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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2989/2012

ATA/693/2013 du 15.10.2013 ( FORMA ) , ADMIS

Descripteurs : ; FACULTÉ(UNIVERSITÉ) ; RÈGLEMENT DES ÉTUDES ET DES EXAMENS ; EXAMEN(FORMATION) ; EXCLUSION(EN GÉNÉRAL) ; DROIT TRANSITOIRE ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : Cst.29.al2; LPA.18; LPA.65; RIO-UNIGE.18ss; Règlement d'études 2010.30ss; Règlement d'études 2010.46; Règlement d'études 2011.45
Résumé : Admission du recours d'une étudiante contre l'université de Genève, la faculté de médecine ayant prononcé son élimination en se fondant sur le règlement d'études entré en vigueur après qu'elle ait échoué aux examens. A défaut de dispositions transitoires, les principes généraux du droit intertemporel s'appliquent.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2989/2012-FORMA ATA/693/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 octobre 2013

1ère section

 

dans la cause

 

Madame X______
représentée par Me Romain Jordan, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

 



EN FAIT

Madame X______, née le ______ 1982, de nationalité marocaine, a brigué dès la rentrée académique 1999-2000 et obtenu en 2005 un diplôme de pharmacien délivré par la faculté des sciences de l'Université de Genève (ci-après : l'université).

Elle a intégré dès la rentrée académique 2005-2006 un programme de maîtrise en protéomique et bioinformatique au sein de la faculté des sciences de l'université, duquel elle a été éliminée le 21 mars 2007 pour n'avoir pas respecté les délais réglementaires.

Elle avait, entre-temps, tenté de s'inscrire pour la rentrée académique 2006-2007 à un cursus de maîtrise en gestion d'entreprise auprès de la faculté des sciences économiques et sociales de l'université, laquelle avait finalement refusé l'inscription au motif qu'elle suivait déjà une formation au sein de la faculté des sciences.

Elle a également entrepris en 2007 et abandonné en 2008 l'obtention d'un doctorat en pharmacie au sein de la faculté des sciences.

Mme X______, suite à sa demande et vu le préavis favorable de la faculté de médecine de l'université (ci-après : la faculté), a été autorisée par décision du 22 février 2007 de l'ancien comité directeur des examens fédéraux pour les professions médicales à intégrer le cursus d'études en médecine humaine.

Elle était dispensée d'effectuer la 1ère année, mais devait passer et réussir les contrôles de prestations à partir de la 2ème année selon les dispositions appliquées par la faculté. Le stage de soins aux malades devait également être accompli. Aucun droit à l'admission aux études ne découlait de cette décision, l'admission dépendant exclusivement de l'université concernée.

Par demande du 31 juillet 2007, admise sans conditions le 13 août suivant par l'université, Mme X______ a obtenu le droit de commencer en 2ème année des études de médecine dès la rentrée académique 2007-2008, en vue d'obtenir un baccalauréat universitaire en médecine (ci-après : baccalauréat).

Le 11 octobre 2007, elle a annoncé à la faculté sa décision de reporter son entrée en 2ème année des études de médecine à l'année académique 2008-2009.

Le 29 septembre 2008, Mme X______ a déposé une nouvelle demande, admise sans conditions le 2 octobre suivant et obtenu le droit d’intégrer en 2ème année les études de médecine dès la rentrée académique 2008-2009.

Elle a toutefois, par courriel du 15 mai 2009, demandé à la faculté de pouvoir interrompre son année académique et reprendre à la rentrée suivante. Elle n'avait pas réussi à suivre l'ensemble de ses cours et ne s'était pas présentée à l'examen de module 1 comme prévu en raison de problèmes familiaux, notamment une fugue de sa petite sœur, une intervention chirurgicale subie par son conjoint, et des difficultés financières nécessitant qu'elle exerce une activité professionnelle parallèlement à ses études.

Selon les déclarations concordantes des parties n'ayant pas produit de pièces à ce sujet, ladite demande a été admise par la faculté.

Mme X______ a repris ses études de médecine dès la rentrée académique 2009-2010. Elle a échoué aux examens de module 1 en février 2010 et de module 2 en juin 2010, obtenant à chacun la note de 2.

Le 25 août 2010, l'intéressée a demandé au doyen de la faculté qu'il lui accorde une dérogation quant à la durée de ses études afin de bénéficier d'une chance supplémentaire de passer sa 2ème année. Les problèmes familiaux et financiers dont elle avait déjà fait état l'avaient empêchée de se concentrer sur ses études et de réussir ses examens de module 1 et 2. Elle voulait revoir ses priorités et souhaitait passer ses examens de 2ème et 3ème année.

Le 2 septembre 2010, la faculté a informé Mme X______ que, suite à l'échec de sa 2ème année d'études, la règle selon laquelle l'étudiant n'ayant pas réussi son second examen propédeutique deux ans après la réussite du premier était définitivement éliminé lui était applicable, étant précisé que le doyen pouvait accorder une prolongation de ce délai pour de justes motifs.

Par courrier du 28 septembre 2010, le doyen de la faculté lui a accordé deux semestres supplémentaires pour terminer sa 2ème année et réussir les examens de module 1 et 2 au cours de l'année académique 2010-2011. Il ne lui resterait alors plus qu'une année pour réussir son baccalauréat. Cette dérogation étant tout à fait exceptionnelle, aucune autre ne lui serait accordée par la suite.

Les 26 janvier et 7 juin 2011, Mme X______ s'est retirée des examens de module 1 et 2, préférant les passer tous les deux en août 2011.

L'étudiante s'est ainsi présentée aux examens de module 1 et 2 lors de la session de septembre 2011. Selon son procès-verbal d'examens du 19 septembre 2011, elle a réussi l'examen de module 1 obtenant la note de 4, et échoué à l'examen de module 2 en obtenant la note de 3.

Par courriel du 13 septembre 2011, la faculté, faisant suite à un message de Mme X______, lui a indiqué les raisons de son élimination. D'une part, tout étudiant en médecine devait réussir sa première année dans les deux ans après l'avoir commencée. D'autre part, elle ne pouvait plus réussir son baccalauréat dans les temps, soit cinq ans, dès lors que son équivalence comptait pour une année et qu'elle n'avait toujours pas réussi sa 2ème année après trois ans.

Le 20 septembre 2011, Mme X______ a adressé un courriel au vice-doyen de la faculté, exposant les difficultés auxquelles elle avait dû faire face et lui demandant de la rencontrer afin de discuter de son échec et des solutions pouvant encore être envisagées pour lui permettre de terminer son baccalauréat.

Le 26 octobre 2011, Mme X______ s'est adressée à la faculté, indiquant qu'elle attendait confirmation écrite de la décision d'élimination dont elle faisait l'objet.

Le 27 octobre 2011, la faculté lui a répondu qu'une lettre d'élimination lui serait adressée par le bureau des admissions et inscriptions de l'université. Au surplus, la teneur du courrier du doyen de la faculté du 28 septembre 2011 (recte : 2010) était confirmée.

Par décision du 1er novembre 2011, la faculté a prononcé l'élimination de Mme X______ des études de médecine humaine suite à son échec à l'examen de module 2, ainsi qu'au courrier du doyen du 28 septembre 2010.

Le pli recommandé contenant cette décision a été acheminé à la nouvelle adresse de l'intéressée, qui ne l'a toutefois pas retiré dans le délai de garde postal arrivant à échéance le 9 novembre 2011.

Le 25 novembre 2011, sous la plume de son conseil, Mme X______ a informé la faculté avoir reçu de l'université une décision d'exmatriculation du 27 octobre 2011, infondée selon elle, sans avoir reçu au préalable de décision d'élimination, étant précisé que le courrier du 28 septembre 2010 ne pouvait être considéré comme tel. Au vu de sa situation, elle souhaitait être entendue avant qu'une décision ne soit rendue et sollicitait copie de son dossier.

Le doyen de la faculté a répondu le 30 novembre 2011, lui adressant copie de son dossier ainsi que de la décision d'élimination du 1er novembre 2011 dont le pli recommandé n'avait pas été retiré dans le délai de garde. Ladite décision avait été rendue et notifiée avant la décision d'exmatriculation et était sujette à opposition.

Le 7 décembre 2011, Mme X______ a formé opposition contre la décision d'élimination du 1er novembre 2011.

Il n'était pas admissible que la décision d'exmatriculation du 27 octobre 2011 soit antérieure à la décision d'exclusion du 1er novembre 2011, car contraire au statut de l'université. Ledit courrier du 1er novembre 2011 ne constituait pas une décision formelle dès lors qu'il n'indiquait ni les motifs de l'élimination, ni les voies de recours. L'élimination de l'étudiante était infondée dès lors que celle-ci pouvait encore se présenter une troisième fois aux examens de 2ème année de médecine conformément au règlement. La règle dite « des deux ans » ne reposant sur aucune base légale, ne lui était pas applicable. Elle n'avait pas encore atteint la durée maximale autorisée pour obtenir son baccalauréat, raison pour laquelle elle sollicitait la prolongation de la durée de ses études.

Par décision sur opposition du 3 septembre 2012, le doyen de la faculté a rejeté l'opposition et confirmé l'élimination de Mme X______, faisant sien le préavis rendu le 30 août 2012 par la commission d'opposition pour les études en faculté de médecine (ci-après : la commission). Cette décision a été déclarée exécutoire nonobstant recours.

Aux termes dudit préavis, la faculté n'était pas compétente pour se prononcer sur l'exmatriculation de l'intéressée, qui relevait de la compétence du rectorat de l'université. La décision du 1er novembre 2011 n'indiquait en effet pas les voies de recours, mais ce vice n'avait eu aucune conséquence pour Mme X______ qui avait pu faire valoir ses droits. Cette dernière connaissait en outre les motifs de son élimination dans la mesure où la faculté les avait exposés dans sa décision du 2 septembre 2010. La décision litigieuse était fondée, dès lors que l'étudiante n'avait pas réussi sa 2ème année de baccalauréat dans le délai réglementaire de deux ans et avait déjà bénéficié d'une prolongation de deux semestres. En outre, aucune situation exceptionnelle ne permettait de justifier sa situation d'échec.

Par acte posté le 5 octobre 2012 et complété le 26 octobre 2012, Mme X______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition précitée, concluant préalablement à la comparution personnelle des parties et principalement à son annulation et sa réformation en ce sens que l'intéressée était autorisée à représenter ses examens de médecine.

Son droit à la réplique avait été violé par l'instance précédente, car le préavis de la commission des oppositions ne lui avait pas été soumis avant que ne soit rendue la décision sur opposition.

La faculté lui avait appliqué le règlement d'études entré en vigueur le 19 septembre 2011, alors que les faits pertinents s'étaient intégralement produits avant cette date. Elle avait ainsi violé le principe de la non-rétroactivité des lois, si bien que la décision attaquée devait être annulée et la cause renvoyée à la faculté pour nouvelle décision.

En appliquant le règlement auquel elle était réellement soumise, elle n'aurait pas été éliminée, car elle avait échoué deux fois au module 2, mais il lui restait une troisième tentative. La règle dite « des deux ans », n'étant pas en vigueur au moment des faits litigieux, n'aurait pas dû lui être appliquée.

Ainsi qu'elle l'évoquerait en audience, vu le caractère sensible des faits litigieux, elle avait été confrontée au cours des trois années précédentes à des circonstances exceptionnelles d'une gravité évidente.

Le 30 novembre 2012, l'université a conclu au rejet du recours.

Mme X______ ne pouvait pas se prévaloir, devant la faculté qui n'était pas une instance judiciaire, du droit de prendre connaissance et de se déterminer sur les allégations des autres parties à la procédure, ce d'autant que la commission n'avait procédé à aucun acte d'instruction et ne s'était déterminée sur aucun fait n'étant pas déjà connu de la recourante. Par ailleurs, celle-ci avait reçu le 3 septembre 2012 une décision motivée et avait pu faire valoir son point de vue efficacement devant la chambre administrative.

La décision entreprise faisait d'autre part application de règles qui, à teneur du règlement d'études, étaient en vigueur au moment de son prononcé et à celui du prononcé de l'élimination. Elle ne violait donc pas le principe de non-rétroactivité. L'application de l'ancien règlement ne lui était au demeurant pas plus favorable dès lors qu'aux termes de celui-ci, les épreuves de première et deuxième année ne pouvaient être répétées qu'une fois.

Mme X______ était inscrite à la faculté depuis l'année académique 2008-2009 et avait bénéficié d'une prolongation de la durée normale des études de deux semestres par décision du 28 septembre 2010. Son élimination le 1er novembre 2011 s'imposait dès lors qu'elle n'avait toujours pas réussi sa première année d'études. La règle dite « des deux ans » lui était applicable.

Enfin, la recourante n'avait ni allégué, ni apporté la preuve de la situation exceptionnelle dont elle se prévalait.

Le 6 décembre 2012, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 18 janvier 2013 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger. Ce délai a par la suite été prolongé au 25 janvier 2013.

A cette dernière date, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

Le 5 juin 2013, Mme X______ a sollicité l'octroi (recte : la restitution) de l'effet suspensif à son recours.

Le 6 mai 2013, la direction de l'Université de Lausanne avait refusé de l'admettre au sein de ladite université au motif qu'elle aurait été éliminée définitivement par l'Université de Genève. Or, tel n'était pas le cas. Son intérêt à poursuivre son parcours universitaire était donc manifestement prépondérant et justifiait la restitution de l'effet suspensif.

Le 20 juin 2013, l'Université de Genève a conclu au rejet de la requête en restitution de l'effet suspensif.

La décision querellée avait clairement un contenu négatif car elle équivalait à un refus de revenir sur la décision d'élimination de la faculté. Il était donc exclu de restituer l'effet suspensif au recours.

Des mesures provisionnelles ne devaient pas davantage entrer en ligne de compte, car elles équivaudraient à accorder à la recourante à titre provisoire, pendant la durée de la procédure, ce qu'elle demandait au fond, à savoir la possibilité de continuer son cursus universitaire.

Par décision du 4 juillet 2013, la présidente de la chambre administrative a refusé de restituer l'effet suspensif au recours.

La restitution de l'effet suspensif aurait eu pour effet de faire droit, de manière provisoire, aux conclusions de la recourante sur le fond, ce qui était en principe prohibé. Une telle restitution aurait pour conséquence que la recourante serait encore étudiante au sein de la faculté et donc de l'université, mais cela ne permettait pas encore son immatriculation à l'Université de Lausanne. L'instruction de la cause étant terminée et celle-ci gardée à juger, l'intérêt de la restitution sollicitée était diminué dès lors qu'une décision au fond allait intervenir.

Sur ce, la cause a été gardée à juger au fond.

EN DROIT

Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 43 al. 2 de la loi sur l'université du 13 juin 2008 - LU - C 1 30 ; art. 36 du règlement relatif à la procédure d’opposition au sein de l’Université de Genève du 16 mars 2009 - RIO-UNIGE ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Le droit d’être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l'autorité de recours n'est pas possible, l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 p. 197 ; 133 III 235 consid. 5.3 p. 250 ; Arrêts du Tribunal fédéral 5A_825/2012 du 17 avril 2013 consid. 3.1 ; 5A_846/2011 du 26 juin 2012 ; ATA/276/2012 du 8 mai 2012 consid. 2 et arrêts cités). Ce moyen doit par conséquent être examiné en premier lieu (ATF 137 I 195 consid. 2.2 p. 197). Sa portée est déterminée en premier lieu par le droit cantonal (art. 41 ss LPA) et le droit administratif spécial (ATF 126 I 15 consid. 2 p. 16 ; 124 I 49 consid. 3a p. 51 et les arrêts cités ; Arrêts du Tribunal fédéral 5A_11/2009 du 31 mars 2009 ; 2P.39/2006 du 3 juillet 2006 consid. 3.2). Si la protection prévue par ces lois est insuffisante, ce sont les règles minimales déduites de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. – RS 101) qui s’appliquent (art. 29 al. 2 Cst. ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 ; T. TANQUEREL, Manuel de droit administratif, Genève-Zurich-Bâle 2011, p. 509 n. 1526 ; A. AUER/ G. MALINVERNI/M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, Berne 2013, Vol. II, 3ème éd., p. 608 n. 1328 ss).

La recourante sollicite de la chambre de céans une audience de comparution personnelle des parties, afin d'être entendue notamment au sujet des circonstances exceptionnelles rencontrées les trois années précédentes.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 138 II 252 consid. 2.2 p. 255 ; Arrêts du Tribunal fédéral 8C_866/2010 du 12 mars 2012 consid. 4.1.1 ; 8C_643/2011 du 9 mars 2012 consid. 4.3 et les références citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; ATA/276/2012 précité consid. 2 et les arrêts cités). Le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (Arrêt du Tribunal fédéral 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 p. 157 ; 138 V 125 consid. 2.1 p. 127 ; 137 II 266 consid. 3.2 p. 270 ; 137 I 195 consid. 2.3.1 p. 197 ; 136 I 265 consid. 3.2 ; 135 II 286 consid. 5.1 p. 293) ; Arrêts du Tribunal fédéral 5A_12/2013 du 8 mars 2013 consid. 4.1 ; 2C_552/2011 du 15 mars 2012 consid. 3.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes ; l'autorité de décision peut ainsi se livrer à une appréciation de la pertinence du fait à prouver et de l'utilité du moyen de preuve offert et, sur cette base, refuser de l'administrer. Ce refus ne viole le droit d'être entendu que si l'appréciation à laquelle elle a ainsi procédé est entachée d'arbitraire (ATF 136 I 229 consid. 5.3 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 ; 130 I 425 consid. 2.1 ; ATA/275/2012 du 8 mai 2012 ; ATA/655/2010 du 21 septembre 2010 et les références citées). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 237 ; 138 IV 81 consid. 2.2 p. 84 ; 134 I 83 consid. 4.1 p. 88 et les arrêts cités ; 133 II 235 consid. 5.2 p. 248 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C_424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2 ; 2C_514/2009 du 25 mars 2010 consid. 3.1). Enfin, le droit d'être entendu n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2D_5/2012 précité consid. 2.3 et les arrêts cités ; ATA/305/2013 du 14 mai 2013 consid. 3 ; ATA/40/2013 du 22 janvier 2013).

b. La procédure administrative est en principe écrite, toutefois si le règlement et la nature de l'affaire le requièrent, l'autorité peut procéder oralement (art. 18 LPA). L'acte de recours doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. A défaut, la juridiction saisie impartit un bref délai au recourant pour satisfaire à ces exigences, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA).

En l'espèce, la chambre administrative renoncera à procéder à l'acte d'instruction sollicité, dans la mesure où une audience de comparution personnelle n'est pas de nature à influer sur l'issue du litige et où elle dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer en connaissance de cause.

Au surplus, la recourante, au demeurant assistée d'un avocat, a délibérément refusé d'indiquer dans ses écritures, bien que le juge délégué lui ait imparti un délai supplémentaire pour compléter son recours, en quoi elle aurait été confrontée à des circonstances exceptionnelles, se limitant à soulever « le caractère extrêmement sensible des faits litigieux ». Or, vu les principes prévalant en matière de procédure administrative et de droit d'être entendu, la recourante ne pouvait pas compter uniquement sur le fait qu'elle serait entendue en audience de comparution personnelle pour alléguer et démontrer les circonstances dont elle entend se prévaloir. Elle n'indique d'ailleurs pas même dans quel but elle allègue ce grief.

La recourante se plaint de la violation de son droit à la réplique, dès lors que la faculté ne lui a pas transmis le préavis de la commission d'opposition du 30 août 2012 avant de rendre sa décision sur opposition du 3 septembre 2012, ne lui laissant ainsi pas l'occasion de se déterminer.

a. La procédure d’opposition contre les décisions concernant les étudiants est réglée aux art. 18 à 35 RIO-UNIGE. L’opposition doit être instruite par une commission instituée à cet effet dans chaque unité principale d’enseignement et de recherche (ci-après : UPER ; art. 28 al. 1 RIO-UNIGE). Celle-ci réunit tous les renseignements pertinents, procède à toutes les enquêtes et à tout acte d’instruction nécessaire pour établir son préavis. Son président est autorisé à déléguer cette tâche à un ou plusieurs de ses membres, ou à l’entreprendre lui-même (art. 28 al. 3 RIO-UNIGE). L’autorité qui instruit peut inviter toute personne ayant participé à l’élaboration de la décision litigieuse à se prononcer sur l’opposition (art. 28 al. 4 RIO-UNIGE). L’opposant peut demander à être entendu par la commission. Il ne dispose cependant pas d’un droit à une audition si la commission estime qu’elle dispose de tous les renseignements nécessaires pour établir son préavis et que l’opposition est suffisamment claire et motivée (art. 28 al. 5 RIO-UNIGE). A la fin de son instruction, la commission émet un préavis à l’intention de l’autorité qui a pris la décision litigieuse (art. 28 al. 6 RIO-UNIGE), laquelle statue.

b. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, dans la mesure où les déterminations de l'instance précédente ou de la partie adverse contiennent de nouveaux éléments qui sont admissibles au plan procédural et matériellement susceptibles d'influer sur le jugement à rendre, un « droit à répliquer » au sens étroit découle directement de l'art. 29 al. 2 Cst. Il s'applique à toutes les procédures judiciaires et administratives. Le « droit de prendre connaissance et de se déterminer sur les allégations des autres participants à la procédure » fondé sur l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) ne dépend quant à lui pas de la pertinence de l'allégation pour la décision à rendre et concerne toutes les procédures judiciaires, même celles qui n'entrent pas dans le champ de protection de l'art. 6 § 1 CEDH. Il ne s'applique en revanche pas aux procédures devant d'autres autorités (ATF 138 I 154 consid. 2.3 et 2.5).

c. La chambre de céans a, pour sa part, considéré que le droit d'être entendu d'un étudiant était violé lorsque le préavis de la commission d'opposition ne revêtait pas la forme écrite (ATA/460/2012 du 30 juillet 2012 ; ATA/417/2012 du 3 juillet 2012), retenant néanmoins dans les deux cas que ladite violation était réparée dans le cadre de la procédure de recours.

En l'espèce, la faculté, en sa qualité d'autorité administrative, se devait de respecter, dans le cadre de la procédure d'opposition, le droit à répliquer de la recourante au sens étroit, découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. Il appert toutefois que la commission d'opposition n'a procédé à aucun acte d'instruction et que son préavis se fonde sur le dossier administratif de la recourante, ainsi que sur son mémoire d'opposition et les pièces y relatives, soit uniquement sur des éléments dont cette dernière avait déjà connaissance.

Au surplus, dans la mesure où la faculté ne motive pas sa décision sur opposition autrement qu'en faisant sien le préavis de la commission rendu quatre jours plus tôt, il est admis que la recourante a eu l'occasion de se déterminer à plusieurs reprises dans le cadre de la présente procédure en recourant contre ladite décision.

Son droit à la réplique n'a par conséquent pas été violé par l'intimée et ce grief sera écarté.

La chambre administrative examinant d'office le droit applicable, il convient de déterminer quel règlement d'études de la faculté s'applique à la recourante.

En effet, depuis que la recourante s'est inscrite à la faculté de médecine en 2007 et jusqu'à ce jour, plusieurs règlements d'études ont successivement été appliqués aux étudiants, à savoir :

      le règlement des études de base de médecine humaine à la Faculté de médecine de l'Université de Genève, entré en vigueur le 15 septembre 2007 (RE 2007) ;

      le règlement des études universitaires de base de médecine humaine à la Faculté de médecine de l'Université de Genève, entré en vigueur le 1er mars 2010 (RE 2010) ;

      le règlement des études universitaires de base de médecine humaine à la Faculté de médecine de l'Université de Genève, entré en vigueur le 19 septembre 2011 (RE 2011) ;

      le règlement des études universitaires de base en médecine humaine à la Faculté de médecine de l'Université de Genève, entré en vigueur le 10 septembre 2012 (RE 2012) ;

      le règlement des études universitaires de base en médecine humaine à la Faculté de médecine de l'Université de Genève, entré en vigueur le 9 septembre 2013 (RE 2013).

La recourante allègue être soumise au RE 2010, selon lequel elle aurait le droit de passer une troisième et dernière fois son examen de module 2, tout en respectant le délai de durée des études. La faculté considère pour sa part que le RE 2011 lui est applicable, raison pour laquelle l'élimination de la recourante devrait être confirmée.

Le principe de la bonne foi entre administration et administré, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l’une et l’autre se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l’administration doit s’abstenir de toute attitude propre à tromper l’administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 129 I 161 consid. 4 p. 170 ; 129 II 361 consid. 7.1 p. 381 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C_534/2009 du 2 juin 2010 ; 9C_115/2007 du 22 janvier 2008 consid. 4.2 ; ATA/141/2012 du 13 mars 2012 ; T. TANQUEREL, op.cit., p. 193 n. 568).

Conformément aux principes généraux du droit intertemporel, lorsqu'un changement de droit intervient au cours d'une procédure administrative contentieuse ou non contentieuse, la question de savoir si le cas doit être tranché sous l'angle du nouveau ou de l'ancien droit se pose. En l'absence de dispositions transitoires, s'il s'agit de tirer les conséquences juridiques d'un événement passé constituant le fondement de la naissance d'un droit ou d'une obligation, le droit applicable est celui en vigueur au moment dudit événement. Dès lors, en cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste en principe celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques (T. TANQUEREL, op.cit., p. 133 ss. n. 403 ss).

La question de savoir si, de manière générale, les étudiants doivent, en vertu du principe de la bonne foi, être admis à terminer une année ou un cycle d'études conformément au règlement prévalant au début de ceux-ci, ou mis nécessairement au bénéfice de dispositions transitoires en cas de changement de réglementation, souffrira de demeurer ouverte en l'espèce, le RE 2010 étant de toute façon applicable au cas d'espèce.

En effet, le RE 2011, qui ne contient aucune disposition transitoire et s'applique à tous les étudiants de la faculté (art. 45 al. 2), est entré en vigueur le 19 septembre 2011 (art. 45 al. 1), soit à la même date que celle indiquée sur le procès-verbal d'examens signifiant à la recourante son échec à l'examen de module 2. Il est par ailleurs clairement indiqué sur ledit procès-verbal d'examens que le règlement applicable à la recourante est le RE 2010. En outre, dès lors que les faits ayant une conséquence juridique, soit la réussite de l'examen de module 1 et l'échec à l'examen de module 2 lors de la session d'août 2011, se sont produits avant l'entrée en vigueur du RE 2011, le droit applicable ne peut être que le RE 2010, et non le RE 2011 en vigueur au moment auquel la décision litigieuse a été prise.

La recourante ayant commencé ses études de médecine en 2008, soit lorsque le RE 2007 était en vigueur, reste à vérifier dans quelle mesure ce dernier serait ou non applicable au cas d'espèce.

Selon les dispositions transitoires contenues à l'art. 46 RE 2010, les étudiants en cours d'études au moment de l'entrée en vigueur de ce règlement restent soumis au RE 2007 jusqu'à la rentrée académique de septembre 2010 (al. 1). Si les évaluations prévues par les ordonnances fédérales ou le règlement d'études passées avant le 31 août 2010 ne sont pas réussies, les étudiants en cours d'études restent soumis au RE 2007 (al. 2 et 3). Néanmoins, si le contenu des évaluations que les étudiants doivent passer selon le RE 2007 et son plan d'études se recoupe avec le contenu des évaluations devant être passées selon le RE 2010 et son plan d'études, le bureau de la commission d'enseignement de la faculté peut décider d'imputer tout ou partie desdites évaluations selon le RE 2007 et de les reporter selon le RE 2010 (al. 4, let. b).

En l'espèce, le RE 2007 était applicable à la recourante au début de ses études au sein de la faculté de médecine. Bien qu'elle ait échoué aux examens de module 1 et 2, respectivement en février et juin 2010, ces évaluations ont été, à tout le moins implicitement, reportées selon le RE 2010, conformément à ce qui figure sur ses procès-verbaux d'examens postérieurs à septembre 2010. Par conséquent, la recourante était bel et bien soumise au RE 2010 lorsque la décision de son exclusion a été prononcée.

La recourante se plaint d'une violation des art. 30 ss RE 2010, aux termes desquels elle devrait être autorisée à passer une troisième et dernière fois son examen de module 2 dès lors qu'elle n'aurait pas encore atteint la durée maximale des études de baccalauréat.

a. Selon le RE 2010, un étudiant peut répéter deux fois chaque examen de 2ème année (art. 30 al. 1). La durée des études de baccalauréat est au minimum de six et au maximum de dix semestres, étant précisé qu'une dérogation peut être accordée par le doyen pour de justes motifs, la prolongation ne pouvant excéder deux semestres supplémentaires (art. 34 al. 2). L'étudiant qui échoue définitivement à une évaluation ou qui n'obtient pas le baccalauréat dans le délai d'études maximum visé à l'art. 34 est éliminé de la faculté (art. 37 al. 1 let. d et e).

b. Les dispositions précitées sont identiques dans le RE 2011, celui-ci introduisant cependant la règle dite « des deux ans » selon laquelle la durée de la première année d'études effectuée au sein de la faculté, que cela soit la première année de baccalauréat ou une autre année dans le cadre d'une admission avec équivalences, est de deux ans au maximum, sous peine d'élimination (art. 4 let. 1c et 37 al. 1 let. e).

En l'espèce, force est de constater que la faculté ne pouvait fonder sa décision d'élimination sur la règle dite « des deux ans », dès lors que le RE 2010 était applicable et que cette règle ne reposait sur aucune base légale ou règlementaire avant l'entrée en vigueur du RE 2011.

La recourante ayant en 2007 reporté son entrée à la faculté de médecine à l'année suivante, il convient d'admettre qu'elle a commencé ses études à la rentrée académique 2008-2009. Elle avait ainsi déjà effectué six semestres d'études au moment de son second échec à l'examen de module 2 en août 2011, auxquels il convient d'ajouter l'année d'équivalence dont elle a bénéficié, soit huit semestres au total.

Ainsi, elle n'avait pas encore atteint la durée maximale des études de baccalauréat en médecine, soit dix semestres, douze en cas de dérogation. Elle était par ailleurs, toujours selon le RE 2010, autorisée à se présenter une troisième et dernière fois à l'examen de module 2.

Par conséquent, la faculté a violé les art. 30 ss du RE 2010 en prononçant dans la décision attaquée l'élimination de la recourante.

Partant, le recours sera admis. La décision litigieuse sera annulée et la cause retournée à la faculté pour nouvelle décision au sens des considérants.

Aucun émolument ne sera mis à la charge de la faculté, malgré l'issue du litige (art. 87 al. 1 2ème phr. LPA). En revanche, la recourante y ayant conclu et étant assistée d'un avocat, une indemnité de procédure de CHF 1'000.- lui sera allouée, à la charge de l'université (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 octobre 2012 par Madame X______ contre la décision sur opposition de la faculté de médecine du 3 septembre 2012 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision sur opposition de la faculté de médecine du 3 septembre 2012 ;

retourne la cause à la faculté de médecine pour nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à Madame X______ une indemnité de procédure de CHF 1'000.-, à la charge de l'Université de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat de la recourante ainsi qu'à l'Université de Genève.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :