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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/557/2017

ATA/648/2017 du 13.06.2017 ( LIPAD ) , REJETE

Descripteurs : HONNEUR CERTIFICAT DE BONNE VIE ET MOEURS ; CONDAMNATION ; PEINE PRIVATIVE DE LIBERTÉ ; PEINE PÉCUNIAIRE ; CASIER JUDICIAIRE ; INTERPRÉTATION(SENS GÉNÉRAL)
Normes : LCBVM.8; LCBVM.10.al1.leta; LCBVM.10.al2; LCBVM.11.al1; LCBVM.11.al2; CP.369; LTF.103.al1; LTF.103.al2.letb
Résumé : Recours contre un refus de délivrer un certificat de bonne vie et moeurs (CBVM) au motif d'une condamnation du recourant à une peine pécuniaire de 170 jours-amende pour infraction à la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20). Interprétation de l'art. 10 al. 1 let. a de la loi sur les renseignements et les dossiers de police et la délivrance des certificats de bonne vie et moeurs du 29 septembre 1977 (LCBVM - F 1 25), qui n'a pas été modifié depuis l'entrée en vigueur, au 1er janvier 2007, de la nouvelle partie du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0). La peine pécuniaire, peine centrale depuis cette révision, équivaut à une peine privative de liberté sous l'égide de l'ancienne partie générale du CO. Par conséquent, la condamnation du recourant à une peine pécuniaire, pour une infraction d'une gravité certaine, constitue un motif de lui refuser la délivrance d'un CBVM au sens de l'art. 10 al. 1 let. a LCBVM. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/557/2017-DIV ATA/648/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 juin 2017

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Claudio Fedele, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 



EN FAIT

1) Par décision du 16 janvier 2017, le commissaire de police a refusé de délivrer à Monsieur A______, né en 1970 et domicilié à Genève, le certificat de bonne vie et mœurs (ci-après : CBVM) sollicité par ce dernier.

Ce refus était justifié par les renseignements de police concernant l’intéressé et se fondait sur l'art. 10 al. 1 let. a et b de la loi sur les renseignements et les dossiers de police et la délivrance des certificats de bonne vie et mœurs du 29 septembre 1977 (LCBVM - F 1 25).

Premièrement, les éléments contenus dans son extrait de casier judiciaire – à savoir deux condamnations les 2 mars 2015 et 22 mars 2016 pour infraction à la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) – n’étaient pas compatibles avec l’obtention du CBVM (art. 10 al. 1 let. a LCBVM).

Deuxièmement, les renseignements de police le concernant – soit une audition et un rapport de renseignements des 23 juillet et 24 août 2010 dans le cadre d’une procédure pénale pour encouragement à la prostitution, et une audition et un rapport de renseignements du 14 octobre 2015 en lien avec des plaques de contrôle non restituées malgré sommation – n’étaient également pas compatibles avec l’obtention du CBVM (art. 10 al. 1 let. b LCBVM).

2) a. Par acte du 17 février 2017, M. A______ a interjeté recours à l’encontre de cette décision auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative), concluant, sous « suite de frais et dépens », à l’annulation de la décision entreprise et à ce qu’il soit ordonné au commissaire de police de lui délivrer le CBVM requis.

Aucun des motifs retenus par le commissaire de police ne résistait à l’examen. M. A______ ne faisait l’objet d’aucune condamnation pénale définitive. S’il était vrai qu’il avait été condamné par jugement du Tribunal de police du 3 mars 2015 à une peine pécuniaire de cent septante jours-amende avec sursis pour infraction à la LEtr et que ce jugement avait été confirmé par arrêt de la chambre pénale d’appel et de révision de la Cour de justice (ci-après : CPAR) du 22 mars 2016, cette condamnation n’était pas définitive. M. A______ avait en effet saisi le Tribunal fédéral d’un recours à l’encontre de cet arrêt, recours qui avait effet suspensif. Il était donc inexact que son casier judiciaire fût incompatible avec l’obtention d’un CBVM.

De surcroît, le commissaire de police avait retenu à charge du recourant les actes d’instruction effectués en 2010 dans le cadre de la procédure pénale dont il avait fait l’objet pour encouragement à la prostitution. Or, cette procédure était la même que celle à l’issue de laquelle il avait été condamné pour violation à la LEtr. Les charges d’encouragement à la prostitution avaient finalement été levées par le Ministère public, qui ne l’avait poursuivi que pour infraction à la LEtr, comme cela ressortait de l’arrêt de la CPAR du 22 mars 2016 qu’il joignait à son recours. Le commissaire de police ne pouvait donc pas retenir ces charges pour refuser de lui délivrer un CBVM.

Enfin, s’agissant des plaques de contrôle qui n’auraient pas été restituées malgré les sommations de l’autorité, il s’agissait de modestes actes qui ne pouvaient avoir à eux seuls pour effet de dénier avec certitude l’honorabilité à laquelle M. A______ avait droit. En effet, étant souvent en voyage, c’était uniquement par désorganisation qu’il n’avait pas donné suite aux rappels de l’autorité.

b. Selon l’arrêt de la CPAR du 22 mars 2016 joint à ses observations, les faits reprochés au recourant étaient les suivants. M. A______ et son frère étaient les uniques actionnaires d’une société, propriétaire et exploitante d’un cabaret à Genève depuis le mois de juin 2009. Nombre des « artistes » ayant travaillé audit cabaret entre juin 2009 et décembre 2010 se prostituaient alors que leur autorisation de séjour l'interdisait. Ce nonobstant, une des missions principales des « artistes » du cabaret était d'encourager les clients à consommer de l'alcool, sachant que les ventes de champagne constituaient la principale rentrée financière de l'établissement. Cette mission d'encouragement à la consommation d'alcool était également contraire au statut d'artiste de cabaret des précitées. Ces dernières, qui touchaient un salaire ne leur permettant pas de vivre décemment à Genève, étaient incitées dans cette activité par le biais de commissions. En les encourageant de la sorte, mais aussi en raison du système de rémunération des employées et du mode de fonctionnement de l'établissement, M. A______ et son frère avaient sciemment, sinon encouragé, du moins grandement facilité l'activité de prostitution des « artistes » de cabaret qu'ils employaient, cette activité leur permettant de réaliser des gains substantiels. Ils avaient ainsi enfreint l’art. 116 al. 1 let. b et al. 3 let. a LEtr.

3) En date du 22 mars 2017, le commissaire de police a conclu au rejet du recours formé par M. A______ dans la mesure où il était recevable, et à la confirmation de la décision entreprise.

Il joignait notamment à son courrier le rapport de renseignement du 10 juin 2016 concernant l’événement du 14 octobre 2015, à savoir le défaut de restitution, par M. A______, des plaques de contrôle de son véhicule malgré les sommations de l’autorité.

4) Par courrier du 23 mars 2017, la chambre administrative a transmis au recourant, suite à sa demande, ledit rapport de renseignement, et lui a imparti un délai au 2 mai 2017 pour formuler toute requête complémentaire.

Selon les pièces transmises par l’intimé, M. A______ avait fait l’objet, le 14 septembre 2015, d’une décision de retrait de son permis de circulation et des plaques d’immatriculation de son véhicule pour défaut de présentation de ce dernier au contrôle technique. Un délai de dix jours lui avait été imparti pour la restitution du permis et des plaques au service cantonal des véhicules ou pour la remise d’une nouvelle attestation d’assurance et la réussite du contrôle technique. À défaut de régularisation dans le délai imparti, les faits, constitutifs d’une infraction à l’art. 97 al. 1 let. b de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), seraient dénoncés au Ministère public. Par mandat de comparution du 30 mai 2016, M. A______ avait été convoqué à une audience le 6 juin 2016 en tant que prévenu d’infraction à l’art. 97 al. 1
let. b LCR. Un rapport de renseignements établi le 10 juin 2016 par la police faisait état d’un contact téléphonique avec M. A______ au mois de mars 2016, et de l’impossibilité de contacter ce dernier depuis lors.

5) Le recourant a adressé ses observations sur ledit rapport le 31 mars 2017.

Il s’étonnait ainsi que ce rapport soit silencieux sur la suite qu’il avait donnée au mandat de comparution à l’audience prévue le 6 juin 2016.

6) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

7) Par arrêt du 24 mai 2017, le Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par M. A______ à l’encontre de l’arrêt de la CPAR du 22 mars 2016, confirmant celui-ci (arrêt du Tribunal fédéral 6B_494/2016, consulté sur le site www.bger.ch).

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. En vertu de l'art. 8 LCBVM, quiconque justifie de son identité et satisfait aux exigences du chapitre IV LCBVM peut requérir la délivrance d'un certificat de bonne vie et mœurs.

b. Le CBVM est refusé à celui dont le casier judiciaire contient une condamnation à une peine privative de liberté. L’autorité compétente apprécie librement, eu égard aux circonstances, si certaines condamnations de peu de gravité peuvent ne pas être retenues. Il peut en être de même des condamnations en raison d’une infraction non intentionnelle (art. 10 al. 1 let. a LCBVM). Le CBVM est également refusé à celui dont l'honorabilité peut être déniée avec certitude en raison soit d'une ou de plusieurs plaintes fondées concernant son comportement, soit de contraventions encourues par lui à réitérées reprises, notamment pour ivrognerie ou toxicomanie, ou encore s'il s'agit d'un failli inexcusable (art. 10 al. 1 let. b LCBVM). Les faits de peu d'importance ou ceux qui sont contestés et non établis ne sont pas pris en considération (art. 10
al. 2 LCBVM).

c. Celui qui tombe sous le coup de l’art. 10 al. 1 let. a LCBVM peut néanmoins recevoir un CBVM si la moitié de la durée déterminante pour l'élimination de l'inscription en vertu de l'article 369 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) est écoulée (art. 11 al. 1 LCBVM). Celui qui tombe sous le coup de l’art. 10 al. 1 let. b LCBVM peut recevoir un certificat de bonne vie et mœurs si dans les deux ans qui précèdent la demande, sa conduite n’a donné lieu à aucun fait pouvant porter atteinte à son honorabilité (art. 11
al. 2 LCBVM).

d. Selon l’art. 369 al. 3 CP, les jugements qui prononcent une peine privative de liberté avec sursis, une privation de liberté avec sursis, une peine pécuniaire, un travail d'intérêt général ou une amende comme peine principale sont éliminés d'office après dix ans.

3) a. L'art. 10 al. 1 let. b LCBVM a été introduit dans le but de saisir les comportements relevant du droit pénal dès leur commission, et de permettre au commissaire de police d'en tenir compte avant la fin de l'instruction pénale et le prononcé judiciaire (Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève, 1977, p. 4774). Celui qui a fait l'objet de plaintes, même si elles sont encore en cours d'instruction, peut ainsi faire l'objet, le cas échéant, d'un refus de délivrance d'un CBVM (ATA/507/2012 du 31 juillet 2012 consid. 3a ; ATA/57/2003 du 28 janvier 2003 consid. 3a)

b. Une interprétation littérale de l'art. 10 al. 2 LCBVM viderait l'institution du CBVM de son sens : elle mettrait le requérant non pas au bénéfice du doute, mais du manque d'information. Elle empêcherait le commissaire de police d'apprécier si les faits resteront vraisemblablement et définitivement non établis ou si, au contraire, ils seront susceptibles d'être prouvés. En revanche, une interprétation qui négligerait le but de l'alinéa 2 porterait une atteinte grave à la liberté individuelle. C'est pourquoi il appartient au commissaire de police d'effectuer ses recherches en tenant compte, notamment, de la gravité de l'infraction, de la complexité des enquêtes et des circonstances particulières ; il devra, dans un délai raisonnable et après avoir procédé à une pesée des intérêts en cause, prendre une décision motivée permettant un contrôle judiciaire (ATA/507/2012 précité consid. 3b ; ATA/57/2003 précité consid. 3b).

c. Le CBVM vise à assurer la constatation de la bonne réputation de l'intéressé à l'égard des tiers dans certaines situations où il est requis, par exemple pour la prise d'un emploi. L'exclusion d'un tel certificat est attachée à l'existence d'un comportement répréhensible par rapport aux critères éthiques adoptés par la majorité de la population (ATA/675/1997 du 4 novembre 1997 et la référence citée). La bonne réputation peut se définir comme le fait de ne pas avoir enfreint les lois régissant la vie des hommes en société, ni heurté au mépris d'autrui les conceptions généralement répandues, conçues comme des valeurs et formant la conscience juridique de la majorité de la population (RDAF 1976 p. 68).

4) La décision de délivrer ou non un CBVM ne relève pas de l'opportunité, mais repose sur des éléments objectifs et d'autres relevant du pouvoir d'appréciation de l'autorité, dont l'excès et l'abus sont revus par la chambre de céans avec plein pouvoir d'examen (art. 61 al. 1 let. a et al. 2 LPA).

5) Selon l’art. 103 al. 1 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le recours au Tribunal fédéral n’a, en règle générale, pas d’effet suspensif. En vertu de l’art. 103 al. 2 let. b LTF, le recours a effet suspensif en matière pénale, dans la mesure des conclusions formulées, s'il est dirigé contre une décision qui prononce une peine privative de liberté ferme ou une mesure entraînant une privation de liberté ; l'effet suspensif ne s'étend pas à la décision sur les prétentions civiles.

La loi ne vise ici que les cas où la décision pénale attaquée, si elle était immédiatement exécutée, entraînerait effectivement une privation de liberté. L’idée est évidemment que si une personne est privée de liberté à tort, ce préjudice n’est guère réparable (Bernard CORBOZ, Commentaire de la LTF, 2014, n. 21 ad art. 103 LTF).

6) En l’espèce, le recourant a été condamné le 3 mars 2015 pour incitation à l’entrée, à la sortie ou au séjour illégaux (infraction à l’art. 116 al. 1 let. b et al. 3 let. a LEtr). Lorsqu’il a requis un CBVM, cette condamnation avait été confirmée par arrêt de la CPAR du 22 mars 2016. Contrairement à ce qu’il soutient, le fait qu’il ait recouru à l’encontre de cette décision auprès du Tribunal fédéral n’avait pas d’effet suspensif. En effet, il n’avait pas été condamné à une peine privative de liberté ferme, mais à une peine pécuniaire de cent septante jours-amende avec sursis (art. 103 al. 2 let. b LTF a contrario). Le commissaire de police a donc correctement procédé en retenant cette condamnation, qui n’est pas de faible gravité, dans sa décision.

En tout état de cause, même si le recours avait eu effet suspensif, les faits qui étaient reprochés au recourant et qui avaient été retenus tant par le Tribunal pénal que par la CPAR – à savoir encourager l'activité de prostitution des « artistes » de cabaret qu'il employait avec son frère, cette activité leur permettant de réaliser des gains substantiels – étaient d’une gravité certaine, et de nature à atteindre son honorabilité. Ils constituaient donc un juste motif pour refuser de lui délivrer un CBVM au sens de l’art. 10 al. 1 let. b LCBVM.

7) Même si ce point n’est pas souligné par le recourant, il sied de relever que ce dernier a été condamné à une peine pécuniaire, alors que l’art. 10 al. 1 let. a LCBVM prévoit que le CBVM est refusé à celui dont le casier judiciaire contient une condamnation à une peine privative de liberté. La question se pose donc de savoir si cette condamnation peut justifier le refus de délivrer un CBVM.

a. La loi s’interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Le juge ne se fonde cependant sur la compréhension littérale du texte que s’il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 137 IV 180 consid. 3.4). En revanche, lorsque des raisons objectives permettent de penser que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause, il y a lieu de déroger au sens littéral d’un texte clair (ATF 137 I 257 consid. 4.1) ; il en va de même lorsque le texte conduit à des résultats que le législateur ne peut avoir voulus et qui heurtent le sentiment de la justice et le principe de l’égalité de traitement (ATF 135 IV 113 consid. 2.4.2). De tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi (ATF 135 II 78 consid. 2.2). Si le texte n’est ainsi pas absolument clair, si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l’intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d’autres dispositions légales (interprétation systématique ; ATF 136 III 283 consid. 2.3.1). Le juge ne privilégie aucune méthode d’interprétation, mais s’inspire d’un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme (ATF 139 IV 270 consid. 2.2 ; 137 IV 180 consid. 3.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_839/2015 du 26 mai 2016 consid. 3.4.1 ; 1C_584/2015 du 1er mars 2016 consid. 4.1).

b. Le législateur suisse a fait de l’aménagement des sanctions alternatives l’un des principaux objets de la révision de la partie générale du CP, adoptée le 13 décembre 2002 et entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (FF 2002 7658). La peine pécuniaire, destinée à se substituer aux peines privatives de liberté de moins de six mois, en est même devenue la peine centrale. La privation de liberté n’intervient ainsi qu’en ultima ratio (Virginie MAIRE, La peine pécuniaire, in : La nouvelle partie générale du code pénal suisse, Berne 2006, pp. 161-162). L’art. 40 CP prévoit en effet que la durée des peines privatives de liberté est de six mois au moins et de vingt ans au plus. Le législateur érige dès lors en principe l’abolition des courtes peines privatives de liberté (Pierre VENTURA, La peine privative de liberté, in : op. cit., p. 204).

c. La LCBVM date de 1979 et la formulation contenue à l’art. 10 al. 1 let. a LCBVM n’a pas été modifiée depuis, sous réserve de la suppression, le 27 janvier 2007 des termes « non radiée » après le mot « condamnation » (MGC 2006-2007/IA – 487) : elle a donc été adoptée alors que la partie générale du CP n’avait pas encore été révisée, et que la peine privative de liberté était la peine centrale.

d. En l’espèce, la condamnation du recourant à une peine pécuniaire équivaut à une condamnation à une peine privative de liberté sous l’égide de l’ancienne partie générale du CP. Par conséquent, il convient de considérer que sa condamnation à une peine pécuniaire de cent septante jours-amende, pour une infraction d’une gravité certaine et pour laquelle l’application de la deuxième phrase de l’art. 10 al. 1 let. a LCBVM ne se justifie pas, constitue un motif de lui refuser la délivrance d’un CBVM au sens de l’art. 10 al. 1
let. a LCBVM. C’est donc à juste titre que le commissaire de police a refusé d’accéder à sa requête. Cette condamnation datant du 2 mars 2015, elle ne sera éliminée de son casier judiciaire qu’en 2025 (art. 369 al. 3 CP). La moitié de la durée déterminante pour l'élimination de cette inscription n’étant pas écoulée, un CBVM ne peut être délivré (art. 11 al. 1 LCBVM).

8) La condamnation du recourant à une peine pécuniaire de cent septante jours-amende pour infraction à la LEtr justifiant à elle seule le refus de lui délivrer un CBVM, la question de savoir si l’absence de restitution de ses plaques de contrôle malgré des sommations de l’autorité le justifiait également peut rester ouverte.

9) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

10) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée
(art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 février 2017 par Monsieur A______ contre la décision du commissaire de police du 16 janvier 2017 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Claudio Fedele, avocat du recourant ainsi qu'au commissaire de police ;

Siégeants : Mme Junod, présidente, MM. Thélin et Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :