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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2858/2022

ATA/917/2023 du 29.08.2023 ( FPUBL ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;FONCTIONNAIRE;POUVOIR D'APPRÉCIATION;VIOLATIONS DES DEVOIRS DE SERVICE;SANCTION ADMINISTRATIVE
Normes : RIPers-HES-SO-GE.29; RIPers-HES-SO-GE.63.al1; RIPers-HES-SO-GE.66; RIPers-HES-SO-GE.125; RIPers-HES-SO-GE.161 ss
Résumé : Rejet d’un recours contre une décision de réduction du traitement à l’intérieur de la classe de traitement d’un chargé d’enseignement, de la position 21 à la position 0 de la classe 23 pour avoir exercé depuis 2011, une activité prétendument accessoire à 80%, non déclarée en qualité d’enseignant dans une école en France. Examen des violations des obligations découlant du statut de chargé d’enseignement et de la procédure d’annonce et d’autorisation de l’exercice d’activités accessoires. Examen de la proportionnalité de la sanction.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2858/2022-FPUBL ATA/917/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 août 2023

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Christian BRUCHEZ, avocat

contre

HAUTE ÉCOLE SPECIALISÉE DE SUISSE OCCIDENTALE - GENÈVE (HES‑SO GENÈVE) intimée

 



EN FAIT

A. a. A______, né en 1969, est chanteur ______. Il a été engagé par le conservatoire de musique B______ en qualité de professeur de chant à temps partiel dès 2005.

En novembre 2006, il a été engagé au conservatoire C______ (France) en qualité de professeur de chant, à temps plein. Il a exercé cette activité conjointement à celle exercée à B______.

b. Le 1er septembre 2009, suite au transfert du Conservatoire de musique B______ à la Haute école de musique - conservatoire de musique de Genève (ci‑après : HEM), il a été engagé en qualité de chargé de cours de la Haute école spécialisée (ci-après : HES) de l’unité décentralisée B______, à un taux d’activité de 65%.

c. Dans un courriel adressé le 1er juin 2011 à D______, directeur de la HEM, A______ indiquait, entre autres informations, que : « mes congés et ma réduction de mon temps de travail à C______ pour l’année prochaine m’ont été accordés ». Dans sa réponse, le directeur le remercie de l’information concernant C______ « qui va dans le sens de nos discussions ».

d. Le 1er septembre 2011, A______ s’est vu confier, en sus de sa fonction de chargé de cours HES, le mandat de responsable du département vocal nouvellement créé, jusqu’au 31 août 2015.

Depuis le 1er septembre 2011, son taux d’activité était fixé à 100 %, soit 1’800 heures par année académique et son salaire fixé en classe 23, annuité 14.

e. Le 1er février 2012, A______ a été nommé fonctionnaire.

f. Dès le 1er avril 2014, la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève (ci-après : HES-SO Genève), à laquelle a été rattachée la HEM, est devenue une institution autonome de droit public.

g. Dès le 1er septembre 2017, la fonction de A______ a été transférée dans celle de maître d’enseignement, responsable HES, conformément à la nouvelle typologie applicable en vertu du règlement interne sur le personnel de la HES-SO Genève du 6 février 2017 (ci-après : RIPers). L’engagement à durée indéterminée était prévu du 1er septembre 2017 au 31 août 2021, renouvelable à son échéance. La durée était liée au mandat de responsable du département vocal.

Son traitement était alors situé en classe 23, annuité 17 et le complément salarial lié à sa fonction de responsable HES était de 6% de la classe 27, annuité 22.

h. Le 8 novembre 2019, la direction des ressources humaines de la HES-SO Genève a adressé à l’ensemble de son personnel un courriel aux fins de rappeler les conditions d’exercice d’une activité accessoire (concernant le personnel engagé à un taux d’activité de 100%) ou extérieure (concernant le personnel engagé à un taux inférieur à 100% jusqu’à concurrence d’un taux global de 100%), conformément à la réglementation applicable. Il était notamment rappelé que toute activité accessoire était soumise à l’autorisation préalable de la direction de l’école concernée.

i. Le 26 janvier 2021, la HES-SO Genève a nommé A______ à la fonction de maître d’enseignement HES à un taux de 100% du 1er septembre 2021 au 31 août 2025.

j. En mai 2021, une directive sur les activités extérieures et accessoires du personnel (ci-après : la directive sur les activités accessoires) a été adoptée par le Conseil de direction de la HES-SO Genève, laquelle prévoyait notamment qu’un formulaire de déclaration d’une activité accessoire rémunérée pour le personnel d’enseignement et de recherche soit le cas échéant transmis.

k. Un entretien d’évaluation et de développement du personnel (ci-après : EEDP) portant exclusivement sur la fonction de responsable du département vocal de la HEM a eu lieu le 25 août 2021, lors duquel plusieurs problèmes ont été identifiés par la direction dans la gestion du mandat. L’EEDP s’appuyait sur la consultation du corps enseignant du département ainsi que sur celui du personnel administratif impliqué dans la gestion de celui-ci.

Le 30 août 2021, le directeur général de la HES-SO Genève a renouvelé le mandat de responsable HES du département vocal de A______, du 1er septembre 2021 au 31 août 2022.

Le 18 septembre 2021, A______ a déposé des observations suite à l’EEDP. Il contestait une partie des problèmes évoqués par la direction mais accueillait favorablement la proposition d’un coaching personnalisé.

Une coach a été mandatée le 26 novembre 2021 pour accompagner A______.

Suite à une consultation du personnel faite début 2022, le directeur de la HES-SO Genève a informé A______ le 12 avril 2022 du non-renouvellement de la fonction de responsable HES dès le 1er septembre 2022.

Cette décision a donné lieu à un litige également pendant devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

l. Le 18 septembre 2021, A______ a adressé à la direction de la HEM le formulaire de déclaration d’une activité accessoire complété et signé. Il a déclaré une activité d’enseignement d’art lyrique et de musique contemporaine au conservatoire C______, représentant 24 journées au total entre octobre 2021 et mars 2022 et une rémunération de CHF 18'850.-. Il mentionnait également que l’exercice de cette activité rentrait dans le cadre de la nécessité d’un service continu de quinze ans au sein de la fonction publique territoriale française pour pouvoir sauvegarder les droits à la caisse de retraite correspondante. Les quinze ans de service continu finissaient en mars 2022, et une disponibilité à durée indéterminée pouvait être demandée au-delà.

m. Le 4 mars 2022, le directeur général de la HES-SO Genève a demandé à A______ la production d’une attestation du Conservatoire C______ précisant son activité et sa rémunération en vue de pouvoir se déterminer sur la compatibilité de cette activité accessoire avec l’engagement à 100% à la HES-SO.

n. Le 31 mars 2022, A______ a indiqué au directeur général que son engagement au conservatoire C______ datait de 2006, qu’il avait été évoqué avec D______ lors de l’entretien en vue de son engagement à la fonction de responsable HES. Il avait été convenu alors que cette activité ne devait pas dépasser une journée de travail par semaine. Il s’était également engagé à suspendre cette activité une fois le délai de quinze ans révolu, soit en avril 2022, engagement qu’il avait renouvelé lors de son dernier EEDP avec D______ en août 2021.

Il a également exposé les discussions avec D______ s’agissant de collaborations pertinentes entre les établissements, lesquelles étaient intervenues dès 2013.

Il joignait une fiche de salaire du Conservatoire C______ pour le mois de février 2022 pour CHF 1'764.82 à un taux d’activité de 80%.

o. Le 7 avril 2022, le directeur général a requis de A______ la fourniture du contrat de travail portant sur l’activité à 80%.

p. A______ a transmis des arrêtés de la présidence du Conservatoire C______ ayant trait à son engagement, datés du 2 octobre 2008 et du 30 mars 2021, indiquant un taux d’activité à 80% du temps plein.

q. Le 9 mai 2022 le directeur général a convoqué A______ a un entretien de service concernant ses activités accessoires. En cas d’incompatibilité, une sanction disciplinaire, voire une résiliation des rapports de service pourrait être prise à l’issue de l’entretien.

r. L’entretien de service s’est tenu le 30 mai 2022 en présence de E______, directeur général de la HES-SO, F______, directrice de la HEM, G______, responsable ressources humaines, et H______, responsable des affaires juridiques ad interim.

Deux attestations établies par le directeur du Conservatoire C______, des 6 et 11 mai 2022, ont été remises par A______, indiquant respectivement un travail à temps partiel de 80%, soit 12h45 hebdomadaires et 19 jours de travail entre le 4 octobre 2021 et le 2 mai 2022.

s. Le 3 juin 2022, le compte rendu de l’entretien de service a été transmis à A______, un délai de quatorze jours lui étant imparti pour fait part de ses commentaires et la remise de ses fiches de salaire pour la période de septembre 2021 à juin 2022 concernant son activité à C______.

Le 21 juin 2022, A______ a indiqué que sur demande il mettrait un terme pour la fin de l’année académique à son engagement à C______.

Les fiches de salaires pour la période de juin 2021 à mai 2022 étaient jointes, indiquant une rémunération mensuelle oscillant entre EUR 1'756.42 et 2'713.34. Les heures cumulées débutant à 55.47 pour janvier et terminant à 665.64 au mois de décembre.

t. Le 7 juillet 2022, le directeur général de la HES-SO a rendu une décision de réduction du traitement de A______ à l’intérieur de la classe de fonction, de la position 21 à la position 0 de la classe 23, à compter du 1er août 2022. La sanction était prononcée pour avoir exercé, depuis 2011, une activité prétendument accessoire à 80%, non déclarée et rompant ainsi le lien de confiance. Le cumul des activités excédait 120%, taux qui était communément admis comme limite d’un tel cumul.

La décision prévoyait également que A______ mette fin avec effet immédiat à son activité au Conservatoire C______.

B. a. Le 9 septembre 2022, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre la décision précitée, concluant à son annulation et préalablement à la production de l’intégralité de son dossier et à une audience de comparution personnelle des parties.

Son activité accessoire était connue de tous au sein de la HEM et figurait tant sur le site internet de l’école et sur les demandes de fonds et autres dossiers de presse, relus par la direction, que sur les programmes des spectacles produits par la HEM dont il était le directeur artistique.

En 2011, D______ avait consenti à la poursuite de cette activité accessoire à condition qu’elle n’excède pas une journée par semaine et qu’elle n’entrave pas son activité au sein de la HEM.

Sa position à C______ était très flexible et son enseignement ne supposait quasiment aucune préparation. Cette activité représentait 400 heures sans majoration possible et n’impliquait aucun suivi des étudiants. Les fiches de paie portaient sur des heures théoriques et non effectives. Son taux effectif pour la HEM était d’au moins 120%. Il n’y avait jamais eu de problème et aucun reproche ne lui avait été fait. Les faits avaient été constatés arbitrairement.

La sanction représentait une baisse de salaire de plus de CHF 40'000.- par an. Il n’avait aucun antécédent disciplinaire.

L’autorité avait ainsi abusé de son pouvoir d’appréciation et violé le principe de proportionnalité.

b. Le 10 octobre 2022, la HES-SO a répondu au recours, concluant à son irrecevabilité, le délai de recours n’ayant pas été respecté.

c. Le 13 octobre 2022, le recourant a fait valoir que le délai de recours arrivant à échéance un jour férié, son recours déposé le lendemain était recevable.

d. Le 3 novembre 2022, la HES-SO a conclu au rejet du recours.

Le recourant n’avait jamais annoncé formellement une activité exercée à 80% au Conservatoire C______. Il continuait, contrairement aux pièces produites, à minimiser son activité parallèle.

L’activité n’aurait jamais été autorisée. Le recourant avait commis une faute en ne la déclarant pas formellement. Cela constituait un grave manquement à ses obligations. Une résiliation des rapports de service aurait légitimement pu être envisagée, si bien que la décision était proportionnée. Il n’avait toujours pas quitté son activité à C______ malgré l’incompatibilité avec son emploi à la HES-SO et les demandes répétées.

e. Entendu en audience de comparution personnelle le 10 novembre 2022, le recourant a déclaré avoir arrêté son activité à C______. Il avait demandé un congé et était « en disponibilité pour convenances personnelles » pour la période du 1er octobre 2022 au 31 mars 2023, le congé étant prolongeable jusqu’à cinq ans. Il avait reçu l’ordre d’arrêter en juillet 2022 et avait pu obtenir dans les trois mois l’arrêt effectif.

Une journée de travail à C______ était composée de deux séances de trois heures, mais cela pouvait varier. Il était responsable de l’atelier lyrique et de l’atelier de musique contemporaine.

La responsable du service juridique ad interim de la HES-SO a souligné que le directeur du Conservatoire C______ avait signé à quelques jours d’intervalle des attestations contradictoires, dont l'une mentionnait une durée hebdomadaire régulière de 12h45. Le principe de l’activité était connu et ne posait pas de problème en soi, c’était son ampleur qui était problématique et inconnue de l’employeur. Le nombre d’heures augmentait et l’ensemble de l’activité n’avait été déclarée formellement qu’en septembre 2021. La demande d’arrêt de l’activité avait été faite avant la décision, lors de l’entretien de service. Le 16 décembre 2013, un courrier avait été envoyé au recourant lui demandant d’être plus présent sur son lieu de travail, en adéquation avec les besoins et les responsabilités de sa fonction.

Le recourant a expliqué qu’il habitait à l’époque à I______ (France), mais qu’il était maintenant installé en Suisse avec un permis B. Avant 2014, J______, dont il était ressortissant n’était pas concernée par l’accord de libre circulation avec la Suisse. Il avait compris que la direction l’invitait à adapter ses jours de présence à Genève en fonction de son autorisation de séjour (120 jours par année non consécutifs) et non comme un reproche d’absentéisme. D______ ne l’avait jamais interpellé pour cela. Quant à sa présence « au bureau », entre 2011 et 2016, il n’avait pas d’espace personnel à titre de bureau, malgré des demandes faites en ce sens.

De nombreux enseignants à la HEM avaient des activités accessoires. Il était par contre un des seuls à devoir travailler sur les deux sites B______ et Genève. Il était devenu responsable du département vocal, qui était un nouveau département à construire de toutes pièces. Le premier coaching était en lien avec les collaborations institutionnelles qui devaient être faites.

La directrice des ressources humaines a précisé que le taux maximum admis était de 120%, activité extérieure, pour les personnes à temps partiel, ou activité accessoire pour les personnes à plein temps, comprises.

f. Le 25 novembre 2022, le recourant a déposé des pièces et des déterminations complémentaires.

L’autorité intimée ne contestait pas les termes de l’accord passé avec D______ lors de l’engagement, selon lequel son activité à C______ ne devait pas dépasser une journée par semaine ni entraver l’exercice de ses fonctions à la HEM. Elle ne démontrait pas qu’il n’avait pas respecté cet accord. Il produisait deux arrêtés de mise en disponibilité du 14 novembre 2011 au 2 janvier 2012 et 29 avril au 26 mai 2019, demandés en anticipation de périodes particulièrement chargées à la HEM. Il démontrait ainsi avoir toujours priorisé son activité au sein de cette institution. Le fait que le contrat formellement proposé par le Conservatoire C______ fasse état d’un taux de 80% et générait automatiquement 55.77 heures par mois, indépendamment des heures variables effectivement réalisées, ne changeait rien à ce qui précédait, dès lors que le conservatoire C______ acceptait qu’il limite son activité effective à une journée par semaine, comme en témoignait l’attestation du directeur du 11 mai 2022. Cela représentait un 20%.

Ce n’était que suite à la présentation de son contrat qu’il y avait eu problème.

Une autre enseignante au moins, K______, travaillait à 75% à la HEM en 2018‑2019, exerçait une activité d’enseignement à L______ (Allemagne) à 50 % depuis l’année 2017-2018, prolongée en 2019-2020, exerçait la même activité à M______ (Allemagne) et était titulaire de classe à N______ (France), selon les pièces déposées. Son taux cumulé était supérieur au sien mais elle n’avait fait l’objet d’aucune sanction.

Le 25 janvier 2023, lors d’une audience d’enquêtes et de comparution personnelle, D______ a expliqué avoir été directeur du Conservatoire de musique de Genève depuis 1992 jusqu’en 2008 puis de la HEM jusqu’au 31 décembre 2021. Sa pratique était de tolérer d’une part des activités ponctuelles, les enseignants restant des artistes, et d’autre part de phases transitoires permettant à l’enseignant une transition harmonieuse avec ses activités précédentes. Cette phase devait être aussi brève que possible. Le port d’attache devait être unique même si des activités ponctuelles, comme des ateliers ou des masterclasses, étaient possibles dans d’autres institutions. Même dans ces cas, il y avait un devoir d’annonce.

Il avait eu quelques conversations avec le recourant au sujet de sa présence sur le lieu de travail, lors des renouvellements périodiques, notamment en 2014, sauf erreur. Il lui avait été demandé, avec la directrice administrative, d’intensifier sa présence sur la base de certains ressentis qui leur avaient été communiqués. Son activité d’enseignant était reconnue et il n’y avait jamais eu de critiques particulières. En 2021, des difficultés managériales et d’organisation avaient été mises en évidence et donné lieu à un coaching ainsi qu'à certaines doléances d’enseignants, à tort ou à raison. Il était impliqué et présent. Il avait mené à chef un certain nombre de projets, notamment complexes tels que des opéras. Cet investissement était toutefois tempéré par ce sentiment d’absence, et le bilan en 2021 était en demi-teinte.

En 2021, il ne savait pas que le recourant avait toujours une activité régulière à C______. Il pensait que celle-ci s’était terminée après une phase transitoire d’une durée indéterminée, a priori lors du premier renouvellement en 2014. En 2017, il ne pensait pas avoir posé la question des activités accessoires.

La provenance des élèves admis ne donnait pas lieu à un bilan. Huit cents candidatures étaient déposées chaque année, les meilleurs candidats étaient choisis. À propos de C______, il y avait une volonté de tempérer le nombre d’étudiants français pour ne pas « faire trop C______ ». Il n’y avait pas de partenariat privilégié avec le Conservatoire C______. Il était possible que tel ou tel candidat ait mentionné provenir du Conservatoire C______, voire avoir suivi l’enseignement de A______, mais il ne se souvenait pas d’un cas particulier d’un élève qui proviendrait du Conservatoire C______ et qui aurait mentionné avoir suivi l’enseignement du recourant. Les examens d’admission étaient présidés principalement par les responsables de département, puis les procès-verbaux d’admission faisaient l’objet de discussions au sein de la direction. Il avait principalement un rôle d’arbitrage.

O______, musicienne domiciliée à Genève, avait été professeure au Conservatoire B______ puis à la HEM entre 1997 et 2020 et avait collaboré avec le recourant en qualité de claveciniste accompagnatrice et dans des classes de musique de chambre. Elle avait ensuite intégré le département de chant dont il était le doyen. Il était donc son responsable hiérarchique. Elle avait eu un taux d’activité entre 15 et 40 %. Elle devait souvent contacter le recourant, y compris en urgence, pour lui faire signer des documents notamment. Elle avait toujours réussi à le joindre assez rapidement, même s’il était en cours ou dans des réunions administratives, lesquelles étaient fréquentes.

Selon elle, le recourant était totalement investi dans son activité à la HEM. Le département s’était beaucoup dynamisé avec lui à sa tête. Il travaillait, comme elle-même, sur les deux sites, ce qui n’était pas évident et occasionnait de nombreux déplacements. Elle savait que le recourant avait une activité régulière à C______. Certains de ses étudiants de C______ passaient le concours d’entrée à la HEM. Elle n’avait jamais entendu de professeurs ou d’étudiants qui se plaignaient qu’il ne soit pas assez présent.

g. Le 24 février 2023, la HES-SO a déposé des observations.

Le témoignage de D______ contredisait l’argumentation du recourant et corroborait sa position : avant le 31 mars 2022, date à laquelle il avait communiqué une fiche de salaire faisant état d’un taux d’activité à 80%, l’étendue de son activité n’avait jamais été annoncée.

Le témoignage de O______ était teinté de subjectivité, ayant travaillé sous la responsabilité hiérarchique principale du recourant qui était intervenu pour ses engagements successifs auprès de la HEM. De plus, ses taux d’activité faibles ne lui avaient pas permis d’avoir une vision exhaustive de la situation.

h. Le 2 mars 2023, le recourant a persisté dans les conclusions prises. Les témoignages soutenaient sa version des faits. L’autorité intimée ne contestait pas la situation de sa collègue qui cumulait plusieurs activités à un taux bien plus élevé que le sien.

i. Le 28 mars 2023, la HES-SO a déposé des observations. La situation de K______ n’était pas celle exposée par le recourant. Celle-ci était engagée à temps partiel, si bien que la situation n’était pas comparable.

j. La cause a ensuite été gardée à juger, le recourant ayant déclaré renoncer à déposer des observations complémentaires le 21 avril 2023.

 

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 166 al. 2 RIPers ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le litige porte sur une sanction disciplinaire prononcée à l’encontre du recourant par la HES-SO.

2.1 La HES-SO Genève est un établissement autonome de droit public doté de la personnalité morale (art. 1 al. 3 de la loi sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale ‑ Genève du 29 août 2013 - LHES‑SO‑GE ‑ C 1 26). Elle s’organise elle-même, fixe ses priorités et ses modalités d’action et est responsable de sa gestion dans le cadre des orientations, principes et règles stipulées par la LHES-SO-GE, dans le respect des dispositions pertinentes du droit fédéral, de la convention intercantonale, et du cadre normatif fixé par la HES-SO (art. 1 al. 4 LHES-SO-GE).

2.2 Les enseignantes et enseignants ainsi que les collaboratrices et collaborateurs de l’enseignement et de la recherche sont soumis aux dispositions de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10) et de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15 ; art. 19 al. 1 de la loi sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève du 29 août 2013 - LHES-SO-GE - C 1 26).

2.3 Pour ce qui a trait au personnel de la HES-SO Genève, les compétences qui appartiennent au Conseil d’État ou à l’office du personnel de l’État (ci-après : OPE) à teneur de la LIP et de la LTrait sont transférées aux organes de la HES-SO Genève selon les modalités définies par le RIPers (art. 19 al. 2 et 20 LHES-SO-GE).

3.             Il est reproché au recourant d’avoir violé des obligations découlant de son statut de chargé d’enseignement et de responsable de département, ce qu’il nie, arguant que les faits ont été mal établis par l’autorité intimée.

3.1 Le corps enseignant a pour mission de dispenser une formation de niveau tertiaire universitaire axée sur la pratique, s’inscrivant prioritairement dans le prolongement d’une formation professionnelle ou artistique initiale. Il réalise des projets de recherche appliquée et de développement dont il intègre les résultats à ses enseignements, dispense les cours de bachelor, de master et d’études postgrade, fournit des prestations à des tiers et assure les échanges avec les milieux professionnels, exécute les tâches administratives, dans les limites particulières de chaque fonction et du cahier des charges personnel (art. 18 al. 1 et 2 RIPers).

3.2 Les responsables de filière ou de département proposent et mettent en œuvre la stratégie de la pédagogie pour leur filière ou leur département, en l’inscrivant dans le projet général d’école ; proposent des actions ou des moyens permettant le développement de la filière ou du département, en lien avec la politique et les objectifs fixés par le Conseil de direction de l’école et en concertation avec le responsable du domaine de la HES-SO ; définissent la répartition interne des ressources allouées en fonction du plan d’étude et du plan de recherche appliquée et développement pour garantir la gestion pédagogique et administrative optimale de leur filière ou de leur département (art. 125 RIPers).

3.3 S’agissant des droits et des devoirs du personnel d’enseignement et recherche décrites dans le RIPers, il est prévu que, dans le cadre de leurs fonctions, les membres du personnel doivent leur temps au service des écoles de la HES-SO Genève. La répartition des activités dans le cadre de leurs fonctions étant précisée dans les cahiers de charges individuels (art. 62 RIPers). La durée normale du travail est de 40 heures par semaine, lesquelles sont en principe réparties sur cinq jours (art. 63 al. 1 RIPers).

3.4 Les membres du corps enseignant à plein temps peuvent exercer des activités rémunérées accessoires et les membres du personnel à temps partiel peuvent exercer des activités rémunérées extérieures. Les activités accessoires et extérieures doivent être compatibles avec l’intérêt de l’école et de la HES-SO et ne doivent pas leur porter préjudice. L’utilisation des infrastructures de l’école pour les activités accessoires et extérieures est soumise à autorisation de la directrice ou du directeur d’école et fait l’objet d’une facturation (art. 66 RIPers).

3.5 L’art. 67 RIPers prévoit que dans le cadre d’une activité accessoire, un membre du corps enseignant peut être engagé dans une autre haute école, université ou école ou peut, exceptionnellement, être autorisé par la directrice générale ou le directeur général à exercer une autre activité lucrative (al. 1). Lorsque l’activité accessoire n’est pas en rapport direct avec les activités de l’intéressée ou l’intéressé, une réduction du taux d’activité peut être exigée par la directrice générale ou le directeur général (al. 2). Les activités accessoires et leurs revenus doivent être annoncés à la directrice ou au directeur d’école qui peut les refuser (al. 3). Lorsque l’éthique et l’équité l’exigent, la directrice générale ou le directeur général peut exiger de l’intéressée ou l’intéressé qu’une partie des revenus accessoires soit versée à la HES-SO Genève (al. 4).

Cette obligation d’annonce de l’activité et des revenus accessoires était déjà prévue à l’art. 15 al. 3 du règlement fixant le statut du corps enseignant HES du 10 octobre 2001 (aRStCE-HES), abrogé par l’adoption du RIPers (art. 194 RIPers) le 15 mars 2017 et s’applique donc pleinement au recourant.

3.6 Il découle de ces dispositions qu’une activité exercée en plus de celle à plein temps existante auprès de la HES-SO Genève, peut l’être à condition d’avoir été annoncée, ainsi que les revenus qu’elle procure à la direction de l’école. De plus, cette dernière ayant le pouvoir de la refuser, aux termes de l’art. 67 al. 3 RIPers, une autorisation doit être donnée à l’intéressé pour exercer cette activité qualifiée d’accessoire.

3.7 Cette procédure d’annonce et d’autorisation a été formalisée par une directive adoptée en mai 2021 par la HES-SO, laquelle prévoit notamment que les activités extérieures et accessoires sont en principe autorisées, voire encouragées, à condition qu’elles soient compatibles avec l’intérêt de l’école et de la HES-SO Genève et qu’elles ne leur portent pas préjudice. Il est précisé que les membres du personnel qui exercent des activités accessoires doivent en particulier veiller à ce que ces dernières n’entravent pas leurs activités pour la HES-SO Genève, notamment en termes de capacité de travail ou de disponibilité. Ils doivent également s’assurer que la HES-SO Genève ne subisse aucun impact négatif du fait de ces activités. Ils veillent à éviter tout conflit d’intérêt entre leurs activités extérieures ou accessoires et leurs activités pour la HES-SO Genève (art. 4 de la directive sur les activités accessoires).

Les activités d’enseignement pour une autre institution sont appréhendées par une disposition spéciale, laquelle indique que si, en principe, dans le cadre d’activités accessoires, les membres du personnel sont autorisés à être engagés dans une autre haute école, ils doivent préalablement s’assurer auprès de leur direction qu’aucun accord de collaboration n’existe et s’il s’agit d’une institution privée, celles-ci ne sont autorisées que si elles ne constituent pas une concurrence déloyale aux activités de l’école ou de la HES-SO Genève. Elle précise encore que les cours élaborés dans le cadre d’un contrat avec une école de la HES-SO Genève ne peuvent être utilisés par une autre institution qu’avec l’accord de la direction de l’école. Le cas échéant, la rétrocession d’une part du salaire correspondant à leur préparation peut être exigée (art. 4.2 directive sur les activités accessoires).

La conduite d’activités extérieures ou accessoires peut comporter des risques de conflits d’intérêts, sans qu’une liste exhaustive de situations puisse être dressée. Quelques exemples sont donnés à l’art. 4.3 de la directive sur les activités accessoires. Ces situations devaient être anticipées et annoncées de manière transparente afin que des mesures de prévention, comme la récusation puissent être mises en place.

S’agissant du taux d’activité, il est précisé qu’en principe une activité accessoire a un caractère ponctuel et irrégulier et ne devait pas conduire à une activité professionnelle à plus de 100% sur la durée. Elle ne devrait pas excéder un taux d’activité de 20%. Une diminution du taux pouvait être décidée par la direction générale notamment lorsque le cumul des activités dépassait un taux annualisé de 100 % (art. 4.5 directive sur les activités accessoires).

L’obligation d’annonce et de contrôle de compatibilité de l’activité accessoire est détaillée à l’art. 4.6 de la directive sur les activités accessoires, qui prévoit notamment que les revenus liés doivent être annoncés. La direction de l’école peut refuser la conduite ou la poursuite de ces activités. Les activités accessoires font l’objet d’une décision de la direction générale sur préavis de la direction de l’école ou du service. Cette évaluation est régulièrement faite, notamment lors des EEDP.

3.8 En l’espèce, le dossier contient une déclaration d’une activité accessoire rémunérée faite par le recourant le 18 septembre 2021 sur un formulaire préimprimé indiquant une activité auprès du Conservatoire C______, dont le pourcentage n’est pas précisé. Le volume horaire total indiqué était de 24 journées entre octobre 2021 et mai 2022, pour une rémunération totale prévue de EUR 18'850.-.

Le dossier contient également un arrêté du 23 octobre 2008 portant sur la titularisation du recourant dans le grade de professeur d’enseignement artistique du Conservatoire C______, au grade de professeur d’enseignement artistique classe normale à compter du 15 novembre 2007 ainsi qu’un arrêté portant sur le maintien de travail à temps partiel du 7 mai 2021, indiquant une réduction à 80% du 1er septembre 2021 au 31 août 2022 inclus, ainsi que la mention que ce taux était autorisé depuis le 1er septembre 2011 et renouvelé annuellement. Figurent également au dossier trois arrêtés de mise en disponibilité pour les périodes du 14 novembre 2011 au 2 janvier 2012, du 29 avril 2019 au 26 mai 2019 et du 1er octobre 2022 au 31 mars 2023.

Il est donc établi que le recourant a déployé une activité à 80% pour le Conservatoire C______, en qualité de professeur dans la fonction publique territoriale française, depuis le 1er septembre 2011 et à temps complet entre 2007 et 2011. Même en tenant compte des mises en disponibilité, correspondant à des interruptions de l’activité, cette activité correspond à un taux de près de 80%.

La question de savoir à combien d’heures effectives d’enseignement correspond ce taux n’est pas pertinente en l’espèce. En effet, d’une part, le reproche fait au recourant est celui d’avoir exercé une activité parallèle, de près de 80% depuis son engagement à 100%, sans l'annoncer ni déclarer les revenus obtenus à la direction et sans avoir l’autorisation de celle-ci pour ce faire.

D’autre part, même si les attestations fournies indiquent un nombre d’heures hebdomadaires et des jours de travail effectifs à C______, la charge de travail d’un enseignant ne correspond pas à celle de sa présence devant les élèves lors des cours qu’il dispense. Ainsi, par exemple, l’aRStCE-HES prévoyait un coefficient de 2,2 par période de cours, comprenant la préparation et l’évaluation continue de l’enseignement, l’élaboration des supports courants de l’enseignement, les adaptations régulières, la coordination didactique et pédagogique et l’organisation courante du travail des assistants (art. 5 al. 2 sRStCE-HES). Appliqué aux heures déclarées de 12,75 hebdomadaire, cela correspond à un 70% une fois reporté sur 40 heures hebdomadaires.

La question de savoir si le recourant a pu effectuer ces deux activités en parallèle, s’agissant notamment de sa présence aux cours qu’il devait donner, n’est pas pertinente non plus, l’acquiescement à l’exercice de toute activité supplémentaire par la direction de l’école étant prévue expressément dans les dispositions applicables à la situation du recourant auprès de la HES-SO.

En outre, en 2011, lors de l’augmentation de son taux d’activité à 100%, l’avenant mentionnait expressément le nombre d’heures à effectuer par année académique, soit 1’800 heures, ce qui correspond, déduction faites de sept semaines de vacances, à 40 heures par semaine, nombre d’heures également fixé dans le RIPers comme durée du travail hebdomadaire du personnel d’enseignement et de recherche (art. 63 RIPers). Toute activité déployée en plus de celle-ci correspond donc à une activité supplémentaire, laquelle aurait dû être annoncée formellement et, le cas échéant, autorisée.

Or, une seule mention de cette activité accessoire figure dans le dossier, avant l’annonce faite par le recourant le 18 septembre 2021. Elle se trouve dans des courriels échangés entre le recourant et le directeur de la HEM du 1er juin 2011, desquels il ressort qu’une discussion a eu lieu s’agissant de l’activité accessoire exercée à C______ lors de l’augmentation du taux d’activité du recourant, ceci à l’occasion de son engagement en qualité de responsable de département. Il ressort également de cet échange que le recourant a déclaré au directeur avoir fait des demandes de congé et de réduction de son taux d’activité auprès du conservatoire C______. Une demande de mise en disponibilité a effectivement été déposée, mais uniquement pour la période du 14 novembre 2011 au 2 janvier 2012.

Cet échange permet d’établir que le directeur était informé d’une activité exercée par le recourant au Conservatoire C______, laquelle se transformait, à la rentrée 2011, d’activité extérieure en une activité accessoire en raison de l’augmentation du taux d’activité du recourant. Toutefois, rien ne permet d’établir que l’ampleur de l’activité ainsi que les modalités exactes de sa poursuite ont été déclarées au directeur.

L’instruction n’a pas permis d’établir que le directeur de la HEM aurait été informé de l’ampleur de cette activité accessoire pour les années académiques ultérieures. Lors de son audition, il a indiqué avoir pensé de bonne foi que l’activité régulière à C______ s’était terminée après une phase transitoire, a priori lors du premier renouvellement en 2014. La question n’avait même plus été évoquée lors du second renouvellement en 2017, et avait été posée à titre de question standard lors du renouvellement de 2021.

Un doute pourrait subsister quant à la connaissance d’une activité accessoire résiduelle du recourant, puisque le directeur a dit qu’il était possible que tel ou tel candidat ait mentionné provenir du Conservatoire C______, voire avoir suivi l’enseignement du recourant.

Toutefois, l’argumentation du recourant ne peut être suivie lorsqu’il affirme que son activité au conservatoire C______ dans toute son ampleur était « connue de tous au sein de la HEM », notamment parce qu’elle figurait sur le site internet de l’école et sur les demandes de fond et dossiers de presse. En effet, si le site internet de l’école mentionne bien que le recourant enseigne le chant au Conservatoire C______, dans la présentation rédigée par le recourant lui-même, aux dires de l’autorité intimée qui n’est pas contredite sur ce point, aucune date ni précision n’y figure, et il en va de même des autres documents déposés.

La responsable du service juridique ad interim de l’autorité intimée n’a pas déclaré autre chose, à savoir que si le principe d’une activité au conservatoire C______ était connu, l’ampleur ne l’était pas. Quant au témoignage de la collègue du recourant, laquelle a indiqué qu’un certain nombre des étudiants de C______ du recourant passaient le concours d’entrée, il ne suffit pas non plus à établir qu’une annonce en bonne et due forme a été faite par le recourant au sujet de son activité accessoire et surtout de son ampleur, même si dans les faits, sa présence à C______ n’était nécessaire qu’un jour par semaine.

Ces mentions dans des documents et la connaissance d’une activité accessoire du recourant par l’école ne permettent pas d’établir que des annonces, telles qu’exigées par les règlements applicables, aient été faites à la direction. Quant au fait que cette activité parallèle était dans toute son ampleur également connue de la direction, comme le prétend le recourant, l’audition du directeur vient la contredire et aucune autre pièce figurant au dossier n’atteste de la connaissance par la direction d’une activité et d’une rémunération accessoires à un taux de 80%.

Finalement, l’obligation d’annonce porte aussi sur la rémunération perçue et sur l’obtention d’un accord de la direction. Or, le recourant n’allègue pas avoir renseigné son employeur sur les revenus générés par son activité accessoire, comme l’exigeaient pourtant le RIPers et l’aRStCE-HES avant lui.

En conséquence, la violation de ses devoirs d’annonce de l’activité exercée conjointement à son engagement à plein temps auprès de l’autorité intimée, de son devoir de déclaration des revenus générés par cette activité et d’obtention de l’accord de la direction pour une activité à un taux de près de 80% au conservatoire C______ doit être considérée comme établie, après l’instruction menée par la chambre de céans, le recourant ayant échoué à établir s’être conformé aux obligations qui ressortent du RIPers et du RStCE-HES notamment.

Le grief sera donc écarté.

4.             La violation de ses devoirs étant établie, il convient d’examiner la sanction prononcée, le recourant estimant que celle-ci violerait le principe de proportionnalité et que l’autorité intimée aurait abusé de son pouvoir d’appréciation.

4.1 Les membres du personnel qui enfreignent leurs devoirs de service, soit intentionnellement, soit par négligence, peuvent faire l’objet d’une sanction disciplinaire au sens des art. 161 ss RIPers (art. 29 RIPers).

La directrice générale ou le directeur général peut prononcer à l’encontre des membres du personnel qui enfreignent leurs devoirs de service, soit intentionnellement, soit par négligence, les sanctions disciplinaires suivantes, dans l’ordre croissant de gravité : a) le blâme ; b) la suspension d’augmentation de traitement pendant une durée déterminée ; c) la réduction du traitement à l’intérieur de la classe de fonction (art. 161 al. 1 RIPers).

4.2 Les sanctions disciplinaires sont régies par les principes généraux du droit pénal, de sorte qu’elles ne sauraient être prononcées en l’absence de faute du fonctionnaire (Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 8e éd., 2020, n. 1515 ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, n. 2249). La notion de faute est admise de manière très large en droit disciplinaire et celle-ci peut être commise consciemment, par négligence ou par inconscience, la négligence n’ayant pas à être prévue dans une disposition expresse pour entraîner la punissabilité de l’auteur (ATA/137/2020 du 11 février 2020). La faute disciplinaire peut même être commise par méconnaissance d'une règle. Cette méconnaissance doit cependant être fautive (Gabriel BOINAY, Le droit disciplinaire dans la fonction publique et dans les professions libérales, particulièrement en Suisse romande, in Revue jurassienne de jurisprudence 1998, n. 55 p. 14).

4.3 Lorsque l'autorité choisit la sanction disciplinaire qu'elle considère appropriée, elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation, lequel est toutefois subordonné au respect du principe de la proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 8D_10/2020 du 7 avril 2021 consid. 4.2). Le pouvoir d'examen de la chambre de céans se limite à l'excès ou à l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 2 LPA)

La nature et la quotité de la sanction doivent être appropriées au genre et à la gravité de la violation des devoirs professionnels et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer les buts d'intérêt public recherchés. À cet égard, l'autorité doit tenir compte en premier lieu d'éléments objectifs, à savoir des conséquences que la faute a entraînées pour le bon fonctionnement de la profession en cause et de facteurs subjectifs, tels que la gravité de la faute, ainsi que les mobiles et les antécédents de l'intéressé (ATA/998/2019 du 11 juin 2019 consid. 6b ; ATA/118/2016 du 9 février 2016 consid. 3a et la jurisprudence citée).

Traditionnellement, le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst. se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public – (ATF 125 I 474 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c).

4.4 En l’espèce, les faits reprochés au recourant ont été qualifiés de graves par l’autorité intimée, qui a infligé la sanction la plus sévère du catalogue prévu par le RIPers, notamment parce que l’activité exercée parallèlement, sans annonce n’aurait pas pu être autorisée, dépassant largement le taux pour être acceptable comme activité accessoire.

Cette qualification de gravité de la violation des obligations est notamment fondée sur la propre directive de l’autorité intimée, qui reprend la pratique appliquée par l’État de Genève pour ses enseignants et ses fonctionnaires en général, laquelle limite à 120% le cumul autorisable d’activités (fiche du mémento des instructions de l’OPE no 01.07.09 « Activité accessoire rémunérée exercée par un membre du personnel »).

À cet égard, il faut relever, sans que cela soit déterminant, que cette pratique était connue du recourant dans la mesure où, lors de l’échange de courriels du 1er juin 2011 produit par le recourant lui-même, elle lui a été rappelée par le directeur de la HEM s’agissant de l’engagement prévu d’un employé, dans les termes suivants : « Avec un 100% au P______, Q______ ne peut être engagé que comme vacataire à un taux inférieur à 20% ».

4.5 Le recourant persiste à considérer que son activité à C______ équivalait à une journée hebdomadaire de travail, ce qui représente de fait un 20 %, l’exonérant de toute faute. Comme vu ci-dessus, cette argumentation tombe à faux, s’agissant d’une activité d’enseignement pour laquelle la présence devant les élèves ne représente qu’une partie du temps que celui-ci doit consacrer à son activité.

4.6 Il considère aussi qu’ayant toujours donné satisfaction dans son activité, rien ne permettait de retenir que son activité accessoire dépassait ce qui avait été autorisé par la direction, compte tenu de la liberté laissée au corps enseignant en dehors des heures d’enseignement et du fait qu’il était dans la situation difficile de travailler sur deux sites (B______ et Genève). Aucune faute grave ne pouvait être retenue à son égard.

Dans ce raisonnement, le recourant ne fait que remettre en cause les limites fixées par le RIPers et la procédure instaurée en matière d’activité accessoire par les règlements qui se sont successivement appliqués à son engagement, laquelle prévoit que l’autorité intimée doit approuver les activités supplémentaires qu’un enseignant envisage d’exercer et qu’une annonce est prévue tant pour les activités que pour les revenus qu’elles procurent. Ce faisant, il omet de prendre en compte le fait que cette réglementation a été adoptée pour des raisons de protection de la santé du personnel notamment, pour limiter les risques de conflits d’intérêts et l’utilisation de cours élaborés dans le cadre d’une activité rémunérée par la HES-SO au bénéfice d’une autre école concurrente.

Quoi qu’il en soit, les questions de savoir si les activités étaient concrètement incompatibles ou quel dommage aurait été subi par l’établissement du fait du non‑respect de ces obligations ne sont pas pertinentes en l’espèce, la violation de ses devoirs d’annonce étant établie, si bien que l’argumentation du recourant tombe à faux.

4.7 Compte tenu de ce qui précède, de la durée pendant laquelle le recourant a violé ses devoirs d’annonce et l’amplitude de l’activité parallèle supplémentaire non autorisée déployée et du fait que le recourant a ainsi profité de la confiance laissée par l’employeur pour l’organisation des activités pour lesquelles il est rémunéré à plein temps, il appert que l’autorité intimée n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation en prononçant la réduction du traitement dans la classe de fonction, ceci même en l’absence d’antécédents disciplinaires.

5.             Finalement, le recourant fait valoir l’égalité de traitement. Une collègue se trouverait dans une situation identique, s’agissant d’exercer des activités accessoires, mais n’aurait jamais été sanctionnée.

5.1 Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art. 8 Cst. lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 146 II 56 consid. 9.1 ; 145 I 73 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_449/2022 du 3 février 2023 consid. 2.2.1 ; 1C_695/2021 du 4 novembre 2022 consid. 3.1.2).

5.2 L’instruction a permis d’établir que la collègue en question était engagée à temps partiel à la HES-SO, ce qui n’est pas contesté par le recourant. En conséquence, les activités exercées en dehors de cette activité principale ne constituent pas des activités accessoires comme pour le recourant, mais des activités extérieures au sens de l’art. 68 RIPers. Les situations ne sont donc pas identiques, cela d’autant plus que l’art. 68 RIPers, contrairement à l’art. 67 al. 3 RIPers qui concerne l’activité accessoire, ne prévoit notamment pas l’obligation d’annonce des revenus obtenus par ces activités extérieures.

Ce grief sera donc écarté.

En tous points infondé, le recours doit être rejeté.

6.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA), étant rappelé que l'intimée – qui n'y a du reste pas conclu – est considérée comme apte à se passer des services d'un avocat (ATA/909/2022 du 13 septembre 2022 consid. 12).

7.             Compte tenu des conclusions du recours et vu l’échelle des traitements de l’intimée, la valeur litigieuse est supérieure à CHF 15'000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 septembre 2022 par A______ contre la décision de la Haute école specialisée de Suisse occidentale - Genève (HES-SO) du 7 juillet 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian BRUCHEZ, avocat du recourant, ainsi qu'à la Haute école specialisée de Suisse occidentale - Genève (HES-SO).

Siégeant : Valérie LAUBER, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Eleanor McGREGOR, Claudio MASCOTTO, Fabienne MICHON RIEBEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. BALZLI

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :