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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4336/2021

ATA/418/2022 du 26.04.2022 ( FPUBL ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;FONCTIONNAIRE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;POUVOIR D'APPRÉCIATION
Normes : Cst.29.al2; LHG.23; LPAC.5; LPAC.6; LPAC.13; RPAC.45.al1.leta; RPAC.47.al1; RTrait.5; RTrait.5A.lete
Résumé : Recours contre une décision l'Hospice général de prolonger d'un an la période probatoire et report de la nomination en qualité de fonctionnaire de l'employée. Large pouvoir d'appréciation de l'administration. Pas de violation de l'art. 5A let.e RTrait, pas d'abus du pouvoir d'appréciation de l'autorité ni de violation du droit d'être entendue de la recourante. Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4336/2021-FPUBL ATA/418/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 avril 2022

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Yann Lam, avocat

contre

HOSPICE GÉNÉRAL


EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1968, au bénéfice de plusieurs années d'expérience dans le domaine des ressources humaines (ci-après : RH), a été engagée par l'Hospice général (ci-après : l'hospice) sous un statut d'employée à durée indéterminée dès le 1er décembre 2019 à 100 %, en tant qu'assistante sociale, au centre d'action sociale (ci-après : CAS) des B______.

2) Dans le cadre de sa période probatoire, elle a effectué un premier entretien d'appréciation et de fixation des objectifs (ci-après : EAFO) le 5 février 2020 après trois mois d'activité. Le bilan de l'évaluateur était qualifié de « bon », quelques compétences étaient à améliorer, « ce qui [était] normal à ce stade ».

Sur quatre objectifs évalués, tous étaient notés B (atteints). Sur quinze points d'évaluation des compétences, onze étaient notés B (adéquats pour la fonction) et 3 étaient notés C (à améliorer). Aucune compétence n'était considérée comme insuffisante (D).

3) Par avenant du 26 février 2020, le contrat de travail de Mme A______ a été modifié dans la mesure où, du 1er mars 2020 au 31 août 2020, elle assumerait la fonction de conseillère en insertion professionnelle au sein du service de réinsertion professionnelle de l'hospice (ci-après : SRP).

4) Selon l’avenant du 28 juillet 2020, elle retrouvait sa fonction d'assistante sociale dès le 1er septembre 2020 pour un taux d'activité à 90 %. Elle a alors commencé à exercer au CAS de C______.

5) Un deuxième EAFO a eu lieu après un an de période probatoire, le 13 janvier 2021. Le bilan de l'évaluateur, Monsieur D______, responsable d'unité (ci-après : RU) de l'époque, était qualifié de « bon ».

Sur quatre objectifs évalués, trois étaient notés B (atteints) et un était noté C (partiellement atteint). Pour ce qui était de l'évaluation des compétences, il ressortait que Mme A______ était une personne motivée, faisant appel à des compétences transversales découlant de sa longue expérience dans les RH et dotée d'une grande autonomie. Elle était également qualifiée de personne agréable et souriante, entretenant de très bonnes relations avec ses collègues et ses responsables directs.

6) Les relations au sein de l'équipe se sont ensuite dégradées et des difficultés de collaboration entre Mme A______ et Monsieur E______, gestionnaire financier et administratif, ont été constatées, dès le mois de janvier 2021.

7) Le 26 avril 2021, Monsieur F______, qui assurait le poste de RU ad interim à la suite du départ de M. D______, s'est entretenu avec Mme A______ et M. E______ afin de leur préciser ses attentes concernant la collaboration et la communication entre eux. L'entrevue faisait suite à un différend entre ces derniers le 15 avril 2021.

8) Par courriel du 23 juillet 2021, à son retour de vacances, Mme A______ a indiqué à Monsieur G______, responsable des RH, qu'elle avait décidé de « tourner la page des tensions passées et faire [son] possible pour instaurer des relations cordiales avec [ses] collègues. » Elle ajoutait qu'elle avait constaté « une atmosphère totalement différente, bien plus professionnelle et détendue » après l'arrivée de Monsieur H______, nouveau RU. Elle était ravie de travailler avec ce dernier et convaincue que c'était bien d'une telle posture professionnelle dont le CAS avait besoin. Elle ne souhaitait plus quitter ce CAS.

9) Une séance s'est tenue le 1er septembre 2021, en raison des tensions persistantes entre Mme A______ et M. E______, en présence des responsables des RH et d'unité. Les intéressés ont été invités à s'adresser au groupe de confiance.

Ceux-ci ont finalement renoncé à une médiation, leur conflit ayant pu se résoudre.

10) En date du 2 novembre 2021, M. H______ a procédé à l'EAFO des deux ans de période probatoire de Mme A______, lors d'un entretien avec celle-ci consacré à la question de sa nomination. Il relevait quatre points forts de la collaboratrice et cinq compétences adéquates pour la fonction.

Cinq compétences étaient à améliorer soit « l'agilité et la créativité », «la coordination et échanges entre professionnels », « la communication », « l'écoute » et « la gestion des situations difficiles ». Une compétence était relevée comme insuffisante, soit « l'appréciation de soi et d'autrui ».

Les trois objectifs qui avaient été fixés lors de l'EAFO précédent étaient notés B (atteint), A (largement atteint) et C (partiellement atteint). Aucun objectif n'était considéré comme non atteint. Sur quinze compétences, quatre étaient notées A, soit des « points forts », cinq étaient notées B « adéquates pour la fonction », quatre étaient notées C « à améliorer », une était notée D « insuffisant ».

Le bilan global était qualifié de peu satisfaisant.

Mme A______ donnait satisfaction dans la gestion de son portefeuille de bénéficiaires, mais pas s'agissant de son intégration. Le document précisait que « dans la situation actuelle, nous allons vers un report de nomination » et qu'afin d'évaluer « les ajustements et la progression » de l'intéressée en fonction des nouveaux objectifs fixés, une nouvelle évaluation aurait lieu en avril 2022.

M. H______ admettait, comme allégué par Mme A______, que l'équipe avait certains torts, mais relevait que l'intéressée ne développait pas une dynamique permettant de faire évoluer la situation de tension, rendant ainsi la vie d'équipe difficile. Il attendait qu'elle prenne davantage position dans l'équipe, en adoptant une communication adaptée, bienveillante, en se montrant à l'écoute et qu'elle développe sa capacité de prise de recul.

Mme A______ indiquait prendre note des remarques de son RU, estimant qu'il ne pouvait y avoir de doute sur son engagement et sa motivation. Elle admettait avoir fait preuve de maladresse dans certaines situations, mais était d'avis que cela était toujours en réaction à des comportements de collègues. Elle faisait état d'une volonté de certains d'entre eux de la mettre à l'écart et relevait des remarques déplacées telle que celle d'une collègue qui, à la vue d'une araignée noire sur son bureau, lui aurait demandé s'il s'agissait de l'un de ses ancêtres, ou encore l'expression d'opinions politiques qu'elle considérait ne pas avoir sa place sur le lieu de travail. Elle avait ainsi préféré s'isoler pendant une certaine période pour éviter des « chamailleries inutiles » et s'était employée à continuer malgré tout à dialoguer avec ses collègues.

Elle souhaitait être réaffectée dans un autre CAS, craignant de ne pouvoir, pendant la prolongation de sa période probatoire, atteindre l'objectif d'intégration au sein de l'équipe du CAS de C______ dont elle pensait être tributaire.

11) Par décision du 9 novembre 2021, notifiée le 19 novembre 2021, l'hospice a prolongé la période probatoire de Mme A______ d'une année, reportant ainsi sa nomination.

12) Le 8 décembre 2021, un entretien a eu lieu en présence de Mme A______ et de MM. G______ et H______, concernant l'EAFO du 2 novembre 2021 et la décision de report de nomination. La teneur de l'entretien était résumée dans un courriel du 14 décembre 2021 adressé à l'intéressée par M. G______.

Le RU confirmait à celle-ci qu'il avait préavisé en faveur d'un report de nomination dans la mesure où ses compétences en matière de collaboration n'étaient pas au niveau souhaité, alors même qu'il s'agissait de compétences essentielles pour une assistante sociale.

Il avait conscience que toute l'équipe du CAS devait « travailler sur la collaboration », raison pour laquelle il avait mis en place une supervision avec un intervenant externe.

Cependant, il était attendu de Mme A______ qu'elle aborde les situations de tension de façon constructive en tenant compte du fait qu'une partie des causes desdites tensions pouvait être liée à son fonctionnement propre. Elle était invitée à exprimer son ressenti avec mesure et le tact nécessaires, à tenir compte du point de vue et de l'intention de ses interlocuteurs, à tenter de trouver des solutions avec ces derniers, et si nécessaire, de faire remonter les problèmes à sa hiérarchie.

13) Par acte du 29 décembre 2021, Mme A______ a interjeté recours après de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision du 9 novembre 2021, concluant préalablement à l'octroi d'un délai complémentaire afin de compléter son recours et produire toute pièce complémentaire utile et, principalement, à l'annulation de la décision de report de l'hospice et donc à sa nomination au statut de fonctionnaire.

L'autorité intimée avait violé son droit d'être entendue sous l'angle de l'obligation de motiver en se limitant à lui indiquer « À la suite de votre dernière évaluation et compte tenu des raisons qui vous ont été évoquées, nous vous informons que la direction a décidé de reporter votre nomination d'une année, soit jusqu'au 1er décembre 2022 ».

L'autorité avait mésusé de son pouvoir d'appréciation en estimant ses prestations comme étant insuffisantes. Ses deux premières évaluations avaient été considérées comme « bonnes ».

Lors de son EAFO de fin de période probatoire le 2 novembre 2021, aucun reproche n'avait été formulé sur la qualité de son travail. Les trois objectifs qui avaient été fixés étaient notés B (atteint), A (largement atteint) et C (partiellement atteint). Aucun objectif n'était considéré comme non atteint.

L'EAFO prévoyait une évaluation de ses compétences. Sur quinze éléments, quatre étaient cotés « A », soit des « points forts » ; cinq étaient cotés « B », soit « adéquat pour la fonction » ; quatre étaient cotés « C », à savoir « à améliorer » et un seul « D », soit «insuffisant ».

Les éléments notés « C » et « D » se rapportaient à des questions d'écoute, de communication, de coordination et d'échange entre les professionnels et d'appréciation de soi et d'autrui.

Les difficultés qu'elle avait rencontrées étaient la conséquence d'une ambiance de travail toxique au sein du CAS de C______. Cette problématique avait d'ailleurs été constatée par les RH dans un courriel du 14 décembre 2021, l'auteur de celui-ci indiquant que le responsable hiérarchique de la recourante avait conscience « que l'équipe d'une façon générale doit travailler sur cette notion de collaboration ».

14) Une réunion a eu lieu le 2 février 2022, en présence de la recourante, de son conseil, du RU, de Madame I______, cheffe de service, et de M. G______. L'objet de la séance était de soumettre à Mme A______ une nouvelle affectation, conformément à son souhait. La teneur de ces discussions a été reprise dans un courrier daté du même jour et adressé au conseil de Mme A______. Il était proposé qu'elle soit réaffectée à une mission de longue durée du « Pool remplaçants de l'Action sociale » (ci-après : le pool), au sein du CAS d' J______. Au cours de cette mission, sa responsable fonctionnelle serait Madame K______, RU de ce CAS, son responsable hiérarchique demeurant M. H______.

Les attentes concernant la collaboration seraient maintenues dans le nouveau contexte. L'évaluation des compétences se ferait conjointement entre les deux RU. Le suivi opérationnel serait effectué en majorité par Mme K______.

15) Mme A______ a répondu à l'hospice par courrier du 9 février 2022.

Elle prenait note du fait que l'autorité intimée n'estimait pas disposer « d'éléments laissant présumer de l'existence d'une atteinte à la personnalité », mais proposait quand même de la réaffecter à une mission de longue durée du pool au CAS d'J______ notamment.

Un poste dans l'équipe du pool, par définition, ne lui permettait pas de s'intégrer à long terme, alors que ladite intégration était l'argument avancé par l'hospice pour reporter sa nomination.

Bien qu'imparfaite, elle acceptait la proposition de l'autorité intimée et lui demandait de se déterminer sur les objectifs qu'elle lui fixait dans le cadre de ce transfert.

16) L'hospice a répondu à ce courrier le 11 février 2022.

Sa proposition découlait du souhait de Mme A______ de changer d'équipe. Un nouvel environnement allait permettre d'évaluer si elle était capable de s'intégrer en tant qu'assistante sociale, non pas dans l'équipe de C______, mais dans « une équipe » et de coopérer dans un but commun notamment avec les collègues des autres métiers. Ce nouvel environnement se rapprochait fortement d'une réaffectation de durée indéterminée dans un CAS, s'agissant d'un remplacement de longue durée et les tâches confiées similaires aux autres assistants sociaux (gestion d'un portefeuille complet de bénéficiaires, collaboration sur ce portefeuille avec des collègues).

17) L'autorité intimée a conclu au rejet du recours de Mme A______.

Le droit d'être entendue de celle-ci n'avait pas été violé dans la mesure où la décision querellée se rapportait expressément à l'EAFO du 2 novembre 2021, consacré à la question de sa nomination, auquel elle avait participé et pu faire valoir ses arguments. Son RU lui avait également exposé les compétences qu'elle devait améliorer et celles qui étaient insuffisantes à ce stade.

Une réunion supplémentaire avait eu lieu le 8 décembre 2021 en présence de Mme A______, de MM. H______ et G______.

Certaines compétences essentielles, notamment celles permettant une collaboration sereine dans les dossiers avec les autres métiers d'un CAS, plus particulièrement les secrétaires sociales et les gestionnaires financiers administratifs, n'étaient pas au niveau attendu.

Le « savoir-faire » de la recourante n'était pas mis en cause, mais son « savoir-être », deux compétences indispensables dans toute activité exercée en équipe, le comportement faisant partie des domaines d'évaluation selon l'art. 5 al. 1 du règlement d’application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’Etat et des établissements hospitaliers du 17 octobre 1979 (RTrait - B 5 15.01).

Il n'était pas contesté que Mme A______ avait été appelée à exercer dans une « équipe à fortes personnalités, qui doit apprendre à collaborer sereinement, raison pour laquelle une supervision avait été mise en place ».

Elle n'avait pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en estimant nécessaire de prolonger la période probatoire de la recourante d'une année, afin de s'assurer que cette dernière était bien apte à adopter une posture compatible avec le travail d'équipe dans le futur.

Ce n'était pas l'intégration dans l'équipe de C______ qui était déterminante – équipe que la recourante souhaitait par ailleurs quitter – mais sa faculté de s'intégrer dans une équipe et de coopérer avec elle dans un but commun.

18) Mme A______ a répliqué le 10 mars 2022.

La critique principale qui lui était faite était sa difficulté à s'intégrer en équipe. Or, l'autorité admettait qu'il existait une situation difficile dans ce CAS doté de « fortes personnalités » et qui avait nécessité une « supervision ».

Il lui était reproché de porter atteinte à l'ambiance de l'équipe par sa passivité, laquelle s'expliquait par son souhait de se protéger de l'ambiance de travail toxique en se mettant en retrait et en se concentrant sur son travail. L'employeur était parfaitement conscient, comme il l'indiquait d'ailleurs dans son courriel du 14 décembre 2021, que le résultat de la collaboration générale ne dépendait pas que d'elle et que l'équipe avait également une responsabilité.

L'employeur lui fixait l'objectif de faire preuve de son intégration sur le long terme dans le CAS de C______. La réalisation de celui-ci était cependant impossible puisqu'en février 2022, il avait été décidé à la suite de discussions avec son conseil de la changer d'équipe et de la placer dans le pool de remplacement au sein du CAS d'J______, toujours sous la responsabilité de M. H______.

19) Les parties ont été informées le 11 mars 2022 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Dans un premier grief, la recourante invoque une violation de son droit d'être entendue sous l'angle de l'obligation de motiver.

a. Le droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit qu'elle mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 III 65 consid. 5.2 ; 142 II 154 consid. 4.2 ; 141 V 557 consid. 3.2.1). L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; 137 II 266 consid. 3.2 ; 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 83 consid. 4. 1). La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_56/2019 du 14 octobre 2019 consid. 2.4.1 et les arrêts cités).

b. En l'espèce, la décision entreprise renvoie à l'EAFO du 2 novembre 2021 et indique à la recourante « À la suite de votre dernière évaluation et compte tenu des raisons qui vous ont été évoquées, nous vous informons que la direction a décidé de reporter votre nomination d'une année, soit jusqu'au 1er décembre 2022. »

Cette décision se limite effectivement à renvoyer aux discussions tenues lors de l'entretien d'évaluation de la recourante du 2 novembre 2021. Il ressort cependant du dossier que les motifs du report ont été exposés à l'intéressée lors de cet entretien, ainsi que lors d'une seconde réunion le 8 décembre 2021.

L'autorité intimée a en outre détaillé ses motifs dans le cadre de son écriture du 14 février 2022 et a produit devant la chambre de céans le compte rendu de l'EAFO du 2 novembre 2021, de même que celui de l'entretien du 8 décembre 2021, établi le 14 décembre 2021. La recourante a ainsi pu faire valoir ses arguments une fois ces éléments figurant au dossier de la chambre administrative et a pu se déterminer en connaissance de cause.

Le droit d'être entendue de la recourante n'a ainsi pas été violé.

3) La recourante fait ensuite grief à l'autorité intimée d'avoir violé l'art. 5A RTrait en reportant sa nomination en qualité de fonctionnaire au motif de prestations insuffisantes.

a. L'art. 23 de la loi sur l'Hospice général du 17 mars 2006 (LHG - J 4 07) prévoit que les relations entre l'hospice et son personnel sont régies par la législation cantonale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux.

b. Le personnel de la fonction publique se compose de fonctionnaires, d’employés, d’auxiliaires, d’agents spécialisés et de personnel en formation selon l'art. 4 al. 1 de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux et à son règlement du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05). Est un fonctionnaire le membre du personnel régulier ainsi nommé pour une durée indéterminée après avoir accompli comme employé une période probatoire (art. 5 LPAC). Est un employé le membre du personnel régulier qui accomplit une période probatoire (art. 6 al. 1 LPAC).

c. L’art. 5 RTrait dispose que les prestations du nouveau collaborateur font l’objet, au terme de la période d’essai de trois mois et des premières et deuxièmes années probatoires, d’une analyse qui porte notamment sur les capacités, le travail effectué et le comportement du titulaire. Si la période probatoire a été prolongée, les prestations de l’intéressé font également l’objet d’une analyse avant le terme de la prolongation (al. 1). Les résultats de l’analyse sont portés à la connaissance du titulaire et discutés au cours d’un entretien avec son chef direct et le supérieur hiérarchique. La formule d’analyse des prestations doit être signée par tous les intéressés. Le titulaire a la possibilité de rédiger une note contestant tout ou partie de l’analyse. Cette note fait partie intégrante du dossier d’analyse (al. 2). Si les résultats ne sont pas jugés satisfaisants, l’intéressé est avisé par écrit qu’il n’assume pas d’une manière satisfaisante les tâches qui lui sont confiées (let. a), qu’il doit améliorer ses prestations dans un ou plusieurs domaines (let. b), qu’une nouvelle analyse doit être faite dans un délai maximum de douze mois, au plus tard avant la fin de la période probatoire (let. c), que si les résultats de cette nouvelle analyse ne sont toujours pas satisfaisants, une autre affectation lui est proposée (let. d). Si cette solution n’est pas possible, il est avisé que les rapports de service doivent cesser au plus tard à la fin de la période probatoire (al. 4).

d. La période probatoire, au terme de laquelle la nomination en qualité de fonctionnaire intervient, est de deux ans, sous réserve de sa prolongation (art. 45 al. 1 let. a et 47 al. 1 du règlement d’application de la LPAC du 24 février 1999 - RPAC - B 5 05.01). L’art. 5A let. e RTrait précise ainsi que la période probatoire de deux ans peut être prolongée exceptionnellement d’un an au maximum en cas de prestations insuffisantes.

e. Aux termes de l'art. 13 LPAC, chaque membre du personnel n’ayant pas le statut de fonctionnaire fait l’objet d’une appréciation qui porte notamment sur les capacités du titulaire et la qualité du travail effectué (let. a), le maintien et le développement des compétences du titulaire (let. b), les objectifs à atteindre et les dispositions à prendre pour la période à venir (let. c). Afin de pouvoir être nommé fonctionnaire, l’employé doit notamment avoir accompli à satisfaction les tâches de sa fonction durant la période probatoire (art. 45 al. 1 let. a RPAC).

f. Le but de la période probatoire est de permettre à l’employeur de jauger, au vu des prestations fournies par l’employé et du comportement adopté pendant
celle-ci, les chances de succès de la collaboration future et pouvoir y mettre fin si nécessaire avant la nomination, s’il s’avère que l’engagement à long terme de l’agent public ne répondra pas aux besoins du service (ATA/992/2018 du 25 septembre 2018 consid. 1c ; ATA/1620/2017 du 19 décembre 2017 consid. 6c ; ATA/1008/2017 du 27 juin 2017).

g. La chambre de céans a confirmé à plusieurs reprises qu'une prolongation de la période probatoire ne respectant pas la procédure y relative était nulle et avait pour conséquence que l'intéressé ne devait plus être considéré comme étant un employé en période probatoire (ATA/223/2010 du 30 mars 2010 consid. 7b ; ATA/613/2006 du 21 novembre 2006 consid. 4b ; ATA/311/ 2005 du 16 avril 2005 consid. 3d).

h. Constitue un abus du pouvoir d’appréciation le cas où l’autorité reste dans le cadre fixé par la loi, mais se fonde toutefois sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 ; ATA/1276/2018 du 27 novembre 2018 consid. 4d ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 515). Il y a excès du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité dépasse le cadre de ses pouvoirs. En outre, celle-ci doit exercer son libre pouvoir d’appréciation conformément au droit, ce qui signifie qu’elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d’inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité. Si elle ne respecte pas ces principes, elle abuse de son pouvoir (ATA/827/2018 du 28 août 2018 consid. 2b ; ATA/845/2015 du 20 août 2015 consid. 2b ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. I, 3ème éd., 2012, p. 743 ss et les références citées).

4) En l'occurrence, la recourante a été amenée à exercer, lors de sa période probatoire, dans trois environnements et équipes différents, soit le CAS
B______, le SRP, le CAS de C______. À teneur des évaluations y afférentes, elle s'est intégrée partout.

Ses compétences professionnelles ont été évaluées à trois reprises, soit les 5 février 2020, le 13 janvier, puis le 2 novembre 2021.

Le premier EAFO des trois mois, au sein du CAS d'J______ a été qualifié de « bon ». L'intégration dans l'équipe est cotée B (atteint) avec pour indication que « Mme A______ s'est très vite intégrée dans l'équipe et a trouvé sa place en son sein. » Elle est également décrite comme « agréable, dynamique et joviale ».

Dans le cadre de l'EAFO d'un an, également qualifié de « bon », les objectifs « découvrir et intégrer l'organisation du CAS de C______ » et « intégration dans l'équipe » ont été notés B, soit atteints. Aucun problème d'intégration au sein de l'équipe n'a, à teneur de ce document, été relevé, comme le souligne à juste titre la recourante. L'autorité intimée ajoute même qu'« après quatre mois d'activité au CAS de C______, elle semble bien intégrée au sein de l'équipe ».

Toutefois, dès le mois d'avril 2021, plusieurs situations de tension entre la recourante ainsi que ses collègues et ses RU ont été constatées.

Un différend est, à teneur du dossier, survenu le 15 avril 2021 entre la recourante et M. E______ et a requis une réunion le 26 avril 2021 en présence également de leur RU de l'époque, M. F______.

La situation semble avoir perduré dans la mesure où un second entretien s'est avéré nécessaire le 1er septembre 2021, à la suite de nouvelles difficultés de collaboration entre les précités, en présence de MM. H______ et G______ responsables, respectivement, d'unité et des ressources humaines.

Quand bien même la recourante a déployé d'importants efforts pour tenter d'atteindre l'objectif d'intégration et de collaboration qui lui était fixé, les difficultés relationnelles entre elle et ses collègues du CAS de C______, ainsi qu'avec certains de ses responsables d'unité, difficultés qui ont duré plusieurs mois et nécessité l’intervention de l’encadrement lors de deux séances à tout le moins, semblent avoir entravé la réussite de cet objectif.

Il convient de souligner que les compétences professionnelles de l'intéressée paraissent alignées avec les exigences du poste, son « savoir-faire » n'étant pas remis en cause et aucun reproche ne lui ayant été fait concernant la gestion de son portefeuille de bénéficiaires, ni dans son interaction avec ceux-ci.

Néanmoins, ses difficultés de collaboration au sein de l'équipe du CAS de C______ justifient, au vu de la nature-même du métier d'assistante sociale, laquelle requiert d'importantes facultés d'adaptation et de gestion des situations de conflit, la prolongation de la période probatoire avant son éventuelle nomination en qualité de fonctionnaire.

Enfin, certes, à teneur des documents produits, la recourante a dû exercer son activité au sein d'une équipe décrite par l'autorité intimée « comme devant faire des efforts de collaboration » et où règnent de « fortes personnalités » et, enfin, qui a nécessité une « supervision externe ».

Si la chambre de céans n'entend pas minimiser les difficultés auxquelles la recourante a été confrontée au sein de l'équipe du CAS de C______, celles-ci ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation de l'intimée relative aux problèmes relationnels de l'intéressée, en raison notamment de l'importance de cette compétence dans l'exercice du métier d'assistante sociale et du large pouvoir d’appréciation dont bénéficie l’administration.

Ainsi, la proposition qui lui a été faite par l'intimée et qu'elle a acceptée le 2 février 2022, à savoir d'être réaffectée à une mission de longue durée dans le Pool remplaçants de l'Action sociale au sein du CAS d'J______ paraît, contrairement à ce que soutient la recourante, cohérente et de nature à lui permettre de repartir sur de nouvelles bases relationnelles afin que ses compétences d'intégration et de collaboration au sein d'une équipe puissent être évaluées de manière plus sereine. En outre, le transfert de la recourante dans une nouvelle équipe est intervenu à sa demande.

Au vu de ce qui précède, l'autorité intimée n’a pas abusé de son pouvoir d'appréciation, en considérant que les prestations professionnelles de Mme A______ ne pouvaient pas être qualifiées de suffisantes au sens de l'art. 5A let. e RTrait.

Dans ces circonstances, la prolongation de la période probatoire de la recourante ne viole pas la loi, ni ne consacre d'abus du pouvoir d'appréciation de l'autorité.

Il s'ensuit que le recours est rejeté.

5) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 décembre 2021 par Madame A______ contre la décision de l’Hospice général du 9 novembre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les

art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yann Lam, avocat de la recourante, ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mmes Payot Zen-Ruffinen et Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :