Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/957/2018

ATA/598/2018 du 12.06.2018 ( FORMA ) , ADMIS

Descripteurs : AVOCAT; CERTIFICAT DE CAPACITÉ ; TITRE UNIVERSITAIRE ; COMPÉTENCE ; RECONNAISSANCE D'UN DIPLÔME ; INTERDICTION DE L'ARBITRAIRE
Normes : Cst.29.al2; LPA.41; RPAv.21.al1; RPAv.22.al6; LPAv.33A.al1.leta; LLCA.7; LLCA.3.al1; LPAv.25.letf; LPAv.26.al1; LPAv.24; Cst.9; RPAv.33
Résumé : Le bureau du conseil de direction de l'intimée est l'autorité compétente pour se prononcer sur la problématique de l'admission d'un étudiant à l'examen final du brevet d'avocat. Le recourant, au bénéfice d'un master en droit délivré par une université de droit suisse (ayant bénéficié du régime dit des « prérequis »), a été autorisé à suivre la formation approfondie dispensée par l'intimée. Les conditions d'admission au stage d'avocat sont les mêmes que celles relatives à la formation approfondie. Or, il serait arbitraire et contraire au principe de la bonne foi de permettre au recourant de suivre cette formation et de l'admettre au stage d'avocat sans qu'il puisse se présenter à l'examen final du brevet d'avocat. Les travaux préparatoires de la LPAv ne commandent pas d'empêcher l'étudiant au bénéfice de 180 crédits ECTS en droit, dont 120 crédits ECTS en droit suisse, de se présenter à l'examen final. Recours admis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/957/2018-FORMA ATA/598/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 juin 2018

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre


ÉCOLE B______



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1976, est titulaire d'une licence ès lettres délivrée par l'Université de Lausanne en juillet 2003. Ce grade est équivalent au grade de master ès lettres.

Il est également titulaire d'un master en droit obtenu le 20 juin 2009 à l'Université de Neuchâtel.

Enfin, après avoir soutenu une thèse, l'Université de Neuchâtel lui a conféré le grade de docteur ès lettres avec la mention magna cum laude le 24 août 2017.

Depuis le 1er février 2018, il est doctorant en droit à l'Université de Fribourg.

2) Du 15 février 2010 au 25 mars 2011, M. A______ a été inscrit au tableau des avocats-stagiaires du canton de Vaud. Il a également été engagé en tant que stagiaire au service C______ du canton du Valais du 9 décembre 2014 au 6 mars 2015 et à l'État-Major du département D______ du canton du Valais du 1er mai au 31 décembre 2016.

3) Le 3 octobre 2017, M. A______ a contacté, par courriel, la directrice de l’École B______ (ci-après :  l’École B______), afin de savoir s'il avait besoin de requérir une équivalence pour s'inscrire.

Il avait commencé sa licence en droit, en 1995, avant la réforme de Bologne, l'ayant reprise en 2007. Déjà licencié dans une autre matière, il avait bénéficié du régime dit des « prérequis » (accès au master sur équivalence d'un bachelor) à l'Université de Neuchâtel.

Il disposait d'une « attestation de prérequis équivalent au bachelor » émise par cette université en mars 2008 et, en tout, de 185 crédits de l'European Credit Transfer and Accumulation System (ci-après : ECTS) dont au moins 120 en droit suisse. Il avait en outre effectué un stage d'avocat de treize mois au barreau du canton de Vaud et douze (recte : dix) mois de stage à E______ en tant que juriste.

4) Après un contact téléphonique avec la directrice de l’École B______ courant octobre 2017, M. A______ a sollicité son inscription à l’École B______, par courrier du 19 octobre 2017, pour la session 2018. Il demandait également une équivalence au bachelor en droit, dans la mesure où il n'était pas titulaire de ce diplôme.

 

5) Entre les 22 et 29 novembre 2017, un échange de courriels est intervenu entre la directrice de l’École B______, qui sollicitait des informations complémentaires, et M. A______, qui a fourni notamment des précisions quant à la comptabilisation de crédits ECTS.

6) Par décision du 15 décembre 2017, la directrice de l’École B______ a refusé la candidature de M. A______ pour le semestre de printemps 2018.

Pour être admis à l’École B______, le candidat devait être titulaire d'une licence en droit suisse, d'un bachelor en droit suisse délivré par une université suisse ou avoir obtenu 180 crédits ECTS en droit, dont 120 crédits ECTS en droit suisse, ces derniers ayant été délivrés par une université suisse et acquis dans le cadre de la formation de base.

Or, l'intéressé n'était titulaire ni d'une licence, ni d'un bachelor en droit suisse. Son admission ne pouvait dès lors intervenir que sur la base de l'existence de 180 crédits ECTS en droit, dont 120 crédits ECTS en droit suisse délivrés par une niversité suisse et acquis dans le cadre de la formation de base.

Le fait d'avoir obtenu un master en droit suisse ne garantissait pas à un candidat la reconnaissance automatique de 90 crédits ECTS. Il fallait vérifier pour chaque cours si les crédits ECTS pouvaient être validés comme relevant de la formation de base en droit suisse.

Seuls les cours suivis dans le cadre du bachelor en droit de l'Université de Fribourg et du master en droit de l'Université de Neuchâtel (dont la passerelle) pouvaient être pris en considération pour M. A______.

Après examen du procès-verbal intermédiaire de notes du bachelor en droit de l'Université de Fribourg, 54 crédits ECTS en droit, dont 50 crédits ECTS en droit suisse, pouvaient être pris en considération. Ces 50 crédits ECTS représentaient les cours d'introduction au droit (14 crédits ECTS), droit public (12 crédits ECTS), fondement du droit privé (inclus droit romain) (12 crédits ECTS), droit pénal I (12 crédits ECTS). En revanche, le cours et le mémoire « Travail propédeutique : Introduction technique » (4 crédits ECTS) ne pouvaient pas être pris en considération comme relevant du droit suisse.

Après examen du procès-verbal de notes de master en droit de l'Université de Neuchâtel, 124 crédits ECTS en droit, dont 82 crédits ECTS en droit suisse, pouvaient être pris en considération. Ces 82 crédits ECTS représentaient les cours d'introduction aux études genre (5 crédits ECTS), droit et progrès médical (4 crédits ECTS), philosophie du droit (6 crédits ECTS), droit fiscal (6 crédits ECTS), droit administratif (12 crédits ECTS), droit des obligations I et II (15 crédits ECTS), droit international public (8 crédits ECTS), mémoire sur « mariage et transsexualisme : une opération de changement de droit. Analyse des solutions juridiques suisse et européenne » (18 crédits ECTS), droit des migrations (séminaire thématique) (4 crédits ECTS), droits de l'homme et procédure (séminaire thématique) (4 crédits ECTS). En revanche, les cours intitulés droit canonique des procès (4 crédits ECTS), introduction au droit de l'Église et des religions (6 crédits ECTS), séminaire de Strasbourg (4 crédits ECTS), Swiss Moot Court (partie orale) (4 crédits ECTS), Swiss Moot Court (partie écrite) (4 crédits ECTS), « WTO Law » (8 crédits ECTS), stage auprès du service juridique de l'entreprise F______ (8 crédits ECTS), stage auprès du service juridique de l'entreprise F______ (4 crédits ECTS) ne pouvaient pas être pris en considération comme relevant du droit suisse.

De plus, les « Séminaires en équivalence 1 et 2 » ne pouvaient pas être pris en compte, dans la mesure où leur contenu ne faisait l'objet d'aucune attestation officielle de l'Université de Fribourg.

Ainsi, M. A______ totalisait 178 crédits ECTS en droit, dont 132 crédits ECTS en droit suisse. Il lui manquait par conséquent 2 crédits ECTS pour pouvoir accéder à l’École B______.

L'attention de l'intéressé était attirée sur le fait que s'il faisait le choix d'utiliser des crédits de master pour remplacer l'absence de bachelor, ces crédits ne pourraient pas être réutilisés au moment de son inscription à l'examen final du brevet d'avocat. Au moment de cette inscription, il devrait avoir obtenu une maîtrise suisse en droit avec un nombre de crédits ECTS égal à 90, crédits indépendants des 120 crédits ECTS déjà accordé au titre des équivalences.

7) Le 21 décembre 2017, M. A______ a formé opposition contre la décision précitée, concluant à son annulation et à la reconnaissance des 2 crédits ECTS manquants.

Il a demandé également des précisions, respectivement une décision formelle, sur la problématique de l'impossibilité de réutiliser ses crédits du master en droit pour accéder à l'examen final du brevet d'avocat.

8) Par décision sur opposition du 11 janvier 2018, dont l'objet était « Votre opposition », la directrice de l’École B______ a accordé 14 crédits ECTS supplémentaires obtenus dans le cadre des cours économie pour juristes (6 crédits ECTS), nouvelles thérapies et biotechnologies (4 crédits ECTS) et problème de nationalité sportive (4 crédits ECTS).

M. A______ totalisait ainsi 192 crédits ECTS en droit, ce qui lui permettait d'accéder à l’École B______ au printemps 2018.

Toutefois, il manquait à son dossier les originaux de l'extrait du casier judiciaire et l'extrait du registre des poursuites, si bien que l'inscription définitive était conditionnée à la délivrance de ces deux documents ainsi qu'à leur contenu.

9) Par décision du même jour, dont l'objet était « Votre demande de précisions quant à l'examen final », la directrice de l’École B______ a confirmé à M. A______ qu'il lui était impossible de réutiliser son master en droit de l'Université de Neuchâtel, même partiellement, lors de l'inscription à l'examen final. Les crédits ECTS du master exigés lors de l'inscription à l'examen final ne pouvaient pas être les mêmes que ceux utilisés pour intégrer l’École B______ et devaient être acquis dans le cadre d'un master achevé et réussi. Il devrait obligatoirement s'agir d'un master indépendant de celui qui lui permettait d'intégrer l’École B______.

L’École B______ était accessible en principe aux étudiants ayant un bachelor en droit suisse délivré par une université suisse. Ces étudiants devaient en parallèle ou par la suite avoir fini leurs études de droit et obtenu un master en droit délivré par une université suisse pour pouvoir se présenter à l'examen final. Ainsi, un étudiant « ordinaire » devenait avocat après avoir eu 180 crédits ECTS avec son bachelor et 90 crédits ECTS avec son master.

Dans la mesure où il avait sollicité une dérogation pour accéder à l’École B______ en se prévalant de crédits ECTS issus d'une partie du bachelor en droit de l'Université de Fribourg et d'un master en droit de l'Université de Neuchâtel, ces crédits ECTS avaient été utilisés pour compenser l'absence de bachelor en droit suisse, soit la première formation requise. Ces mêmes crédits ECTS ne pouvaient plus être utilisés pour affirmer que la seconde partie de la formation de base requise aurait été réalisée. Une telle solution créerait une sorte de formation sommaire exclue par le législateur et permettrait à des personnes n'ayant pas la formation nécessaire d'exercer une profession en violation des exigences posées par la loi.

Ainsi, dès lors que l'intéressé avait fait le choix d'utiliser les crédits ECTS d'un master pour réunir les 120 crédits ECTS nécessaires pour remplir l'exigence de la condition d'entrée à l’École B______, il lui faudrait ensuite obtenir un autre master qui lui permettrait d'accéder à l'examen final. Il s'agirait d'un master distinct de celui dont les crédits ECTS avaient été utilisés pour compenser l'absence de bachelor, étant précisé que ce master devrait comporter 90 crédits ECTS au total comme tout master en droit.

L'option qui consisterait par exemple, afin d'éviter d'avoir à refaire un master, d'ajouter des crédits ECTS « hors-master », ne pouvait pas être acceptée, car elle était illicite. Une autre option qui consisterait à suivre des cours de droit et à passer des examens à titre d'auditeur libre serait également écartée.

10) Le 18 janvier 2018, M. A______ a transmis les documents demandés pour valider son inscription définitive à l’École B______.

Il a également formé opposition à la décision du 11 janvier 2018 concernant la problématique de la réutilisation de son master en droit délivré par l'Université de Neuchâtel lors de l'inscription à l'examen final.

11) Par décision du 22 février 2018, le bureau du conseil de direction de l’École B______ (ci-après : le bureau) a transmis à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) l'écriture de M. A______ du 18 janvier 2018 concernant trois griefs interprétés comme visant la décision du 11 janvier 2018, dont l'objet était « Votre opposition ». Il a rejeté pour le surplus son opposition dans la mesure de sa recevabilité.

On comprenait de l'argumentation de l'opposant qu'il considérait que, pour son admission à l’École B______, sa licence ès lettres aurait été suffisante pour qu'il soit admis à l’École B______, sans qu'il soit nécessaire d'utiliser ses crédits ECTS de son master en droit de l'Université de Neuchâtel. Or, ce grief ne visait pas la décision de l’École B______ du 11 janvier 2018 dont l'objet était « Votre demande de précisions quant à l'examen final », mais visait la décision sur opposition du 11 janvier 2018 intitulée « Votre opposition ». Or, la chambre administrative était compétente pour un recours contre la décision sur opposition du 11 janvier 2018.

De la même façon, l'argumentation, selon laquelle son master en droit devrait être considéré comme une licence en droit, de sorte qu'il aurait dû être admis à l’École B______ sur la seule base de son master en droit, visait la décision la décision sur opposition du 11 janvier 2018 intitulée « Votre opposition ».

Cependant, on pouvait aussi comprendre de cette argumentation qu'il considérait que le titulaire d'une licence en droit pouvait se présenter avec cette licence tant pour la formation approfondie qu'à l'examen final, la même chose devrait valoir pour un titulaire d'un master en droit. Or, la lettre de la loi distinguait clairement bachelor, master et licence. Le système de la licence était un système qui équivalait à une formation de bachelor et de master, raison pour laquelle la détention d'une licence en droit était suffisante pour accéder tant à l’École B______ qu'à l'examen final du brevet d'avocat et raison pour laquelle un bachelor en droit était requis pour accéder à l’École B______ et un master en droit pour être admis à l'examen final. Dès lors, un master en droit ne saurait, sans bachelor en droit préalable, être considéré comme l'équivalent d'une licence en droit.

Son grief relatif à la non-conformité de l'art. 25 let. f de la loi sur la profession d’avocat du 26 avril 2002 (LPAv - E 6 10) à la loi fédérale sur la libre circulation des avocats du 23 juin 2000 (LLCA - RS 935.61) concernait la décision sur opposition du 11 janvier 2018 intitulée « Votre opposition », si bien que l'écriture devait être transmise à la chambre administrative comme objet de sa compétence.

Toutefois, on pouvait aussi comprendre de ce grief qu'il considérait comme non conforme à la LLCA le fait que les crédits ECTS de son master utilisés pour compenser l'absence de bachelor ne puissent plus être réutilisés pour être admis à l'examen final du brevet d'avocat. Or, le canton de Genève demeurait libre de fixer des exigences plus strictes pour l'obtention du brevet d'avocat. Le but des art. 25 let. f LPAv et 33A al. 1 let. a LPAv était que le candidat qui se présentait à l'examen final soit titulaire d'un bachelor en droit et d'un master en droit, cette exigence visant, d'une part, à protéger le candidat à l'examen final lui-même, afin qu'il n'ait pas de lacunes l'empêchant de présenter avec succès cet examen, et, d'autre part, à protéger les futurs clients de l'avocat, ce dernier devant maîtriser les notions de droit de procédure enseignées à l’École B______ mais aussi de droit de fond enseignées dans le cadre d'un bachelor en droit puis approfondies dans le cadre d'un master en droit. Si l’École B______ acceptait l'utilisation de crédits ECTS d'un master en droit pour compenser une absence partielle de bachelor en droit, le but protecteur des art. 25 let. f LPAv et 33A al. 1 let. a LPAv ne saurait être éludé par le « recyclage » du master en droit déjà utilisé pour compenser l'absence de bachelor, alors qu'une telle manière de procéder viderait de son sens les conditions académiques nécessaires à l'obtention du brevet d'avocat.

Quant au grief relatif à l'impossibilité de réutiliser le master déjà employé pour compenser les crédits ECTS manquants pour le bachelor en droit et à l'obligation d'accomplir un master en droit autre que celui utilisé pour compenser lesdits crédits ECTS relèveraient d'une « tracasserie administrative », d'une « science de l'arbitraire » et ne respecterait pas « le plus élémentaire du principe de la proportionnalité », il n'était pas suffisamment motivé et apparaissait irrecevable. Toutefois et par surabondance de moyens, le but de l'exigence d'un bachelor en droit et d'un master en droit était de protéger, d'une part, le candidat afin qu'il dispose des connaissances suffisantes pour ne pas rencontrer de difficultés insurmontables lors du brevet d'avocat et, d'autre part, l'intérêt des futurs clients de l'avocat, afin que la personne les représentant dispose de connaissances suffisantes en droit. C'était dans ce même intérêt qu'il était exigé de l'intéressé de présenter un master distinct que celui utilisé pour compenser les crédits ECTS manquant à son bachelor partiel. On ne saurait y voir du formalisme excessif ou de l'arbitraire dans la décision, qui apparaissait au demeurant proportionnée, aucun autre moyen ne permettant d'atteindre les buts visés.

Enfin, l'argumentation de M. A______ sur l'impossibilité technique de présenter de nouveaux examens de master dont les crédits ECTS seraient distincts de ceux obtenus dans son master en droit obtenu en 2009 était difficile à comprendre. Il pouvait en effet s'agir de n'importe quel master de droit de n'importe quelle université suisse.

L'en-tête de cette décision mentionnait « Opposition de M. A______ à la décision de refus d'équivalence pour l'examen final du 11 janvier 2018 ».

12) Le 23 février 2018, la directrice de l’École B______ a transmis à la chambre administrative l'écriture de M. A______ du 18 janvier 2018 s'agissant des griefs interprétés comme visant la décision sur opposition du 11 janvier 2018, dont l'objet était « Votre opposition ».

La chambre administrative a ouvert une procédure sous le numéro de cause A/651/2018.

13) Invité à se déterminer par le juge délégué dans la cause A/651/2018, M. A______ a, le 27 février 2018, indiqué son absence de volonté de recourir contre la décision d'admission à l’École B______ du 11 janvier 2018, dont l'objet était « Votre opposition ».

14) Par décision du 1er mars 2018 (ATA/198/2018), le juge délégué a rayé la cause A/651/2018 du rôle.

15) Par acte déposé au greffe de la chambre administrative le 20 mars 2018, M. A______ a formé un recours. Il a conclu à ce que la nullité de la décision du 11 janvier 2018, dont l'objet était « Votre demande de précisions quant à l'examen final », soit constatée, à l'annulation et à ce que soit déclaré nulle la décision du 22 février 2018, « sous suite de frais et dépens ».

La décision du 11 janvier 2018 devait être déclarée nulle, accessoirement être annulée, au motif qu'elle avait été rendue par une autorité incompétente.

La décision du 22 février 2018 était viciée formellement, si bien qu'elle devait être déclarée nulle, accessoirement être annulée. Dans l'opposition du 18 janvier 2018, il n'avait jamais fait mention d'une demande d'équivalence. Il avait uniquement demandé à ce qu'il soit renoncé à une décision contraire au droit. Le bureau se prévalait de son opposition pour « métamorphoser » la nature de sa décision du 11 janvier 2018, d'une demande de précision par rapport à l'examen final à un refus d'équivalence pour l'examen final. Le bureau s'était dès lors arrogé une compétence qui lui faisait défaut.

Il n'était pas possible d'accéder au master sans un diplôme équivalent au bachelor de la branche correspondante. Ainsi, la notion de bachelor partiel utilisée dans la décision du 22 février 2018 n'existait pas.

Le bureau n'était pas compétent pour qualifier ou requalifier les titres universitaires. Sa compétence se limitait au simple contrôle de détention du diplôme requis pour être admis à la formation approfondie et être admis à l'examen final.

Dans la mesure où il était titulaire d'un master en droit, équivalent en tous points à une licence en droit, il remplissait la condition posée par l'art. 25 let. f LPAv pour qu'il puisse être admis à la formation dispensée par l’École B______. De la même façon, son master était suffisant pour être admis à l'examen final. Son titre universitaire ne pouvait pas être décomposé. Il était plein et entier. En effet, il avait obtenu son master en droit à l'Université de Neuchâtel, sur la base de sa licence ès lettres ajoutée d'une garantie contractuelle d'obtention des prérequis. Son cursus juridique de 1995, sous le régime des licences, à 2008 avait été pris en considération. Son master devait être considéré comme l'accomplissement complet des cursus requis, accessoirement l'équivalent d'une licence en droit. Ainsi, ce diplôme universitaire devait lui ouvrir tous les accès qu'une licence ouvrait.

Il était disproportionné d'exiger qu'il obtienne un nouveau master, ce qui le pousserait au final à obtenir 360 crédits ECTS, cela alors même qu'il disposait des connaissances académiques et professionnelles nécessaires pour la pratique du métier d'avocat. La mesure la plus apte à garantir les buts visés par le bureau serait l'examen de la formation approfondie de l’École B______.

Enfin, il était arbitraire d'exiger qu'il passe un second master en droit pour pouvoir se présenter à l'examen final du brevet d'avocat.

Le recours a été enregistré sous le numéro de cause A/957/2018, soit la présente procédure.

16) Le 18 avril 2018, l’École B______ a conclu au rejet du recours, sous suite de frais.

Le bureau était l'autorité de décision pour les admissions, les équivalences et les exclusions, de sorte qu'il était bien l'autorité compétente pour rendre la décision du 11 janvier 2018 dont l'objet était « Votre demande de précisions quant à l'examen final ».

Le fait que l'intitulé des deux décisions du 11 janvier 2018 ne soit pas strictement identique ne changeait rien au fait que les deux décisions concernaient le même objet, soit la possibilité pour M. A______ d'accéder à l'examen final sur la base d'un master en droit déjà utilisé préalablement pour accéder à l’École B______ afin de pallier l'absence de bachelor en droit suisse. Du reste, le bureau était compétent tant pour les admissions que les équivalences, de sorte que le fait que la décision concernait une équivalence ou une admission à l'examen final n'avait aucune influence sur la compétence du bureau. Enfin, c'était bien à la demande expresse de l'intéressé que la décision du 11 janvier 2018 dont l'objet était « Votre demande de précisions quant à l'examen final » avait été rendue.

La décision du 22 février 2018 utilisait l'expression « bachelor partiel » afin de désigner les notes obtenues en vue de l'obtention d'un bachelor par l'intéressé, sans qu'il n'ait achevé cette formation. L'élément déterminant était que celui-ci n'avait pas de bachelor en droit. À le comprendre, il ne pourrait pas être titulaire d'un master en droit sans être titulaire d'un bachelor en droit. L’École B______ ne pouvait dès lors qu'inviter M. A______ à produire son diplôme de bachelor en droit, ce qui rendrait son recours sans objet. Dans le cas contraire, toute son argumentation n'avait pas de sens.

Le bureau ne remettait pas en question le fait qu'il était titulaire d'un master en droit délivré par l'Université de Neuchâtel. Le bureau, dans sa décision, se contentait d'examiner si l'intéressé pouvait, avec sa formation académique actuelle, se présenter à l'examen final du brevet d'avocat. Il appliquait l'art. 24 LPAv qui déterminait les conditions d'accès à l'examen final. Il le faisait en tenant compte des éléments qui avaient préalablement été retenus lors de l'examen des conditions d'accès à la formation en application de l'art. 25 LPAv.

Les cantons demeuraient libres de fixer des exigences plus strictes pour l'obtention du brevet d'avocat. Par ailleurs, le système de la licence correspondait à une formation de bachelor en droit et d'un master en droit. M. A______ ne disposant pas d'un bachelor en droit, son master en droit ne pouvait pas être considéré comme équivalent à une licence en droit. Les conditions d'accession au doctorat en droit étaient différentes des conditions d'accession à l'examen final du brevet d'avocat et une telle comparaison était exorbitante à l'objet du litige. L'intéressé ne se voyait pas non plus empêché d'accéder au stage d'avocat dans le canton de Genève, ayant pu utiliser son master en droit et ses crédits ECTS surnuméraires afin de compenser son absence de bachelor. Il tentait de contourner les exigences de formation académiques posées par le canton de Genève en « recyclant » son master déjà utilisé pour compenser l'absence de bachelor en droit. Une telle manière de procéder allait à l'encontre de la systématique et de l'esprit de la LPAv. En outre et selon la doctrine, les exigences de la LPAv, plus strictes que celles de la LLCA, n'étaient pas disproportionnées ou arbitraires. Le but de la formation en droit était double. D'une part, protéger le candidat d'éventuelles lacunes lors de l'examen final et d'autre part, protéger les futurs clients, le métier d'avocat exigeant tant des connaissances du droit de procédure que du droit de fond. En l'occurrence, à teneur des relevés de notes de M. A______, il n'avait pas suivi de cours dans certains domaines du droit, nécessaires dans le métier d'avocat, notamment en droit de la famille, droit du divorce, droits des successions, droit du travail, droit de la sécurité sociale, droit des sociétés ou encore en droit des poursuites et faillites. Les examens de l’École B______ ne permettaient pas de tester ses connaissances de droit de fond, dans la mesure où les examens examinaient les connaissances de droit de procédure des étudiants. La maîtrise du droit de fond était démontrée par le diplôme de bachelor en droit (ou formation équivalente) complété – au plus tard à l'inscription à l'examen final – par un diplôme de master en droit (ou formation équivalente). Tout master ne n'importe quelle université lui était ouvert pour accéder à l'examen final. L’École B______ ne s'opposait pas non plus à ce que le recourant choisisse de procéder par la voie du « bachelor accéléré » que proposait l'Université de Genève ou encore qu'il achève son bachelor en droit de l'Université de Fribourg afin qu'il satisfasse aux conditions académiques nécessaires pour se présenter à l'examen final.

17) Le 25 avril 2018, M. A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.

En aucun cas l’École B______ avait été saisie d'une demande d'admission, d'équivalence ou d'exclusion.

Il était titulaire d'un diplôme équivalent au bachelor en droit, au sens des Directives du Conseil des hautes écoles pour le renouvellement coordonné de l'enseignement des hautes écoles universitaires suisses dans le cadre du processus de Bologne du 28 mai 2015 (ci-après : les directives de Bologne HEU) et du Règlement d'études du 15 octobre 2004 de la faculté de droit de l'Université de Genève (ci-après : le règlement d'études UNIGE). Le contrat et l'attestation d'obtention des prérequis constituaient un diplôme de nature équivalente et déployaient des effets similaires à ceux d'un bachelor en droit au sens des directives de Bologne HEU.

Les cantons étaient certes libres d'ajouter des exigences mais ne disposaient d'aucune compétence de redéfinition des diplômes de master. La primauté du droit fédéral devait être appliquée.

L'accès au doctorat requérait l'accumulation des deux échelons (bachelor et master, équivalent à la licence).

La doctrine ne s'était pas déterminée sur l'annulation d'un master par soustraction de crédits ECTS.

Il n'avait aucun besoin d'une équivalence pour son bachelor, dans la mesure où il en détenait déjà une et que l'art. 33A al. 1 let. a LPAv demandait uniquement un master.

S'entendre dire aujourd'hui, avec ses diplômes et son expérience pratique, qu'il n'avait pas une formation équivalente à celle de jeunes gens de 20 ans de moins que lui relevait d'une profonde et inexplicable injustice.

18) Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées par courrier du juge délégué du 2 mai 2018.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10, par renvoi de l’art. 49 LPAv ; art. 36 al. 1 du règlement relatif à la procédure d'opposition au sein de l’Université de Genève du 16 mars 2009 - RIO-UNIGE, par renvoi des art. 25 al. 3 du règlement d’application de la loi sur la profession d’avocat du 7 décembre 2010 - RPAv - E 6 10.01 et art. 11 du règlement d’études de l’École B______ en vigueur dès le 21 février 2011 - RE ECAV).

2) Le recourant sollicite son audition. Quant à l'intimée, elle propose l'audition de la directrice de l’École B______.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes et d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_545/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1 ; 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; ATA/1111/2017 du 18 juillet 2017 consid. 2a).

Cela n’implique donc pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; 134 I 140 consid. 5.3).

b. En l'espèce, l'audition du recourant et de la directrice de l’École B______ n’apporterait pas d’éléments pertinents supplémentaires, ceux-ci s’étant déterminés par écrit sur les faits de la cause et ayant produit toutes les pièces utiles au cours de l'échange d’écritures devant la chambre administrative, qui dispose ainsi des éléments nécessaires pour statuer en toute connaissance de cause.

Il ne sera dès lors pas donné suite aux requêtes d'instruction.

3) Dans un premier grief, le recourant soutient que les décisions du 11 janvier 2018, dont l'objet est « Votre demande de précisions quant à l'examen final », et du 22 février 2018, intitulée « Opposition de M. A______ à la décision de refus d'équivalence pour l'examen final du 11 janvier 2018 », sont nulles, au motif que le bureau n'est pas compétent pour les prononcer.

a. La nullité absolue d'une décision peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office. Elle ne frappe que les décisions affectées des vices les plus graves, manifestes ou du moins facilement reconnaissables et pour autant que sa constatation ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Sauf dans les cas expressément prévus par la loi, il ne faut admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire (ATF 130 II 249 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1). Des vices de fond d'une décision n'entraînent qu'exceptionnellement sa nullité. Entrent avant tout en considération comme motifs de nullité l'incompétence fonctionnelle et matérielle de l'autorité appelée à statuer, ainsi qu'une erreur manifeste de procédure (ATF 129 I 361 consid. 2.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1).

b. Selon l'art. 21 al. 1 RPAv, le bureau est chargé de la gestion courante de l’École B______. Il prend, dans les limites de cette gestion, toutes les décisions et mesures nécessaires au bon fonctionnement de l’École B______ notamment en matière académique, administrative et financière.

Le bureau est l'autorité de décision pour les admissions, les équivalences et les exclusions (art. 22 al. 6 RPAv).

c. En l'occurrence et selon la chronologie du dossier, dans son courrier du 21 décembre 2017, le recourant a demandé des précisions, respectivement une décision formelle, sur la problématique de l'impossibilité de réutiliser ses crédits du master en droit pour accéder à l'examen final du brevet d'avocat.

La directrice de l’École B______ lui a répondu le 11 janvier 2018 dans une décision, dont l'objet était « Votre demande de précisions quant à l'examen final ».

Suite à l'opposition du recourant le 18 janvier 2018, le bureau, autorité compétente pour se prononcer sur les questions relatives aux admissions (art. 22 al. 6 RPAv), a statué par décision du 22 février 2018.

Bien qu'il s'en défende, force est de constater que, par sa demande du 21 décembre 2017, le recourant a requis une prise de position de l'autorité intimée sur la problématique de son admission à l'examen final du brevet d'avocat (art. 33A LPAv).

Au vu de l'art. 22 al. 6 RPAv précité, le bureau est bien l'autorité compétente pour statuer sur cette question.

Par ailleurs, le fait que ces deux décisions ne soient pas intitulées de la même façon (« Votre demande de précisions quant à l'examen final » pour l'une et « Opposition de M. A______ à la décision de refus d'équivalence pour l'examen final du 11 janvier 2018 » pour l'autre) n'a au final pas d'importance. En effet, elles traitent toutes les deux de la question de savoir si le recourant, vu son parcours académique, est admissible à l'examen final du brevet d'avocat. Peu importe donc que la question soit analysée sous l'angle d'une demande d'« équivalence » ou sous la forme d'une demande d'admission, le bureau étant compétent pour statuer dans les deux cas (art. 22 al. 6 RPAv).

Le grief est mal fondé.

4) Le recourant considère qu'il n'est pas possible d'accéder au master sans un diplôme équivalent au bachelor de la branche correspondante. Ainsi, la notion de bachelor partiel utilisée dans la décision du 22 février 2018 n'existe pas.

a. Selon l'art. 1 des directives de Bologne HEU, les hautes écoles universitaires suisses organisent toutes leurs filières d'études selon un premier cursus, comprenant 180 crédits ECTS (études de bachelor) (al. 1 let. a), un deuxième cursus, comprenant 90 à 120 crédits ECTS (études de master) (al. 1 let. b). Ensemble, les études de bachelor et de master remplacent les actuelles études de diplôme ou de licence (al. 2 1ère phr.).

L'art. 3 des directives de Bologne HEU précise que l'admission aux études de master requiert en principe un diplôme de bachelor d'une haute école ou un diplôme équivalent délivré par une haute école (al. 1). Les titulaires d'un diplôme de bachelor délivré par une université suisse doivent être admis sans autres conditions dans les filières d'études de master universitaires de la branche d'études correspondante (al. 2). Les universités peuvent faire dépendre l'obtention du diplôme de master de l'acquisition de connaissances et de compétences non acquises pour l'obtention du bachelor (al. 5).

b. En l'occurrence, le recourant est titulaire d'une licence ès lettres délivrée par l'Université de Lausanne en juin 2003. Cette licence est l'équivalent d'un master en lettres. Ayant bénéficié du régime dit des « prérequis », il a obtenu un master en droit obtenu le 20 juin 2009 à l'Université de Neuchâtel.

Contrairement à ce que l'intéressé soutient, le fait d'avoir pu accéder au cursus de master en droit et d'obtenir ce diplôme ne signifie pas qu'il serait titulaire d'un diplôme équivalent à un bachelor en droit. Preuve en est le fait que dans le cadre de ce régime dit des « prérequis », il a dû rattraper certaines branches fondamentales du droit suisse. Par ailleurs, force est de constater que le dossier ne contient aucun diplôme de bachelor en droit délivré par une université suisse au nom du recourant. Certes, l'utilisation de la notion de « bachelor partiel » dans la décision du 22 février 2018 peut paraître inappropriée au vu des dispositions des directives de Bologne HEU précitées, mais elle doit s'entendre comme étant la conséquence de l'utilisation des crédits du master en droit du recourant pour pallier l'absence de bachelor en droit en vue de son admission à l’École B______.

Le grief est mal fondé.

5) Le recourant considère que le bureau n'est pas compétent pour qualifier les titres universitaires.

a. Selon l'art. 33A al. 1 let. a LPAv, pour être admis à l'examen final, le candidat doit avoir obtenu une licence en droit ou un master en droit délivré par une université suisse ou un diplôme équivalent délivré par une université d’un État qui a conclu avec la Suisse un accord de reconnaissance mutuelle des diplômes.

b. En l'occurrence et comme vu supra, le bureau est l'autorité de décision pour les admissions (art. 22 al. 6 RPAv). Or, dans le cadre de l'admission du recourant à l'examen final du brevet d'avocat, le bureau ne remet pas en cause le fait que l'intéressé soit titulaire d'un master en droit délivré par l'Université de Neuchâtel. Il n'a aucunement requalifié ce diplôme mais a uniquement vérifié si, compte tenu de son parcours académique, le recourant pourrait se présenter à l'examen final du brevet d'avocat.

La question de savoir si c'est de manière conforme au droit que le bureau est arrivé à la conclusion que le recourant ne pourra pas, en l'état, se présenter à l'examen final du brevet d'avocat sera examinée ci-dessous.

Le grief sera écarté.

6) a. Selon l'art. 7 LLCA, pour être inscrit au registre, l'avocat doit être titulaire d'un brevet d'avocat. Les cantons ne peuvent délivrer un tel brevet que si le titulaire a effectué des études de droit sanctionnées soit par une licence ou un master délivrés par une université suisse, soit par un diplôme équivalent délivré par une université de l'un des États qui ont conclu avec la Suisse un accord de reconnaissance mutuelle des diplômes (al. 1 let. a) et un stage d'une durée d'un an au moins effectué en Suisse et sanctionné par un examen portant sur les connaissances juridiques théoriques et pratiques (al. 1 let. b). Le bachelor en droit est une condition suffisante pour l'admission au stage (al. 3).

Est réservé le droit des cantons de fixer, dans le cadre de la présente loi, les exigences pour l'obtention du brevet d'avocat (art. 3 al. 1 LLCA).

b. Selon la doctrine, les conditions de formation à réunir sont fixées à l'art. 7 al. 1 LLCA. En font notamment partie un stage et un examen professionnels (art. 7 al. 1 let. b LLCA). Il s'agit de conditions minimales, nécessaires pour qu'un brevet cantonal puisse et doive être reconnu par un autre canton. Les cantons demeurent en revanche libres de fixer des exigences plus strictes pour la délivrance de leur propre brevet (art. 3 al. 1 LLCA ; Philippe MEIER/Christian M. REISER, in Michel VALTICOS/Christian M. REISER/Benoît CHAPPUIS [éd.], Loi sur les avocats, commentaire romand, 2010, ad art. 7 LLCA p. 44 n. 3).

La novelle du 23 juin 2006 a opté pour le master comme condition à l'inscription au registre, les participants à la procédure de consultation s'étant très largement prononcés pour cette solution, ce qui paraissait logique dans la mesure où dans le système académique suisse, c'est bien le master qui remplaçait la licence. Doctrine et jurisprudence l'avaient d'ailleurs déjà admis. Le maintien du terme « licence » s'explique par les titulaires de titre d'avant « Bologne », qui n'en auraient pas demandé la modification en titre du nouveau régime (Philippe MEIER/Christian M. REISER, op. cit., ad art. 7 p. 50 n. 31).

Si le master en droit est exigé, le bachelor peut très bien avoir été obtenu dans un autre domaine, pour autant que le canton concerné n'exige pas des stagiaires qu'ils soient aussi porteurs d'un bachelor en droit. Notons qu'un avocat inscrit au registre d'un canton permissif, porteur d'un master en droit et d'un bachelor acquis dans un autre domaine, bénéficie de la libre circulation des avocats et peut offrir ses prestations ainsi que s'établir professionnellement dans un canton restrictif qui exige le bachelor et le master en droit. Les candidats locaux pourraient y voir une forme de discrimination à rebours. Au sens des auteurs, l'exigence du bachelor et du master en droit est toutefois admissible, compte tenu du fait que les branches juridiques de base sont enseignées au niveau du bachelor et peuvent légitimement être jugées nécessaires à l'exercice de la profession d'avocat (François BOHNET/Vincent MARTENET, Droit de la profession d'avocat, 2009, p. 230 n. 528).

Dans le canton de Vaud, l'art. 32 al. 1 let. a de la loi sur la profession d'avocat (LPAv - 177.11) prévoit que pour être admis aux examens d'avocat, le stagiaire doit être titulaire soit d'un bachelor universitaire en droit suisse et d'un master universitaire en droit suisse ou d'un master en droit jugé équivalent selon l'art. 7 LLCA, soit d'une licence en droit suisse.

c. Dans le cadre de l'art. 3 LLCA, le canton de Genève a réglé les conditions d'obtention du brevet d'avocat.

Pour être admis à la formation approfondie dispensée par l’École B______, il faut notamment être titulaire d’une licence en droit suisse, d’un bachelor en droit suisse délivré par une université suisse ou avoir obtenu 180 crédits ECTS en droit, dont 120 crédits ECTS en droit suisse, ces derniers ayant été délivrés par une université suisse et acquis dans le cadre de la formation de base (art. 25 let. f LPAV).

L'art. 26 al. 1 LPAV précise que pour être admis au stage, il faut remplir les conditions prévues à l'art. 25 LPAV et être au bénéfice d'un engagement auprès d'un maître de stage.

d. Selon l'art. 24 LPAv, pour obtenir le brevet d'avocat, il faut avoir effectué des études de droit sanctionnées soit par une licence ou un master délivrés par une université suisse, soit par un diplôme équivalent délivré par une université de l’un des États qui ont conclu avec la Suisse un accord de reconnaissance mutuelle des diplômes (let. a), avoir effectué une formation approfondie à la profession d'avocat validée par un examen (let. b), avoir accompli un stage (let. c) et avoir réussi un examen final (let. d).

À teneur de l'art. 33A al. 1 let. a LPAv, pour être admis à l'examen final, le candidat doit avoir obtenu une licence en droit ou un master en droit délivré par une université suisse ou un diplôme équivalent délivré par une université d’un État qui a conclu avec la Suisse un accord de reconnaissance mutuelle des diplômes.

e. Il ressort des travaux préparatoires du chapitre IV LPAv, dont font parties les art. 24 LPAv et 33A al. 1 let. a LPAv, que, tranchant deux questions laissées ouvertes par la nouvelle LLCA, le projet de loi a opté, d'une part, en faveur d’un accès à la profession d’avocat limité aux personnes ayant obtenu un bachelor en droit suisse délivré par une université suisse ou ayant obtenu 180 crédits ECTS en droit, dont 120 crédits ECTS en droit suisse, ces derniers ayant été délivrés par une université suisse et donc bénéficiant de bonnes connaissances en droit suisse. L’on évite ainsi que des étudiants puissent accéder à la formation d’avocat alors qu'ils n'ont pas suivi un minimum d'enseignements en droit suisse, par exemple en ayant obtenu un bachelor en droit étranger et un master en droit international et européen ou encore en ayant obtenu un master en droit du vivant (l’un des masters prévus par la faculté de droit de Genève) sans avoir suivi auparavant d’études de droit, mais des études de biologie ou de médecine. En effet, l'intérêt public qui est celui de la protection des justiciables requiert que la pratique du barreau genevois soit réservée aux personnes disposant de connaissances minimum en droit suisse. À cet égard les 120 crédits ECTS concordent aux nombres d'enseignements en droit suisse dispensés dans le cadre du bachelor en droit délivré par l'Université de Genève. En outre, le stage doit servir à acquérir une expérience pratique et non pas assurer des connaissances juridiques théoriques de base. Pour le surplus, l'administration fédérale considère qu'il n'existe pas d'autres textes légaux imposant d'admettre au stage d'avocat les titulaires de diplômes en droit délivré par une université étrangère.

D'autre part, le projet de loi prévoit qu’il ne faut pas laisser des titulaires de bachelor se présenter à l’examen final sans avoir préalablement obtenu un master en droit, si celui-ci ne devait pas avoir été obtenu avant l’entrée en stage. Cela permet d’éviter que quiconque puisse prétendre justifier du titre d’avocat, alors même qu’il ne pourrait pas obtenir son inscription au registre cantonal, faute de disposer d’un master en droit d’une université suisse ou d’un titre équivalent au sens de l’art. 7 LLCA (Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève [en ligne] [ci-après : MGC], séance 17 du 22 janvier 2009 à 17h00, PL 10'426, p. 16-17, consultable en ligne sur http://ge.ch/grandconseil /data/texte/PL10426.pdf).

Aux commentaires par article il est précisé à propos de l'art. 33A al. 1 LPAv que jusqu'à présent la licence en droit était nécessaire et suffisante tant pour l'admission au stage que pour l'inscription au registre. Désormais, le bachelor en droit est suffisant pour effectuer le stage, mais le master en droit est nécessaire pour l'inscription au registre conformément à l'art. 7 al. 1 let. a LLCA. En conséquence, compte tenu du fait que la personne qui subit avec succès l'examen de fin de stage peut requérir du Conseil d'État la délivrance du brevet d'avocat (art. 33 LPAv) et donc ensuite demander son inscription au registre, il est impératif qu'elle soit titulaire, lors de son inscription à l'examen final, d'un master en droit (MGC, PL 10'426 précité, p. 28, consultable en ligne sur http://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL10426.pdf).

f. Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 Cst. si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. Il ne suffit toutefois pas qu’une autre solution paraisse concevable, voire préférable. Pour qu’une décision soit annulée, elle doit se révéler arbitraire non seulement dans ses motifs, mais également dans son résultat (ATF 138 I 49 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_32/2015 du 28 mai 2015 ; ATA/459/2017 du 25 avril 2017 consid. 5e).

g. En l'espèce, selon le parcours académique pertinent du recourant, celui-ci a commencé une licence en droit, en 1995 (durant six mois), puis un bachelor en droit en 2007 (pendant dix mois et demi) à l'Université de Fribourg, mais a interrompu ses études. Le recourant est titulaire d'un master en droit délivré par l'Université de Neuchâtel en 2009, ayant bénéficié du régime dit des « prérequis ».

À la suite de son opposition du 21 décembre 2017, le recourant a finalement été admis pour suivre la formation approfondie dispensée par l’École B______, dans la mesure où il remplissait les conditions de l'art. 25 let. f 2ème hypothèse LPAV, soit avoir obtenu 180 crédits ECTS en droit, dont 120 crédits ECTS en droit suisse, ces derniers ayant été délivrés par une université suisse et acquis dans le cadre de la formation de base.

Dans la mesure où il remplit les conditions de l'art. 25 let. f LPAV, il pourra également être admis au stage d'avocat (art. 26 al. 1 LPAV), ce que du reste reconnaît l'intimée dans ses écritures.

Or, il serait arbitraire et contraire au principe de la bonne foi (art. 9 Cst.) de permettre au recourant de tout d'abord suivre la formation approfondie dispensée par l’École B______ puis de l'admettre au stage d'avocat sans pouvoir finalement se présenter à l'examen final du brevet d'avocat, dont le but est de vérifier la maîtrise des compétences juridiques théoriques et pratiques des avocats stagiaires.

Cette conclusion est corroborée par le texte clair de l'art. 33A al. 1 let. a LPAV qui précise qu'un master en droit délivré par une université suisse est suffisant pour être admis à l'examen final du brevet d'avocat. À ce propos, il ne ressort pas des travaux préparatoires de la LPAV reproduits ci-dessus qu'un étudiant bénéficiant de plus de 180 crédits ECTS en droit, dont 120 crédits ECTS en droit suisse, devrait être empêché de se présenter à l'examen final pour des motifs d'intérêt public représenté par la protection des justiciables. Au contraire, la condition d'avoir acquis 120 crédits ECTS en droit suisse, représentant le minimum de connaissances de base en droit suisse, permet de garantir une bonne base juridique.

Ainsi, l'intimée, en considérant que le recourant peut suivre la formation approfondie dispensée par l’École B______ et qu'il peut être engagé en tant qu'avocat stagiaire, estime que l'intéressé dispose des connaissances juridiques théoriques de base en droit suisse permettant au final de se présenter à l'examen final du brevet d'avocat. D'ailleurs, cela pourra être vérifié lors de l'examen final dont le champ porte sur l'ensemble du droit positif, fédéral et genevois, en vigueur au moment où il a lieu (art. 33 RPAv).

Enfin et contrairement au canton de Vaud, le législateur genevois n'exige pas des candidats qu'ils soient au bénéfice d'un bachelor universitaire en droit suisse et d'un master universitaire en droit suisse pour se présenter à l'examen final du brevet d'avocat. Le canton de Genève est ainsi plus souple par rapport aux conditions d'admission à l'examen final du brevet d'avocat, ce qu'il est en droit de faire, puisque sa souplesse est conforme à l'art. 7 al. 1 let. a LLCA.

Par conséquent, l'intimée n'est pas en droit de considérer que le master en droit du recourant a été utilisé dans le cadre de son admission à la formation dispensée par l’École B______ et qu'il ne peut pas se présenter à l'examen final du brevet d'avocat.

Pour autant que le recourant satisfasse aux autres conditions de l'art. 33A al. 1 LPAv, soit avoir réussi l'examen validant la formation approfondie dispensée par l’École B______ (let. b) et avoir accompli le stage (let. c), il pourra se présenter à l'examen final du brevet d'avocat.

7) Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et la décision attaquée annulée sur ce point. Elle sera confirmée pour le surplus.

8) Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée au recourant, qui comparaît en personne et qui n’a pas allégué avoir exposé des frais pour sa défense (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 mars 2018 par Monsieur A______ contre la décision du bureau du conseil de direction de l'École B______ du 22 février 2018 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision du bureau du conseil de direction de l'École B______ du 22 février 2018 en tant qu'elle lui dénie le droit de se présenter à l'examen final du brevet d'avocat ;

la confirme pour le surplus ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 133 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______ à l'École B______, ainsi qu'à la commission du barreau, pour information.

Siégeant : Mme Junod, présidente, MM. Thélin et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Poinsot

 

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :