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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/606/2002

ATA/763/2002 du 03.12.2002 ( M ) , REJETE

Descripteurs : TAXE MILITAIRE; CALCUL; EXONERATION FISCALE; M
Normes : LIFD.22; LIFD.102; LIFD.38
Résumé : Les versements pour l'acquisition du logement provenant de la prévoyance au sens de l'art. 38 LIFD doivent également être pris en considération dans le calcul du revenu soumis à la taxe d'exemption du service militaire. Rappel des conditions de prise en compte des directives, circulaires ou instructions écrites par l'administration.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 3 décembre 2002

 

 

 

dans la cause

 

 

Monsieur B__________

 

 

 

 

contre

 

 

 

 

SERVICE DE LA TAXE D'EXEMPTION DE L'OBLIGATION DE SERVIR

 



EN FAIT

 

 

1. Lors de son arrivée en Suisse en 1989, les instances militaire n'ont pas recruté M. B__________ en raison de son âge - il est né en 1960 -, conformément à l'article 1 bis de la loi fédérale sur l'organisation militaire, alors en vigueur, remplacé depuis par l'article 8 alinéa 2 LAAM (RS 510.10). N'étant donc pas incorporé dans une formation de l'armée, il est redevable de la taxe en vertu de l'article 2 alinéa 1 lettre a de la loi fédérale du 12 juin 1959 sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir (LTEO - RS 661).

 

2. Selon une liste du 7 février 2002 émanant de l'administration fiscale cantonale, M. B__________ a reçu en 2000 un capital provenant de la prévoyance de CHF 900'596.-. Ce versement était destiné à rembourser une partie d'un prêt hypothécaire selon l'article 3 alinéa 3 lettre c de l'ordonnance sur les déductions admises fiscalement pour les cotisations versées à des formes reconnues de prévoyance (OPP 3 - RS 831.461.3). En application des articles 16, 22 et 38 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD - RS 642.11), ce revenu a fait l'objet d'une taxation à l'impôt fédéral direct, à raison de 20% selon l'article 204 LIFD.

 

3. Le 30 mai 2002, le service genevois de la taxe d'exemption de l'obligation de servir (ci-après: le service) a notifié à M. B__________ une décision portant sur sa taxe d'exemption de l'obligation de servir. Cette taxe s'élevait à CHF 3'602.-. Elle était calculée au taux de 2 % calculé sur le 20 % du capital reçu de son institution de prévoyance, soit sur le montant arrondi à CHF 900'500.-.

 

4. Contre cette décision, M. B__________ a formé une réclamation datée du 3 juin 2002 auprès du service. Il a contesté que les revenus provenant de la prévoyance soient soumis à la taxe d'exemption.

 

5. Par décision du 14 juin 2002, le service a rejeté la réclamation. Selon l'article 11 LTEO, la taxe était perçue selon la LIFD, les versements anticipés provenant de la prévoyance devant également être pris en considération dans le calcul du revenu soumis à la taxe (art. 204 LIFD). Quelle que soit l'affectation de cette prestation, elle était soumise à l'impôt fédéral direct (art. 22 et 38 LIFD).

 

6. Par acte du 27 juin 2002, M. B__________ a recouru auprès du Tribunal administratif. Il a repris ses arguments et a conclu à l'annulation de la taxe.

 

7. Le service s'est opposé au recours. La "Circulaire concernant le traitement au point de vue du droit de la taxe de versements anticipés de la prévoyance vieillesse destinés à l'acquisition à la propriété du logement" (ci-après: la circulaire), émise le 2 juillet 1997 par l'administration fédérale des contributions, déterminait les détails de la taxation en matière de LTEO.

 

 

EN DROIT

 

 

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

 

2. Le recourant ne conteste pas le principe de son assujettissement à la taxe. Il estime que la prestation anticipée qu'il a reçue de son institution de prévoyance ne doit pas être assimilée à un revenu au sens de la LIFD. Selon cette loi en effet, la taxe devait être perçue sur le revenu net total que l'assujetti réalisé en Suisse et à l'étranger (art. 11 LTEO).

 

3. Sont imposables selon l'article 22 alinéa 1 LIFD "tous les revenus provenant de l'assurance vieillesse et survivants, de l'assurance-invalidité ainsi que tous ceux provenant d'institutions de prévoyance professionnelle ou fournis selon des formes reconnues de prévoyance individuelle liée, y compris les prestations en capital et le remboursement des versements, primes et cotisations".

 

Les versements pour l'acquisition du logement provenant du 3e pilier A et du 2e pilier sont considérés comme des prestations en capital provenant de la prévoyance au sens de l'article 38 LIFD. Les prestations en capital son imposées séparément et l'impôt est calculé sur la base de taux représentant le cinquième des barèmes inscrits à l'article 36. Depuis le 1er janvier 1990, en effet, il est admis que l'épargne accumulée dans le cadre du 3e pilier A soit perçue totalement ou partiellement par "anticipation", c'est-à-dire avant la survenance d'un cas de prévoyance, afin d'amortir la dette hypothécaire grevant un logement.

4. La circulaire énonce en son chiffre 34: "Si la taxe est perçue d'après la législation sur l'IFD, les versements anticipés provenant de la prévoyance seront alors également pris en considération pour le calcul du revenu soumis à la taxe d'exemption de l'obligation de servir."

 

En ce qui concerne le calcul de la taxe, la circulaire instruit les administrations cantonales de la taxe d'exemption de l'obligation de servir de la manière suivante: "Les versements anticipés de prestations de vieillesse provenant d'institutions de prévoyance destinées à l'acquisition et à la construction d'un logement en propriété utilisé pour ses propre besoins, à l'acquisition de participation à la propriété du logement ainsi qu'au remboursement d'un prêt hypothécaire sont soumis à la taxe pour un cinquième du montant versé et ils sont ajoutés aux autres revenus soumis" (chiffre 11).

 

5. Se pose la question de savoir si la circulaire émise par l'Administration fédérale de contributions est applicable au cas d'espèce:

 

En règle générale, les instructions, les circulaires et les directives administratives - ou, en d'autres termes, les ordonnances administratives - n'ont, selon la jurisprudence et la doctrine, pas force de loi et ne constituent pas du droit fédéral au sens de l'art. 49 let. a PA (ATF 121 II 478 consid. 2b, ATF 121 IV 66 consid. 3, ATF 120 II 139 consid. 2b, ATF 119 Ib 41 consid. 3d, ATF 118 V 131 consid. 3a, ATF 118 V 210 consid. 4c, ATF 117 Ib 231 consid. 4b; JAAC 55.27 p. 271 et réf. citées; Moser, op. cit., ch. 2.67; Pierre Moor, Droit administratif, vol. I, 2e éd., Berne 1994, p. 271; Rhinow/Koller/Kiss, Öffentliches Prozessrecht und Justizverfassungsrecht des Bundes, Bâle et Francfort-sur-le-Main 1996, n° 1038; Gygi, op. cit., p. 290).

 

Si les directives, circulaires ou instructions émises par l'administration ne peuvent contenir de règles de droit, elles peuvent cependant apporter des précisions quant à certaines notions contenues dans la loi ou quant à la mise en pratique de celle-ci. Sans être lié par elles, le juge peut néanmoins les prendre en considération en vue d'assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré. Il ne doit cependant en tenir compte que si elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATF 121 II 478 consid. 2b).

 

Emise par l'autorité chargée de l'application concrète, l'ordonnance administrative est un mode de gestion: elle rend explicite une ligne de conduite, elle permet d'unifier et de rationaliser la pratique, elle assure ce faisant aussi l'égalité de traitement et la prévisibilité administrative et elle facilite le contrôle juridictionnel, puisqu'elle dote le juge de l'instrument nécessaire pour vérifier que l'administration agit selon des critères rationnels, cohérents et continus, et non pas selon une politique virevoltante du cas par cas (P. MOOR, op. cit. p. 268).

 

En l'occurrence, il sied en premier lieu de constater que les instructions en question ont été édictées par une autorité compétente pour agir dans le domaine. En effet, il ressort de l'article 102 alinéa 1 et 2 LIFD, que l'Administration fédérale des contributions veille à l'application uniforme de la LIFD et arrête les dispositions d'exécution propres à assurer une taxation et une perception correctes et uniformes de l'impôt fédéral direct. Pour le surplus, celle-ci peut ordonner des mesures d'instruction, dans des cas d'espèce, ou, le cas échéant, les prendre de son propre chef (art. 103 al. 1 let. c LIFD).

 

Il en découle que l'administration en question était habilitée à édicter une telle circulaire.

 

6. Reste à examiner, si les instructions ch. 11 et 34 de la circulaire respectent le sens et le but des normes de la LIFD et LPP.

 

En 1990, lors de la modification de la LIFD, le législateur a introduit l'article 38 LIFD aussi bien pour garantir le concept fondamental de la LPP selon lequel le droit à la déduction intégrale des cotisations doit correspondre à la pleine imposition des prestations, que pour assurer une égalité de traitement sur le plan fiscal entre le bénéficiaire d'une prestation en capital et le bénéficiaire de rentes. Il y avait également lieu de garantir le principe de l'imposition en fonction de la capacité économique (Agner/Jung/Steinmann, commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, Zurich 2001, § 2 ad art. 38 LIFD, p. 155).

 

La circulaire étant conforme à ces buts, elle correspond au sens et au but des normes de la LIFD et de la LPP.

 

Enfin, la prise en compte du cinquième seulement du capital reçu satisfait au principe de la proportionnalité.

 

7. Il suit de ce qui précède, que la circulaire est conforme aux principes des normes dont elle précise le contenu, qu'elle permet ainsi une taxation uniforme, et, se basant sur les articles 22, 38 LIFD et la circulaire, la décision de taxation du service cantonal de la taxe d'exemption de l'obligation de servir est conforme au droit fédéral.

 

Le recours sera ainsi rejeté. Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant.

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable le recours interjeté le 27 juin 2002 par M. B__________ contre la décision du service de la taxe d'exemption de l'obligation de servir du 14 juin 2002;

 

au fond :

 

le rejette;

 

met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-;

dit que conformément aux articles 97 et suivants de la loi fédérale d'organisation judiciaire, le présent arrêt peut être porté, par voie de recours de droit administratif, dans les trente jours dès sa notification, par devant le Tribunal fédéral; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il est adressé en trois exemplaires au moins au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14; le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyen de preuve, doivent être joints à l'envoi;

 

communique le présent arrêt à Monsieur B__________ ainsi qu'au service de la taxe d'exemption de l'obligation de servir.

 


Siégeants : M. Paychère, président, MM. Thélin, Schucani, Mmes Bonnefemme-Hurni, Bovy, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. : le vice-président :

 

M. Tonossi F. Paychère

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci