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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/790/2003

ATA/751/2004 du 28.09.2004 ( TPE ) , REJETE

Descripteurs : CONSTRUCTION ET INSTALLATION; RENOVATION; TRAVAUX D'ENTRETIEN; TRAVAUX SOUMIS A AUTORISATION
Normes : LDTR.3 al.1; LDTR.3 al.9; LDTR.3 al.25; RLGL.1 al.5
Résumé : Les travaux litigieux doivent être considérés comme des travaux de rénovation soumis à la LDTR, en raison notamment de leur coût élevé et du fait qu'aucun travaux n'ont été entrepris lors des années précédentes dans l'appartement considéré.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/790/2003-TPE ATA/751/2004

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 28 septembre 2004

dans la cause

 

Z. C. D'A. SUR L.V.
représentée par Me Jean-François Marti, avocat

contre

 

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS

et

 

DEPARTEMENT DE L'AMENAGEMENT, DE L'EQUIPEMENT ET DU LOGEMENT

et

M. O. P.-P.

et

M. M. T.

appelées en cause



1. Le 25 septembre 2001, la Z. C. d’A.s SUR L.V. à Z., (ci-après : Z.) représentée par PSP M. SA. à Carouge, a signé un contrat de bail à loyer avec M. M. T. et O. P.-P. portant sur un appartement de six pièces et demie situé au 6ème étage de l’immeuble X, rue du Mont-Blanc à Genève. La surface du logement était d’environ 145 m2 et le loyer annuel net se montait à CHF 36'000.-, soit CHF 3'000.- par mois. A ce montant était ajouté un acompte pour les frais de chauffage de CHF 140.- et un forfait pour la télévision de CHF 20,65 soit un montant total de CHF 3'160,65 par mois. Le bail prenait effet le 1er novembre 2001 et était reconductible tacitement de six mois en six mois.

Faisaient partie intégrante du contrat, les clauses particulières, les règles et usages locatifs du canton de Genève ainsi qu’un avis de fixation du loyer lors de la conclusion du nouveau bail, indiquant le dernier loyer annuel de ce logement depuis le 1er mai 1993, soit CHF 16'800.-. Le motif de la hausse était celui de l’adaptation aux loyers usuels du quartier. Les clauses particulières du bail contresignées par les parties le 25 septembre 2001 prévoyaient qu’en dérogation aux conditions générales et aux règles et usages appliqués dans le canton de Genève, le bail était conclu pour une durée initiale de 11 mois. Au point 5.5, il était spécifié qu’à « la prise de possession des locaux, il ne sera exécuté par le bailleur, d’autres travaux que ceux expressément convenus à la signature du bail ».

Quant au chiffre 5.6 il était ainsi libellé : « à cet effet, les travaux suivants seront exécutés par le bailleur à l’entrée du locataire :

- réfection complète de la peinture des murs, plafonds et boiseries ;

- rénovation et mise en conformité de l’installation électrique ;

- remplacement de la baignoire et du lavabo dans la salle de bains ;

- remplacement de l’évier de la cuisine ;

- remplacement des faïences dans la salle de bains et la cuisine ;

- remplacement du carrelage dans la salle de bains et la cuisine ;

- ponçage et vitrification de tous les parquets ».

Enfin, le chiffre 5.7 prévoyait que « conformément aux règles et usages locatifs, tous travaux auxquels le locataire désirerait ultérieurement procéder devront faire l’objet d’une autorisation écrite de la part du bailleur. Sauf convention contraire, ils ne donneront lieu à aucune indemnité de la part du bailleur en cours ou en fin de bail ».

2. Avant l’entrée des locataires dans ce logement, la Z. avait fait exécuter dans cet appartement des travaux et les locataires avaient également procédé à plusieurs travaux consentis par la bailleresse en les prenant à leur charge.

3. Le 12 mars 2002, les locataires, représentés par l’Asloca-Rive, ont transmis au département de l’aménagement, de l’équipement et du logement (ci-après : le département) une copie du bail à loyer et de l’avis de fixation de loyer initial. Le département était prié d’indiquer si les travaux effectués par la bailleresse avaient été autorisés et quel était le loyer fixé par le département.

4. Le 15 mars 2002, le département a interpellé PSP M. SA. en priant cette société de bien vouloir lui transmettre d’ici au 5 avril 2002 la liste détaillée de la nature et du coût des travaux effectués dans cet appartement afin de déterminer si ceux-ci étaient ou non assujettis à la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation du 25 janvier 1996 (LDTR – L 5 20).

5. Le 26 mars 2002, PSP M. SA. a précisé au département que les travaux de rénovation s’étaient élevés à CHF 79'359.-. Il s’agissait :

- du remplacement des papiers peints, peinture complète de tout l’appartement y compris les boiseries CHF 36'880.- ;

- ponçage et vitrification des parquets : CHF 3'920.- ;

- mise en conformité des installations électriques : CHF 14'000.- ;

- remplacement du carrelage et des faïences dans la salle de bains et la cuisine : CHF 13'417.- ;

- remplacement des appareils sanitaires dans la salle de bains, les WC, y compris accessoires et remplacement de l’évier de la cuisine : CHF 11'142.-.

Il était précisé que PSP voulait effectuer des travaux qui ne seraient pas soumis à la LDTR raison pour laquelle elle n’avait pas procédé aux travaux d’aménagement et d’équipement de la cuisine, laissant aux locataires le choix d’effectuer ces travaux à leurs frais comme l’attestaient les deux correspondances produites, à savoir un courrier adressé aux locataires le 9 octobre 2001 et une demande de Mme T. du 15 octobre 2001. Il apparaissait de ces documents que les locataires étaient autorisées à poser un WC supplémentaire et une douche et à choisir d’autres faïences et carrelages, toute plus-value par rapport au devis initial étant à charge des locataires. Celles-ci étaient de même autorisées à poser de nouveaux agencements et équipements dans la cuisine et à réouvrir le mur situé entre le salon et le cagibi afin d’agrandir le salon.

Le 15 octobre 2001, Mme T. avait remercié PSP M. SA. de lui accorder la possibilité d’effectuer les travaux nécessaires qu’elles souhaitaient faire à leurs frais dans l’appartement. Elles avaient fait livrer la baignoire et la douche à leurs frais.

6. Par courrier recommandé du 9 avril 2002, le département a signifié à PSP M. SA. que les travaux effectués étaient par leur nature et leur montant des travaux de rénovation au sens de l’article 3 alinéa 1 lettre d LDTR. De plus, l’augmentation de loyer étaient de 114 %.

Le département a ordonné le dépôt dans les trente jours d’une requête en autorisation de construire.

7. Un avocat s’est constitué pour la Z. et par courrier du 3 mai 2002, celui-ci a contesté que les travaux effectués par la bailleresse dans l’appartement en question soient soumis à la LDTR. L’appartement situé dans un immeuble très ancien avait nécessité une réfection complète. Les travaux effectués relevaient de par leur nature de l’entretien courant.

Quant à la hausse de loyer, elle était justifiée par l’adaptation de celui-ci aux loyers usuels du quartier et la requête du département n’était pas admissible compte tenu de la force dérogatoire du droit fédéral.

A défaut, une décision portant indication des voie et délai de recours était requise.

8. Par décision du 15 mai 2002, le département a maintenu que les travaux s’élevant à CHF 79'359.- correspondaient à CHF 12'209.- par pièce ce qui était considérable. Le loyer était passé de CHF 2'584.- à CHF 5'538.- la pièce par an et il en était résulté un changement qualitatif de l’appartement.

Partant, ces travaux étaient soumis à la LDTR et un délai de 30 jours dès réception de ce courrier était imparti à la propriétaire pour déposer une requête en autorisation de construire.

9. En temps utile, la Z. a recouru contre cette décision auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions (ci-après : CCRMC).

10. Par décision du 4 avril 2003, ledit recours a été rejeté. La CCRMC a estimé que les travaux effectués par la bailleresse n’étaient pas des travaux d’entretien de sorte qu’ils étaient assujettis à la LDTR et soumis à autorisation selon l’article 9 de cette loi. La Z. devait déposer une autorisation de construire.

11. Par acte déposé au greffe du Tribunal administratif le 9 mai 2003, la Z. a recouru contre cette décision en concluant à son annulation et à ce qu’il soit constaté que lesdits travaux n’étaient pas assujettis à la LDTR.

12. Le tribunal a interpellé les locataires qui ne se sont pas manifestées.

13. Le 23 juin 2003 le département a conclu au rejet du recours pour les raisons déjà exposées.

14. Le 24 novembre 2003, le juge délégué a transmis au département la copie d’un jugement rendu le 2 mai 2003 par le Tribunal des baux et loyers, jugement qui n’a pas été frappé d’appel et au terme duquel ledit tribunal avait fixé à CHF 28'320.-, charges non comprises, le loyer annuel de l’appartement en question. La Z. avait été condamnée à rembourser aux locataires le trop-perçu de loyer.

15. Le juge délégué a fixé un transport sur place qui a eu lieu en présence des parties le 15 décembre 2003. Seule l’une des deux locataires, Mme T. était présente. De plus, M. F. M. a assisté à la fin du transport sur place.

Le juge a pu constater que dans la cuisine, la peinture des murs, du plafond et des boiseries avait été refaite. Ces dernières avaient été repeintes imparfaitement. L’évier avait été changé. Les meubles de cuisine n’étaient pas encastrés et Mme T. avait installé son propre frigo, sa propre cuisinière ainsi qu’un lave-vaisselle. Le carrelage et les faïences avaient été changés et elle avait payé un supplément pour ces revêtements qu’elle désirait en grès et non pas en carreaux comme cela avait été prévu initialement.

Dans les chambres, la peinture des boiseries murales avait été refaite et la paille d’avoine changée. Les parquets avaient été vitrifié. De manière générale, la peinture des boiseries s’écaillait.

Dans l’une des chambres se trouvant sur la cour intérieure, une partie du marbre situé au-dessus du foyer de la cheminée se décollait et le clapet intérieur de la cheminée ne fonctionnait pas.

Dans les WC visiteurs, le petit lavabo à gauche de l’entrée avait été changé car il coulait. Les carreaux n’avaient pas été modifiés. La peinture des murs et du plafond avait été refaite de même que celle de la fenêtre donnant sur la cour intérieure. La cuvette des WC avait été changée mais le réservoir était mal fixé.

Dans la salle de bains les locataires avaient installé, avec l’accord de la régie, un nouveau WC. Ils avaient remplacé la baignoire sur pieds par une baignoire encastrée à laquelle ils avaient adjoint une cabine de douche. Les revêtements du mur étaient carrelés jusqu’au plafond et le revêtement de la baignoire était en grès comme ceux de la cuisine. Ces revêtements de même que l’installation du WC supplémentaire, de la douche et d’une baignoire plus grande que celle proposée par la régie avaient été pris en charge par les locataires.

Dans le salon, la tapisserie avait été pour partie arrachée dans l’angle de la pièce. Le mur sonnait creux. La peinture avait été apposée sur l’ancienne tapisserie à relief. Les boiseries de la porte de séparation entre le salon et la pièce adjacente avaient été repeintes de sorte que la serrure était obstruée. Le pan de mur situé derrière la porte d’entrée avait été repeint également et la tapisserie changée. Le plafond avait été refait. Au centre se trouvait une rosace. Des gondolements étaient visibles. Sur la paroi côté rue du Mt-Blanc la tapisserie n’avait pas été changée entre le haut de la porte-fenêtre et le plafond.

Mme T. a relevé que ces travaux étaient terminés lorsqu’elle avait pris possession de l’appartement.

Dans la pièce servant de bureau et donnant sur la rue du Mt-Blanc, les plafonds et les boiseries avaient été repeints et le parquet vitrifié. Une double porte donnant accès à une alcôve était condamnée de sorte que les portes étaient fermées et tapissées. Les locataires les ayant rouvertes, le haut des portes n’était pas refait. Selon M. M., architecte de profession, la mise en conformité de l’électricité avait été rendue nécessaire par le fait qu’il n’y avait pas de prise de terre dans tout l’appartement.

La courette intérieure avait été obstruée au moment de la création de la salle de bains de l’étage supérieur de sorte qu’il n’y avait pas d’aération dans ces locaux et les odeurs des étages inférieurs montaient jusque dans l’appartement.

Dans la cuisine il n’y avait pas de ventilation. Une fenêtre donnait sur la cour intérieure de l’immeuble mais celle-ci était couverte d’une verrière. Au-dessus de la cuisinière se trouvait bien une bouche d’aération mais elle n’était pas raccordée.

Les factures produites correspondaient aux travaux payés par la bailleresse.

Un délai a été accordé à Mme T. pour qu’elle fournisse les factures concernant les travaux et plus-values qu’elle avait payées elle-même.

16. Le 14 janvier 2004, Mme T. a fait parvenir au juge délégué les « documents relatifs aux travaux de plus-values » payés par ses soins représentant un total de CHF 5'073,40 ainsi qu’un plan coté de l’appartement.

17. Ces pièces ont été transmises aux parties et un délai leur a été imparti pour se déterminer. Le 12 février 2004, la Z. A. a indiqué n’avoir pas d’observations à formuler et persister dans les termes de son recours.

Le 25 février 2004, le département a constaté que les coûts pris en charge par les locataires concernaient des plus-values qui n’avaient pas à être déduites du montant des travaux entrepris par la bailleresse. Il a persisté dans sa décision et sa détermination.

18. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 litt. a de la loi SUR la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). Les locataires ont été appelées en cause en application de l’article 71 LPA car leur situation juridique est susceptible d’être modifiée par la décision dont est recours.

2. a. Selon l’article 3 alinéa 1 lettre d et alinéa 2 LDTR, sont qualifiés de transformation les travaux qui ont pour objet la rénovation, c’est-à-dire la remise en état, même partielle, de tout ou partie d’une maison d’habitation, en améliorant le confort existant sans modifier la distribution des logements, sous réserve qu’il ne s’agisse pas de travaux d’entretien. Ces derniers, non assujettis à la LDTR, sont les travaux courants d’entretien faisant partie des frais d’exploitation ordinaires d’une maison d’habitation. Les travaux raisonnables d’entretien régulier ne sont pas considérés comme travaux de transformation, pour autant qu’ils n’engendrent pas une amélioration du confort existant.

b. Il ressort des travaux législatifs ayant précédé la modification de cette disposition légale, entrée en vigueur le 16 octobre 1999, que le Grand Conseil désirait, pour tracer une limite précise entre travaux soumis et non soumis à la loi, que soient pris en compte le coût de ces derniers et leur incidence sur les loyers, comme prévu par la jurisprudence (Mémorial du Grand Conseil 1999 9/11 1076). La minorité du Grand Conseil avait proposé une autre teneur pour l’article 3 alinéa 2 LDTR, précisant que les travaux d’entretien qui ne devaient intervenir qu’à une échéance lointaine, tels notamment la remise à neuf d’un appartement au changement de locataire, n’étaient pas assujettis à la LDTR (Mémorial 1999 9/11 page 1166). Lors du deuxième débat concernant ce projet de modification de la LDTR, de très nombreux amendements ont été soumis au Grand Conseil par la minorité, notamment celui de préciser, à l’article 3, alinéa 1 lettre d LDTR, que devaient être considérés comme travaux de rénovation ceux dont le coût total engendrait une augmentation de loyer de plus de 20 % (Mémorial 1999 9/1 1211). Cet amendement a été refusé, tout comme celui visant à préciser que la remise à neuf d’un appartement au changement de locataire n’était pas assujettis à la loi (Mémorial 1999 10/11 page 1415).

c. Cela étant, les notions de transformation et d’entretien n’ont pas reçu de nouvelles définitions, de sorte que la jurisprudence rendue à cet égard sous l’ancienne LDTR conserve toute sa pertinence (ATA/688/2002 du 12 novembre 2002 ; ATA/211/1997 et ATA/212/1997 du 8 avril 1997 ; ATA/522/2004 du 8 juin 2004).

3. De jurisprudence constante, il est admis, s’agissant de la distinction entre travaux d'entretien et de rénovation (ou transformation) consacrée à l’article 3 LDTR, de tenir un raisonnement en deux temps, à savoir :

- D’abord en examinant si, de par leur nature, les travaux en cause relèvent de l’entretien ou, au contraire, consistent en des travaux de rénovation. En prolongement de cette distinction, la jurisprudence a admis que des travaux d’entretien sont susceptibles d’aboutir à une rénovation ou à une transformation soumis à la LDTR lorsque, n’ayant pas été exécutés périodiquement ou par rotation tout au long de l’existence de l’immeuble, ou encore parce qu’ils n’ont pas été exécutés du tout pendant de nombreuses années, leur accumulation, même en tenant compte d’une exécution rationnelle commandant un regroupement, leur confère une incidence propre à engendrer un changement de standing de l’immeuble (A. MAUNOIR, La nouvelle LDTR au regard de la jurisprudence, in RDAF 1996 p. 314 et la jurisprudence citée) ;

- Ensuite, en s’attachant à l’ampleur et, partant, au coût desdits travaux et à leur répercussion sur le montant du loyer, dès lors qu’il pourrait en résulter un changement d'affectation qualitatif sur les logements, ces derniers ne répondant plus aux besoins prépondérants la population (ATA/365/2001 du 29 mai 2001, ATA/261/2001 du 24 avril 2001 et les références citées). 

Le Tribunal administratif a ainsi notamment considéré comme relevant de l'entretien l'installation de nouveaux sanitaires, l'agencement des cuisines, la mise en conformité de l'installation électrique, la pose de nouveaux revêtements des sols et des parois, ainsi que des travaux de peinture et de serrurerie (ATA/162/2003 du 25 mai 2003 ; ATA/365/2001 et ATA/261/2001 précités et les références citées). Il précisait toutefois dans un arrêt précédent, qu'il convenait de tenir compte également des circonstances dans lesquelles les travaux étaient accomplis et notamment de leur accumulation en raison d'un défaut d'entretien courant des bâtiments concernés (ATA/659/2004 du 24 août 2004 ; ATA/688/2002 du 12 novembre 2002 ; ATA/34/1998 du 27 janvier 1998).

4. a. Comme vu ci-dessus, l'examen de la nature des travaux ne saurait être toutefois le seul critère à prendre en considération pour déterminer si les interventions concernées échappent à la loi. Celles-ci peuvent atteindre une ampleur telle qu'elles sont susceptibles d'aboutir à un changement qualitatif de l'immeuble. De même, l'augmentation du loyer consécutive à des travaux peut avoir pour effet d'entraîner un changement d'affectation qualitatif des logements (ATA/802/2001 du 4 décembre 2001).

b. Dans la mesure où la loi vise principalement à maintenir un habitat correspondant, notamment sous l'angle économique, aux besoins prépondérants de la population, il faut éviter que des travaux non soumis à la loi ne conduisent à la longue à une érosion dudit habitat. En d'autres termes, la loi cherche à soumettre au contrôle de l'Etat certaines catégories de travaux davantage en fonction des risques qu'ils font peser sur le caractère abordable des logements qu'en fonction du type des travaux eux-mêmes (O. BINDSCHEDLER, F. PAYCHÈRE, "La jurisprudence récente du Tribunal administratif du Canton de Genève en matière d'entretien des immeubles" in RDAF 1998 p. 368). Qu'il s'agisse de soumettre au régime des transformations certains travaux d'entretien ou, malgré l'absence de régularité, de ne pas assimiler ces travaux à des transformations, le critère décisif est donc leur coût et ses conséquences sur le caractère abordable des logements (O. BINDSCHEDLER, F. PAYCHERE, op. cit., p. 369).

