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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/975/2012

ATA/500/2012 du 31.07.2012 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/975/2012-FORMA ATA/500/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 31 juillet 2012

2ème section

 

dans la cause

 

Madame T______

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA CULTURE ET DU SPORT

 



EN FAIT

1. Madame et Monsieur T______, domiciliés à Plan-les-Ouates, sont les parents d'E______, leur troisième enfant, né le 12 septembre 2008.

2. Au mois de décembre 2009, la direction générale de l’enseignement primaire du département de l’instruction publique, de la culture et du sport (ci-après : DIP) a écrit à l’ensemble des parents concernés pour les informer de la mise en œuvre de l’accord intercantonal sur l’harmonisation de la scolarité obligatoire du 14 juin 2007, entré en vigueur le 1er août 2009 (HarmoS - C 1 06). L’art. 5 al. 1 de ce dernier prévoyait que « l’élève est scolarisé dès l’âge de 4 ans révolus, le jour de référence étant le 31 juillet ». La mesure serait introduite progressivement et cela de la façon suivante : à la rentrée 2010, la dispense d’âge simple serait accordée aux enfants nés avant le 30 septembre 2006 ; à la rentrée 2011, les enfants nés le 31 août 2007 ou avant cette date pourraient entrer en 1ère enfantine ; dès la rentrée 2012, application d’HarmoS, avec obligation scolaire à 4 ans et date de référence au 31 juillet (date butoir pour tous les élèves de 1ère enfantine : 31 juillet 2008) ; à partir de la rentrée 2013-2014, la dispense d’âge simple serait totalement supprimée et la nouvelle date de référence pour l’entrée à l’école primaire publique sera le 31 juillet, à 4 ans.

Ce courrier se terminait ainsi, le premier paragraphe cité étant en caractères gras :

« En vue de garantir la cohérence des décisions sur le plan intercantonal, le DIP n'entend pas accorder de dérogation.

Nous sommes toutefois conscients que l'application des dispositions prévues peut confronter certaines familles à des difficultés de force majeure. Si tel devait être le cas, vous pouvez vous adresser au service de la scolarité de la direction générale de l'enseignement primaire qui examinera votre situation ».

3. Le 20 février 2012, Mme T______ a envoyé au DIP une demande de dérogation pour E______ afin qu’il puisse commencer l’école à la rentrée 2012. L'organisation familiale en serait facilitée. En effet, elle était infirmière et avait des horaires irréguliers et son mari avait d'énormes responsabilités dans l'entreprise familiale, ce qui le rendait peu disponible à la maison. En outre, sa mère, qui gardait les enfants pendant qu'elle travaillait, avait déjà un certain âge. Au jardin d'enfants, E______ s'était lié d'amitié avec des camarades plus âgés qui commenceraient l'école à la prochaine rentrée et il était très éveillé car stimulé par ses deux aînés.

4. Par pli recommandé du 19 mars 2012, le DIP a refusé la dérogation sollicitée, confirmant qu'E______ serait scolarisé à la rentrée 2013. Aucune dérogation ne pouvait être accordée malgré les motifs exposés. Les dispositions légales ne le permettaient pas.

5. Par acte du 27 mars 2012, Mme T______ a recouru contre cette décision auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à l'octroi d'une dérogation afin que son fils commence l'école à la rentrée 2012. Elle reprenait en substance son argumentation antérieure.

6. Le 16 avril 2012, le DIP a conclu au rejet du recours. Sa décision était conforme tant aux dispositions législatives en vigueur qu’à une jurisprudence constante de la chambre administrative, qui, dans plusieurs arrêts récents, avait rejeté les recours interjetés à l’encontre des décisions de refus de dérogations, étant précisé que le DIP n'était entré en matière que sur des demandes de dérogation pour certains enfants nés en 2006 pour la rentrée 2010, soit la première concernée par la mise en vigueur d'HarmoS, vu le court délai d'adaptation pour les parents et organismes concernés.

7. Le 23 avril 2012, la chambre administrative a accordé aux parties un délai échéant au 14 mai 2012 pour formuler d'éventuelles requêtes d'acte d'instruction complémentaire. Aucune requête n'ayant été transmise, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. HarmoS a pour but d’harmoniser la scolarité obligatoire au sein des cantons concordataires en accordant les objectifs de l’enseignement et les structures scolaires, d’une part, et, d’autre part, en développant et en assurant la qualité et la perméabilité du système scolaire au moyen d’instruments de pilotage communs (art. 1 HarmoS). Il prévoit notamment que l’élève est scolarisé dès l’âge de 4 ans révolus, le jour de référence étant le 31 juillet (art. 5 al. 1 HarmoS). Les cantons s’engagent à respecter les caractéristiques structurelles de la scolarité obligatoire telles que définies au chapitre III, dont l’art. 5 fait partie, dans un délai maximal de six ans après l’entrée en vigueur de l’accord. Selon l’art. 15 HarmoS, l’assemblée plénière de la CDIP décide de la date d’abrogation de l’art. 2 du CICS, qui prévoit notamment que l’âge d’entrée à l’école est fixé à 6 ans révolus au 30 juin, les cantons pouvant avancer ou retarder cette date dans une limite de quatre mois. Au 4 avril 2012, l’art. 2 CICS n’avait pas été abrogé (recueil des bases légales de la CDIP consultable sur le site : http://www.cdip.ch/dyn/11703.php).

Dans son communiqué de presse du 13 mai 2009 annonçant l’entrée en vigueur d’HarmoS au 1er août 2009, la CDIP a relevé « que le jour de référence pour l’entrée à l’école obligatoire ne pourra plus varier comme aujourd’hui au sein d’une fourchette de huit mois. Pour les cantons concordataires, l’âge de l’enfant au 31 juillet déterminera son entrée à l’école enfantine (il devra avoir fêté son 4ème anniversaire avant cette date). Les parents conserveront la possibilité, moyennant une demande, de faire avancer ou repousser l’entrée à l’école de leur enfant ». Cette dernière précision a été répétée dans la feuille d’information sur l’école enfantine obligatoire publiée le 17 juin 2010 par la CDIP, disponible en ligne sur le site http://www.cdip.ch/dyn/15414.php.

3. En même temps qu’HarmoS est entrée en vigueur la convention scolaire romande du 21 juin 2007 (CSR - C 1 07), dont le but est notamment d’instituer et de renforcer l’espace romand de formation, en application d’HarmoS (art. 1 al. 1 CSR). Elle comporte des domaines dans lesquels la coopération entre les cantons est obligatoire et fait l’objet d’une réglementation contraignante et d’autres dans lesquels la collaboration n’est pas obligatoire et fait l’objet de recommandations (art. 2 CSR). Le début de la scolarisation entre dans la première catégorie (art. 3 al. 1 let. a CSR). La convention prévoit que l’élève est scolarisé dès l’âge de 4 ans révolus, le jour déterminant étant le 31 juillet (art. 4 al. 1 CSR). La fixation du jour de référence n’exclut pas les cas de dérogations individuelles qui demeurent de la compétence des cantons (art. 4 al. 2 CSR).

4. a. Dans le canton de Genève, la durée de la scolarité obligatoire est réglée à l’art. 11 LIP. Cette disposition légale a été modifiée le 10 juin 2011, modification qui est entrée en vigueur le 29 août 2011 et est libellée ainsi :

«  1 La scolarité est obligatoire pour les enfants dès l’âge de 4 ans révolus au 31 juillet.

2 L’âge d’entrée à l’école obligatoire ne peut être avancé.

3 Le Conseil d’Etat définit dans le règlement les conditions auxquelles une dispense d’âge peut être accordée à des enfants qui, arrivés au terme de la première année du cycle élémentaire, sont jugés aptes du point de vue scolaire, psychologique et médical à fréquenter une classe destinée normalement à des élèves plus âgés.

4 Sur demande des parents et sous leur responsabilité, le département peut, exceptionnellement et pour de justes motifs, retarder d’une année scolaire l’entrée d’un élève à l’école obligatoire ».

b. L’ancien règlement relatif aux dispenses d'âge du 12 juin 1974 (aRDAge) a été abrogé et remplacé par le règlement relatif aux dispenses d'âge du 21 décembre 2011 (RDAge - C 1 10.18), texte qui ne contient plus aucune disposition traitant des dispenses simples accordées au début de l’enseignement obligatoire.

5. Dans sa lettre circulaire de décembre 2009 adressée à tous les parents concernés par la mise en œuvre d’HarmoS pour les enfants devant être admis en 1ère enfantine, le DIP, après avoir précisé qu’en vue de garantir la cohérence des décisions sur le plan intercantonal il n’entendait pas accorder de dérogations, a invité les familles pouvant être confrontées à des difficultés de force majeure par l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation, à s’adresser à lui pour qu’il examine leur situation. Force est ainsi de constater que, par-là, il a pu laisser penser que des dérogations seraient possibles. Le DIP a cependant précisé par la suite, sans être contredit, qu’aucune dérogation n'avait été accordée au-delà de la rentrée 2010 et que pour les rentrées ultérieures la dispense d’âge simple sera totalement supprimée.

6. En l’espèce, E______ est né le 19 septembre 2008. Il est soumis au régime d’admission à l’école prévue par l’art. 11 LIP. Cette disposition ne donne pas droit à l’examen d’une dérogation. Sous cet angle, l’option prise par le Conseil d’Etat d’imposer, dès la rentrée scolaire 2012, un respect strict de la condition de l’âge est conforme tant au texte concordataire qu’à ceux de la CRS et de la LIP. Le DIP a ainsi refusé à juste titre d’entrer en matière sur la demande de dérogation et le texte légal clair ne lui laissait aucun pouvoir d’appréciation (ATA/485/2011 du 26 juillet 2011 et ATA/312/2011 du 17 mai 2011 pour la rentrée 2011 ; ATA/394/2012 du 19 juin 2012 et ATA/358/2012 du 5 juin 2012 pour la rentrée 2012).

7. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 400.-sera mis à la charge de la recourante. Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 mars 2012 par Madame T______ contre la décision du département de l’instruction publique, de la culture et du sport du 19 mars 2012 ;

 

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Madame T______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu’il ne lui est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame T______ ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la culture et du sport.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction a.i. :

 

 

C. Sudre

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :