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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/135/2012

ATA/417/2012 du 03.07.2012 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/135/2012-FORMA ATA/417/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 juillet 2012

2ème section

 

dans la cause

 

Madame M______
représentée par Me Alain Marti, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

et

FACULTÉ DE DROIT

 



EN FAIT

1. Madame M______ est titulaire d’une maîtrise en biologie délivrée par la faculté des sciences de l’Université de Genève (ci-après : l’université).

2. Elle s’est inscrite à la faculté de droit (ci-après : la faculté) pour entreprendre des études menant à la maîtrise universitaire spécialisée interdisciplinaire en droit du vivant. Elle s’est présentée aux examens de la session de mai-juin 2011, où elle a obtenu une note de 3,25 à l’examen de l’enseignement de droit de la personnalité. C’était sa deuxième tentative. Il s’agissait d’un examen oral conduit par Madame Dominique Manaï, professeure, accompagnée d’un juré, Monsieur Timothy Bauer, son assistant.

3. Selon le procès-verbal d’examens du 29 juin 2011 qui récapitulait les résultats obtenus, dont la note insuffisante précitée, elle n’avait pas obtenu de crédits ECTS pour celui-ci. Dès lors, la formation n’était pas réussie.

4. Le 12 juillet 2011, Mme M______ a fait opposition auprès du doyen de la faculté contre le procès-verbal d’examen précité, reçu le 30 juin 2011, concluant à la correction de la note accordée à l’examen de droit de la personnalité, qui devait être portée à 4. Elle était stupéfaite d’avoir échoué à cet examen car elle avait la certitude de maîtriser la matière. Après un premier échec lors d’une session précédente, elle avait perdu un semestre à préparer cette branche et elle était sortie de l’examen persuadée d’avoir réussi.

Après son échec, elle avait pris contact avec M. Bauer, qui l’avait informée des raisons de celui-ci. Il avait notamment considéré qu’elle n’avait pas été suffisamment synthétique, mais que l’on pouvait comprendre qu’elle connaissait la matière.

Elle n’avait ainsi pas été jugée sur ses connaissances de cette branche du droit mais sur la forme. Elle n’avait pas été questionnée de manière adéquate. Elle trouvait étrange d’échouer deux fois dans une matière, alors qu’elle avait le sentiment à chaque fois d’avoir réussi et la certitude de connaître le sujet. Le juré qu’elle avait rencontré lui avait reproché de ne pas avoir abordé la question du tort moral alors que celle-ci ne se posait pas.

5. Le 12 août 2011, Mme M______ a écrit à la faculté pour se plaindre de la lenteur dans le traitement de l’opposition, qui n’avait pas fait l’objet d’un accusé de réception.

6. Le 19 août 2011, Monsieur Christian Bovet, doyen de la faculté de droit, (ci-après : le doyen), lui a adressé une copie de la détermination de Mme Manaï, en l’invitant à se déterminer à son sujet. Selon ce préavis, daté du 18 août 2011 et qui était adressé au doyen, l’opposition devait être rejetée. L’examen oral constituait en la résolution d’un cas pratique tiré au sort par l’étudiante, qui disposait de quinze minutes de préparation. Le matériel à disposition était constitué des douze fascicules de jurisprudence non annotés acquis par tout étudiant qui avait suivi le cours. Le candidat devait exposer oralement la solution aux examinateurs, qui lui posaient ensuite deux ou trois questions. Cette présentation orale durait quinze minutes.

Mme M______ n’était pas parvenue à formuler les problèmes et encore moins à fournir une réponse à la question posée par le cas. Elle s’était noyée dans des considérations générales et émotionnelles. Lorsque Mme Manaï lui avait posé une question pour lui rappeler l’existence de la loi et de la jurisprudence, elle n’avait pas compris l’allusion mais réitéré son avis, teinté de considérations affectives et dénué de pertinence dans la résolution du cas. Elle s’était présentée devant les examinateurs sans textes de loi ni fascicules de jurisprudence. Son manque de rigueur, son mauvais traitement des faits, son absence de raisonnement juridique et son oubli des bases légales ainsi que de la jurisprudence n’étaient pas acceptables à un niveau de maîtrise en droit. Le sort lui avait désigné un cas portant sur un film qui devait être diffusé au sujet de jeunes adultes handicapés mentaux. L’association qui était chargée de la tutelle de la plupart d’entre eux s’opposait à la diffusion de ce film et il lui était demandé ce que pouvait faire juridiquement ladite association. Or, l’étudiante n’avait pas compris l’enjeu juridique de ce complexe de fait, elle n’avait pas posé les questions juridiques pertinentes ni fait état des bases légales topiques. Elle ne s’était pas référée à la jurisprudence. Elle avait constaté une atteinte à la sphère privée, mais sans indiquer les moyens juridiques prévus pour faire respecter les droits des victimes d’une atteinte à la personnalité.

Les propos que la recourante prêtait à M. Bauer, juré de l’examen, étaient contestés. Celui-ci lui avait simplement confirmé qu’elle était en-dessous du niveau requis pour une maîtrise en droit et que sa réponse était incomplète.

7. Le 26 août 2011, Mme M______, sous la plume de son conseil - car elle se trouvait en Chine pour y suivre une année de formation - a contesté l’appréciation de Mme Manaï. Elle demandait la production des notes des examinateurs car sans cela, le débat se résumerait à « la parole de l’un contre celle de l’autre ». La réponse du professeur examinateur n’était que généralité. Elle avait le sentiment de s’être référée aux bases légales, soit les art. 28 ss du Code civil suisse du 10 décembre l907 (CCS - RS 210). Elle contestait ne pas avoir abordé les points soulevés par la professeure dans son préavis. Au contraire de ce qu’affirmait celle-ci, ce qu’elle avait dit était pertinent.

8. Le 11 octobre 2011, le Professeur Nicolas Jeandin, président de la commission des oppositions, a transmis à Mme M______ une copie des notes manuscrites prises par les deux jurés lors de l’examen. Il s’agissait d’une feuille comportant un tableau pré-imprimé, énumérant différents éléments sur lesquels l’évaluation devait porter : résolution attendue du cas, références aux bases légales et jurisprudence pertinente, raisonnement juridique, motivation et argumentation, solution juridique, impression de maîtrise du sujet et remarques. Chaque juré avait annoté sa feuille par de brèves remarques synthétiques. Les deux jurés avaient mentionné qu’elle avait cité une base légale qui n’était plus en vigueur. Selon l’un des examinateurs, elle ne maîtrisait pas vraiment le sujet, même si elle l’avait étudié. Elle n’avait pas effectué de raisonnement juridique au sujet des conditions de l’art. 28 CCS. Elle avait de la peine à cerner les problèmes et n’avait pas compris ce que représentait la notion d’illicéité, nécessaire pour qu’il y ait atteinte. Selon l’autre juré, l’étudiante compliquait tout. Elle ne savait pas définir l’illicéité, ni effectuer de syllogismes, mélangeant la psychologie et le droit.

9. Le 25 octobre 2011, Mme M______ a pris position sur les notes manuscrites des examinateurs, qui lui avaient été transmises par le président de la commission en charge des oppositions instaurée par le règlement relatif à la procédure d’opposition au sein de l’Université de Genève du 16 mars 2009 (RIO-UNIGE ; ci-après : commission RIO). Ces notes étaient incomplètes. Elles n’étaient pas claires et se contredisaient. Il y avait un décalage entre l’appréciation de l’un et l’autre des jurés. Aucun des deux jurés ne disait que la candidate n’avait dit quelque chose de faux, si ce n’était la validité de l’art. 28 CCS. Elle ne comprenait pas pourquoi, sur cette base, elle avait été éliminée. L’un des jurés avait relevé que la candidate avait étudié. Elle ne demandait pas de recevoir son diplôme summa cum laude mais elle ne devait pas être éliminée alors qu’elle avait étudié. Cette élimination était insoutenable et arbitraire.

10. Le 16 novembre 2011, le collège des professeurs a rejeté l’opposition de Mme M______ par une décision signée du doyen au nom de cette instance. Si l’appréciation d’un examen pouvait faire l’objet d’une opposition en matière de contrôle de connaissances, l’autorité statuant sur celle-ci n’examinait les griefs soulevés par l’opposant que sous l’angle de l’arbitraire. En l’espèce, Mme M______ se limitait à opposer sa propre version du déroulement des faits à celle de l’examinatrice. Les notes prises par les jurés constituaient des documents à vocation purement interne, que chacun rédigeait à sa manière, et qui avaient une portée à vrai dire réduite. Elles ne contredisaient pas le contenu des informations transmises par Mme Manaï le 18 août 2011, qui en explicitait le contenu. Il ressortait de ces documents que l’examen de l’opposante avait été insuffisant. La note de 3,25 qui avait été attribuée à sa prestation échappait au grief d’arbitraire. Les conclusions tendant à l’attribution d’une note supérieure étaient irrecevables.

11. Le 19 janvier 2012, Mme M______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition précitée, reçue le 20 décembre 2011. Elle conclut à son annulation et à ce que « l’art. 2 de l’art. 31 » RIO-UNIGE n’avait pas de base légale, à ce que la cause soit renvoyée à l’université pour nouvelle décision au fond, ou à ce que la note de 3,5 soit corrigée et portée à 4.

Avant de statuer, la chambre administrative devait l’entendre ainsi que M. Bauer.

La décision sur opposition avait été prise au-delà du délai de soixante jours de l’art. 52 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). La commission RIO n’aurait pas dû inviter Mme Manaï à se prononcer par écrit, mais l’entendre lors d’une audience contradictoire en sa présence afin qu’elle puisse la questionner. Son droit d’être entendu n’avait pas été respecté. Le courrier de la professeure avait été qualifié de « préavis », alors que le RIO-UNIGE ne connaissait que le préavis de la commission d’opposition. Le préavis de cette dernière n’avait pas été transmis et sa production était demandée. Des enquêtes auraient dû être ordonnées par la commission RIO-UNIGE. La restriction posée par l’art. 31 al. 2 RIO-UNIGE de la validité d’un examen au seul cas de figure de l’arbitraire était elle-même arbitraire. L’art. 43 al. 2 de la loi sur l’université du 13 juin 2008 (LU - C 1 30) ne prévoyait pas une telle limitation du pouvoir d’examen de l’autorité d’opposition en matière de contrôle de connaissances.

12. Le 5 mars 2012, le doyen a répondu au recours, concluant à son rejet. Celui-ci était infondé pour les motifs suivants :

- les délais pour la reddition de la décision avaient été respectés. Celle-ci devait être rendue dans les trente jours dès la fin de l’instruction, selon l’art. 33 RIO-UNIGE qui instaurait un délai particulier ;

- les droits procéduraux de Mme M______ avaient été respectés. L’art. 28 al. 4 RIO-UNIGE prévoyait que les personnes ayant participé à l’élaboration de la décision pouvaient être amenées à se prononcer sur l’opposition mais n’instaurait pas l’obligation d’une audition en présence de l’opposant ;

- le droit d’être entendu de Mme M______ avait été respecté. Cette dernière n’avait d’ailleurs jamais requis l’audition de Mme Manaï ou suggéré que celle-ci se détermine sur des questions particulières ;

- la commission des oppositions de la faculté avait présenté oralement un rapport lors de la séance du collège des professeurs du 16 novembre 2011. Bien que la recourante n’ait jamais réclamé copie de ce préavis, il n’y avait pas de difficulté à produire un extrait du procès-verbal de la séance en question ;

- la limitation du pouvoir de cognition reposait sur une base légale. L’université jouissait d’une large autonomie. Elle avait le droit d’organiser la procédure d’opposition. C’est ce qu’elle avait fait en prévoyant qu’en matière de contrôle de connaissances l’autorité chargée de statuer sur l’opposition ne pouvait revoir les griefs de fond soulevés par l’opposante que sous l’angle de l’arbitraire. Cette règle codifiait la jurisprudence de l’ancienne commission de recours de l’université, et cette jurisprudence avait été confirmée à réitérées reprises par la chambre administrative.

Sur le fond, l’appréciation de l’examen litigieux qui avait été faite par les jurés n’était ni insoutenable, ni arbitraire.

Annexé à cette réponse figurait un extrait du relevé de décisions de la séance du collège du corps professoral du 18 novembre 2011, à laquelle Mme Manaï était excusée et à laquelle participait M. Jeandin. Le document en question précisait : « le collège examine l’opposition formée le 12 juillet 2011 par Mme M______ à l’encontre de sa note de 3,25 obtenue à l’examen oral de droit de la personnalité subi lors de la session de mai-juin 2011. La Prof. D. Manaï n’assiste pas aux délibérations. L’opposante se limite pour l’essentiel à opposer sa propre version du déroulement de l’examen à celle du professeur. Il ressort des éléments du dossier que la candidate ne disposait pas des connaissances suffisantes, n’étant pas parvenue à justifier le problème juridique posé par le cas et à y apporter des réponses satisfaisantes. La note obtenue n’avait rien d’arbitraire si bien que - suivant la recommandation de la commission - l’opposition est rejetée à l’unanimité ».

13. Le 6 mars 2012, le juge délégué a transmis à la recourante la réponse de l’université. Un délai au 21 mars 2012 était accordé aux parties pour formuler toute requête complémentaire. Passé la date en question, la cause serait gardée à juger en l’état du dossier.

Aucune requête n’a été formulée dans le délai imparti.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2. La recourante demande à être entendue et requiert l’audition de ses examinateurs.

Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (Arrêt du Tribunal fédéral 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 I 279 consid. 2.3 p. 282 ; 132 II 485 consid. 3.2 p. 494 ; 127 I 54 consid. 2b p. 56 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_552/2011 du 15 mars 2012 consid. 3.1).

Cette garantie n’implique pas le droit à une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2D_5/2012 précité consid. 2.3, et les arrêts cités ; ATA/302/2012 du 15 mai 2012 ; ATA/40/2012 du 19 janvier 2012).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 p. 236 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 p. 158 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2D_2/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3 ; 2D_51/2011 du 8 novembre 2011 ; 2C_58/2010 du 19 mai 2010 consid. 4.3 ; 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.2, et les arrêts cités ; ATA/432/2008 du 27 août 2008 consid. 2b). Le droit d’être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l’issue du litige (ATF 133 II 235 consid 5.2 p. 248 ; 129 I 232 consid. 3.2 p. 236 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C_424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2 ; 2C_514/2009 du 25 mars 2010 consid. 3.1).

En l’espèce, le dossier étant complet, la chambre de céans dispose des éléments nécessaires pour statuer sans donner suite à la demande d’audition présentée par la recourante.

3. La décision contestée ayant été prise le 16 septembre 2011, sont applicables les dispositions de la LU, du Statut de l’Université du 16 mars 2011, entré en vigueur le 28 juillet 2011, celles du RIO-UNIGE, le règlement d’étude de la faculté de droit du 15 octobre 2004 (RE DROIT) ainsi que le règlement d’étude de la maîtrise interdisciplinaire en droit du vivant du 13 mai 2009 (RE MIDV). Celle-ci constituant une maîtrise thématique au sens de l’art. 42 al. 2 RE DROIT (art. 1 al. 3 RE MIDV), elle est soumises sauf dispositions contraires, à celles du chap. III du RE DROIT relatives à la maîtrise (art. 26 à 41).

4. a. L’art. 43 al. 2 LU délègue à l’université la compétence de mettre en place une procédure d’opposition interne à l’égard de toute décision au sens de l’art. 4 LPA avant le recours à la chambre administrative.

b. La procédure d’opposition contre les décisions concernant les étudiants est réglée aux art. 18 à 35 RIO-UNIGE. L’opposition doit être instruite par une commission instituée à cet effet dans chaque unité principale d’enseignement et de recherche (ci-après : UPER ; art. 28 al. 1 RIO-UNIGE). Celle-ci réunit tous les renseignements pertinents, procède à toutes les enquêtes et à tout acte d’instruction nécessaire pour établir son préavis. Son président est autorisé à déléguer cette tâche à un ou plusieurs de ses membres, ou à l’entreprendre lui-même (art. 28 al. 3 RIO-UNIGE). L’autorité qui instruit peut inviter toute personne ayant participé à l’élaboration de la décision litigieuse à se prononcer sur l’opposition (art. 28 al. 4 RIO-UNIGE). L’opposant peut demander à être entendu par la commission. Il ne dispose cependant pas d’un droit à une audition si la commission estime qu’elle dispose de tous les renseignements nécessaires pour établir son préavis et que l’opposition est suffisamment claire et motivée (art. 28 al. 5 RIO-UNIGE). A la fin de son instruction, la commission émet un préavis à l’intention de l’autorité qui a pris la décision litigieuse (art. 28 al. 6 RIO-UNIGE), laquelle statue.

5. Selon le RIO-UNIGE, en matière de contrôle des connaissances, l’autorité qui a pris la décision litigieuse et qui statue sur l’opposition examine d’office les faits. Elle apprécie librement les griefs soulevés par l’opposant, mais n’examine que sous l’angle de l’arbitraire les griefs de fond soulevés par celui-ci (art. 31 al. 1 et 2 RIO-UNIGE).

Est arbitraire une note ou une évaluation qui violerait une règle claire ou qui ne se baserait pas sur des critères objectifs et valables pour tous les étudiants, et qui serait insoutenable ou qui choquerait le sens de l’équité (art. 31 al. 2 in fine).

6. Le contrôle des connaissances pour les candidats à la maîtrise suivant les enseignements de la faculté est réglé aux art. 38 à 41 RE DROIT. Toutefois, pour les questions relatives à la procédure à suivre dans ce domaine, l’art. 38 al. 1 RE DROIT renvoie aux art. 17 à 21 RE DROIT.

Le RE DROIT prévoit que les étudiants peuvent faire opposition dans un délai de trente jours aux décisions en matière d’évaluation (art. 19 al. 1 RE DROIT). Chaque opposition est instruite par la commission des oppositions de la faculté. A la fin de son instruction, la commission émet un préavis à l’intention de l’autorité qui a pris la décision litigieuse (art. 19 al. 2 RE DROIT), laquelle statue. Pour le surplus, sont applicables les dispositions du RIO-UNIGE (art. 19 al. 3 RIO-UNIGE).

7. La recourante se plaint de l’absence dans le dossier d’un préavis écrit émanant de la commission RIO. Le doyen de la faculté explique que ce préavis a été donné oralement lors du collège des professeurs du 16 novembre 2011. C’est ce qui ressort de l’extrait du procès-verbal de cette séance à laquelle participait M. Jeandin. Même si la teneur des art. 28 al. 5 RIO-UNIGE et 19 al. 3 RE DROIT ne le précisent pas expressément, il découle de la raison d’être de ces dispositions qu’un tel préavis doit être émis par écrit. Il doit permettre en effet de retracer ultérieurement le déroulement de l’instruction menée et de connaître les actes accomplis dans ce cadre, conformément à l’art. 28 al. 3 et 4 RIO-UNIGE.

En l’espèce, si les droits procéduraux de la recourante ont été respectés d’une manière générale durant l’instruction de l’opposition, puisque les pièces du dossier et la prise de position de la professeure examinatrice lui ont été transmises et qu’elle a pu, à plusieurs stades de celle-ci, se déterminer à ce sujet, un tel préavis écrit, qui spécifierait les raisons ayant conduit la commission à recommander le rejet de l’opposition, fait défaut. En ce sens, le droit d’être entendu de la recourante a été violé. Celui-ci inclut en effet le droit pour l’administré d’obtenir une décision motivée, conformément à la loi. Il est lésé lorsque le préavis écrit nécessaire à la prise de cette décision fait défaut.

8. Une décision entreprise pour violation du droit d’être entendu n’est pas nulle mais annulable (ATF 136 V 117 ; 133 III 235 consid. 5.3 p. 250 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2D_5/2012 précité consid. 2.3 ; 1C_568/2011 du 13 février 2012 consid. 3 ; ATA/862/2010 du 7 décembre 2010 consid. 2, et les arrêts cités). En effet, selon un principe général, la nullité d’un acte commis en violation de la loi doit résulter ou bien d’une disposition légale expresse, ou bien du sens et du but de la norme en question (ATF 122 I 97 consid. 3 p. 99 ; 119 II 147 consid. 4a p. 155, et les arrêts cités). En d’autres termes, il n’y a lieu d’admettre la nullité, hormis les cas expressément prévus par la loi, qu’à titre exceptionnel lorsque les circonstances sont telles que le système d’annulabilité n’offre manifestement pas la protection nécessaire (cf. ATF 121 III 156 consid. 1 ; Arrêt du Tribunal fédéral 8C_643/2011 du 9 mars 2012 consid. 4.5 ; ATA/386/2011 du 21 juin 2011 consid. 6). Ainsi, d’après la jurisprudence, la nullité d’une décision n’est admise que si le vice dont elle est entachée est particulièrement grave, est manifeste ou du moins facilement décelable et si, en outre, la constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Des vices de fond n’entraînent qu’à de rares exceptions la nullité d’une décision ; en revanche, de graves vices de procédure, ainsi que l’incompétence qualifiée de l’autorité qui a rendu la décision, sont des motifs de nullité (ATF 122 I 97 consid. 3 p. 99 ; 116 Ia 215 consid. 2c, et les arrêts cités).

L’autorité de recours peut renoncer à l’annulation d’une décision pour violation du droit d’être entendu ou pour un autre vice de forme, s’il peut être réparé dans le cadre de la procédure de recours menée devant elle. La réparation d’un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d’être entendu, n’est possible que lorsque l’autorité dispose du même pouvoir d’examen que l’autorité inférieure (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 p. 197 s. ; 133 I 201 consid. 2.2 p. 204 ; 132 V 387 consid. 5.1 p. 390 ; 129 I 129 consid. 2.2.3 p. 135 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C_572/2011 du 3 avril 2012 consid. 2.1 ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 8C_104/2010 du 29 septembre 2010 consid. 3.2 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; 1C_104/2010 du 29 avril 2010 consid. 2 ; ATA/435/2010 du 22 juin 2010 consid. 2 ; ATA/192/2012 du 3 avril 2012 ; ATA/163/2012 du 27 mars 2012 ; ATA/710/2011 du 22 novembre 2011 ; P. MOOR / E. POLTIER, Droit administratif,  vol. 2, 3ème éd., 2011, ch. 2.2.7.4 p. 322 et 2.3.3.1 p. 362 ; T. TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 516, n. 1553, et les références citées). Elle dépend toutefois de la gravité et de l’étendue de l’atteinte portée au droit d’être entendu et doit rester l’exception (ATF 126 I 68 consid. 2 p. 72, et la jurisprudence citée ; Arrêts du Tribunal fédéral précités) ; elle peut cependant se justifier en présence d’un vice grave lorsque le renvoi à l’instance inférieure constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF  133 I 201 précité consid. 2.2 p. 204 ; ATA/301/2012 du 15 mai 2012). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/301/2012 précité ; ATA/711/2011 du 22 novembre 2011).

9. Selon sa jurisprudence constante, la chambre de céans n’examine les recours en matière de contrôle de connaissances que sous l’angle restreint de l’arbitraire (ATA/904/2010 du 21 décembre 2010, et la jurisprudence citée), ce qui était également le cas du collège des professeurs à teneur de l’art. 31 RIO UNIGE. La réparation du droit d’être entendu de la recourante est donc envisageable si toutes les conditions sont réunies.

En l’espèce, il est établi que la commission RIO s’est saisie du traitement de l’opposition après le dépôt de celle-ci et qu’elle a effectivement procédé à son instruction. Si son préavis a été donné oralement au collège des professeurs le 16 novembre 2011, le doyen, dans la décision sur opposition querellée, a largement repris le contenu de l’instruction qu’elle a menée. S’il a pu motiver celle-ci aussi précisément c’est parce qu’il a été largement informé par ses représentants des points sur lesquels l’instruction avait porté. Devant la chambre de céans, la recourante a pu faire valoir de manière complète son point de vue et ce aussi efficacement que devant l’autorité de première instance. La violation du droit d’être entendu liée à l’absence de préavis écrit doit être considérée comme réparée dans le cadre de la présente procédure et la chambre administrative entrera en matière sur le fond du litige.

10. La recourante se plaint de ce que le collège des professeurs a tardé à statuer, sans respecter le délai de soixante jours instauré par l’art. 52 LPA. Selon l’art. 33 RIO-UNIGE, l’instance intimée doit en principe prendre sa décision dans les trente jours suivant la fin de l’instruction de l’opposition et non pas du dépôt de celle-ci. En l’espèce, le collège des professeurs a rendu sa décision écrite près d’un mois après avoir reçu le préavis oral de la commission RIO, lors de la séance du 16 novembre 2011. Il a respecté le délai de la disposition légale spéciale précitée.

11. La recourante se plaint de l’absence d’audition orale et contradictoire de la professeure examinatrice devant la commission avant la décision sur opposition. L’art. 28 al. 4 RIO-UNIGE ne prévoit que la possibilité d’entendre l’opposant, même si une audition d’autres personnes n’est pas inconcevable. Cette disposition réglementaire ne fonde aucun droit pour la recourante à une telle audition. En outre, un débat portant sur l’évaluation d’un examen oral ne justifie pas une telle audition.

12. La recourante considère que la limitation du pouvoir de cognition du collège des professeurs résultant de l’art. 31 al. 2 RIO-UNIGE ne repose pas sur une base légale suffisante et qu’elle est arbitraire.

L’art. 43 al. 2 LU charge l’université, dans le cadre de l’autonomie dont elle jouit, de mettre en place une procédure d’opposition permettant de trancher en premier lieu en son sein tout le contentieux administratif lié aux décisions qu’elle prend. Cette large délégation l’autorisait à mettre en place une procédure particulière pour les oppositions relatives aux décisions prises en matière de contrôle de connaissances et à restreindre à l’arbitraire ses pouvoirs en la matière, pour des raisons naturelles dans un tel domaine, conformément aux standards adoptés sur ce point par toutes les instances judiciaires (Arrêt du Tribunal fédéral 2D_77/2009 du 26 avril 2010 ; ATA/904/2010 précité). Ce grief n’a aucune consistance.

13. Finalement, la recourante considère que la note de 3,5 est arbitraire, reprenant sur ce point l’argumentation qu’elle avait développée devant la commission RIO.

En l’occurrence, la recourante se présentait à un examen faisant partie d’un programme de maîtrise universitaire. Il n’apparaît pas qu’elle ait été traitée différemment des autres étudiants lors de l’examen en question. Selon les notes personnelles prises par les deux jurés, son évaluation s’est faite en fonction de critères prédéterminés. Aucun argument ne peut être tiré d’éventuelles contradictions ou lacunes que recèleraient les notes personnelles précitées, dès lors qu’elles ne constituaient avant tout qu’un support utile à chacun des examinateurs dans leur délibération au sujet de la note à attribuer. Toutefois, les notes prises par chacun des examinateurs assoient les explications données par la professeure examinatrice sur les raisons de l’échec de la recourante, même si celle-ci a le sentiment d’avoir suffisamment étudié la matière, objet de l’examen. Elles permettent d’admettre qu’il n’était ni insoutenable, ni arbitraire, du point de vue des examinateurs, enseignants universitaires, de lui infliger une note insuffisante à l’issue d’un examen de droit des personnes subi sous la forme d’un cas pratique, lorsqu’ils retiennent tous deux des insuffisances ou des erreurs dans le raisonnement juridique, dans la référence à des base légales ou à des notions juridiques, voire dans la compréhension des enjeux juridiques du litige, et que les questions posées à la candidate n’apportent aucune amélioration à la situation.

14. Le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 1000.- sera mis à la charge de la recourante. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 janvier 2012 par Madame M______ contre la décision sur opposition de l’Université de Genève du 16 novembre 2011 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1000.- à la charge de Madame M______ ;

dit qu’il ne lui est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Alain Marti, avocat de la recourante, à l’Université de Genève, ainsi qu’à la Faculté de droit.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

Le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :