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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2019/2015

ATAS/13/2016 du 12.01.2016 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2019/2015 ATAS/13/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 12 janvier 2016

2ème Chambre

 

En la cause

Madame A________, domiciliée à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Sarah BRAUNSCHMIDT SCHEIDEGGER

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A________ (ci-après : l'assurée ou la recourante), née B________ le ______1960 au Mozambique, où elle a suivi sa scolarité sans acquérir de formation professionnelle, s'est installée en Suisse, dans le canton de Genève, en août 1992 (de fait, selon elle, en 1988 déjà), en provenance du Portugal, pays dont elle a la nationalité. Le 18 juillet 1992, elle a épousé Monsieur A________, ressortissant portugais domicilié à Genève. Tous deux sont titulaires d'un permis d'établissement dans le canton de Genève. Le couple a eu trois enfants, prénommés C________, D________ et E________, nés respectivement le ______ 1984, le ______1990 et le _____ 1995.

2.        L'assurée indique avoir travaillé comme serveuse ou vendeuse en boulangerie jusque dans le courant de l'année 2008, depuis laquelle elle a été en incapacité totale de travail en raison de douleurs dorsales et cervicales, de fibromyalgie et de dépression. Le 8 mars 2012, elle a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité (ci-après : AI), que l'office de l'AI du canton de Genève (ci-après : OAI) a rejetée par décision du 13 octobre 2014, contre laquelle elle a recouru le 11 novembre 2014 auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (cause A/3437/2014). Par une décision du 21 décembre 2015 (ATAS/983/2015), ladite juridiction ordonnera une expertise psychiatrique de l'assurée, en considération d'un changement de jurisprudence adopté par le Tribunal fédéral en matière de troubles somatoformes douloureux et d'affections psychosomatiques assimilées.

3.        Le 27 janvier 2015, l'assurée a requis du service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) des prestations complémentaires familiales.

4.        Par décision du 25 février 2015, le SPC a refusé à l'assurée le droit aux prestations complémentaires familiales et au subside d'assurance-maladie dès le dépôt de la demande précitée, enregistrée le 1er février 2015. Le total des dépenses reconnues était de CHF 74'715.00 en février 2015 et de CHF 97'851.00 dès le 1er mars 2015 (la différence entre février et mars 2015 s'expliquant par la prise en compte, dès mars 2015, de CHF 23'136.00 de primes d'assurance-maladie), alors que le total du revenu déterminant était de CHF 114'663.00 dès février 2015, montant dans lequel étaient compris un « gain hypothétique adulte non actif » de CHF 19'630.50, pris en compte à 100 %, pour l'assurée ainsi qu'une allocation de logement de CHF 4'999.80.

5.        Par une autre décision rendue également le 25 février 2015, le SPC a refusé à l'assurée le droit à l'aide sociale dès février 2015, pour le motif que ses dépenses reconnues étaient entièrement couvertes par son revenu déterminant.

6.        Par courrier recommandé du 13 avril 2015, l'assurée, représentée par Caritas Genève, a formé opposition contre la décision du SPC du 25 février 2015 lui refusant le droit aux prestations complémentaires familiales. L'allocation de logement dont elle bénéficiait ne devait pas être prise en compte, selon ce qu'avait jugé la chambre des assurances sociales en date du 29 janvier 2015, la disposition réglementaire fondant sa prise en considération violant le principe de la légalité. Un gain hypothétique ne pouvait par ailleurs être retenu pour l'assurée, dès lors que cette dernière était en incapacité complète d'exercer un emploi.

7.        Par décision du 12 mai 2015, le SPC a admis partiellement l'opposition de l'assurée, en tant que - conformément à l'ATAS/155/2015 du 29 janvier 2015 - il déduisait dorénavant l'allocation de logement du loyer effectif et, donc, que le montant de CHF 4'999.80 ne figurait plus dans le calcul la concernant des prestations complémentaires familiales et d'aide sociale, sans que cela n'ait en l'occurrence d'impact dans la mesure où son loyer effectif demeurait, après déduction de cette allocation de logement, supérieur aux montants maximaux admis à titre de loyer par la législation pertinente sur les prestations complémentaires familiales (ni d'ailleurs pour la rubrique « majoration de loyer » en matière d'aide sociale). Il a en revanche rejeté l'opposition s'agissant de la prise en compte d'un gain hypothétique de l'assurée, en l'occurrence d'un montant arrondi et annualisé de CHF 19'630.50, ainsi que le voulaient la loi et la jurisprudence, à teneur desquelles les conséquences d'une éventuelle incapacité de travail relevaient le cas échéant de l'AI mais n'étaient pas pertinentes pour les prestations complémentaires familiales. L'assurée était toujours « hors barèmes », tant pour les prestations complémentaires que pour l'aide sociale.

Les nouveaux plans de calcul et décomptes sur opposition, également du 12 mai 2015, joints à cette décision sur opposition, retenaient, pour février 2015, un total de dépenses reconnues de CHF 74'715.00 pour les prestations complémentaires familiales (et de CHF 61'440.00 pour l'aide sociale) et un revenu total déterminant de CHF 109'663.00 pour les prestations complémentaires familiales (et de CHF 90'347.00 pour l'aide sociale), et, dès mars 2015, un total de dépenses reconnues de CHF 97'851.00 pour les prestations complémentaires familiales (et de CHF 84'576.00 pour l'aide sociale) et un même revenu total déterminant de CHF 109'663.00 pour les prestations complémentaires familiales (et de CHF 90'347.00 pour l'aide sociale). Au titre des revenus, ces plans de calcul n'incluaient pas d'allocation de logement, mais bien un « gain hypothétique adulte non actif » de CHF 19'630.50 pour l'assurée. Cette dernière n'avait droit ni aux prestations complémentaires familiales, ni à un subside d'assurance-maladie.

8.        Par acte du 12 juin 2015, l'assurée, représentée désormais par un avocat, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice d'une déclaration de recours contre cette décision sur opposition, en concluant, sous suite de dépens, à l'octroi de prestations complémentaires familiales dès le 1er février 2015 et à la fixation d'un délai pour compléter son recours (cause A/2019/2015).

9.        Le même jour, l'assurée a saisi la chambre administrative de la Cour de justice d'un recours contre la même décision sur opposition, en tant que cette dernière lui refusait le droit à l'aide sociale (cause A/2025/2015).

Elle a retiré ce recours le 13 juillet 2015, et la chambre administrative a rayé la cause de son rôle par décision du 27 juillet 2015.

10.    Par un complément de recours adressé le 18 août 2015 à la chambre des assurances sociales, l'assurée a précisé contester uniquement la prise en compte d'un gain potentiel au titre du revenu total déterminant et l'absence de toute prime d'assurance-maladie dans ses dépenses reconnues pour février 2015 (sans motiver davantage son recours sur ce second grief). S'agissant du gain hypothétique de l'assurée, la chambre des assurances sociales avait déjà pris en compte, contrairement à la jurisprudence citée par le SPC, l'invalidité comme facteur empêchant une activité lucrative au même titre que les autres facteurs évoqués par le Tribunal fédéral, comme l'âge de la personne concernée, son état de santé, ses connaissances linguistiques, sa formation professionnelle, l'activité exercée précédemment, le marché de l'emploi et, le cas échéant, la durée d'un éloignement de la vie professionnelle. Si l'assurée percevait finalement une rente d'invalidité avec un effet rétroactif couvrant la période considérée, le SPC serait en droit de reprendre le calcul des prestations versées et de solliciter une rétrocession. Il serait toutefois choquant qu'un couple, dont l'un des époux ne peut travailler pour des motifs tenant à des circonstances telles que l'âge, l'absence de formation, les soins à vouer à de jeunes enfants, la langue, puisse bénéficier de prestations complémentaires familiales, mais qu'un couple dont l'un des époux ne peut pas travailler pour cause d'invalidité non encore reconnue par l'assurance compétente soit réduit à l'aide sociale. L'assurée ne pouvait travailler en raison de son état de santé, de son âge, de son éloignement du marché du travail depuis sept ans, de son absence de formation et de son expérience professionnelle limitée exclusivement à des domaines d'activités physiques qu'elle ne pouvait plus exercer vu sa maladie. Elle concluait préalablement à l'audition de ses médecins traitants et à sa comparution personnelle, et principalement à l'exclusion de tout gain potentiel de sa part pour le calcul des prestations complémentaires familiales lui étant dues dès le 1er février 2015, et à l'allocation en sa faveur d'une indemnité de procédure.

11.    Par mémoire du 8 septembre 2015, le SPC a conclu au rejet du recours. L'absence de prise en compte, au titre des dépenses, de la prime d'assurance-maladie en février 2015 se justifiait par le fait que l'assurée et sa famille étaient alors assistées par l'Hospice général, qui avait pris à sa charge le subside complet d'assurance-maladie, qui n'avait pas à être pris en compte à double. Quant au gain hypothétique d'un adulte non actif, il s'imposait de le retenir pour les prestations complémentaires familiales, dont la finalité n'était pas de pallier aux difficultés financières des familles résultant d'une incapacité temporaire de travail ou d'une invalidité, éventualités assurées le cas échéant par l'assurance-accidents, l'AI y compris les prestations complémentaires fédérales et cantonales, les indemnités de l'assurance-chômage en cas de maladie et les prestations cantonales en cas de maladie. Si une rente d'invalidité ou des indemnités journalières d'une durée de six mois au moins étaient octroyées à l'assurée par l'OAI, celle-ci pourrait prétendre, sous réserve de remplir les autres conditions personnelles et économiques, à des prestations complémentaires fédérales et/ou cantonales du régime de l'AVS/AI, dont l'octroi exclurait celui de prestations complémentaires familiales.

12.    Par décision du 8 septembre 2015, le vice-président du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique présentée par l'assurée pour les trois procédures administratives précitées A/3437/2014, A/2019/2015 et A/2025/2015, pour le motif que l'assurée ne remplissait pas la condition d'indigence, les revenus de son ménage se situant au-dessus du minimum vital (même majoré de 20 %) en vigueur dans le canton de Genève.

13.    Le 14 septembre 2015, la chambre des assurances sociales a transmis cette écriture à l'assurée, en lui impartissant un délai au 5 octobre 2015 pour consulter le dossier et formuler d'éventuelles observations.

14.    L'assurée n'a pas formulé d'observations.

15.    La cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 3 let. a de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations cantonales complémentaires du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25), dont celles concernant les prestations complémentaires familiales au sens des art. 36A ss LPCC. Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie, dès lors que le présent recours est dirigé contre une décision rendue sur opposition en application de la LPCC.

Le présent recours a été interjeté en temps utile (art. 43 LPCC), dans le respect des exigences de forme et de contenu prescrites par la loi (art. 89B de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Touchée directement par la décision attaquée et ayant un intérêt personnel digne de protection à son annulation ou sa modification, la recourante a qualité pour recourir (art. 60 let. a et b et 89A LPA).

Le présent recours est donc recevable.

2.        Il n'y a pas lieu de suspendre la présente procédure jusqu'à droit jugé dans la cause A/983/2015 opposant la recourante à l'OAI. Il n'existe en effet pas de connexité étroite entre le recours dirigé contre une décision du SPC relative à la prise en compte d'un gain hypothétique en matière de prestations complémentaires et une décision de l'OAI relative à une incapacité de gain constitutive le cas échéant d'invalidité dans le domaine de l'assurance-invalidité ; ces deux objets sont nettement distincts l'un de l'autre (arrêt du Tribunal fédéral 8C_574/2008 du 8 juin 2009 consid. 4.2 ; ATAS/527/2013 du 27 mai 2013 consid. 2).

3.        a. La couverture des besoins vitaux en matière d'assurance-vieillesse et survivants et d'invalidité est une tâche incombant conjointement à la Confédération et aux cantons (art. 112a de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101). Ce principe se trouve concrétisé par l'art. 2 al. 1 de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30), selon lequel la Confédération et les cantons accordent aux personnes qui remplissent les conditions fixées aux art. 4 à 6 LPC des prestations complémentaires destinées à la couverture des besoins vitaux. Les prestations complémentaires prévues par la LPC se composent de la prestation complémentaire annuelle, qui est une prestation en espèces, versée mensuellement, calculée sur la base de revenus et dépenses réguliers et prévisibles, et qui fait l'objet d'un financement conjoint de la Confédération et des cantons (art. 3 al. 1 let. a et al. 2, 13 et 15 LPC), et du remboursement des frais de maladie et d'invalidité, sur présentation de pièces justificatives, prestations en nature à la charge exclusive des cantons (art. 3 al. 1 let. b, 14 et 16 LPC).

La LPC n'empêche pas les cantons de développer leurs propres prestations sociales. Son art. 2 al. 2 phr. 1 prévoit que les cantons peuvent allouer des prestations allant au-delà de celles qui sont prévues par la LPC et fixer les conditions d'octroi de ces prestations. Ils disposent d'une entière autonomie pour prévoir ainsi et régler des aides supplémentaires, pour le financement desquelles, toutefois, ils ne reçoivent pas de contributions de la Confédération ni, en vertu de l'art. 2 al. 2 phr. 2 LPC, ne peuvent percevoir de cotisations patronales (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, 2015, n. 1 ss ad art. 2).

b. Le canton de Genève prévoit deux types de telles prestations sociales, en complément ou en marge des prestations complémentaires prévues par la LPC, ciblant deux catégories distinctes de bénéficiaires, à savoir d'une part les personnes âgées, les conjoints ou partenaires enregistrés survivants, les orphelins et les invalides - bénéficiaires pouvant prétendre le cas échéant au versement de prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité (art. 1 al. 1 et 2 à 36 LPCC) - et d'autre part les familles avec enfant(s) - bénéficiaires pouvant le cas échéant prétendre au versement de prestations complémentaires cantonales pour les familles, appelées prestations complémentaires familiales (ci-après : PCFam ; art. 1 al. 2 et 36A à 36I LPCC).

Selon l'art. 36C al. 1 LPCC, le droit à des prestations complémentaires fédérales, au sens de la LPC, ou à des prestations complémentaires cantonales, au sens du titre II de la LPCC, ainsi que la renonciation à un tel droit, excluent le droit à des PCFam.

c. Les PCFam ont été introduites dans la législation genevoise par une loi 10600 modifiant la LPCC, adoptée le 11 février 2011, entrée en vigueur le 1er novembre 2012.

d. Selon l'art. 1A al. 2 LPCC, les prestations complémentaires familiales sont régies par les dispositions figurant aux titres IIA et III de la LPCC, par les dispositions de la LPC auxquelles la LPCC renvoie expressément et les dispositions d'exécution de la LPC désignées par règlement du Conseil d'Etat (cf. art. 2 du règlement relatif aux prestations complémentaires familiales du 27 juin 2012 - RPCFam - J 4 25.04), ainsi que par la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830) et ses dispositions d'exécution.

4.        a. Les PCFam garantissent que les familles avec enfant(s) perçoivent le revenu minimum cantonal d'aide sociale garanti aux familles par la LPCC.

Le montant annuel des PCFam correspond à la part des dépenses reconnues au sens de l'art. 36F LPCC qui excède le revenu déterminant au sens de l'art. 36E LPCC, mais ne doit pas dépasser le montant prévu à l'art. 15 al. 2 LPCC (art. 36D al. 1 LPCC).

Les bénéficiaires de PCFam doivent exercer une activité lucrative salariée (art. 36A al. 1 let. c LPCC), d'un taux annuel minimal de 40 % lorsque le groupe familial comprend une personne adulte et de 90 % lorsque le groupe familial comprend deux personnes adultes (art. 36A al. 4 LPCC). Dans le droit fil de cette condition personnelle, l'art. 36E al. 2 LPCC prévoit, au titre du revenu déterminant, que lorsque l'un des adultes composant le groupe familial n'exerce pas d'activité lucrative, il est tenu compte d'un gain hypothétique qui correspond à la moitié du montant destiné à la couverture des besoins vitaux de deux personnes selon l'art. 36B al. 2 LPCC, montant qui est fixé par règlement du Conseil d'État. Ce montant (arrondi et annualisé) est en l'occurrence de CHF 19'630.50, à teneur de l'art. 20 RPCFam, soit de la moitié des CHF 39'261.33 (CHF 25'661.00 x 1.53).

b. La recourante ne conteste que tel soit le montant du gain hypothétique résultant de l'application des dispositions légales et réglementaires précitées, mais elle estime que, dans son cas, il ne doit pas être retenu de gain hypothétique en ce qui la concerne dès lors qu'elle est médicalement en incapacité de travail.

5. a. Ni la LPCC ni le RPCFam ne prévoient de tenir compte d'une éventuelle incapacité de travail dans le calcul du revenu déterminant donnant droit aux PCFam, alors que ces textes législatifs modulent de façon assez détaillée la notion de revenu déterminant, écartant par exemple la prise en compte d'un gain hypothétique « lorsque le groupe familial est constitué d'un seul adulte faisant ménage commun avec un enfant âgé de moins d'un an » (art. 36E al. 5 LPCC ; cf. aussi art. 16 à 18 RPCFam). Le texte de ladite législation autorise d'autant moins à retenir l'exception revendiquée par la recourante que non seulement l'une des conditions d'octroi des PCFam est que les bénéficiaires de ces dernières exercent une activité lucrative (art. 36A al. 1 let. c et al. 4 LPCC), mais aussi que l'octroi de PCFam se trouve exclu par celui de prestations sociales visant à remédier à une absence de revenu tenant à une incapacité médicale de travailler (art. 36C al. 1 LPCC) et que les PCFam n'ont pas vocation à se substituer provisoirement au versement de ces dernières.

b. Les travaux préparatoires des dispositions régissant les PCFam renforcent cette interprétation littérale, grammaticale et systématique de ladite législation.

Selon l'exposé des motifs du projet de loi 10600, ce dernier vise « à améliorer la condition économique des familles pauvres. La prestation complémentaire familiale qui leur est destinée, ajoutée au revenu du travail, leur permettra d'assumer les dépenses liées à leurs besoins de base. Grâce au caractère temporaire de cette aide financière et aux mesures d'incitation à l'emploi qu'elle associe, le risque d'enlisement dans le piège de l'aide sociale à long terme et de l'endettement sera largement écarté. En effet, le revenu hypothétique étant pris en compte dans le calcul des prestations, il constitue un encouragement très fort à reprendre un emploi ou augmenter son taux d'activité [...]. Le présent projet ne concerne que les familles actives professionnellement » (MGC 2009-2010 III A 2828).

Dans son rapport sur ledit projet de loi, la commission des affaires sociales du Grand Conseil a souligné que la « cible de ce projet de loi est d'améliorer la situation économique des familles pauvres qui travaillent (Working Poor) » (MGC 2010-2011 V A 4358).

c. La chambre de céans a déjà jugé à plusieurs reprises que le but de la LPCC n'est pas de pallier aux difficultés financières des familles résultant d'une incapacité de travail temporaire ou d'une invalidité. De telles éventualités sont assurées notamment par l'assurance-accidents, l'assurance-invalidité, y compris les prestations complémentaires fédérales et cantonales, ou encore par les indemnités de l'assurance-chômage en cas de maladie et les prestations cantonales en cas de maladie. Tenir compte, dans l'établissement du droit aux prestations complémentaires familiales, d'une incapacité de travail (temporaire ou permanente) reviendrait à intégrer un facteur étranger aux situations pour lesquelles le législateur cantonal a entendu instaurer une aide financière aux familles. Le but du législateur en instaurant des prestations complémentaires familiales était précisément de valoriser le travail, d'encourager le maintien ou la reprise d'un emploi, ou l'augmentation du taux d'activité, notamment par la prise en compte d'un revenu hypothétique dans le calcul des prestations complémentaires (ATAS/1255/2013 du 17 décembre 2013 consid. 8 ; ATAS/527/2013 du 27 mai 2013 consid. 3c). Contrairement à ce que prétend la recourante, la chambre de céans n'a pas dit autre chose sur ce point dans l'ATAS/553/2014 consid. 8a).

d. Contrairement à ce que prétend la recourante, une dérogation à la prise en compte d'un gain hypothétique en cas d'incapacité de travail ne saurait se déduire, pour les PCFam, de l'art. 11 al. 1 let. g LPC, prévoyant que les revenus déterminants comprennent les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi et de l'interprétation donnée à cette disposition, voulant qu'un dessaisissement soit retenu (donc un gain hypothétique) notamment lorsque le conjoint d'un assuré s'abstient de mettre en valeur sa capacité de travail alors qu'il pourrait se voir obligé d'exercer une activité lucrative en vertu de son devoir de contribuer, selon ses facultés, à l'entretien convenable de la famille, donc en considération de son âge, de son état de santé, de ses connaissances linguistiques, de sa formation professionnelle, de son activité exercée jusqu'ici, du marché de l'emploi, du temps plus ou moins long pendant lequel il a été éloigné de la vie professionnelle (art. 163 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210 ; ATF 134 V 53 consid. 4.1 ; 117 V 287 consid. 3b ; Michel VALTERIO, op. cit., n. 95, 132 ss et 141 ad art. 11).

D'une part les PCFam sont des prestations sociales régies par le droit cantonal, indépendamment du droit fédéral, et d'autre part elles sont conçues, comme déjà indiqué, dans une perspective différente tant des prestations complémentaires fédérales que des autres prestations complémentaires prévues par le droit cantonal, à savoir les prestations complémentaires cantonales, qui, elles, sont bien davantage calquées sur les prestations complémentaires fédérales (cf. art.1A al. 1 et art. 5 LPCC). Certes, pour les PCFam, l'art. 36E al. 1 LPCC définit le revenu déterminant en faisant référence à l'art. 11 LPC (moyennant certaines adaptations), mais cette norme se trouve complétée par des précisions dérogatoires s'harmonisant avec la finalité desdites prestations, dont celles, déjà citées, qu'en cas d'activité lucrative exercée à temps partiel, il est tenu compte, pour chacun des adultes composant le groupe familial, d'un revenu hypothétique qui correspond à la moitié de la différence entre le revenu effectif et le montant qui pourrait être réalisé par la même activité exercée à plein temps (art. 36E al. 2 LPCC), que lorsque l'un des adultes composant le groupe familial n'exerce pas d'activité lucrative, il est tenu compte d'un gain hypothétique qui correspond à la moitié du montant destiné à la couverture des besoins vitaux de deux personnes définis par la législation pertinente (art. 36E al. 3 LPCC), et qu'il n'est pas tenu compte d'un gain hypothétique lorsque le groupe familial est constitué d'un seul adulte faisant ménage commun avec un enfant âgé de moins d'un an (art. 36E al. 5 LPCC). De plus, si l'art. 2 al. 1 RPCFam déclare applicables les dispositions d'exécution de la LPC concernant notamment le dessaisissement, lesdites dispositions d'exécution - à savoir l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301) - n'excluent pas la prise en compte d'un gain hypothétique en considération d'une incapacité de travail.

e. Il ne saurait être déterminant que l'intimé aurait la perspective d'obtenir la rétrocession des PCFam qui s'avéreraient avoir été versées indûment si la recourante percevait finalement une rente d'invalidité couvrant rétroactivement la période considérée en l'espèce, voire alors - de façon exclusive de PCFam (art. 36C al. 1 LPCC) - des prestations complémentaires cantonales. Cette possibilité serait bien plus précaire et aléatoire dans l'hypothèse inverse.

f. C'est donc à bon droit que l'intimé a retenu un gain hypothétique (en l'occurrence non contesté ni contestable quant à son montant) pour la recourante dans le calcul des PCFam dont elle a requis le versement.

6. La recourante n'a nullement motivé son second grief qu'aucune prime d'assurance-maladie n'a été prise en compte au titre de ses dépenses reconnues de février 2015.

L'intimé a expliqué, de façon convaincante et non contestée par la recourante, que cette dernière et sa famille ont été assistées en février 2015 par l'Hospice général, qui a pris en charge le subside complet d'assurance-maladie, si bien que la recourante ne pouvait prétendre à la prise en compte à double de cette dépense.

Le recours est également mal fondé sur ce point.

7. Entièrement mal fondé, le présent recours doit donc être rejeté.

La procédure est gratuite, la recourante n'ayant pas agi de manière téméraire ou témoigné de légèreté (art. 89H al. 1 LPA).

La recourante n'obtenant pas gain de cause, il ne lui est pas alloué d'indemnité de procédure (art. 89H al. 3 LPA), non plus qu'à l'intimé en sa qualité de service d'une collectivité publique chargée d'exercer une tâche publique (Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 656).

* * * * * *

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure.

5.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF) aux conditions de l'art. 116 LTF. Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie SCHNEWLIN

 

Le président

 

 

 

 

Raphaël MARTIN

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le