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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1736/2012

ATA/502/2012 du 31.07.2012 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1736/2012-FORMA ATA/502/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 31 juillet 2012

2ème section

 

dans la cause

 

Madame B______

et

Monsieur P______

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA CULTURE ET DU SPORT



EN FAIT

1. Madame B______ et Monsieur P______ sont les parents d’E______, né le 9 août 2009.

2. Le 22 mai 2012, ils ont écrit à la direction générale de l’enseignement primaire (ci-après : DGEP) en demandant que leur fils puisse débuter sa scolarité en août 2013, en lieu et place d’août 2014. Ils avaient récemment déménagé à Satigny, alors qu’ils habitaient précédemment à la rue U______ et qu’E______ fréquentait la crèche du J______, où il pourrait rester jusqu’en juillet 2013. L’enfant était inscrit à la crèche de A______ pour l’année 2013-2014, mais en l’état, une place ne pouvait pas lui être garantie dans cette crèche-ci. De plus, une année supplémentaire en crèche leur coûtait CHF 19'000.-, ce qui était « un engagement financier colossal », alors que leur enfant dépassait de neuf jours seulement la date butoir.

3. Par pli recommandé du 25 mai 2012, la DGEP a refusé d’accorder la dérogation sollicitée, E______ étant né après la date de référence arrêtée au 31 juillet, de sorte qu’il serait admis en 1ère année primaire à la rentrée 2014.

4. Par acte posté le 5 juin 2012, Mme B______ et M. P______ ont recouru contre cette décision auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) en reprenant leurs explications et conclusions. Ils avaient envisagé d’autres alternatives de garde avant de solliciter une dérogation. Les grands-parents d’E______ ne résidaient pas dans le canton de Genève et les autres possibilités ne rentraient pas dans le cadre de leur budget familial. Ils concluaient derechef à l’octroi de la dérogation en raison de ces « neuf jours d’écart ».

5. Le 25 juin 2012, le département de l’instruction publique, de la culture et du sport (ci-après : DIP) a conclu au rejet du recours en se référant à la jurisprudence constante de la chambre de céans.

6. Cette réponse a été transmise aux recourants, qui ont été invités à indiquer d’ici le 13 juillet 2012 s’ils maintenaient leur recours ou s’ils avaient d’éventuelles observations à formuler, ensuite de quoi la cause serait gardée à juger.

7. Le 6 juillet 2012, Mme B______ et M. P______ ont indiqué que la crèche de A______ ne pouvait en aucun cas leur garantir une place pour E______. Ils regrettaient que lors de la mise en œuvre de l’accord intercantonal sur l’harmonisation de la scolarité obligatoire du 14 juin 2007 (HarmoS - C 1 06), aucune structure n’ait été mise en place pour venir en aide aux parents d’enfants nés au mois d’août. Ils demandaient s’il y avait la possibilité soit d’autoriser la crèche du J______ à accepter E______ une année supplémentaire malgré leur déménagement à Satigny, la crèche du J______ se trouvant dans l’immeuble même de leur employeur, soit de prier la crèche de A______ de leur accorder une priorité. Ils n’avaient d’autre recours que de solliciter cette dérogation et persistaient dans leurs conclusions.

8. Cette détermination a été transmise au DIP le 10 juillet 2012 et la cause gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 131 et 132 al. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. HarmoS a pour but d’harmoniser la scolarité obligatoire au sein des cantons concordataires en accordant les objectifs de l’enseignement et les structures scolaires d’une part, et d’autre part, en développant et en assurant la qualité et la perméabilité du système scolaire au moyen d’instruments de pilotage communs (art. 1 HarmoS). Il prévoit notamment que l’élève est scolarisé dès l’âge de 4 ans révolus, le jour de référence étant le 31 juillet (art. 5 al. 1 HarmoS). Les cantons s’engagent à respecter les caractéristiques structurelles de la scolarité obligatoire telles que définies au chap. III, dont l’art. 5 fait partie, dans un délai maximal de six ans après l’entrée en vigueur de l’accord. Selon l’art. 15 HarmoS, l’assemblée plénière de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (ci-après : CDIP) décide de la date d’abrogation de l’art. 2 du concordat intercantonal sur la coordination scolaire du 29 octobre 1970 (CICS - C 1 05), qui prévoit notamment que l’âge d’entrée à l’école est fixé à 6 ans révolus au 30 juin, les cantons pouvant avancer ou retarder cette date dans une limite de quatre mois. Au 13 avril 2011, l’art. 2 CICS n’avait pas été abrogé (recueil des bases légales de la CDIP consultable sur le site : http://www.cdip.ch/dyn/11703.php).

Dans son communiqué de presse du 13 mai 2009 annonçant l’entrée en vigueur de HarmoS au 1er août 2009, la CDIP a relevé « que le jour de référence pour l’entrée à l’école obligatoire ne pourra plus varier comme aujourd’hui au sein d’une fourchette de huit mois. Pour les cantons concordataires, l’âge de l’enfant au 31 juillet déterminera son entrée à l’école enfantine (il devra avoir fêté son 4ème anniversaire avant cette date). Les parents conserveront la possibilité, moyennant une demande, de faire avancer ou repousser l’entrée à l’école de leur enfant ». Cette dernière précision a été répétée dans la feuille d’information sur l’école enfantine obligatoire publiée le 17 juin 2010 par la CDIP, disponible en ligne sur le site http://www.cdip.ch/dyn/15414.php.

3. En même temps qu’HarmoS, est entrée en vigueur la convention scolaire romande du 21 juin 2007 (CSR - C 1 07), dont le but est notamment d’instituer et de renforcer l’espace romand de formation, en application de HarmoS (art. 1 al. 1 CSR). Elle comporte des domaines dans lesquels la coopération entre les cantons est obligatoire et fait l’objet d’une réglementation contraignante, et d’autres dans lesquels la collaboration n’est pas obligatoire et fait l’objet de recommandations (art. 2 CSR). Le début de la scolarisation entre dans la première catégorie (art. 3 al. 1 let. a CSR). La convention prévoit que l’élève est scolarisé dès l’âge de 4 ans révolus, le jour déterminant étant le 31 juillet (art. 4 al. 1 CSR). La fixation du jour de référence n’exclut pas les cas de dérogations individuelles qui demeurent de la compétence des cantons (art. 4 al. 2 CSR).

4. Selon l’art. 11 al. 1 de la loi sur l’instruction publique du 6 novembre 1940 (LIP - C 1 10), la scolarité obligatoire comprend neuf années scolaires complètes. Les enfants âgés de 6 ans révolus y sont astreints dès le début de l’année scolaire ; ils achèvent leur scolarité obligatoire à la fin de l’année scolaire au cours de laquelle ils ont atteint l’âge de 15 ans révolus. L’école enfantine, quant à elle, comprend des classes facultatives destinées aux enfants de 4 et 5 ans (art. 24 LIP). Elle est intégrée dans l’enseignement primaire (art. 21 let. a LIP).

Un règlement détermine les conditions d’octroi des dispenses d’âge pour l’admission à l’école (art. 11 al. 1 LIP).

Sur la base de cette délégation, le Conseil d’Etat a édicté le règlement relatif aux dispenses d’âge du 12 juin 1974 (RDAge - C 1 10.18), dont l’art. 1 prévoit :

« L’âge d’entrée à l’école obligatoire est fixé à 6 ans révolus au 30 juin. Par voie de conséquence, les enfants qui atteignent :

a) l’âge de 6 ans révolus au 30 juin sont astreints à la scolarité obligatoire et doivent entrer en 1ère année primaire dès le début de l’année scolaire ;

b) l’âge de 5 ans révolus au 30 juin peuvent être admis dans la 2ème classe facultative de la division enfantine ;

c) l’âge de 4 ans révolus au 30 juin peuvent être admis dans la 1ère classe facultative de la division enfantine ».

5. En dérogation à la disposition précitée, des dispenses d’âge peuvent être accordées aux élèves de l’enseignement public (art. 2 RDAge). L’art. 3 RDAge, intitulé « dispenses simples - modalités transitoires » prévoit, qu’au moment de l’inscription à l’école et sauf demande contraire des parents, une dispense d’âge simple est accordée spontanément à la rentrée 2010 pour les élèves entrant en 1ère classe enfantine nés jusqu’au 30 septembre 2006 et, à la rentrée 2011, pour les élèves entrant en 1ère classe enfantine nés jusqu’au 31 août 2007 (art. 3 al. 1 let. a et b RDAge). Cette disposition vise à atténuer l’impact du passage du système actuel instauré par le CICS, permettant d’avancer ou de reculer de quatre mois la date de référence, au système HarmoS, qui instaure une date de référence contraignante (Exposé des motifs à l’appui du projet de loi autorisant le Conseil d’Etat à adhérer à HarmoS - PL 10350 - p. 11, consultable sur le site http://www.ge.ch/grandconseil/moteurPdf.asp?typeObj=PL&numObj=10350). L’alinéa 2 de cette disposition précise que, dès la rentrée 2012, tous les enfants âgés de 4 ans révolus au 31 juillet doivent être scolarisés en 1ère classe enfantine.

Contrairement à la dispense d’une année ou plus prévue à l’art. 4 RDAge, qui peut être accordée à un enfant en âge de fréquenter la 2ème enfantine jugé apte, du point de vue psychopédagogique et médical, à suivre sans difficultés une classe de 1ère primaire, à l’issue d’une procédure initiée par une demande écrite et motivée des parents, la dispense d’âge simple présente un caractère automatique. Son but, mentionné dans l’ancienne teneur de l’art. 3 RDAge - qui prévoyait qu’elle était octroyée aux enfants nés jusqu’au 31 octobre - était de permettre aux enfants concernés de fréquenter le même degré que leurs camarades nés avant le 1er juillet.

Le règlement ne prévoit pas d’autres cas de dispense d’âge que ceux susmentionnés. En particulier, il ne permet plus d’octroyer des dispenses d’âge simples pour des enfants nés après le 30 septembre 2006 pour la rentrée 2010, respectivement après le 31 août 2007 pour la rentrée 2011, et après le 31 juillet 2008 pour la rentrée 2012. A partir de la rentrée 2013-2014, la dispense d’âge simple sera totalement supprimée et la nouvelle date de référence pour l’entrée à l’école primaire publique sera le 31 juillet. Il ne contient pas de clause réservant la possibilité de dérogations dans des situations exceptionnelles.

E______ est donc soumis à ce régime puisqu’il fêtera son 4ème anniversaire le 9 août 2013 et il devra donc attendre la rentrée scolaire 2014.

Dans une jurisprudence bien établie, la chambre de céans a régulièrement refusé toute dérogation, en dernier lieu pour les enfants nés après le 31 juillet 2007 (ATA/419/2012 du 3 juillet 2012 ; ATA/485/2011 du 26 juillet 2011 ; ATA/312/2011 du 17 mai 2011 et les références citées). Il n’existe en l’espèce pas de raison de s’écarter de ces jurisprudences.

6. Un projet de loi a été déposé le 24 octobre 2011 afin de proposer que les enfants ayant 4 ans révolus le jour de la rentrée scolaire puissent être admis à l’école (PL 10884). Cependant, ce PL a été retiré depuis. Il n’y a donc pas lieu de s’écarter des jurisprudences précitées, malgré les difficultés financières et organisationnelles alléguées par les recourants. De plus, la chambre administrative n’a aucune compétence pour contraindre la crèche du J______ à garder E______ ou celle de A______ à accepter celui-ci.

7. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 400.-sera mis à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement. Aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 juin 2012 par Madame B______ et Monsieur P______ contre la décision du 25 mai 2012 de la direction générale de l’enseignement primaire du département de l'instruction publique, de la culture et du sport ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Madame B______ et Monsieur  P______, pris conjointement et solidairement ;

dit qu’il ne leur est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame B______ et Monsieur P______, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la culture et du sport.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction a.i. :

 

 

C. Sudre

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :