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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2173/2019

ATAS/178/2020 du 04.03.2020 ( LAA ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2173/2019 ATAS/178/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 4 mars 2020

4ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à WATERLOO, Canada, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Eric MAUGUE

 

 

recourant

 

contre

HDI GLOBAL SE, sis Avenue d'Ouchy 14, LAUSANNE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Didier ELSIG

 

 

intimée

 

 

EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après l'assuré ou le recourant) a été engagé en qualité d'hockeyeur professionnel par le B______ Club SA (l'employeur) pour deux saisons successives, la dernière débutant le 10 août 2017 et se terminant le 31 mai 2018. À ce titre, il était assuré auprès de HDI Global SE (ci-après l'assurance ou l'intimée) pour l'assurance-accidents obligatoire et complémentaire.

2.        L'employeur a adressé à l'assurance, le 12 février 2018, une déclaration d'accident LAA annonçant que l'assuré s'était blessé le 1er février 2018. Il avait subi une torsion du poignet droit et une entorse du même poignet en chutant lors d'un match de hockey.

3.        Le 21 mars 2018, l'assuré a été opéré à la clinique de la Colline par le docteur C______, spécialiste en chirurgie de la main.

4.        Le 5 juin 2018, l'assurance a informé l'assuré que pour déterminer la suite de son intervention, elle le priait de bien vouloir se soumettre à une expertise médicale, qui avait été confiée au docteur D______, spécialiste en chirurgie orthopédique de la main FMH, à Lausanne, le 14 septembre 2018.

5.        Le 5 juin 2018, l'assurance a transmis au Dr D______ la mission d'expertise et le dossier médical de l'assuré.

6.        Par décision du 5 juin 2018, l'assurance a informé l'assuré qu'elle lui versait l'indemnité journalière à 100% du 1er mai 2018 jusqu'au 31 mai 2018.

7.        Le 22 juin 2018, l'assuré a contesté le choix du Dr D______, car celui-ci n'avait pas été désigné par l'assurance de façon consensuelle, conformément aux exigences fixées par le Tribunal fédéral. Pour des motifs pratiques, il était indiqué de désigner un expert au Canada, où il était retourné.

8.        Le 5 juillet 2018, le Dr C______ a évalué l'évolution de la capacité de travail de l'assuré du 22 mars au 13 juin 2018.

9.        Le 31 juillet 2018, l'assurance a prié l'assuré de se rendre à la consultation d'expertise fixée, dès lors que celui-ci n'avait pas de nouvel emploi, précisant que ses frais de voyage seraient indemnisés. Il devait se soumettre à des examens médicaux ou techniques si ceux-ci étaient nécessaires à l'appréciation du cas et s'ils pouvaient être raisonnablement exigés, selon l'art. 43 al. 2 LPGA, faute de quoi l'assureur pourrait se prononcer en l'état du dossier ou clore l'instruction et décider de ne pas entrer en matière.

10.    Le 31 juillet 2018, l'assurance a informé l'assuré que, sur la base des renseignements médicaux en sa possession, elle réglait l'indemnité journalière à 100% le 1er mai 2018, à 75% du 2 au 15 mai 2018, à 50% du 16 mai au 12 juin 2018 et à 25% du 13 juin au 31 juillet 2018. Elle déduisait les indemnités journalières versées à 100% du 1er au 31 mai 2018.

11.    Le 8 août 2018, l'assuré a contesté le calcul des indemnités journalières de l'assurance. Son contrat de travail prévoyait le versement d'une rémunération dans la mesure où il était apte à jouer des matchs. La validité de son contrat était d'ailleurs subordonnée à un examen médical attestant de sa pleine capacité pour exercer une telle activité. Ce contrat de travail ne disposait pas qu'il serait rémunéré à raison de 25% pour signer des autographes, respectivement 50%, voire 75%, pour réaliser des entraînements. Cette prétendue capacité résiduelle de travail ne lui permettait pas de générer des revenus dans son activité habituelle. Compte tenu des éléments médicaux concordants figurant au dossier, selon lesquels il ne pourrait pas jouer de match jusqu'au mois de septembre suivant, il appartenait à l'assurance de lui verser, jusqu'à cette date, 100% des indemnités journalières. L'assurance n'était en outre pas fondée à mettre en oeuvre unilatéralement un expert sans tenter au préalable de parvenir à une désignation consensuelle. En l'espèce, l'assuré avait suggéré que l'expertise soit confiée à un médecin au Canada, dès lors qu'il résidait désormais dans cet État où se trouvaient de nombreux spécialistes en médecine du sport aptes à apprécier les capacités professionnelles de joueurs de hockey professionnels. L'assurance avait décidé de recourir au Dr D______, sans motiver sa décision ni lui permettre de formuler des contre-propositions. Un tel procédé n'était pas compatible avec la jurisprudence. Si l'assurance persistait à ne pas accéder à sa demande raisonnable de désigner un expert au Canada, l'assuré souhaitait que l'expertise soit, en tout état de cause, confiée à des spécialistes en médecine du sport. Dès lors qu'il s'agissait d'apprécier sa capacité à reprendre son activité habituelle d'hockeyeur professionnel, il convenait de s'adresser à des spécialistes à même d'apprécier correctement la situation. L'hôpital de la Tour disposait d'un centre dédié à la médecine du sport.

12.    Le 31 août 2018, l'assurance a informé l'assuré qu'en ce qui concernait l'indemnisation de la perte de gain, elle avait versé les montants reconnus jusqu'au 31 juillet 2018. Pour ce qui était de l'expertise médicale, à moins que le médecin traitant de l'assuré puisse lui certifier que l'évolution médicale actuelle permettait la reprise totale des activités dès le 21 septembre 2018, elle maintenait l'expertise. Aucun élément objectif ne permettait de retenir une prévention de l'expert. Elle ne s'opposait pas à l'avance de frais de voyage et de séjour et réservait un montant de CHF 2'000.- à faire valoir sur les justificatifs qui devraient lui être soumis. À la suite du rapport d'expertise, elle confirmerait sa prise de position définitive sous forme d'une décision.

13.    Le 3 septembre 2018, l'assuré a demandé à l'assurance de lui notifier une décision sujette à opposition. L'assurance maintenait la désignation du Dr D______ sans faire valoir d'éléments objectifs pour ne pas entrer en matière sur la proposition que l'assuré avait formulée.

14.    Le 11 octobre 2018, l'assurance a pris acte du refus de collaborer de l'assuré, qui ne s'était pas présenté, sans s'être excusé, au rendez-vous fixé le 14 septembre 2018 par le Dr D______. Elle devait instruire les cas. L'absence de recherche de concertation ou de consensus dans le processus de désignation de l'expert n'était pas un droit justiciable en soi et seules des raisons pertinentes et non de vagues sous-entendus permettaient de récuser un expert. Avant de se prononcer par décision, elle demandait à l'assuré de lui préciser, d'ici au 20 octobre 2018, en quoi consistait actuellement son emploi du temps depuis le 1er septembre 2018 (description de ses journées-type et évolution de la situation actuelle).

15.    Le 26 novembre 2018, l'assuré a formé un recours pour déni de justice auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice.

16.    Par décision du 13 février 2019, l'assurance a informé l'assuré qu'elle entendait s'en tenir aux taux et durée d'incapacité de travail retenus par le Dr C______.

17.    Par arrêt du 25 février 2019 (ATAS/147/2019), la chambre des assurances sociales a dit que le recours pour déni de justice était devenu sans objet, l'assurance ayant rendu une décision dans l'intervalle.

18.    Le 4 mars 2019, l'assurance a informé l'assuré qu'elle allait procéder à une expertise médicale afin d'examiner l'obligation de sa prise en charge du cas. Il lui proposait deux nouveaux noms d'experts, soit le docteur E______ ou le docteur F______, tous deux experts SIM certifiés et spécialistes en chirurgie orthopédique et traumatologie.

19.    Le 19 mars 2019, l'assuré a estimé que l'assurance ignorait délibérément, une fois encore, la jurisprudence qui lui imposait de tenter de parvenir à une désignation consensuelle de l'expert. Il s'agissait de mettre en oeuvre une expertise qui portait sur l'incapacité de travail d'un joueur de hockey professionnel. Une spécialisation en médecine du sport paraissait un prérequis incontournable pour mener à bien une telle mission. Suite à un entretien téléphonique avec son ancien conseil, Maître Didier ELSIG, quatre noms d'experts avaient été proposés, à savoir le docteur G______, spécialiste en médecine physique et réadaptation et spécialiste en médecine du sport, de l'hôpital de la Tour, le docteur H______, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil moteur, de l'hôpital de la Tour, le professeur I______, spécialiste en chirurgie orthopédique et médecine du sport, de la clinique de la Colline, et le docteur J______, spécialiste en médecine physique et réadaptation et médecine du sport, de la clinique de la Colline. Sans même discuter ces suggestions, l'assurance proposait à nouveau unilatéralement des médecins, qui ne présentaient aucune compétence particulière en matière de médecine du sport. De plus, à l'instar du Dr D______, ces derniers étaient très régulièrement mandatés par les assurances et entretenaient des rapports étroits avec celles-ci. Le Dr E______ était ainsi membre du cercle des prestataires médicaux de « Allianz Wordwide Care » et médecin-conseil d'Axa Assurances. Quant au Dr F______, il fonctionnait en qualité de médecin-conseil du groupe Mutuel et de la SUVA. De tels profils conduisaient à émettre de sérieuses réserves quant à leur impartialité. L'assuré demandait donc à l'assurance de prendre en considération ses suggestions.

20.    Le 21 mars 2019, l'assurance a rappelé qu'elle avait renoncé au premier expert proposé, quand bien même l'assuré n'avait avancé aucun motif objectif de récusation. Ce dernier refusait les deux nouveaux experts proposés, qui étaient pourtant également au bénéfice d'une formation d'expert SIM. Une telle obstruction était incompréhensible. Le choix de l'expert ainsi que la mise en oeuvre d'une expertise étaient du ressort et de la compétence de l'assureur-accidents LAA. Les juges cantonaux genevois n'avaient pas dit autre chose dans leur récente décision incidente du 25 février 2019, indiquant au passage qu'aucun élément objectif ne permettait de retenir la prévention de l'expert D______. Le fait que les experts proposés étaient des spécialistes, non seulement en orthopédie, mais également en expertises médicales, ne pouvait faire obstacle à leur fonctionnement comme experts, ce d'autant plus s'ils fonctionnaient également comme médecin-conseil de l'un ou l'autre assureur concurrent. Cela ne constituait pas un motif de récusation. Les experts proposés par l'assuré ne disposaient pas de formation SIM en expertise, raison pour laquelle il n'y avait aucune raison de s'écarter des experts proposés par l'assurance. Celle-ci allait donc arrêter son choix sur le Dr F______. En cas de refus de l'assuré de se soumettre à l'expertise, les frais seraient mis à sa charge et il reviendrait à la chambre des assurances sociales de se pencher sur son obstruction systématique.

21.    Le 22 mars 2019, l'assuré a invité l'assurance à lui notifier sans délai une décision incidente sujette à recours.

22.    Le 7 mai 2019, l'assuré a adressé un rappel à l'assurance.

23.    Par décision du 17 mai 2019, l'assurance a désigné le Dr F______ pour procéder à l'expertise de l'assuré, précisant que celui-ci pouvait former opposition à cette décision dans le délai de trente jours et que l'effet suspensif d'une éventuelle opposition était retiré.

Le 6 juin 2019, l'assuré a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, faisant valoir que le recours était dirigé contre une décision incidente rendue par l'assurance. Il s'agissait là d'une décision d'ordonnancement de la procédure, qui était directement susceptible de recours devant le tribunal cantonal des assurances. Il demandait au préalable la récusation des juges de la 10èmechambre, qui avaient rendu l'arrêt du 25 février 2019, dans lequel ils avaient porté des appréciations sur la manière dont l'assurance avait conduit la procédure qui dénotaient un parti pris injustifié. L'assuré demandait la restitution de l'effet suspensif. L'assurance ne pouvait objecter un devoir de célérité dans le traitement du dossier alors même qu'elle avait traîné de manière parfaitement injustifiée depuis le 6 juin 2018 pour mettre en oeuvre l'expertise. Si elle s'estimait fondée à désigner unilatéralement le Dr D______, ce qu'elle soutenait encore aujourd'hui, il lui aurait appartenu de rendre immédiatement une décision sujette à recours, ce qu'elle n'avait délibérément pas fait pendant près d'une année. Elle aurait également pu proposer, durant l'été 2018, les deux autres experts qu'elle entendait aujourd'hui mettre en oeuvre. L'assurance ne pouvait faire valoir aucun intérêt objectif au retrait de l'effet suspensif, si ce n'était de préserver sa volonté de passer en force dans la désignation de l'expert qu'elle entendait mettre en oeuvre en s'affranchissant des exigences posées par la jurisprudence en matière de tentative de désignation consensuelle de l'expert. Pour ces motifs, il importait de restituer l'effet suspensif au recours.

Au fond, l'assurance s'affranchissait des exigences jurisprudentielles en matière de choix d'expert. À cela s'ajoutait que pendant près d'une année, elle avait refusé de rendre une décision sur la désignation de l'expert pour priver l'assuré de tout moyen de faire valoir ses droits. À aucun moment, l'assurance n'avait démontré la moindre disposition à discuter de la désignation de l'expert. Quant à sa proposition de deux autres experts, le procédé demeurait identique. L'assurance ne laissait aucune latitude pour une tentative de désignation consensuelle. Elle choisissait unilatéralement des experts notoirement et régulièrement mandatés par des assurances en ne procédant même pas à l'amorce d'une discussion sur les propositions du recourant. C'était d'autant plus choquant que celui-ci avait fait valoir un motif objectif pour mandater un expert spécialiste de la médecine du sport, dans la mesure où il était joueur de hockey professionnel, et qu'il avait fait cinq propositions dans ce contexte. En conséquence, la décision entreprise devait être annulée et la chambre des assurances sociales devait désigner un expert ou renvoyer la cause à l'assureur pour reprise de la procédure de désignation d'un expert, avec suite de dépens.

24.    Le 11 juin 2019, la chambre des assurances sociales a octroyé un délai à l'assurance au 25 juin pour sa détermination sur la demande de restitution de l'effet suspensif et au 9 juillet 2019 pour sa réponse au fond.

25.    Par arrêt incident du 4 juillet 2019, la chambre de céans a restitué l'effet suspensif au recours interjeté contre la décision rendue par l'intimée le 17 mai 2019 (ATAS/637/2019).

26.    Le 29 juillet 2019, la chambre de céans a adressé un rappel à l'assurance qui n'avait pas répondu au recours dans le délai imparti.

27.    Le 14 août 2019, le conseil du recourant a transmis à la chambre de céans un courrier adressé directement à lui par l'assurance le 11 juillet 2019, lui proposant deux nouveaux experts. Passé le délai dans lequel l'assurance avait été appelée à se déterminer pour la dernière fois, la décision de reconsidération avait valeur de proposition au juge. Il en résultait que le courrier du 11 juillet 2019 ne pouvait être considéré que comme une proposition qu'il appartenait à la chambre des assurances sociales d'apprécier. De manière générale et compte tenu des manoeuvres dilatoires auxquelles s'était livrée l'intimée depuis près d'une année pour échapper au cadre légal qui lui était imposé en matière de désignation consensuelle des experts, le recourant sollicitait une comparution personnelle des mandataires pour trouver une issue rapide à ce litige.

Selon le courrier du 11 juillet 2019 transmis par le recourant à la chambre de céans, l'intimée proposait deux nouveaux noms d'experts médicaux qui étaient spécialisés en médecine du sport, soit le docteur K______, ancien chef de clinique à Nyon, orthopédiste, spécialisée en sports d'équipe, proposé sur la « List of Medical Service Providers » de l'US Embassy for Switzerland, et le docteur L______, orthopédiste, expert SIM, spécialisé en médecine du sport, de la Clinique de Genolier. L'intimée précisait n'avoir aucun lien avec ces deux experts, qu'elle n'avait jamais mandatés.

28.    Le 11 septembre 2019, le nouveau conseil récemment mandaté par l'intimée a requis une prolongation pour faire des observations.

29.    Par réponse du 2 octobre 2019, l'intimée a relevé que le recourant ne s'était toujours pas déterminé à ce jour sur les deux noms proposés le 11 juillet 2019. Le recourant, par voie de son avocat, souhaitait non seulement choisir le nom des experts médicaux, mais également celui des juges, ce qui était inadmissible. Cela dénotait qu'il était à mille lieues du consensus dont il se prévalait. Le fait que le recourant ne se soit pas encore déterminé sur les deux derniers noms proposés le 11 juillet 2019 était symptomatique et démontrait son absence de volonté réelle de trouver le consensus, dont il feignait de se prévaloir. Les tentatives passées, et même actuelles, de l'intimée démontraient sa volonté de proposer des experts qualifiés. C'était bien l'assurance qui était chargée, en vertu de la maxime d'office, d'instruire la cause administrative et de désigner les experts, et non l'assuré. Si un consensus ne pouvait être atteint, il revenait alors à l'assureur de désigner un expert, et non à l'assuré. S'il était compréhensible que la désignation d'un expert par l'assureur soit annulée et que la cause soit renvoyée lorsque celui-ci n'avait pas essayé de parvenir à un accord avec l'assuré sur le choix de l'expert, tel n'était manifestement pas le cas en l'espèce, puisque l'assurance avait essayé de parvenir à un accord avec l'assuré sur le choix de l'expert en lui proposant cinq experts au total. Si l'on ne devait retenir dans chaque cas que des noms d'experts proposés par un assuré, cela reviendrait à octroyer à celui-ci le droit de désigner les experts dans chaque procédure, ce qui était contraire au système légal actuel en Suisse et au devoir d'instruction et de prise en charge des honoraires de l'expert par l'assureur LAA. L'intimée concluait au rejet du recours et à la confirmation de sa décision du 17 mai 2019.

30.    Le 23 octobre 2019, le recourant a observé que la chambre avait fixé le 11 juin 2019 à l'intimée un premier délai au 9 juillet 2019 pour s'exprimer sur le fond du recours. Celle-ci n'avait pas jugé utile de faire usage de cette faculté, mais avait adressé directement à son conseil, le 11 juillet 2019, un courrier lui proposant deux nouveaux noms d'experts. Le 12 août 2019, soit un mois plus tard, l'intimée avait sollicité un délai au 12 septembre 2019 pour s'exprimer sur le fond, qui lui avait été accordé. Le 11 septembre 2019, le conseil de cette assurance avait sollicité un nouveau délai au 2 octobre 2019 au motif qu'il devait encore s'entretenir avec sa mandante, délai qui lui avait été à nouveau accordé. L'intimée recourait ainsi systématiquement à des procédés dilatoires pour tarder à statuer en relation avec les contestations formulées par l'assuré. Il en était ainsi tant en matière de désignation d'experts qu'en relation avec le litige qui opposait les parties en matière d'indemnités journalières. De tels procédés étaient contraires aux exigences de diligence et de célérité, auxquelles étaient soumis les assureurs sociaux et plus généralement au respect du cadre légal dans lequel ceux-ci étaient appelés à oeuvrer. Contrairement à ce que prétendait l'intimée, le recourant n'avait pas systématiquement récusé les experts médicaux. Il demandait à ce que l'assurance respecte les exigences jurisprudentielles en matière de tentative de désignation consensuelle de ceux-ci. Dans le cas présent, l'intimée avait désigné unilatéralement le Dr D______ le 5 juin 2018, en ne laissant aucune marge à l'assuré pour formuler des contre-propositions ou des motifs de récusation. Lorsque l'assuré avait fait valoir ses droits et suggéré d'autres experts, l'intimée l'avait immédiatement menacé de statuer en l'état pour défaut de collaboration.

Par la suite et alors même que l'assuré avait réclamé à réitérées reprises une décision incidente sujette à recours, l'assurance était demeurée inactive pendant près de 10 mois. Une telle attitude était contraire au principe de célérité dans le traitement des dossiers dont elle avait la charge et constituait une forme de déni de justice. Par la suite, s'agissant des nouveaux experts proposés dans le cadre de la procédure, l'attitude de l'assurance démontrait qu'elle n'était toujours pas disposée à tenter une désignation consensuelle, mais qu'elle demeurait « arc-boutée » sur les noms de quelques experts acquis à sa cause dont elle disposait sur une liste fermée. En tout état de cause, force était de constater que l'assurance avait reconsidéré sa décision en entendant désormais confier l'expertise aux Drs K______ ou L______. Il s'agissait là de propositions formulées au juge. La cause étant désormais du ressort de la chambre de céans, par la volonté de l'intimée qui avait reconsidéré sa décision après qu'un délai pour se prononcer au fond lui avait été accordé, il lui appartenait de statuer et de désigner l'expert.

Le recourant concluait principalement à l'admission du recours et à ce que la chambre des assurances sociales désigne un expert avec pour mission d'apprécier l'état de santé du recourant et sa capacité de travail en qualité d'hockeyeur professionnel, avec suite de dépens.

31.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

4.        Le litige porte sur la désignation d'un expert dans le cadre du litige opposant le recourant à l'intimée.

5.        Selon l'art. 53 al 3 LPGA, jusqu'à l'envoi de son préavis à l'autorité de recours, l'assureur peut reconsidérer une décision ou une décision sur opposition contre laquelle un recours a été formé.

L'assureur social est tenu de notifier sa décision de reconsidération, qui doit remplacer la décision contestée par voie de recours, sans délai aux parties et d'en donner connaissance à l'autorité de recours (art. 58 al. 2 PA, applicable par renvoi de l'art. 55 al. 1 LPGA). L'autorité de recours doit continuer à traiter le recours dans la mesure où la nouvelle décision de l'assureur social ne l'a pas rendu sans objet (cf. art. 58 al. 3 PA; Commentaire romand de la loi sur la partie générale des assurances sociales éd. par Anne-Sylvie DUPONT / Margit MOSER-SZELESS, 2018, n. 105 et 106 ad art. 53).

En l'occurrence, l'intimée a proposé deux nouveaux experts au recourant avant de transmettre sa réponse au recours, sans toutefois rendre de décision formelle en ce sens. Son courrier doit ainsi être considéré comme une proposition, qui ne lie pas le juge.

6.        Selon l'art. 44 LPGA, si l'assureur doit recourir aux services d'un expert indépendant pour élucider les faits, il donne connaissance du nom de celui-ci aux parties. Celles-ci peuvent récuser l'expert pour des raisons pertinentes et présenter des contre-propositions.

Lorsqu'il y a désaccord quant à l'expertise telle qu'envisagée par l'assureur, celui-ci doit rendre une décision incidente au sens de l'art. 5 al. 2 PA. Il s'agit d'une décision d'ordonnancement de la procédure contre laquelle la voie de l'opposition n'est pas ouverte (art. 52 al. 1 LPGA; cf. arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 29/03 du 25 novembre 2004) et qui est directement susceptible de recours devant le tribunal cantonal des assurances (cf. art. 56 al. 1 LPGA).

Selon le Tribunal fédéral, l'assuré peut faire valoir contre une décision incidente d'expertise médicale non seulement des motifs formels de récusation contre les experts, mais également des motifs matériels, tels que par exemple le grief que l'expertise constituerait une « second opinion » superflue, contre la forme ou l'étendue de l'expertise, par exemple le choix des disciplines médicales dans une expertise pluridisciplinaire, ou contre l'expert désigné, en ce qui concerne notamment sa compétence professionnelle (ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.7 p. 257; 138 V 271 consid. 1.1 p. 274 s.). Le Tribunal fédéral a également considéré qu'il convient d'accorder une importance plus grande que cela a été le cas jusqu'ici, à la mise en oeuvre consensuelle d'une expertise et que l'assureur doit rendre une décision incidente susceptible de recours lorsqu'elle est en désaccord avec le requérant ou ses proches sur le choix de l'expert. Il est de la responsabilité tant de l'assureur social que de l'assuré de parer aux alourdissements de la procédure qui peuvent être évités. Il faut également garder à l'esprit qu'une expertise qui repose sur un accord mutuel donne des résultats plus concluants et mieux acceptés par l'assuré (ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.6 p. 256).

S'agissant plus particulièrement de la mise en oeuvre d'une expertise consensuelle, le Tribunal fédéral a précisé, dans un arrêt subséquent, qu'il est dans l'intérêt des parties d'éviter une prolongation de la procédure en s'efforçant de parvenir à un consensus sur l'expertise, après que des objections matérielles ou formelles ont été soulevées par l'assuré. Ce n'est que si le consensus ne peut être atteint que l'assureur pourra ordonner une expertise, en rendant une décision qui pourra être attaquée par l'assuré (ATF 138 V 271 consid. 1.1).

La recherche d'un consensus est nécessaire lorsque l'assuré fait valoir des objections « admissibles » de nature formelle, en rapport avec le cas concret, ou matérielle, en rapport avec la spécialité médicale (arrêt du Tribunal fédéral 9C_560/2013 du 6 septembre 2013 consid. 2.3 et les références).

Enfin, la chambre de céans a jugé qu'indépendamment des griefs invoqués par l'assuré à l'encontre de l'expert, la désignation de l'expert par l'assureur devait être annulée et la cause lui être renvoyée, lorsqu'il n'avait pas essayé de parvenir à un accord avec l'assuré sur le choix de l'expert, en violation des droits de participation de l'assuré dans la procédure de désignation de celui-ci. Elle a précisé à cet égard que ce n'est pas uniquement en présence de justes motifs de récusation à l'encontre de l'expert que l'assuré pouvait émettre des contre-propositions (ATAS/226/2013 du 28 février 2013 consid. 5 et ATAS/263/2013 du 13 mars 2013 consid. 6). Il n'en demeure pas moins qu'une partie ne pouvait s'opposer à la désignation d'un expert sans donner des motifs valables, tels que des doutes sur son indépendance ou sa compétence. En effet, si tel était le cas, cela reviendrait à lui accorder un droit de veto sur le choix d'un expert (ATAS/1029/2017 du 16 novembre 2017 consid. 6).

7.        En l'espèce, le recourant a refusé la désignation des Drs D______, puis F______, au motif, notamment, que ceux-ci n'étaient pas spécialisés en médecine du sport. Cette exigence paraît justifiée dans le cas d'espèce, qui concerne un hockeyeur professionnel. Au cours de la procédure de recours, l'intimée a proposé deux autres experts par courrier adressé directement au conseil du recourant, précisant qu'il s'agissait de deux spécialistes en médecine du sport, qu'elle n'avait jamais mandatés. L'intimée a ainsi tenté de trouver un accord avec le recourant. Vu l'absence de critiques formulées par le recourant contre les derniers experts proposés, la chambre de céans retiendra qu'un consensus est intervenu entre les parties et, conformément à la demande du recourant, désignera le Dr K______ comme expert.

8.        Le recours est ainsi admis.

9.        Le recourant obtenant gain de cause et étant assisté d'un conseil, il a droit à des dépens qui seront fixés à CHF 2'000.- (art. 61 let. g LPGA).

10.    Pour le surplus la procédure est gratuite.


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Désigne le docteur K______ comme expert dans le cadre de la procédure opposant le recourant à l'intimée.

4.        Alloue au recourant une indemnité de procédure de CHF 2'000.-, à la charge de l'intimée.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral de la santé publique par le greffe le