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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2431/2005

ATA/771/2005 du 15.11.2005 ( VG ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2431/2005-VG ATA/771/2005

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 15 novembre 2005

dans la cause

 

Monsieur X.__________
représenté par Me Pierre Ochsner, avocat

contre

CONSEIL ADMINISTRATIF DE LA VILLE DE GENèVE


 

1. Monsieur X.__________ a été engagé au poste d’agent de ville par décision du conseil administratif de la Ville de Genève (ci-après : le conseil administratif) le 7 septembre 1994.

Il a effectué les trois ans de sa période probatoire avec les éloges de sa hiérarchie. Selon les rapports de cette dernière, il était « dynamique, intelligent et très travailleur. Il avait en outre un excellent contact avec le public ».

2. A partir du 1er novembre 1997, M. X.__________ a été nommé pour une durée indéterminée au poste d’agent de ville par le conseil administratif. Par la suite, il a successivement acquis le grade d’appointé (en 1998) puis de caporal-chef (en 2002).

3. Le 14 juillet 2004, le conseil administratif a nommé M. X.__________ au poste de gestionnaire du domaine public au service des agents de ville et du domaine public dès le 1er septembre 2004.

4. Dès cette date, M. X.__________ a été affecté au service des terrasses. A cette occasion, il a rejoint le bureau dans lequel Madame Z._________, seule fonctionnaire affectée jusqu’alors à ce poste, travaillait déjà.

Cette dernière fumait plusieurs cigarettes par demi-journée dans le bureau commun.

5. Ressentant une gêne vis-à-vis de la fumée de cigarette, M. X.__________ a fait part, trois jours après le début de la cohabitation, de cette incommodité à sa collègue de travail, mais celle-ci a alors réagi très vivement.

Aucun dialogue n’étant possible, Mme Z._________ a alors sollicité un entretien avec le chef de service.

6. Il ressort des pièces du dossier qu’à l’occasion de cet entretien qui a eu lieu le 2 novembre 2004, le chef de service a répondu à M. X.__________ qu’il devait accepter la situation telle qu’elle était et supporter les cigarettes que fumait sa collègue. Il n’était du reste pas prouvé, toujours selon le chef de service, que la fumée passive était dangereuse pour la santé.

7. M. X.__________ s’est plaint de cette situation dans un courrier adressé à la directrice du département des sports et de la sécurité (ci-après : la directrice) le 8 novembre 2004.

Très satisfait de son nouveau poste de travail, il souhaitait trouver une issue favorable à ce problème et sollicitait de la part de la directrice le réexamen de la situation.

8. Le 10 novembre 2004, M. X.__________ a rencontré son chef de service. Ce dernier lui a alors proposé, pour échapper à la fumée de sa collègue, de changer de bureau et d’activité, soit de passer de la gestion des terrasses à la gestion des procédés de réclame.

9. Faisant suite à cette conversation, M. X.__________ a interpellé son chef de service, le 15 novembre 2004, quant aux raisons qui justifiaient son changement d’affectation.

Dans l’antépénultième paragraphe de son courrier, il le priait, dans un délai de réponse d’une semaine, de bien vouloir lui expliquer, par écrit, les motifs de ce changement d’activité. Il ne tenait pas à changer de bureau tant que la situation ne s’était pas clarifiée.

10. Le chef de service s’est déterminé par une note interne datée du 16 novembre 2004, en ces termes :

« J’ose espérer que vos propos ont dépassé votre pensée, pour ne pas dire plus, si je me réfère à l’antépénultième paragraphe de votre courrier.

Au cas où cette hypothèse n’était pas infirmée, je reconnais immédiatement m’être trompé en vous engageant en qualité de gestionnaire du domaine public.

Pour l’heure, j’attends qu’à réception de la présente, vous :

- libériez votre actuel bureau ;

- preniez contact avec [votre nouveau supérieur hiérarchique], en vue d’intégrer une place de travail dans son groupe ;

- vous conformiez aux instructions de ce dernier. »

11. Le même jour, le chef de service a contacté M. X.__________ par téléphone afin qu’il se rende dans son bureau, ayant précisé que la directrice du département serait également présente. M. X.__________ lui a alors répondu qu’il n’accepterait de se rendre dans son bureau qu’accompagné par une tierce personne de son choix. Finalement, l’entretien n’a pas eu lieu.

12. Quelques minutes plus tard, M. X.__________ a reçu la visite spontanée, dans son bureau, de la directrice du département, accompagnée de son nouveau supérieur hiérarchique.

M. X.__________ ne souhaitant pas s’entretenir avec la directrice du département et son nouveau supérieur hiérarchique, il est sorti de son bureau et, en ouvrant la porte avec vigueur, et il a déplacé la chaise à roulettes sur laquelle la directrice était assise.

13. Ayant reçu copie des courriers de M. X.__________, le coordinateur santé et sécurité du personnel de la Ville de Genève (ci-après : le coordinateur) a interpellé le chef de service dans un courriel daté du 16 novembre 2004. Il lui incombait, en sa qualité de coordinateur, « de mettre tout en œuvre afin que les dispositions prises par le conseil administratif en matière de fumée passive soi[ent] respectée[s] ». Il sollicitait un entretien avec lui pour « clarifier la situation ».

Le chef de service lui a répondu par le même moyen le jour même en ces termes :

« Tout a été clarifié ; j’ai demandé à M. X.__________ d’occuper d’une place dans un bureau où se trouvent trois autres personnes non fumeur ».

14. Par courriel du 17 novembre 2004, le coordinateur a rendu le chef de service attentif aux dispositions de la directive relative à la protection des non-fumeurs approuvée par le conseil administratif le 29 mai 2002 (ci-après : la directive). En outre, il l’a invité « à la plus grande prudence dans le cadre de la gestion de cette situation, car d’un point de vue juridique, il [lui apparaissait] comme étant difficilement soutenable de procéder à une nouvelle affectation parce qu’une personne ne souhait[ait] pas subir de la fumée passive. » L’article 2 alinéa 1 de la directive était clair à ce propos.

En conclusion, il réitérait sa demande d’entretien avec le chef de service afin de discuter de ce problème.

15. Le 17 novembre 2004, M. X.__________ a accusé réception de la note interne de son chef service.

Il s’étonnait qu’aucune réponse n’ait encore été donnée à sa demande initiale, à savoir que la directive soit appliquée. Les motifs de la mutation dont il faisait l’objet lui étaient toujours inconnus. Enfin, il refusait de s’installer dans un autre bureau tant que la situation ne serait pas clarifiée.

16. a. Le 18 novembre 2004, le conseiller administratif accompagné de la directrice du département ont notifié en mains propres à M. X.__________ une décision de mise à pied de deux jours avec suppression de traitement au sens de l’article 34 lettre b du statut du personnel de l’administration municipale (ci-après : le statut - LC 21 151).

b. Aux termes de cette décision, il était reproché à M. X.__________ :

- d’avoir refusé de se rendre dans le bureau de son chef de service, lequel désirait lui expliquer les raisons de son déplacement dans un autre bureau ;

- d’avoir refusé d’entendre la directrice du département venue lui expliquer la mesure de réorganisation prise par son chef de service ;

- d’avoir bousculé avec violence la directrice du département ;

- d’avoir refusé de s’installer dans son nouveau bureau, et d’avoir adopté une attitude générale de défi à l’égard de ses supérieurs hiérarchiques.

c. Si ce comportement devait perdurer, M. X.__________ était prévenu qu’une mesure de licenciement serait alors prise par le conseil administratif, déjà saisi du cas.

Dite décision comportait l'indication de la voie et délai de recours au conseil administratif.

17. Le 19 novembre 2004, M. X.__________ a écrit au conseiller administratif afin de lui faire part de sa version des faits.

Il avait toujours été ouvert à un déplacement physique de sa place de travail dans le service. Il ne comprenait toutefois pas pourquoi ce changement de lieu était également lié à une modification de son activité professionnelle.

18. Le 22 novembre 2004, le conseiller administratif, sur papier à en-tête de la directrice, lui a répondu, sans apporter d’éléments nouveaux à la cause.

19. Par recours du 20 décembre 2004, M. X.__________ a contesté la décision du conseiller administratif du 18 novembre 2004 auprès du conseil administratif.

Il contestait les griefs retenus par la décision attaquée. Il ne s’était pas rendu coupable d’agissements inadmissibles.

20. Par décision du 15 juin 2005, le conseil administratif a converti la mise à pied de deux jours en blâme.

De par son comportement, M. X.__________ avait violé l’article 13 lettre a du statut. Toutefois, le conseil administratif remarquait que M. X.__________ avait sollicité de sa hiérarchie l’application de la directive, et qu’en lieu et place d’un soutien, il lui avait été indiqué qu’il serait déplacé de bureau. Il s’agissait de tenir compte de cet élément dans la détermination de la sanction, de sorte qu’il se justifiait de la transformer en blâme.

Cette décision pouvait faire l’objet d’un recours au Tribunal administratif dans les trente jours à compter de sa notification.

21. Par acte posté le 8 juillet 2005, M. X.__________ a saisi le Tribunal administratif d’un recours contre la décision précitée. Il conclut, sous suite de frais et dépens, à son annulation.

22. Par courrier du 15 septembre 2005, le Tribunal administratif a invité les parties à produire leur liste de témoins, ce qu’elles ont fait dans le délai imparti.

23. Le même jour, il a invité le conseil administratif à produire les échanges de correspondances et notes internes avec M. X.__________, ainsi que la directive.

Le conseil administratif s’est exécuté le 22 septembre 2005.

24. Une audience de comparution personnelle des parties et d’enquêtes s’est tenue le 3 novembre 2005.

a. M. X.__________ a précisé avoir lui-même souhaité changer d’activité en 2004, car après dix ans d’activité dans la police municipale, il ressentait le besoin de donner une nouvelle orientation à sa carrière.

b. Le conseil administratif a précisé que la directive figurait sur son site intranet, et qu’elle avait été distribuée au printemps 2002 à tous les collaborateurs.

c. Le Tribunal de céans a entendu la directrice du département. A réception du courrier de M. X.__________, elle avait demandé au chef de service de prendre les mesures adéquates. Pour elle, la mesure adéquate consistait à donner à M. X.__________ la possibilité de travailler dans un bureau sans fumée. Cette mesure s’inscrivait dans le cadre de l’article 2 alinéa 1 de la directive. Le déplacement de M. X.__________ n’impliquait pas un changement de fonction, mais un changement de travail uniquement. Elle avait procédé à une pesée des intérêts en présence, en prenant en compte le fait que Mme Z._________, excellente collaboratrice, travaillait à la Ville de Genève depuis plus d’une vingtaine d’années. Le déplacement de M. X.__________ lui était ainsi apparu la meilleure solution.

d. Mme Z._________ a déclaré qu’elle savait qu’il existait une directive concernant la fumée dans les locaux de la Ville de Genève, mais ne l’avait jamais vue. Elle travaillait à la ville depuis huit ans (sic). Les locaux où elle-même et M. X.__________ travaillaient disposaient d’une cafétéria avec un coin fumeur. Ne fréquentant pas la cafétéria, elle n’utilisait donc pas l’endroit réservé aux fumeurs pour ce faire. Elle n’avait jamais reçu l’interdiction de sa hiérarchie de fumer dans son bureau.

e. Le supérieur hiérarchique de M. X.__________ encore à ce jour a confirmé que les prestations professionnelles de ce dernier lui donnaient entièrement satisfaction, de même que son caractère et son attitude.

 

S’agissants des faits du 16 novembre 2004, il a confirmé que M. X.__________ avait eu un geste malheureux en bousculant la chaise sur laquelle la directrice du département était assise. Il s’était expliqué ce comportement par le fait que M. X.__________ semblait très affecté par ce qui lui arrivait. C’était la seule fois qu’il avait constaté chez ce dernier ce type de comportement. Depuis qu’il travaillait avec lui, il n’avait pas constaté de mouvement d’humeur de sa part.

A l’issue de l’audience, M. X.__________ a renoncé à l’audition du chef de service et du conseiller administratif, tandis que le conseil administratif s’en est remis à l’appréciation du Tribunal sur cette question.

25. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

1. a. A teneur de l’article 56B alinéa 4 lettre a de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (LOJ – E 2 05), le recours au Tribunal administratif est ouvert contre des décisions concernant les rapports de service des fonctionnaires et autres membres du personnel des communes, dans la mesure où une disposition légale, réglementaire ou statutaire spéciale le prévoit.

b. Selon l’article 86A de la loi sur l’administration des communes (LAC – B 6 05), le recours au Tribunal administratif est ouvert contre les décisions d’une autorité communale en matière de mesures disciplinaires, et cela sous réserve d’exceptions non réalisées en l’espèce.

En l’espèce, le recourant conteste le blâme qui lui a été infligé par l’autorité intimée dans sa décision du 15 juin 2005. Cette décision constitue une mesure disciplinaire au sens de l’article 86A LAC, de sorte que la voie du recours au Tribunal administratif est ouverte.

c. Au surplus, interjeté dans le délai légal de 30 jours (art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 – LPA – E 5 10), le recours est recevable.

2. En sa qualité de fonctionnaire de la Ville de Genève, le recourant est soumis au statut.

3. Le recourant reproche à l’autorité intimée d’avoir changé son bureau et son affectation, parce qu’il sollicitait l’application de la directive anti-fumée. Dans ce contexte, son attitude ne serait pas constitutive d’une violation de l’article 13 lettre a du statut.

4. a. Le fonctionnaire qui enfreint ses devoirs de service, soit intentionnellement, soit par négligence, est passible d’une sanction disciplinaire (art. 33 du statut).

b. Selon l’article 34 du statut, les sanctions disciplinaires sont, prononcées par le directeur ou le chef de service, l’avertissement (let. a), prononcées par le conseiller administratif responsable, le blâme et la mise à pied jusqu’à deux jours avec suppression de traitement (let. b), et prononcées par le conseil administratif, les mesures plus incisives non pertinentes in casu (let. c).

Pour déterminer la sanction appropriée, l'autorité disciplinaire dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Cependant, la sanction doit être proportionnelle à la gravité de la violation du devoir de fonction, à l'importance du devoir ainsi violé et à la faute de l'agent public (ATA/397/2005 du 31 mai 2005).

c. Aux termes de l’article 13 lettre a du statut, les fonctionnaires doivent, par leur attitude, entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés, et permettre de faciliter la collaboration entre ces personnes.

5. A teneur de l’article 36 du statut, le blâme et la mise à pied jusqu’à deux jours avec suppression de traitement sont prononcés et notifiés par lettre motivée après que le fonctionnaire intéressé a été entendu par conseiller administratif responsable, sur les faits qui lui sont reprochés.

En l’espèce, le 18 novembre 2004, le conseiller administratif responsable s’est rendu dans le bureau du recourant, accompagné de la directrice de son département, afin de lui notifier directement sa décision de mise à pied de deux jours avec suppression de traitement. Or, il ne ressort ni du dossier, ni des écritures de l’autorité intimée, ni des enquêtes, que le recourant ait été entendu par le conseiller administratif responsable avant de se voir notifier cette décision. Dans ces circonstances, c’est en violation du droit d’être entendu du recourant, tel qu’il est consacré par l’article 36 du statut, que la décision initiale a été prise. Ce vice formel n’entraîne toutefois pas l’admission du recours, car il a été réparé par la procédure de recours devant le conseil administratif, qui jouissait d’un plein pouvoir d’examen, en fait comme en droit (ATA/703/2002 du 19 novembre 2002).

6. Afin d’apprécier la proportionnalité de la mesure entreprise, il s’agit d’examiner, dans un premier temps, si le recourant était en droit de requérir l’application de la directive au moment des faits, soit à l’automne 2004.

a. A teneur de l’article 2 alinéa 1 de la directive relative à la protection des non-fumeurs approuvée par le conseil administratif le 29 mai 2002, le conseil administratif, les directeurs et les chefs de service sont tenus de prendre, ou de faire prendre, toutes les mesures nécessaires pour protéger le personnel non-fumeur de la fumée passive. Ces derniers doivent veiller à une application uniforme et efficace de ces mesures au sein de l’administration municipale. Il met à disposition les moyens nécessaires (al. 2).

b. Le personnel est tenu de suivre les directives de l’employeur en matière de mesures de protection des non-fumeurs et d’observer les directives contenues dans ce règlement (art. 3 al. 1).

c. Aux termes de l’article 5 alinéa 1 de la directive, il est interdit de fumer dans tous les locaux de l’administration municipale, dont notamment les locaux de travail, les bureaux, les couloirs, etc. Il est par contre autorisé de fumer dans les espaces spécialement aménagés à cet effet, lorsque le service en dispose. Ces espaces doivent être clairement signalés à l’aide de panneaux indiquant « espace fumeur ».

d. Selon son article 9 alinéa 1, cette directive est entrée en vigueur le 1er juillet 2002.

En l’espèce, les faits litigieux se sont déroulés à l’automne 2004, de sorte que la directive était en vigueur à cette date. L’autorité intimée a confirmé qu’elle avait été, au demeurant, distribuée au printemps 2002 à l’ensemble des collaborateurs de la ville, et qu’elle était disponible sur le site intranet de l’administration municipale. Le recourant, incommodé par la fumée provoquée par les cigarettes que consommait sa collègue installée dans le même bureau, a fait part de ce problème à sa hiérarchie à plusieurs reprises auprès de son chef de service – lequel lui a notamment répondu que la fumée passive n’était pas dangereuse pour la santé –, puis, par pli du 8 novembre 2004, à la directrice du département concerné. Or, alors que cette situation en cause s’inscrivait clairement en violation de l’article 5 alinéa 1 de la directive, le chef de service et la directrice du département ont refusé d’intervenir auprès de la collègue du recourant afin de lui demander de se rendre, pour fumer, dans l’espace réservé à cet effet dans la cafétéria (art. 5 al. 1 in fine). En outre, le chef de service du recourant l’a informé le 10 novembre 2004 qu’il était muté au service des procédés de réclame dans un bureau « non fumeur ». Face aux interrogations du recourant quant à ce changement d’affectation, le chef de service a refusé de s’expliquer, lui ordonnant de « libérer son bureau » séance tenante. Enfin, alors que le coordinateur santé l’avait expressément interpellé en le rendant attentif aux dispositions de la directive et au fait qu’il était juridiquement insoutenable de procéder de la sorte, contre le gré du recourant de surcroît, le chef de service a complètement ignoré son intervention.

Le Tribunal administratif estime que ces éléments s’inscrivent en violation patente de l’article 2 de la directive et qu’ils constituent une atteinte particulièrement grave et choquante aux droits du recourant découlant de ses rapports de service avec la Ville de Genève (cf. art. 19 de l’ordonnance 3 relative à la loi sur le travail du 18 août 1993 – OLT3 – RS 822.113, applicable en vertu des art. 3a et 6 de la loi fédérale sur le travail dans l’industrie, l’artisanat et le commerce du 13 mars 1964 – LT – RS 822.11 ; art. 13 let. a du statut).

7. Mis en rapport avec ce qui précède, les agissements litigieux du recourant doivent être relativisés. Ainsi ne saurait-on lui faire grief de ne pas avoir accepté de s’installer immédiatement dans son nouveau bureau, tant cette mesure était arbitraire. De la même manière, le comportement du recourant consistant à refuser de s’entretenir avec son chef de service – qui niait le caractère nocif de la fumée passive – et la directrice du département, lesquels refusaient de remettre en cause le principe même de son changement d’affectation et estimaient que cette mesure était conforme à l’article 2 de la directive, ne saurait lui être mis à charge. Enfin, s’agissant du geste malheureux que le recourant a eu en sortant de son bureau le 16 novembre 2004, le Tribunal de céans retient que cette attitude n’est certes pas exempte de tout reproche, mais remise dans son contexte elle n’est à l’évidence pas de nature à justifier le prononcé d’une sanction disciplinaire telle qu’un blâme, tant elle ne se serait jamais produite si la hiérarchie du recourant avait pris des mesures idoines afin de respecter les dispositions de la directive. Enfin, il sied également de relever que le dossier du recourant ne fait état d’aucun autre élément négatif, bien au contraire. Son supérieur hiérarchique actuel, qui a assisté à l’événement en cause, a d’ailleurs confirmé que c’était la seule fois qu’il avait vu le recourant avoir une telle attitude, et que ce dernier lui donnait entièrement satisfaction, tant dans son attitude que dans ses prestations professionnelles.

8. Ainsi, l’autorité intimée ne pouvait, sans violer le principe de proportionnalité et sans arbitraire, prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre du recourant. Il s’ensuit que le recours sera admis, et la décision attaquée annulée.

9. Le recourant obtenant gain de cause, une indemnité de procédure de CHF 2'000.- lui sera allouée, à charge de l'Etat de Genève.

Enfin, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du conseil administratif de la Ville de Genève, qui succombe (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 juillet 2005 par Monsieur X.__________ contre la décision du conseil administratif de la Ville de Genève du 15 juin 2005 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision attaquée ;

met à la charge du conseil administratif de la Ville de Genève un émolument de CHF 1'500.- ;

alloue une indemnité de CHF 2'000.- à Monsieur X.__________, à charge de l'Etat de Genève ;

communique le présent arrêt à Me Pierre Ochsner, avocat du recourant, ainsi qu'au conseil administratif de la Ville de Genève.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Paychère, Mme Hurni, M. Thélin et Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste  adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :