Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/450/2008

ATA/437/2008 du 27.08.2008 ( DCTI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/450/2008-DCTI ATA/437/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 27 août 2008

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur H______

contre

DIRECTION DU LOGEMENT


 


EN FAIT

1. Madame et Monsieur H______ (ci-après : les époux H______ ou les recourants) habitent un logement subventionné HLM de quatre pièces au 81, route de Y______ au Petit-Lancy, dont le loyer annuel s’élève à CHF 19'608.-, charges et parking non-compris.

2. Le 25 juillet 2005, la direction du logement (ci-après : DL) leur avait octroyé, à titre exceptionnel, une allocation de logement du 1er août 2005 au 31 mars 2006. Leur attention était attirée sur le fait qu'ils devaient rechercher un logement moins onéreux.

3. Le 2 novembre 2006, la DL a refusé une demande d’allocation de logement présentée par les époux H______ le 3 octobre 2006, ces derniers n’ayant pas entrepris de recherches en vue de trouver un logement moins onéreux. La réclamation a été rejetée le 4 janvier 2007.

4. En date du 9 novembre 2007, les époux H______ ont déposé une nouvelle demande d’allocation de logement auprès de la DL. Sous la rubrique des démarches entreprises pour trouver un logement moins cher, ils indiquaient avoir déposé parallèlement une demande d'appartement auprès du même service.

5. Par décision du 28 novembre 2007, la DL a refusé l’octroi de l’allocation sollicitée, car l’appartement était trop cher, le prix de la pièce par an étant de CHF 4'902.-.

6. Les époux H______ ont élevé une réclamation contre cette décision le 1er décembre 2007. L’Etat avait autorisé la fixation d’un loyer qu’il estimait, par ailleurs, trop élevé pour avoir un droit à l'allocation de logement. Ils ne comprenaient pas la logique d’un tel système. Leur situation financière, qui s’était modifiée en été 2007 suite à la prise de retraite de l'un d'eux, n’avait pas été prise en compte.

7. Par décision du 6 février 2008, la DL a rejeté la réclamation, persistant dans sa motivation antérieure.

8. Par courrier mis à la poste le 13 février 2008, les époux H______ ont recouru auprès du Tribunal administratif, reprenant leur argumentation développée devant l’autorité administrative.

9. Le 17 mars 2008, la DL s’est opposée au recours. Il incombait aux administrés de trouver un appartement meilleur marché avant de demander une allocation de logement. Ils avaient toutefois la possibilité de justifier l’absence de recherches. Afin de sauvegarder l’égalité de traitement entre administrés, la DL avait édicté une directive administrative visant à définir l’inconvénient majeur, notamment sous l’angle du montant du loyer, l’une des pierres angulaires de la mise en œuvre de l’article 39A de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05). En l’espèce, les recourants occupaient un appartement de quatre pièces au loyer annuel de CHF 19'608.-, charges et garage non compris, soit CHF 4'902.- par pièce. Or, le montant maximal du loyer annuel par pièce, selon la directive précitée, s'élevait, jusqu’au 28 février 2008, à CHF 4'799.-. Les locataires ne pouvaient dès lors se prévaloir d'aucun inconvénient majeur. Toutefois, ladite directive avait été modifiée dès le 1er mars 2008, en ce sens que les limites annuelles de loyer par pièce ont été revues à la hausse, s’élevant désormais à CHF 5'199.- pour un logement de quatre pièces. La décision querellée demeurait néanmoins justifiée en raison du caractère tardif et insuffisant des recherches entreprises pour trouver un appartement moins onéreux. Celles-ci se résumaient en effet à une demande déposée à la DL en même temps que la requête d’allocation du 9 novembre 2007. Les intéressés avaient pourtant eu leur attention attirée à plusieurs reprises depuis 2005 sur la nécessité d’entreprendre de telles recherches et ils ne faisaient état d’aucun inconvénient majeur justifiant cette tardiveté.

10. Les époux H______ ont réagi à ces observations le 1er avril 2008. Ils avaient effectué des recherches de logement, mais au début, ils n’avaient pas compris que seules comptaient les inscriptions auprès de la Ville de Genève et de la DL. Ils étaient maintenant inscrits auprès des mairies de Lancy et Onex. Ils souhaitaient rester dans cette région, dans laquelle ils résidaient depuis plus de quarante ans.

Le courrier a été transmis à la DL.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Un locataire peut être mis au bénéfice d'une allocation de logement si son loyer constitue une charge manifestement trop lourde, eu égard à son revenu et à sa fortune, et si un échange avec un logement moins onéreux ne peut se réaliser sans inconvénients majeurs (art. 39A al. 1 et 2 LGL). Le loyer pris en considération s’entend sans les charges.

Selon l'article 39 A alinéa 3 LGL, le Conseil d'Etat détermine les conditions auxquelles le locataire a droit à une allocation, ainsi que le calcul de celle-ci.

En vertu de l'article 22 alinéa 1 lettre a du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 (RLGL - I 4 05.01), l'allocation de logement ne peut pas être accordée aux locataires qui, après en avoir été requis, ne justifient pas qu'un échange avec un logement moins onéreux ne peut se réaliser sans inconvénient majeur pour eux.

3. Selon la jurisprudence du Tribunal administratif, l’allocation peut être refusée d’une part, si le locataire n’est pas en mesure de démontrer qu’il a entrepris des démarches suffisantes afin de trouver un appartement mieux adapté à sa situation financière et d’autre part, s’il a refusé l’échange avec un appartement moins onéreux (ATA/489/2007 du 2 octobre 2007 et les références citées).

4. Les personnes qui demandent une allocation de logement doivent apporter la preuve de leurs recherches, notamment auprès d'organismes officiels, d'un appartement correspondant mieux à leur situation (ATA/489/2007 déjà cité ; ATA/892/2004 du 16 novembre 2004).

Le tribunal de céans a déjà jugé que compte tenu de la très forte tension qui règne actuellement à Genève sur le marché du logement, il convenait de ne pas se montrer trop exigeant quant à la preuve des recherches effectuées. Ainsi, le fait de s’être inscrit auprès de la DL, auprès des fondations immobilières de droit public et de procéder à des recherches via Internet pouvait être suffisant (ATA/489/2007 du 20 octobre 2007 et les références citées).

5. Le locataire doit démontrer qu'un échange avec un logement moins onéreux ne peut se réaliser sans inconvénients majeurs (ATA/525/2007 du 16 octobre 2007 et les références citées).

6. Constituent des inconvénients majeurs au sens de la jurisprudence du Tribunal administratif, notamment l’insalubrité du logement, la cohabitation avec un ex-conjoint avec qui les relations sont devenues mauvaises, la naissance de triplés alors que l’appartement est petit ou encore le fait de ne pas pouvoir installer dans un studio le lit spécial que requiert l’état de santé d’un locataire (ATA/55/2005 du 1er février 2005). Pour la DL, il y a inconvénient majeur lorsque :

l’ensemble des revenus provient du chômage ;

un enfant est à la crèche ou dans une école spécialisée ;

des soins médicaux sont dispensés à proximité ;

des parents âgés sont à la charge du locataire.

7. En l’espèce, l’autorité intimée estime qu’au vu du loyer payé par les recourants, ceux-ci ne peuvent se prévaloir d’aucun inconvénient majeur. Pour ce faire, la DL se réfère à une directive administrative interprétative, visant à définir l’inconvénient majeur, notamment sous l’angle du montant du loyer, l’une des pierres angulaires de la mise en œuvre de l’article 39A alinéa 1 LGL. Jusqu'au 28 février 2008, elle était référencée sous PA/DS/13.04. Depuis le 1er mars 2008, elle est enregistrée sous PA/DS/13.05, suite à l'adoption des montants des loyers admissibles.

En règle générale, les instructions, les circulaires et les directives administratives – ou, en d’autres termes, les ordonnances administratives – n’ont, selon la jurisprudence et la doctrine, pas force de loi et ne constituent pas du droit fédéral au sens de l’article 49 lettre a de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021) (ATF 121 II 473 consid. 2b p. 478 ; ATF 121 IV 64 consid. 3 p. 66 ; ATA/270/2006 du 16 mai 2006 et les réf. citées ; ATA/763/2002 du 3 décembre 2002, consid. 5 et les réf. citées).

Si les directives, circulaires ou instructions émises par l’administration ne peuvent contenir de règles de droit, elles peuvent cependant apporter des précisions quant à certaines notions contenues dans la loi ou quant à la mise en pratique de celle-ci. Sans être lié par elles, le juge peut néanmoins les prendre en considération en vue d’assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré. Il ne doit cependant en tenir compte que si elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATF 121 II 473 consid. 2b).

Emise par l’autorité chargée de l’application concrète, l’ordonnance administrative est un mode de gestion : elle rend explicite une ligne de conduite, elle permet d’unifier et de rationaliser la pratique, elle assure ce faisant aussi l’égalité de traitement et la prévisibilité administrative et elle facilite le contrôle juridictionnel, puisqu’elle dote le juge de l’instrument nécessaire pour vérifier que l’administration agit selon des critères rationnels, cohérents et continus, et non pas selon une politique virevoltante du cas par cas (ATA/503/2007 du 9 octobre 2007 et les références citées).

Dans la mesure où ladite directive a pour objectif de limiter l’octroi de l’aide aux seuls locataires dans l’impossibilité de déménager dans un logement moins onéreux, elle sert effectivement le but de la loi et elle peut donc être prise en considération dans l’application de celle-ci par le tribunal de céans (cf. dans ce sens ATA/354/2007 du 31 juillet 2007).

8. Il est établi que les recourants occupent un appartement de quatre pièces. Le montant du loyer à la pièce par an est de CHF 4'902.-. Jusqu’au 28 février 2008, ce montant excluait l’octroi d’une allocation de logement, car il était supérieur à la limite admissible, fixée à CHF 4'799.- par pièce et par an. Depuis le 1er mars 2008, cette limite ayant été repoussée à CHF 5'199.-, une allocation de logement demeure en principe exclue, sauf si les locataires établissent avoir entrepris des recherches pour trouver un logement moins onéreux ou démontrent l’existence d’un inconvénient majeur justifiant l’absence de recherches. En outre, l’occupation du logement doit, soit être normale, soit comprendre une pièce de plus que le nombre de personnes.

9. La seule preuve de recherches de logement moins coûteux apportée par les recourants est leur inscription auprès de la DL, déposée parallèlement à la demande d’allocation de logement du 9 novembre 2007. Ils font état d’inscriptions auprès d’autres entités, mais postérieures à la demande précitée et n’apportent pas de justificatifs de démarches antérieures à celle-ci, alors même que la DL avait relevé, à trois reprises depuis 2005, qu’ils n’avaient pas démontré avoir entrepris de telles recherches. Celles qui ont été faites sont ainsi tardives et insuffisantes. Les recourants ne faisant valoir aucun inconvénient majeur au sens de la jurisprudence et des directives précitées, justifiant cette tardiveté, la décision querellée ne peut qu’être confirmée.

10. Au vu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

Un émolument de CHF 300.- sera mis à la charge des recourants conjointement et solidairement (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 février 2008 par Madame et Monsieur H______ contre la décision de la direction du logement du 6 février 2008 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge des recourants conjointement et solidairement, un émolument de CHF 300.- ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame et Monsieur H______ ainsi qu'à la direction du logement.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :