsabilité d’un administrateur dure en règle générale jusqu’au moment où il quitte effectivement le conseil d’administration et non pas jusqu’à la date où son nom est radié du registre du commerce. Cette règle vaut pour tous les cas où les démissionnaires n’exercent plus d’influence sur la marche des affaires et ne reçoivent plus de rémunération pour leur mandat d’administrateur (ATF 126 V 61 consid. 4a). En d’autres termes un administrateur ne peut être tenu pour responsable que du dommage résultant du non-paiement de cotisations qui sont venues à échéance et auraient dû être versées entre le jour de son entrée effective au conseil d’administration et celui où il a quitté effectivement ces fonctions, soit pendant
la durée où il a exercé une influence sur la marche des affaires. Demeurent réservés les cas où le dommage résulte d’actes qui ne déploient leurs effets qu’après
le départ du conseil d’administration (arrêt du Tribunal fédéral des assurances
H 263/02 du 6 février 2003 consid. 3.2).

d. Dans certaines circonstances, un employeur peut causer intentionnellement un préjudice sans être dans l’obligation de le réparer, lorsqu’il retarde le paiement des cotisations pour maintenir son entreprise en vie, lors d’une passe de trésorerie difficile. Mais il faut alors, pour qu’un tel comportement ne tombe pas ultérieurement sous le coup de l’art. 52 LAVS, que l’on puisse admettre que l’employeur avait, au moment où il a pris sa décision, des raisons sérieuses et objectives de penser qu’il pourrait s’acquitter des cotisations dues dans un délai raisonnable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_338/2007 du 21 avril 2008 consid. 3.1). À cet égard, la seule expectative que la société retrouve un équilibre financier ne suffit pas ; il faut des éléments concrets et objectifs selon lesquels on peut admettre que la situation économique de la société se stabilisera dans un laps de temps déterminé et que celle-ci recouvrera sa capacité financière (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 163/06 du 11 juin 2007 consid. 4.4). Ce qui est déterminant, ce n’est pas de savoir si l’employeur croyait réellement que l’entreprise pouvait être sauvée et que les cotisations seraient payées dans un proche avenir ; il s’agit bien plutôt d’examiner si une telle attitude était alors défendable, objectivement, aux yeux d’un tiers responsable (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 19/07 du 10 décembre 2007 consid. 4.1).

Le fait de s’alarmer de la situation, de négocier avec les créanciers ou encore de tabler sur la promesse d’un actionnaire majoritaire ne sont pas des circonstances qui feraient apparaître comme légitime ou non fautive l’inobservation par un administrateur des prescriptions en matière d’AVS (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 163/00 du 19 octobre 2000 consid. 3b).

10.    a. La responsabilité de l’employeur au sens de l’art. 52 LAVS suppose enfin un rapport de causalité naturelle et adéquate entre la violation intentionnelle ou par négligence grave des prescriptions et la survenance du dommage. La causalité est adéquate si, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s’est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2).

Selon la jurisprudence, celui qui entre dans le conseil d’administration d’une société a le devoir de veiller tant au versement des cotisations courantes qu’à l’acquittement des cotisations arriérées, pour une période pendant laquelle il n’était pas encore administrateur. En règle générale, il y a dans les deux cas un lien de causalité entre l’inaction de l’organe et le non-paiement des cotisations, de sorte que l’administrateur répond solidairement de tout le dommage subi par la caisse de compensation en cas de faillite de la société (RCC 1992 p. 262, 268 ss consid. 7b).

Le lien de causalité adéquate entre le comportement fautif – soit la rétention des cotisations alors même que les salaires sont versés – et le dommage survenu ne peut pas être contesté avec succès lorsque les salaires versés sont tels que les créances de cotisations qui en découlent directement ex lege ne sont plus couvertes (SVR 1995 AHV n° 70 p. 214 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 167/05 du 21 juin 2006 consid. 8 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 74/05 du 8 novembre 2005 consid. 4).

b. La causalité adéquate peut être exclue, c’est-à-dire interrompue, l’enchaînement des faits perdant alors sa portée juridique, lorsqu’une autre cause concomitante – la force majeure, la faute ou le fait d’un tiers, la faute ou le fait de la victime – constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l’on ne pouvait pas s’y attendre. L’imprévisibilité de l’acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate; il faut encore que cet acte ait une importance telle qu’il s’impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l’événement considéré, reléguant à l’arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l’amener, en particulier le comportement de l’auteur (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 95/05 du 10 janvier 2007 consid. 4).

11.    a. En l’espèce, le recourant fait valoir en premier lieu que la structure organisationnelle de la société limitait grandement ses possibilités de faire entendre sa voix sur le plan interne à la société, celle-ci étant dirigée de fait par la famille E______ et M. M______, personnes qui auraient dissimulé de manière astucieuse la situation financière réelle de la société, de sorte qu’il n’avait pas à douter, avant 2012, de la bonne gestion de cette dernière, d’autant que le rapport du 25 mai 2011 de l’organe de révision pour l’année 2010 ne contenait aucun élément qui aurait pu justifier une quelconque méfiance de sa part.

En argumentant de la sorte, le recourant oublie qu’en endossant la charge d’administrateur du 5 octobre 2010 au 19 août 2013, il lui incombait, indépendamment de son rôle effectif, d’exercer les attributions intransmissibles et inaliénables rattachées à sa fonction de par la loi, en particulier la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, ce qui était incompatible avec le fait d’avoir simplement « confiance en M. H______» et de « laisser faire les choses » sans ne rien savoir à ce sujet, soit « à mon total insu » (cf. courrier du
14 février 2017 du recourant à l’intimée). En effet, d’un point de vue formel, le recourant était administrateur unique de la société avec un droit de signature individuelle. Aussi aurait-il pu aisément se renseigner périodiquement sur la marche des affaires – ce qui incluait notamment la surveillance du paiement des cotisations sociales paritaires (arrêt du Tribunal fédéral 9C_657/2015 du 19 janvier 2016 consid. 5.3 et les références) – et prendre les mesures appropriées pour effectuer les paiements des cotisations sociales en souffrance (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_80/2017 du 31 mai 2017 consid. 5.2). On rappellera à cet égard qu’est précisément constitutive d’une négligence grave la passivité d’un administrateur ; s’il se trouve tenu à l’écart, dans les faits, de la gestion opérationnelle, il doit s’efforcer d’autant plus durablement d’avoir accès aux livres de compte (cf. arrêt 9C_289/2011 précité, consid. 4.2). Or si comme le recourant le prétend, il n’avait pas de raison de se méfier des agissements des dirigeants de la société avant 2012, c’est là un indice supplémentaire montrant que sa surveillance du paiement des cotisations paritaires était déjà très lâche – voire inexistante – en 2010 et 2011 ; sans quoi, la sommation de l’intimée du 4 août 2011 (cf. pce 9, p. 5 intimée), portant sur des arriérés de cotisation à hauteur de CHF 11'762.- pour l’année 2010, aurait déjà dû éveiller sa méfiance – au plus tard à réception de cet envoi par la société – et l’inciter à procéder à une surveillance et des vérifications plus étroites des manquements de la société en matière de prélèvement et/ou règlement des cotisations paritaires. Dans ce contexte, le recourant saurait d’autant moins tirer argument du rapport du 25 mai 2011 de l’organe de révision (relatif à l’exercice 2010) que cet organe y rappelle que la responsabilité de l’établissement des comptes annuels incombe au conseil d’administration et que dans le cas particulier, l’organe de révision contrôlait les comptes annuels uniquement selon les critères de la Norme suisse sur le contrôle restreint, ce qui n’incluait ni les vérifications des flux d’exploitation, ni les auditions ou autres opérations de contrôle destinées à détecter des fraudes (cf. pce 7 recourant).

b. Le recourant invoque ensuite avoir pris une série de mesures après avoir commencé à nourrir de sérieux doutes, en 2012, au sujet des propos rassurants de MM. H______ et F______, lesquels contrastaient avec les commandements de payer que recevait la société. Il en veut notamment pour preuve son courriel du
30 mars 2012 à M. K______ et son courriel du 5 avril 2012 à MM. F______ et G______. Force est cependant de constater que dans le premier courriel, le recourant interpellait avant tout M. K______ au sujet de la gestion des débiteurs de la société et que « sur un autre plan concernant la gestion des employés », il était question de la LPP mais non des cotisations sociales dues à l’intimée (pce 8 recourant). Quant au courriel du 5 avril 2012, il soulevait à nouveau la question du recouvrement des créances de la société envers ses clients et pointait l’incurie
de MM. F______ et G______ en la matière. Pour le reste, il était effectivement question des dettes de la société (TVA impayée, salaires versés aux employés « par tranches ») mais non des dettes de cotisations sociales de la société envers l’intimée (pce 9 recourant). On ajoutera que ces remarques valent également pour le procès-verbal de l’assemblée générale extraordinaire du 12 novembre 2012.

Le recourant tente encore de tirer argument du courrier que la société lui a adressé le 29 mai 2012, auquel étaient annexés « les justificatifs de paiement destinés à l’OCAS ». Compte tenu d’une gestion que le recourant qualifiait lui-même de « catastrophique » à partir de 2012 (cf. recours, p. 5 § 1), ce courrier très sommaire de la société – qui équivalait en définitive à une simple assurance selon laquelle les charges sociales étaient payées – revenait, comme en 2010 et 2011, à partir du principe qu’il était possible de se fier à une bonne gestion alors que le contraire était déjà manifeste à partir de 2012, de l’avis même du recourant. Cela aurait dû l’amener à mettre en place un contrôle plus strict comportant au minimum un examen minutieux des documents commerciaux et, si nécessaire, l’obtention de renseignements complémentaires, voire l’appel aux services d’un expert-comptable (cf. ATF 114 V 219 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2011 du 8 juillet 2011 consid. 5.1). Le recourant s’est toutefois abstenu de telles mesures, à tout le moins en matière de cotisations d’assurances sociales, domaine dans lequel les directives et les ordres de paiement qu’il prétend avoir mis en place étaient clairement insuffisants à eux seuls. Et cette omission de mettre en place un contrôle plus strict s’explique d’autant moins que le recourant a ouvertement fait part de ses « doutes quant à l’exactitude des chiffres […] et des comptes présentés » lors de l’assemblée générale du 12 novembre 2012 (cf. pce 12, p. 2 recourant).

c. Le recourant indique enfin avoir rendu attentif son successeur, M. B______, le 30 août 2013, que les charges sociales n’étaient pas payées et qu’il fallait mettre à profit une rentrée financière de CHF 60'000.- pour s’en acquitter. Ce faisant, le recourant ne fait que confirmer que la société a versé des salaires sur lesquels des ressources financières étaient encore attendues, faisant ainsi supporter le risque inhérent au financement d’une entreprise par l’assurance sociale, ce qui est constitutif d’une négligence grave au sens de l’art. 52 al. 1 LAVS (cf. ATF 108 V 189 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_701/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6.2).

d. Dans la mesure où les observations que M. B______ a faites le 20 mars 2019 en qualité d’appelé en cause, concernent exclusivement les difficultés qu’il a personnellement rencontrées en tant qu’administrateur à partir du 30 août 2013, date de son entrée en fonction, elles ne sont pas de nature à modifier l’appréciation portée par la chambre de céans sur l’inobservation des prescriptions en matière d’AVS par le recourant.

12.    Les manquements du recourant relatifs au défaut de paiement des cotisations paritaires sont sans aucun doute en rapport de causalité naturelle et adéquate avec le dommage subi par l’intimée. En effet, s’il avait correctement exécuté son mandat, le recourant aurait veillé au paiement desdites cotisations ou pris les mesures qui s’imposaient. Et si l’attitude de MM. H______ et F______ et de M. G______ l’empêchait d’exercer son devoir de surveillance, il lui appartenait de démissionner sans délai de ses fonctions. Dès lors qu’il a néanmoins décidé de revêtir les habits d’administrateur sans en assumer la plénitude des devoirs, y compris à partir de 2012 (cf. ci-dessus : consid. 11b et c), il doit répondre des conséquences du défaut de paiement par la société des cotisations paritaires auquel sa passivité a contribué.

13.    Au vu de ce qui précède, le recourant doit être tenu pour responsable du dommage subi par l’intimée en raison du non-paiement des cotisations dues et exigibles à son entrée en fonction le 5 octobre 2010 et échues jusqu’au 19 août 2013, terme de son mandat. En l’espèce, le recourant ne remet pas en cause la somme réclamée à ce titre, qui s’élève à CHF 167'652.70. La chambre de céans relèvera à toutes fins utiles que le dommage annoncé comprend les cotisations relatives à la période précitée ainsi que les frais administratifs, de sommation, de poursuite et les intérêts moratoires, ce qui est conforme aux prescriptions en vigueur (cf. Directives sur la perception des cotisations – DP n° 8016 et 8017).

14.    Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté.

Le recourant, qui succombe, n’a pas droit à des dépens (art. 61 let. g LPGA a contrario).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 

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PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Julia BARRY

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le