5. En l’espèce, il faut distinguer les travaux effectués dans cet appartement par la bailleresse d’une part et ceux effectués par les locataires d’autre part, les premiers s’élevant à près de CHF 80'000.- et les seconds se montant à CHF 5'000.- environ. Au vu des factures produites par les locataires, le département a retenu à juste titre dans son dernier courrier du 25 février 2004 que cette somme de quelque CHF 5'000.- n’avait pas à être déduite du montant des travaux entrepris par la propriétaire puisqu’il s’agissait avant tout de plus-values pour des matériaux que les locataires souhaitaient différents de ceux choisis par le bailleur, en particulier d’autres carreaux et une baignoire.

Le montant des travaux à considérer est bien celui de CHF 79'359.- concernant le remplacement des papiers peints, la peinture complète de l’appartement, le ponçage et la vitrification des parquets, la mise en conformité des installations électriques, le remplacement du carrelage et des faïences dans la salle de bains et la cuisine ainsi que le remplacement des appareils sanitaires.

Force est d’admettre que les travaux effectués par la propriétaire dénotent que cet appartement n’a pas fait l’objet, lors des années précédentes, d’un entretien régulier au point que les installations électriques par exemple n’ont pas été mises en conformité.

Tous ces travaux constituent manifestement des travaux d’entretien différés qui doivent être considérés comme des travaux de transformation en application de l’article 3 alinéa 2 LDTR a contrario. Le fait que les travaux de peinture notamment aient été réalisés de manière imparfaite n’est en l’espèce pas pertinent.

6. Dans une espèce récente, le tribunal de céans a certes admis que la rénovation d’un appartement de quatre pièces ayant coûté la somme de CHF  25'718.- correspondait à des travaux d’entretien courant d’un coût raisonnable, non soumis à la LDTR (ATA/525/2004 du 8 juin 2004). Or, l’espèce aujourd’hui litigieuse entraîne un coût beaucoup plus élevé pour cet appartement.

7. Il découle de ce qui précède que les travaux litigieux doivent être considérés comme des travaux de rénovation et que dès lors, ils sont soumis à la LDTR.

8. Compte tenu de ce dernier élément, il appartiendra au département de fixer un loyer maximum après travaux sans tenir compte des montants payés par les locataires et de fixer un dies aquo pour le contrôle du loyer ainsi instauré, en s’assurant, conformément au principe de la force dérogatoire du droit fédéral, que celui-ci est compatible avec le jugement prononcé par le Tribunal des baux et loyers dont aucune des parties n’a appelé.

9. Le recours sera ainsi rejeté. La cause sera renvoyée au département au sens des considérants.

Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge de la recourante. Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure. (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 mai 2003 par la Z. C. d’A. s. L.V. contre la décision du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement du 4 avril 2003 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 2'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité ;

renvoie la cause au département de l’aménagement, de l’équipement et du logement pour fixer le loyer au sens des considérants ;

communique le présent arrêt à Me Jean-François Marti, avocat de la recourante, au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, à la commission cantonale de recours en matière de constructions ainsi qu’à M. O. P.-P. et M. T., appelées en cause.

 

Siégeants :

M. Schucani, président, M. Paychère, Mme Bovy, Mme Hurni, M. Thélin, juges.

Au nom du Tribunal Administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

le juge présidant :

 

 

D. Schucani

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :