Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/1666/2011

ATA/485/2011 du 26.07.2011 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1666/2011-FORMA ATA/485/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 juillet 2011

2ème section

 

dans la cause

 

Madame X______ et Monsieur X______

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA CULTURE ET DU SPORT

 



EN FAIT

1. Madame X______ et Monsieur X______ (ci-après : les époux X______) sont les parents de Y______ né le 2 août 2008.

2. Au mois de décembre 2009, la direction générale de l’enseignement primaire du département de l’instruction publique, de la culture et du sport (ci-après : le département) a écrit à l’ensemble des parents concernés pour les informer de la mise en œuvre de l’accord intercantonal sur l’harmonisation de la scolarité obligatoire du 14 juin 2007, entré en vigueur le 1er août 2009 (ci-après : HarmoS - C 1 06). L’art. 5 al. 1 de ce dernier prévoyait que « l’élève est scolarisé dès l’âge de 4 ans révolus, le jour de référence étant le 31 juillet ». La mesure serait introduite progressivement et cela de la façon suivante : à la rentrée 2010, la dispense d’âge simple serait accordée aux enfants nés avant le 30 septembre 2006 ; à la rentrée 2011, les enfants nés le 31 août 2007 ou avant cette date pourraient entrer en 1ère enfantine ; dès la rentrée 2012, application d’HarmoS, avec obligation scolaire à 4 ans et date de référence au 31 juillet (date butoir pour tous les élèves de 1ère enfantine : 31 juillet 2008) ; à partir de la rentrée 2013-2014, la dispense d’âge simple sera totalement supprimée et la nouvelle date de référence pour l’entrée à l’école primaire publique sera le 31 juillet, à 4 ans.

3. Le 14 avril 2011, les époux X______ se sont adressés à la direction générale de l’enseignement primaire. Ils souhaitaient que leur fils Y______ bénéficie d’une dérogation à la règle qui lui imposerait de ne commencer l’école qu’à la rentrée 2013. Il fréquentait la crèche en tant que l’un des deux plus jeunes de sa volée et semblait à tous les professionnels qui l’entouraient parfaitement intégré, que ce soit au niveau du langage, du raisonnement ou du comportement social. Il était par ailleurs le plus grand en taille de cette même volée. Plusieurs de leurs connaissances travaillant dans l’enseignement primaire et qui côtoyaient régulièrement Y______ depuis sa naissance les avaient vivement encouragés à demander une dérogation.

4. Par décision du 12 mai 2011, le département a maintenu sa décision. L’entrée en vigueur d’HarmoS de la suppression de l’octroi de dispense d’âge simple dans le canton de Genève avait donné lieu à une information tout public. A la rentrée 2012, le département se trouverait dans la troisième étape de la transition en vue d’appliquer la date de référence imposée à tous les cantons, et, à ce stade, les nouvelles dispositions réglementaires adoptées par le gouvernement genevois seraient strictement appliquées. En conséquence, aucune dérogation ne serait accordée et seuls les enfants nés avant le 31 juillet 2008 pourraient entrer en classe de 1ère enfantine.

Le département ne pouvait donc donner suite à la requête des époux X______.

Dite décision faisait référence à la jurisprudence de la chambre administrative de la section administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), laquelle avait rejeté plusieurs recours à l’encontre des décisions de refus des dérogations pour les rentrées 2011 et 2012.

5. Les époux X______ ont saisi la chambre administrative d’un recours contre la décision précitée, par acte du 30 mai 2011.

La lettre d’information datée de décembre 2009 indiquait que la dispense d’âge simple serait supprimée dès la rentrée 2013-2014. Or ce qu’ils demandaient était une dispense pour la rentrée 2012-2013. Pourquoi dès lors ne pas avoir indiqué que la dispense d’âge simple serait supprimée dès cette rentrée-ci ?

Leur fils Y______ se trouvait objectivement au même niveau d’apprentissage que les enfants qui commenceraient l’école à la rentrée 2012 et qu’il côtoyait tous les jours à la crèche. L’un des objectifs de l’enseignement public, soit aider chaque élève à développer de manière équilibrée sa personnalité, sa créativité ainsi que ses aptitudes intellectuelles, manuelles, physiques et artistiques ne serait alors pas atteint.

Ils ne souhaitaient pas mettre leur enfant dans une situation d’échec scolaire en le poussant à commencer en 2012 s’il n’avait pas la maturité suffisante. Ils suivraient les conseils des éducateurs de l’Espace de vie enfantine (ci-après : EVE) de Z______ qui travaillaient dans l’intérêt de l’enfant, si ceux-ci recommandaient d’attendre la rentrée 2013. Ils souhaitaient une dérogation afin que leur fils, s’il était prêt à entrer à l’école en août 2012, puisse le faire sans qu’il risque de s’ennuyer et qu’il soit nécessaire de demander une dérogation l’année suivante.

6. Dans sa réponse du 11 juillet 2011, le département s’est opposé au recours, reprenant et développant sa motivation antérieure.

7. Par mémo du 12 juillet 2011, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 131 et 132 al. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. HarmoS a pour but d'harmoniser la scolarité obligatoire au sein des cantons concordataires en accordant les objectifs de l'enseignement et les structures scolaires d'une part et, d'autre part, en développant et en assurant la qualité et la perméabilité du système scolaire au moyen d'instruments de pilotage communs (art. 1 HarmoS). Il prévoit notamment que l'élève est scolarisé dès l'âge de 4 ans révolus, le jour de référence étant le 31 juillet (art. 5 al. 1 HarmoS). Les cantons s'engagent à respecter les caractéristiques structurelles de la scolarité obligatoire telles que définies au chapitre III, dont l'art. 5 fait partie, dans un délai maximal de six ans après l'entrée en vigueur de l'accord. Selon l'art. 15 HarmoS, l'assemblée plénière de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (ci-après : CDIP) décide de la date d'abrogation de l'art. 2 du concordat intercantonal sur la coordination scolaire du 29 octobre 1970 (CICS - C 1 05), qui prévoit notamment que l'âge d'entrée à l'école est fixé à 6 ans révolus au 30 juin, les cantons pouvant avancer ou retarder cette date dans une limite de quatre mois. Au 13 avril 2011, l'art. 2 CICS n'avait pas été abrogé (Recueil des bases légales de la CDIP consultable sur le site : http://www.cdip.ch/dyn/11703.php).

Dans son communiqué de presse du 13 mai 2009 annonçant l'entrée en vigueur de HarmoS au 1er août 2009, la CDIP a relevé « que le jour de référence pour l'entrée à l'école obligatoire ne pourra plus varier comme aujourd'hui au sein d'une fourchette de huit mois. Pour les cantons concordataires, l'âge de l'enfant au 31 juillet déterminera son entrée à l'école enfantine (il devra avoir fêté son 4ème anniversaire avant cette date). Les parents conserveront la possibilité, moyennant une demande, de faire avancer ou repousser l'entrée à l'école de leur enfant ». Cette dernière précision a été répétée dans la feuille d'information sur l'école enfantine obligatoire publiée le 17 juin 2010 par la CDIP, disponible en ligne sur le site http://www.cdip.ch/dyn/15414.php.

3. En même temps qu’HarmoS est entrée en vigueur la convention scolaire romande du 21 juin 2007 (CSR - C 1 07), dont le but est notamment d'instituer et de renforcer l'espace romand de formation, en application de HarmoS (art. 1 al. 1 CSR). Elle comporte des domaines dans lesquels la coopération entre les cantons est obligatoire et fait l'objet d'une réglementation contraignante et d'autres dans lesquels la collaboration n'est pas obligatoire et fait l'objet de recommandations (art. 2 CSR). Le début de la scolarisation entre dans la première catégorie (art. 3 al. 1 let. a CSR). La convention prévoit que l'élève est scolarisé dès l'âge de 4 ans révolus, le jour déterminant étant le 31 juillet (art. 4 al. 1 CSR). La fixation du jour de référence n'exclut pas les cas de dérogations individuelles qui demeurent de la compétence des cantons (art. 4 al. 2 CSR).

4. Selon l'art. 11 al. 1 de la loi sur l'instruction publique du 6 novembre 1940 (LIP - C 1 10), la scolarité obligatoire comprend neuf années scolaires complètes. Les enfants âgés de 6 ans révolus y sont astreints dès le début de l’année scolaire ; ils achèvent leur scolarité obligatoire à la fin de l’année scolaire au cours de laquelle ils ont atteint l’âge de 15 ans révolus. L'école enfantine, quant à elle, comprend des classes facultatives destinées aux enfants de 4 et 5 ans (art. 24 LIP). Elle est intégrée dans l'enseignement primaire (art. 21 let. a LIP).

Un règlement détermine les conditions d’octroi des dispenses d’âge pour l’admission à l’école (art. 11 al. 1 LIP).

Sur la base de cette délégation, le Conseil d'Etat a édicté le règlement relatif aux dispenses d'âge du 12 juin 1974 (RDAge - C 1 10.18), dont l'art. 1 prévoit :

« L'âge d'entrée à l'école obligatoire est fixé à 6 ans révolus au 30 juin. Par voie de conséquence, les enfants qui atteignent :

a) l'âge de 6 ans révolus au 30 juin sont astreints à la scolarité obligatoire et doivent entrer en 1ère année primaire dès le début de l'année scolaire ;

b) l'âge de 5 ans révolus au 30 juin peuvent être admis dans la 2ème classe facultative de la division enfantine ;

c) l'âge de 4 ans révolus au 30 juin peuvent être admis dans la 1ère classe facultative de la division enfantine ».

En dérogation à la disposition précitée, des dispenses d'âge peuvent être accordées aux élèves de l'enseignement public (art. 2 RDAge). L'art. 3 RDAge, intitulé « dispenses simples - modalités transitoires » prévoit qu'au moment de l'inscription à l'école, et sauf demande contraire des parents, une dispense d'âge simple est accordée spontanément à la rentrée 2010 pour les élèves entrant en 1ère classe enfantine nés jusqu'au 30 septembre 2006 et, à la rentrée 2011, pour les élèves entrant en 1ère classe enfantine nés jusqu'au 31 août 2007 (art. 3 al. 1 let. a et b RDAge). Cette disposition vise à atténuer l'impact du passage du système actuel instauré par le CICS, permettant d'avancer ou de reculer de quatre mois la date de référence, au système HarmoS qui instaure une date de référence contraignante (Exposé des motifs à l'appui du projet de loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à HarmoS - PL 10350 - p. 11, consultable sur le site http://www.ge.ch/grandconseil/moteurPdf.asp?typeObj=PL&numObj=10350). L’alinéa 2 de cette disposition précise que dès la rentrée 2012, tous les enfants âgés de 4 ans révolus au 31 juillet doivent être scolarisés en 1ère classe enfantine.

Contrairement à la dispense d'une année ou plus prévue à l'art. 4 RDAge, qui peut être accordée à un enfant en âge de fréquenter la 2ème enfantine jugé apte, du point de vue psychopédagogique et médical, à suivre sans difficulté une classe de 1ère primaire, à l'issue d'une procédure initiée par une demande écrite et motivée des parents, la dispense d'âge simple présente un caractère automatique. Son but, mentionné dans l'ancienne teneur de l'art. 3 RDAge - qui prévoyait qu'elle était octroyée aux enfants nés jusqu'au 31 octobre - est de permettre aux enfants concernés de fréquenter le même degré que leurs camarades nés avant le 1er juillet.

Le règlement ne prévoit pas d'autres cas de dispense d'âge que ceux susmentionnés. En particulier, il ne permet plus d'octroyer des dispenses d'âge simples pour des enfants nés après le 30 septembre 2006 pour la rentrée 2010, respectivement après le 31 août 2007 pour la rentrée 2011 et après le 31 juillet 2008 pour la rentrée 2012. A partir de la rentrée 2013-2014, la dispense d’âge simple sera totalement supprimée et la nouvelle date de référence pour l’entrée à l’école primaire publique sera le 31 juillet, à 4 ans. Il ne contient pas de clause réservant la possibilité de dérogations dans des situations exceptionnelles.

5. Certes, dans sa lettre circulaire de décembre 2009 adressée à tous les parents concernés par la mise en œuvre d’HarmoS pour les enfants devant être admis en 1ère enfantine, après avoir précisé qu'en vue de garantir la cohérence des décisions sur le plan intercantonal il n'entendait pas accorder de dérogations, le département a invité les familles pouvant être confrontées à des difficultés de force majeure par l'entrée en vigueur de la nouvelle teneur de l'art. 3 RDAge, à s'adresser à lui pour qu'il examine leur situation. Force est ainsi de constater que le département, a d'entrée de cause laissé penser que des dérogations seraient possibles. Par la suite, il a cependant précisé, sans être contredit, qu'aucune dérogation ne serait accordée pour les rentrées 2011-2012, et que pour les rentrées ultérieures, la dispense d’âge simple sera totalement supprimée.

Y______ est donc soumis à ce régime puisqu’il fêtera son 4ème anniversaire le 2 août 2012.

Il sied encore d’ajouter que la chambre administrative dans une jurisprudence bien établie, a régulièrement refusé toute dérogation, en dernier lieu pour les enfants nés après le 31 août 2007 (ATA/312/2011 du 17 mai 2011 et les références citées).

6. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 400.-sera mis à la charge des recourants pris conjointement et solidairement (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 juin 2011 par Madame X______ et Monsieur X______ contre la décision du 12 mai 2011 du département de l'instruction publique, de la culture et du sport ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Madame X______ et Monsieur X______, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 400.- ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame X______ et Monsieur X______ ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la culture et du sport.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, Mme Hurni, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

C. Derpich

 

la présidente siégeant :

 

 

L. Bovy

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :